La lecture à portée de main
131
pages
Français
Ebooks
2021
Écrit par
Lecordouan
Publié par
Nombre7 Editions
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Publié par
Date de parution
03 décembre 2021
Nombre de lectures
1
EAN13
9782381538440
Langue
Français
Ces nouvelles constituent d’une certaine façon une cantilène cévenole. Elles célèbrent avant tout la beauté sauvage et indifférente des Cévennes, les pauvres gens, tous les laissés pour compte qui y vécurent péniblement depuis le XIXe ou qui y vivent encore : paysans pauvres coincés entre un protestantisme rigoriste et leurs pulsions sexuelles, les mineurs de fond, ceux qui s’obstinaient à vouloir rester au pays, ceux qui vivent encore en marge de la normalité. Ces fictions se déroulent essentiellement dans la Cévenne gardoise. Elles témoignent d’un passé pas si lointain mais méconnu. Il faut aimer comme l’auteur la solitude, l’isolement, l’austérité de cette terre pour vivre là sans se faire d’illusions sur la nature humaine.
Publié par
Date de parution
03 décembre 2021
Nombre de lectures
1
EAN13
9782381538440
Langue
Français
ISBN : 9782381538440
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Les Cabossés Bonheur et Crève-cœurs en Cévennes gardoise
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Lecordouan
Les Cabossés Bonheur et Crève-cœurs en Cévenne gardoise
Du même auteur :
Le chant feutré des étoiles (poésie)
Incandescence d'un destin (poésie)
À tous les mineurs de fond et à tous les laissés pour compte.
Bien qu'inspirées de faits réels, ces nouvelles sont des fictions.
Les expressions ou mots utilisés dans certaines nouvelles appartiennent à un patois occitan très localisé et uniquement parlé, à un langage vernaculaire. Ils n’ont donc aucune orthographe officielle. Celle qu’ils ont dans le texte relève du bon vouloir du narrateur.
Les Véridiques
— Qu’est-ce qu’on attend ? Allez ! Commençons cette réunion, qu’on en finisse une bonne fois pour toutes.
Sarah, une belle quinquagénaire, a soulevé un pan de rideau et regarde par la fenêtre le mas d’Antoine qui fait face. La lumière filtre à travers les volets. Elle répond calmement :
— On attend Antoine. Il ne va pas tarder.
— Merde ! Il se fait toujours désirer, lui. Il n’a pas de montre ou de portable ? Il n’ignore pourtant pas que nous devons les exécuter aujourd’hui.
— On connaît tous Antoine depuis notre enfance. On sait bien comment il est.
— Ouais ! Toi non plus tu ne changes pas, Sophie. Toujours disposée à prendre sa défense. Tu m’étonnes d’ailleurs. Je pensais qu’il t’épouserait. Je savais que tu l’avais choisi.
L’idée qu’il se marie avec Alain ne m’avait jamais effleuré l’esprit. Cette union a dû te porter un sacré coup au moral ?
Sophie porte sur Pierre un regard glacial, inquiétant, sans piper mot. Elle avait peut-être été épargnée du pire. Elle aurait pu épouser Antoine, lui faire deux ou trois enfants puis être abandonnée pour Alain ou un autre. Cette pensée adoucissait sa blessure d’amour-propre. L’amour est un bouquet de fleurs de bêtise. Il fane vite. Après tout, ce n’est pas grand-chose. Un dérèglement hormonal temporaire. Rien qui ne vaille qu’on souffre. Étrangement, depuis, l’idée de tuer ne la quittait plus. C’était si facile d’ôter la vie. Les occasions ne lui manquaient pas d’éliminer un fonctionnaire obtus, un Dom Juan de fête foraine, un macho au volant, un contempteur arrogant, un imbécile fier de lui… mentalement. En revanche, elle ne se faisait pas à l’idée de mourir.
— Les jeunes sont souvent impatients et cons comme la lune ou comme toi Pierre. Ta connerie ne prend jamais de RTT ?
— Ta gueule, Espagnol de l’armée en déroute !
— Je n’ai pas loué le mas ni les chaises. Je suis chez moi ici. On ne doit pas le libérer. Patiente encore un peu ! La patience est le chemin de la sagesse. Elle laisse le temps de la réflexion… Voilà Antoine qui sort de chez lui ! Il arrive… Sarah prend place sur une des deux chaises vides disposées en cercle devant l’âtre. Le dernier arrivé, le teint d’un soleil d’hiver, s’assied à côté de Paco, le vétéran du groupe. Ce vieux Cévenol descend d’une lignée d’anarchistes venus s’installer en Cévennes gardoises, après un séjour au camp d’Argelès, en février 1939. Brun aux yeux bleus, le visage émacié, grand et sec comme un arc électrique, Paco est peu disert. Il préfère les bâtons de dynamite aux paroles. D’ailleurs, il s’interroge sur sa présence dans ce mas. L’affaire ne devrait pas traîner. Il va rapidement retrouver sa solitude.
— On ne les entend pas. Sont-ils toujours dans la bergerie ? demande Antoine.
— Oui, depuis leur enlèvement, la semaine dernière. Je les ai cagoulés et bâillonnés comme convenu et leur ai retiré leurs bâillons seulement au moment des repas, répond Sarah. La mère pleure en silence. Elle sent probablement la mort. C’est instinctif et animal dans une situation de danger imminent.
— Cette peur de mourir me la rend presque sympathique, lance Sophie. C’est une femme fruste, déterminée, voire bornée. Elle préfèrerait mourir au grand jour, aux côtés de son mari et de ses fils, des Véridiques, ces valeureux guerriers avides de martyre. Pas la nuit. Pas enfermée comme une bête.
— Les deux adolescents, des jumeaux âgés de seize ans, réagissent en combattants du grand Satan. Ils cherchent des repères à tâtons et des objets qui pourraient leur servir d’armes. Ils ont été conditionnés pour tuer. Ce qu’ils ont fait. Ils ne redoutent rien. Si on ne redoute pas de perdre sa vie, on se rend maître de celle de l’autre.
— Détrompe-toi Sarah ! La peur est un poison qui se distille lentement dans le corps, paralyse les membres, intoxique l’esprit.
Ceux qui racontent n’avoir jamais été effrayés dans des situations dangereuses sont des cons, des dingues ou des menteurs. Je suis persuadé que la peur accroît leur instinct de survie, assène Paco.
— Rappelez-vous les vidéos révélant leur fanatisme, le plaisir manifeste avec lequel ils décapitaient eux-mêmes les infidèles et la fierté de leur père assistant à ces monstruosités. Et tous les trois, violant de jeunes otages puis les éventrant une fois leurs pulsions libidinales assouvies ou les réduisant à l’état d’esclaves sexuelles. Le viol, arme de guerre, ne date pas d’aujourd’hui. Souvenez-vous de ces hommes accusés de sodomie qu’ils empalaient avant de les transformer en torches vivantes… Antoine et Sophie ont eu de la chance de les reconnaître après les avoir vus dans un documentaire diffusé sur une chaîne de télévision. Et alors qu’ils faisaient tranquillement leur marché dans la petite ville de la Grand’Combe. Ils se croyaient tirés définitivement d’affaire après avoir réussi à quitter clandestinement le pays où ils avaient perpétré leurs crimes. Ils s’imaginaient en sécurité planqués dans un mas abandonné.
Pierre prend la parole :
— Ils sont venus se faire oublier dans ce trou Sarah, se mettre en état d’anhydrobiose idéologique, constituer une cellule dormante, et probablement une base arrière de cache d’armes que nous trouverons
— L’impéritie des politiciens m’écœure. Ce dégoût renforce ma volonté, mais vous, êtes-vous toujours d’accord pour accomplir la mission que nous nous sommes fixés ? les interroge Antoine. Nous devons agir unis et inflexibles, avec la détermination d’un commando. Désormais, impossible de reculer.
Après ces propos d’Antoine, Paco enchaîne, tête raide, le regard perdu dans le vide.
— À ce stade, il ne s’agit pas de savoir si on va le faire, mais qui va le faire.
Il se tient depuis longtemps à l’écart, comme les Épicuriens, de ces politiciens véreux, mais pleins d’égards pour ces abrutis d’électeurs gobeurs de leurs bobards. Avec pour seul rempart, son secret du bonheur.
Sarah intervient à nouveau :
— Toi, tu es un homme de certitude. Tu portes la couleur de la désespérance depuis ton adolescence. De notoriété publique tu es un mécréant. Moi, les jeunes me posent un cas de conscience. Je crois en Dieu et en la rédemption. Ils ont été v