L Hôpital : allô quoi ?
260 pages
Français

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L'Hôpital : allô quoi ? , livre ebook

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Description

Cet ouvrage s’inscrit dans le cadre des réflexions actuelles sur les missions de l'hôpital. En presque un demi-siècle de carrière, l’auteur a vu les médecins perdre leur prestige et leur pouvoir au profit du gestionnaire. Il a vu la mission prioritaire de soins pour tous devenir une recherche de soins financièrement rentables. Il a vu la protection sacrée de la vie reculer devant des fins de vie apparentées à de l’euthanasie. L’auteur s'efforce de traiter avec humour ces sujets graves, à travers des cas cliniques vécus, l'histoire de la médecine et des réflexions personnelles. Il donne ici le point de vue du praticien qui n’est ni politique ni philosophique ni religieux mais qui a été, cependant, journellement confronté à des attitudes que lui dictent des personnalités compétentes mais inexpérimentées.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 30 janvier 2017
Nombre de lectures 1
EAN13 9782334132541
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0067€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composér Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d'adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-334-13252-7

© Edilivre, 2017
Exergue

A mon épouse, Denise A mes enfants, Stéphane, Caroline, Gregory, Marie-Charlotte et Rodolphe
Remerciements
Je remercie Madame le Professeur Marie Paule Suret Léonard et Madame Janine Dewasme pour leurs conseils et leurs corrections
Avertissement
Toute ressemblance d’avec les malades et les histoires médicales évoquées ou décrites dans cet ouvrage ne saurait être fortuite. L’anonymat n’empêchera peut-être pas qu’ils se reconnaissent. Je leur demande pardon d’avoir sans leur permission raconté leur histoire. Qu’ils sachent, encore de ce monde ou déjà dans l’autre, qu’ils sont toujours présents et vivants dans mes pensées.
Ça y est, ils sont partis
1969. Ça y est, ils sont partis. Tous sauf la garde. Tous les docteurs sauf moi qui ne le suis pas encore. Tous ceux qui savent, sauf moi, qui savait peu mais qui, ce soir, ne sait plus rien. Je marche d’un pas vif, tête droite, regard fixe, l’air préoccupé. Je marche comme j’ai vu marcher ceux qui se pensent importants. Ça me rassure de savoir que je peux marcher comme eux. Je renoue mon tablier blanc à poche kangourou, indispensable insigne de ma fonction d’interne des hôpitaux. La branche de stéthoscope qu’avec soin j’ai laissé dépasser, achève de signifier à tous, ce que je suis. Je relève un instant le col de ma blouse comme le font en signe de reconnaissance certains chirurgiens, puis je l’abaisse en position normale. Si on me prenait pour le chirurgien de garde ! Sans but précis j’arpente les longs couloirs démesurément hauts et sinistres de l’hôpital. C’est l’hiver, novembre 1968, la nuit sera longue, triste et humide de crachin. Ce soir j’ai la responsabilité des malades de ce vieil hôpital. Il accueille des malades tuberculeux dans deux étages de sanatorium. Mais aussi des maladies respiratoires, de la néphrologie, et de la réanimation. Plus de cinq cents malades, pour moitié des adultes, les autres sont des enfants. Je suis fier et inquiet. C’est ma première garde. Si les malades savaient !
Un malade adulte hospitalisé appartient déjà à une spécialité. C’est un malade de pneumologie, de néphrologie, de médecine interne, de gastro-entérologie… et depuis peu de réanimation. Je suis de garde et je ne connais rien à la réanimation. Un réanimateur est présent tard le soir, ensuite, il peut être joint au téléphone. Il y a aussi des enfants en réanimation. Des petits parfois de deux ans. C’est très petit un malade de deux ans. J’ai peur des enfants malades. Ils ne disent pas s’ils ont mal, ni comment, ni où, ni depuis quand. Ils pleurent dès qu’ils me voient. On leur a trop dit si tu n’es pas sage tu auras une piqûre ou pire tu iras à l’hôpital. C’est mieux quand ils ne sont pas conscients. Ils ne pleurent plus, mais c’est plus grave et alors c’est moi qui panique. Il faudrait un service de réanimation rien que pour les enfants. Les enfants âgés de moins de 15 ans sont hospitalisés en pédiatrie. A 15 ans et quelques jours, un enfant malade est encore un enfant, mais hospitalisé il devient un adulte, la maladie fait grandir. Ce n’est pas pour des raisons de maturité ou de responsabilité, c’est uniquement pour des raisons techniques, pratiques… La taille des lits par exemple. Un enfant hospitalisé n’appartient pas pour l’instant à une spécialité autre que la pédiatrie. Il n’y a pas de « sur-spécialités » pour les enfants, pas encore. Il y a quand même les services de prématurés. Un prématuré est un grand ou un petit prématuré. Mais un grand prématuré est plus petit qu’un petit prématuré. En fait on dit grand par référence à l’importance de la prématurité. Un grand ne dépasse pas 800 g. Ce n’est pas très gros 800 g, ça gigote un peu des bras des jambes, en petits mouvements saccadés comme pour chercher à agripper sa mère. Ça dort beaucoup, ça geint faiblement, une plainte fragile de souris. Une vie qu’un souffle pourrait éteindre. Dans leur couveuse, leur grosse tête les fait ressembler à des têtards dans un aquarium. Je suis de garde et je ne connais rien aux prématurés. J’ai l’impression que tout le monde s’en fiche. Sauf moi qui prie qu’aucun prématuré n’aille mal cette nuit. – Je ne crois pas que quelqu’un m’entende. Je ne crois pas en Dieu. Il est difficile de trouver à l’hôpital des preuves de son existence. Je ne veux pas l’offenser, on ne sait jamais, une petite intervention de sa part serait la bienvenue en particulier ce soir. La vierge Marie c’est autre chose. C’est elle que l’on trouve depuis toujours dans les chambres des malades, en image d’Epinal ou statuette fluorescente, magnifique de tendresse, enfermée et mystérieuse dans son globe de verre où tombe la neige en légers flocons. C’est à elle que s’adressent ces exvotos pathétiques qui tapissent les murs gras des chambres et forcent la raison d’y croire. La Vierge, je sais que je peux compter sur son aide et l’interpeller intérieurement. Jésus Marie Joseph ! Pendant quarante ans j’ai entamé chaque bataille pour la vie que je pressentais difficile par ce cri intérieur. Mon haka à moi, à chacun son truc.
Des petits « prémas » j’en ai seulement aperçu à travers les vitres de l’unité de néonatalogie, figurines aztèques en file indienne, bras et jambes au carré. Les petits prématurés ne m’inquiètent pas trop. Mais les grands c’est une autre histoire. Heureusement, il y a un pédiatre quasiment toujours sur place, il n’y pas encore de garde organisée, mais il est là et s’occupe d’eux nuit et jour, un inlassable combattant, un rare, un dévoué nyctalope, tel un hibou, il semble ne dormir jamais.
Mentalement je retrace les parcours qui mènent à tel ou tel service. Il ne manquerait plus que je me perde ! Les autres, ceux qui ont déjà fait deux ou trois gardes m’ont recommandé de ne pas m’aventurer dans les souterrains. Des malades s’y seraient perdus ! C’est évidemment faux mais restons prudent. L’hôpital a été réquisitionné et occupé pendant la guerre 40. Un blockhaus trône encore à l’entrée. Des visiteurs impressionnés, échine courbée, l’œil au travers des meurtrières cherchent l’entrée de ce peu avenant poste d’accueil. Partie émergée d’un réseau complexe, il est encore relié à des kilomètres de souterrains sombres et humides qui contiennent tout ce qu’il n’est pas convenable de montrer dans un hôpital : tuyauterie sanitaire, câblages, vieux matériels… Ils servent de galeries de liaison entre les services logistiques et permettent d’acheminer discrètement les poubelles, le linge sale et les morts vers la morgue ou la salle de nécropsie. J’ai, un jour où la curiosité l’emportait sur la prudence, entrouvert la porte de cet étrange monde souterrain et osé quelques pas dans la pénombre. J’ai vite rebroussé chemin redoutant d’y croiser quelque squelette oublié là, mort d’ennui. Je rigole, comme disent les ados.
Il est 21 heures. Il y a trois heures que la garde, ma première garde a commencé et personne ne m’a encore appelé. J’avance à grands pas sonores qui résonnent dans les hauts couloirs comme issus d’un mauvais polar. Ce bruit fort et décidé me rassure, c’est mon bruit. La nuit est tombée depuis longtemps et le signal lumineux vert, qui indique la sortie, projette timidement au sol une ombre noire. Mon ombre. Attachée à mes pas, même si elle tremblote comme un vieux parkinson, c’est une présence. J’ai la gorge un peu sèche. L’hôpital, la nuit, a toujours quelque chose d’angoissant. Si personne ne m’appelle je ne saurai pas ce que je sais. Demain je pourrai toujours raconter que j’ai eu une nuit horrible, que j’ai sauvé un enfant atteint de méningite foudroyante, une détresse respiratoire, deux accidents vasculaires cérébraux, une hypothermie chez un SDF… chaud l’hypothermie ! On apprend vite à ne pas soigner des hommes mais des pathologies. L’anonymat rassure. J’aurais assuré comme un vrai docteur. Je souris, la statistique est contre moi. La probabilité pour que dans un hôpital il y ait des malades et qu’ils n’aillent pas tous bien est raisonnablement forte. J’ai été major du concours de l’internat, donc forcément je m’en sortirai bien, en tout cas, mieux que les autres, enfin pas pire. Quand même, ce soir je suis seul. Pour la première fois je suis seul et responsable. Jésus Marie Joseph ! Un instant je pense à partir, à rentrer chez moi, à être auprès de ma femme et ma fille qui n’a que quelques jours. Je pourrais me dire que je ne suis pas bien… que je suis malade. La honte ! En vrai je ne suis pas tout à fait seul. Dans l’hôpital voisin ils sont quatre. C’est mieux que d’être seul. Deux internes en médecine, un de porte et un d’aile. Un portier et un volant. Etre de porte signifie s’occuper des entrées et des urgences. Etre d’aile ou volant n’a rien à voir avec Spiderman, encore que… C’est avoir la charge des malades déjà hospitalisés. Il y a aussi deux internes en chirurgie et un chirurgien. C’est le personnage central de la garde, un vrai docteur, un seigneur, un chef de clinique qu’on ne dérange qu’en cas d’absolue nécessité. Et chacun a intérêt à avoir examiné son malade de la racine des cheveux au trou du… sinon c’est l’engueulade, le sermon, la leçon publique. Ça gueule un chirurgien, quand ça a raison, et plus fort quand ça a tort, souvent les moins bons, comme ailleurs. Un chirurgien aime à être servi au bloc, comme à table. Le chirurgien de garde a sa salle à manger où il invite qui il veut. Surtout des filles. Je m’en fiche, je ne serai pas chirurgien. De toute façon les médecins de garde ne peuvent pas quitter leur établissement. Personne ne se déplacera. Au mieux je peux espérer un conseil de vieux, un interne de troisième année. Le plus vraisemblable sera le pire, la blague à mes dépe

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