L'année 2009 a été marquée par la forte baisse du taux de prélèvements obligatoires. Le présent rapport estime que, loin d'être le « signe d'une évolution vertueuse », cette diminution traduit l'incapacité de la France à faire face aux besoins collectifs autrement que par l'emprunt. La diminution du PIB potentiel consécutive à la crise économique ou encore la perspective d'une augmentation des charges dues au vieillissement de la population, rendent difficile le rééquilibrage des budgets de l'Etat et de la sécurité sociale. Le rapport présente des scenarii pour réduire la dette de l'Etat et la dette sociale, en écartant d'emblée la possibilité d'accroître dès à présent les prélèvements obligatoires : montée en charge de la fiscalité « verte » avec l'instauration de la taxe carbone, allègement de la fiscalité des entreprises (suppression de la taxe professionnelle), adaptation au contexte de l'économie globalisée, etc. Il s'interroge enfin sur les effets d'une éventuelle augmentation de ces prélèvements.
Paternité, pas d'utilisation commerciale, partage des conditions initiales à l'identique
Langue
Français
Extrait
N° 45
SÉNATSESSION ORDINAIRE DE 2009-2010Enregistré à la Présidence du Sénat le 15octobre 2009
RAPPORT DINFORMATION
FAIT
au nom de la commission des finances (1) sur lesprélèvements obligatoireset leurévolution,
Par M. Philippe MARINI,
Sénateur,
Rapporteur général.
(1) Cette commission est composée de : ArthuisM. Jean, président ; Bricq, Nicole Gaillard, MmeM. Yann MM. Jean-Jacques Jégou, Thierry Foucaud, Aymeri de Montesquiou, Joël Bourdin, François Marc, Alain Lambert, vice-présidents ; MM. Philippe Adnot, Jean-Claude Frécon, Mme Fabienne Keller, MM. Michel Sergent, François Trucy, secrétaires ;M. Philippe Marini, ; général rapporteurM. Jean-Paul Alduy, Angels, Bertrand Auban, Denis Badré, Bernard André, MM.Mme Michèle Mme Marie-France Beaufils, MM. ClaudeBelot, Pierre Bernard-Reymond, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Yvon Collin, Philippe Dallier, Serge Dassault, Jean-Pierre Demerliat, Éric Doligé, André Ferrand, Jean-Pierre Fourcade, Christian Gaudin, Adrien Gouteyron, Charles Guené, Claude Haut, Edmond Hervé, Pierre Jarlier, Yves Krattinger, Gérard Longuet, Roland du Luart, Jean-Pierre Masseret, Marc Massion, Gérard Miquel, Albéric de Montgolfier, François Rebsamen, Jean-Marc Todeschini, Bernard Vera.
I. LES PRINCIPALES TENDANCES DE LÉVOLUTION DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES.......................11..............................................................................................
A. UN RISQUE DE DIMINUTION DURABLE ET SUBIE DU TAUX DE PRÉLÈVEMENTSOBLIGATOIRES........................................................................................111. Les déterminants de lévolution du taux de prélèvements obligatoires : quelques rappels.....11...............................................................................................................................a) Les allégements des gouvernements successifs auront réduit le taux de prélèvements obligatoires denviron 3,5 points de 1998 à 2010 .......................................... 13b) Des fluctuations spontanées résultant de celles de lactivité économique, qui normalementsannulentàmoyenterme..............................................................................142. Un risque de diminution durable à cause de la crise économique........................................... 17a) Un taux de prélèvements obligatoires qui retrouverait en 2009 et en 2010 son niveaude1981,selonleGouvernement..............................................................................18b) Limpôt sur les sociétés : effondrement temporaire ou éclatement dune « bulle » ?........... 18(1) Une implosion en 2009, partiellement rattrapée en 2010......................................................... 18(a) Selon une approche « graphique » : des recettes de lordre de 16 milliards deuros en 2009.......................................22............................................................................(b) Des simulations simples conduisent à des recettes de 16 milliards deuros en 2009 et 31 milliards deuros en 2010..................................................................................23(2) Léclatement dune « bulle » de recettes de 10 milliards deuros ?........................................... 25c) Un taux de prélèvements obligatoires structurellement réduit par la crise ? ........................ 26
B. LA RÉPARTITION DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES ENTRE LES ASSIETTES...............................................................................................................................281. La tendance récente : réduire les cotisations sociales au profit de la taxation du revenu........................................................8...2..........................................................................2. Une stabilité des impôts sur la consommation qui ne paraît pas économiquement justifiée............29.......................................................................................................................
C. LA RÉPARTITION DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES ENTRE LES CATÉGORIES DADMINISTRATIONS PUBLIQUES ............................................................ 301. Les évolutions densemble : augmentation du poids de la sécurité sociale et des collectivités territoriales, diminution de la part de lEtat....................................................... 302. La fiscalisation du financement de la sécurité sociale et de la dette sociale............................ 32a) La fiscalisation du financement de la sécurité sociale ......................................................... 32(1) Une tendance de long terme.................................................................................23...............(2) La fiscalisation du financement de la sécurité sociale a été juridiquement clarifiée depuis 2005..................................................33....................................................................(3) Toutefois laffectation du produit de 20 impôts et taxes reste peu lisible et gagnerait à être rationalisée................................................................33................................................b)Lafiscalisationdeladettesociale......................................................................................363. Laugmentation de la part des collectivités territoriales dans les prélèvements obligatoires accompagne les transferts de compétences......................................................... 36
D. LA PERSISTANCE DUN NIVEAU ÉLEVÉ DE COTISATIONS SOCIALES EN FRANCE QUI LA DISTINGUE DES AUTRES ETATS EUROPÉENS .................................... 38
2 - -
II. QUELLE POLITIQUE DE PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES POUR FAVORISER LA SORTIE DE CRISE ?................14................................................................
A. SE FIXER DES PRINCIPES DIRECTEURS ............................................................................. 411. Limpossibilité daccroître rapidement les prélèvements obligatoires..................................... 412. Une application de la loi de programmation des finances publiques qui suscite certaines interrogations.........................................................................................................43.a) Lobligation de gager annuellement les créations de « niches » fiscales ou sociales est interprétée de manière laxiste par le Gouvernement ...................................................... 43(1) Larticle 11 de la loi de programmation des finances publiques............................................... 43(2) La décision du Gouvernement de considérer que cette disposition ne sapplique quà la situation en « régime de croisière »44.....................................................................................b) Lapplication effective de la règle de gage global de lensemble des mesures nouvelles fiscales ou sociales dici 2012 suscite certaines interrogations............................ 46(1) Une disposition qui ne doit pas forcément sappliquer annuellement........................................ 46(2) Lobligation dalourdir dici 2012 les prélèvements obligatoires denviron 6 milliards deuros par rapport au droit actuellement prévu.................................................................... 47
B. ORGANISER LA MONTÉE EN CHARGE DE LA FISCALITÉ « VERTE » ............................ 491. La taxe carbone : un impôt davenir mais à lincidence modeste à court terme...................... 492. « Niches vertes » ou « niches grises » : quelle cohérence et quel impact pour les finances publiques ?.....57..........................................................................................................
C. POURSUIVRE LALLÈGEMENT DE LA FISCALITÉ DES ENTREPRISES .......................... 611. La tendance à lallègement de la fiscalité des entreprises....................................................... 612. Une tendance amplifiée pour répondre à la crise.................................................................... 643. Deux nouveaux impôts, assis sur les immobilisations foncières et sur la valeur ajoutée, pour remplacer la taxe professionnelle...................................................................... 664. La France reste malgré tout handicapée par le haut niveau nominal des taux des principaux prélèvements sur les entreprises27............................................................................
D. LEVER LES INQUIÉTUDES EN MATIÈRE DE FISCALITÉ LOCALE .................................. 731. La suppression de la taxe professionnelle : enjeux et conséquences pour les collectivités territoriales...37......................................................................................................a) De plus en plus coûteuse pour le budget de lEtat, la taxe professionnelle représente une recette essentielle pour les collectivités territoriales.................................... 73b) La réforme de la taxe professionnelle suscite de réelles inquiétudes au regard de lautonomie financière des collectivités territoriales ........................................................... 752. Renforcer la cohérence entre la structure, les compétences et le financement......................... 77a) Adapter la ressource fiscale au champ de compétences de chaque catégorie de collectivitésterritoriales.....................................................................................................77b)Laspécialisation:unefaussebonneidée............................................................................78c) Clarifier les rapports entre lEtat et les collectivités territoriales......................................... 78d)Quelcalendrierpouruneréforme?....................................................................................79
III. QUELS CONTOURS POUR LES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES D APRÈS LA CRISE ?..........................................................................................................18..
A. SADAPTER AU CONTEXTE DE LÉCONOMIE GLOBALISÉE ........................................... 811. Les principes et orientations dégagés par le Conseil des prélèvements obligatoires, dans une importante étude réalisée à la demande de la commission des finances................... 812. Un triptyque fiscal à envisager à moyen terme........................................................................ 82a) Le « bouclier fiscal » vise à prévenir la spoliation de certains contribuables................... 82b) mais il présente de réels effets pervers ........................................................................... 83c) Le principe du « triptyque » et son évaluation financière .................................................... 84d) Une réforme qui ne doit pas être adoptée à contre-temps .................................................... 86
- 3 -
3. Les réductions des exonérations de cotisations sociales patronales : une piste à emprunter avec prudence..............................................................................87..........................a) Le dilemme entre lutte contre le chômage et amélioration de la compétitivité .................... 87b) Des économies potentielles existent cependant ................................................................... 88
B. PRIVILÉGIER UNE DYNAMIQUE DE LASSIETTE .............................................................. 891. Elargir les bases et réduire les taux : lautre règle dor......................................................... 892. Poursuivre la lutte engagée contre les paradis fiscaux............................................................ 90a) Les avancées issues des sommets du G 20 .......................................................................... 91b) Une action à poursuivre aux niveaux national, européen et international ............................ 91
IV. VERS UNE AUGMENTATION DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES ?.................. 93A.DENOUVEAUXDÉFISÀRELEVER......................................................................................931. Les limites de la recherche déconomies budgétaires.............................................................. 93a) Labsence deffet immédiat significatif des réformes structurelles...................................... 93b) Une marge de manuvre limitée pour des économies conjoncturelles ................................ 932. La menace de la charge de la dette.........................95................................................................a) Lhypothèque de laccroissement de la charge de la dette de lEtat..................................... 95b)Larepriseinéluctabledeladettesociale.............................................................................97(1) Laccumulation de nouveaux déficits sociaux en 2009 et 2010................................................ 97(2) La crise actuelle rend certes difficile toute hausse des prélèvements obligatoires....................... 97(3) Cependant, elle ne doit pas être le prétexte pour différer le débat sur le financement de la nouvelle dette sociale.........9.8...........................................................................................3. Les dépenses liées au vieillissement de la population.............................................................. 99a) Des dépenses liées au vieillissement qui devraient augmenter de 3,2 points de PIB entre2004et2050..............................................................................................................99b) Le financement des retraites : « le rendez-vous de 2010 » à ne pas manquer ......................1004. Les conséquences dune augmentation probablement durable du taux de chômage................101
B. QUELLES PERSPECTIVES POUR LE TAUX DE PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES?....................................................................................................................1011. La crise semble rendre impossible le rétablissement des finances publiques par la seule maîtrise de la dépense....................................01.1...............................................................2. La nécessité de réaliser plusieurs dizaines de milliards deuros dajustements supplémentaires par rapport à ce qui est actuellement prévu ?.......102........................................
TRAVAUX DE LA COMMISSION..................................................................................................................... 105
AUDITION DE MME CHRISTINE LAGARDE, MINISTRE DE LÉCONOMIE, DE LINDUSTRIE ET DE LEMPLOI, ET DE M. ALAIN MARLEIX, SECRÉTAIRE DETAT À LINTÉRIEUR ET AUX COLLECTIVITÉS TERRITORIALES, SUR LE PROJET DE SUPPRESSION DE LA TAXE PROFESSIONNELLE ET LA RÉFORME DES FINANCES LOCALES............................................................................................................................................................. 105
AUDITION DE M. JEAN-LOUIS BORLOO, MINISTRE DETAT, MINISTRE DE LÉCOLOGIE, DE LÉNERGIE, DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE LA MER, EN CHARGE DES TECHNOLOGIES VERTES ET DES NÉGOCIATIONS SUR LE CLIMAT, DE MME CHRISTINE LAGARDE, MINISTRE DE LÉCONOMIE, DE LINDUSTRIE ET DE LEMPLOI, ET DE MME CHANTAL JOUANNO, SECRÉTAIRE DETAT CHARGÉE DE LÉCOLOGIE............................................ 117
AUDITION DE M. PHILIPPE SÉGUIN, PREMIER PRÉSIDENT DE LA COUR DES COMPTES, PRÉSIDENT DU CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES.......................................................... 125
EXAMEN DU RAPPORT..................................................................................................................................... 139
- 4 -
- 5 -
INTRODUCTION
Le débat sur les prélèvements obligatoires et leur évolution constitue, du point de vue de votre commission des finances, loccasion par excellence de saffranchir de ce quil est convenu dappeler la tyrannie de lurgence. Il permet effectivement à la fois davoir undébat consolidé portant sur les finances publiques dans leur ensemble, quil sagisse de celles de lEtat ou de la sécurité sociale, et de prendre le recul nécessaire pour se fixer les repères dont nous avons besoin pour adapter la France à un environnement mouvant. Les crises, surtout lorsquelles sont profondes, ont aussi des vertus, en ce quelles nous conduisent à remettre en cause un certain nombre dhabitudes intellectuelles ou institutionnelles et donc de nous obliger à repenser le fonctionnement de nos économies, voire celui de notre société.
Une baisse des prélèvements obligatoires en trompe-lil Le fait nouveau, cette année, cest la très forte baisse des prélèvements obligatoires. Selon les prévisions du Gouvernement, le taux de prélèvements obligatoires serait de 40,7 % du PIB en 2009 et en 2010. Un niveau aussi faible na jamais été atteint depuis 1981. Mais loin dêtre le signe dune évolution vertueuse ou le résultat de la volonté affichée de diminuer un taux de prélèvement notoirement trop élevé, cette baisse traduit notreincapacité à faire face à nos besoins collectifs autrement que par lemprunt, cest-à-dire en reportant sur les générations futures la charge de payer les interventions publiques daujourdhui. Tant pour le budget de lEtat que pour celui de la sécurité sociale, la crise a dabord pour effet un effondrement sans précédent des recettes. Le Gouvernement na pu, très légitimement, que prendre acte du phénomène et laisser jouer les stabilisateurs automatiques. Il ne fallait pas « ajouter la crise à la crise ». Sagissant des recettes fiscales, la contraction est dautant plus forte que la crainte, justifiée, de la rupture des circuits de financement de léconomie a conduit le Gouvernement à mettre en place une série de mesures destinées en particulier à améliorer la trésorerie des entreprises. Lampleur des moins-values de recettes fiscales attendues en 2009 ne doit cependant pas surprendre, dès lors que les mécanismes de limpôt sur les sociétés conduisent mécaniquement, à eux seuls, à réduire les recettes fiscales de plus dun point de PIB.
- 6 -
Le financement des politiques publiques compromis par la diminution du PIB potentiel consécutive à la crise Les perspectives des finances publiques apparaissent dautant plus préoccupantes que la crise va probablement durablement affecter le niveau du PIB potentiel, voire le taux de croissance potentielle : non seulement léconomie française est pour ainsi dire « descendue dune marche » en termes de PIB potentiel, mais il est possible que le taux de croissance potentielle des prochaines années se situe sensiblement en-dessous du niveau, de lordre de 2%, auquel on lestimait avant la crise. Un tel ralentissement de la croissance potentielle nest cependant quune éventualité. Sa concrétisation dépendra de la capacité des agents économiques à augmenter leur productivité et leur compétitivité, mais nul doute que les multiples garde-fous rendus nécessaires par la crise financière, ne favoriseront pas le potentiel de croissance de léconomie française. Cet affaissement du PIB potentiel de léconomie française ne peut que rendre encore plus difficile à résoudre, les équations du budget de lEtat comme de la sécurité sociale. Cest que lépuisement de la ressource vient sajouter à un décalage structurel déjà ancien entre recettes et dépenses publiques. Le déficit public exprimé en points de PIB, conformément aux règles du traité de Maastricht, ne peut que se trouver considérablement accru, dès lors que le maintien à un niveau élevé des dépenses publiques se conjugue avec une moindre croissance du PIB. Laccentuation du décalage déjà ancien entre dépenses et recettes publiques Depuis longtemps, lEtat peine à financer des politiques publiques. A une dynamique des dépenses particulièrement forte que le vieillissement de la population va encore accentuer, sajoute une tendance à alléger les prélèvements obligatoires, dans un contexte de concurrence fiscale exacerbée en Europe. La globalisation avait, depuis une vingtaine dannées, entraîné le monde dans une course au moins disant fiscal. Au nom de lencouragement à linitiative, on a provoqué une forme de surenchère destinée à faciliter la prise de risques. Il existe une tendance à lasurtaxation des facteurs de production peu mobiles et à la détaxation des facteurs de production nomades, matière grise et capitaux financiers en particulier. Aujourdhui, ce mouvement semble ne pas devoir sarrêter. Et de fait, malgré la crise, nous assistons à une amplification du phénomène spontané de contraction des recettes fiscales et sociales, par la multiplication de mesures discrétionnaires dallègements de la taxation des entreprises et des particuliers.
- 7 -
Sans doute les gouvernements navaient-ils pas le choix au moment où les circuits économiques et financiers étaient menacés de rupture mais le résultat est là : les finances publiques doivent faire face à une perte de ressources massive, sans doute impossible à compenser rapidement à la fois à cause des risques politiques, surévalués ou non, aux yeux de nos dirigeants, et de perspectives de croissancea priorimoins favorables. Préserver les ressorts de linitiative dans un contexte de prélèvements obligatoires accrus : léternel arbitrage entre efficacité et équité Après plusieurs décennies de discours appelant à la baisse des prélèvements obligatoires, il peut être critiquable de se résigner, même temporairement, à leur augmentation. Votre commission est persuadée quil ne saurait être question de prélever sensiblement plus sur une activité économique en moindre croissance voire comme actuellement en régression :seul le retour de la croissance devrait pouvoir réduire substantiellement le taux dendettement. Toutefois, au moment où la dette publique explose et où la dette sociale dérape, il est bon denvoyer un signal à lopinion et aux marchés pour bien montrer que lEtat fera face à ses engagements, justifiant la faiblesse des spreads constatésdette souveraine. Tout peut en effet déraper très sur sa vite Dans cette perspective et sans doute aussi parce que leurs déficits ont atteint des niveaux insupportables, un changement de mentalités semble samorcer :une série de pays tels lEspagne ou le Royaume-Uni ont déjà pris la décision de relever leurs impôts. Le débat sur les prélèvements obligatoires participe de cette tendance en ce sens quil voudrait, par un constat sans concession, contribuer à une évolution des esprits en ouvrant des pistes pour reformater notre système de prélèvements et essayer de déboucher sur une nouvelle dynamique des finances publiques. Comme votre commission des finances la largement souligné les années précédentes, nos dispositifs sont devenus largement illisibles et ne semblent pouvoir se développer que par la multiplication des exceptions que sont les niches fiscales. De fait, celles-ci sont encore accrues par les mesures discrétionnaires décidées pour enrayer la crise ou amorcer des évolutions structurelles. Cette entropie de nos systèmes de prélèvements fiscaux et sociaux appelle à des changements radicaux dans le sens dune plus grande neutralité et dun retour à une fiscalité moins perfectionniste. Sans doute faudra-t-il trouver et faire accepterun nouvel équilibre entre équité et efficacité en matière de prélèvements obligatoires.
8 - -
En particulier, sil est vrai quil est plus cohérent de taxer les revenus nets des charges engagées pour les produire, on peut aussi se demander, dès lors quil est de plus en plus difficile dans une économie dématérialisée dimputer des charges à la fois juridiquement à un organisme et géographiquement à un pays, sil ne serait pas préférabledimposer, dans certains cas, les flux bruts. Par ailleurs, la fiscalité est aussi un moyen dinfluer sur les comportements pour amener les agents économiques à prendre en compte les conséquences de leurs comportements. De ce point de vue, la fiscalité dite « verte » ouvre un champ assez vaste, étant entendu que son objet nest pas de rapporter durablement des masses de recettes publiques mais dinfluer sur les décisions des agents pour les rendre plus respectueuses de lenvironnement. Repenser le système de prélèvements dans le sens dune responsabilisation accrue des agents En tout état de cause, votre rapporteur général estime que les agents économiques devront tôt ou tardaccepter de payer les services collectifsdont ils bénéficientà un niveau plus proche de leur coût. Des évolutions sont en cours avec le vieillissement de la population qui rendront inévitables des prélèvements plus importants à niveau de prestations inchangé. Mais cette approche consistant àresponsabiliser les agents leur en faisant prendre en charge directement ou indirectement à travers des prélèvements accrus un certain nombre de charges aujourdhui socialisées, ne vaut pas que pour le risque vieillesse. Dans dautres domaines, tels que léducation, il ne serait pas inconcevable de faire payer à leur prix les études supérieures des enfants issus des couches les plus aisées de la population ce qui allègerait dautant la pression sur le budget de lEtat. Dans un contexte daugmentation massive du poids de la dette publique et plus généralement des dépenses de fonctionnement sagissant en particulier des dépenses sociales,il faudra agir à tous les niveaux, à la fois sur les recettes mais aussi sur les dépenses: le déplacement de la ligne de partage entre les sphères publique et privée vient de ce point de vue non seulement diminuer la charge à financer par prélèvements mais encore permettre de faire participer les agents au coût des interventions dont ils bénéficient. Si les prélèvements obligatoires ont pour objet essentiel de couvrir des besoins, ils doivent aussi, quil sagisse de taxes ou de participations aux frais, constituer des signaux de nature à améliorer lallocation des ressources et donc à limiter la charge quils font peser sur léconomie, ce qui est indispensable du fait de la persistance de la tendance à la globalisation.