Suivre Jésus et faire du business
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Description

Les Baruya de Nouvelle-Guinée sont l'une des dernières sociétés tribales découvertes par l'Occident. Comment ont-ils réussi à passer, en quelques décennies, du néolithique à la modernité ? Que sont devenus les « secrets des hommes », dont la trahison redoutée eût sapé un ordre social fondé sur la subordination des femmes ?


Avec un art exceptionnel de conteur, Maurice Godelier retrace ces transformations en s'appuyant sur un demi-siècle d'observations quasi ininterrompues de plusieurs générations d'anthropologues. Car depuis son séjour pionnier dans les années 60 beaucoup de choses ont changé, et aujourd'hui les Baruya (hommes et femmes) jouent gros jeu aux cartes, tout en suivant les cours du café à la radio.


L'histoire de cette petite société offre un exemple particulièrement clair des effets conjoints du christianisme et du capitalisme mondialisé. On peut y lire en miniature les caractéristiques de notre monde et y voir tout à la fois l'occidentalisation forcée d'une société tribale et la résistance de ses valeurs traditionnelles.


Maurice Godelier est directeur d'études à l'EHESS, Médaille d'or du CNRS, Prix de l'Académie Française. Sa renommée mondiale en fait l'un des plus grands anthropologues vivants. Il a publié, entre autres classiques, L'énigme du don, Métamorphoses de la parenté, Au fondement des sociétés humaines et, plus récemment, un magistral Lévi-Strauss.

Sujets

Informations

Publié par
Nombre de lectures 4
EAN13 9782362801624
Langue Français
Poids de l'ouvrage 6 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0082€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Présentation de l'éditeur
Les Baruya de Nouvelle-Guinée sont l'une des dernières sociétés tribales découvertes par l'Occident. Comment ont-ils réussi à passer, en quelques décennies, du néolithique à la modernité ? Que sont devenus les « secrets des hommes », dont la trahison redoutée eût sapé un ordre social fondé sur la subordination des femmes ?
Avec un art exceptionnel de conteur, Maurice Godelier retrace ces transformations en s'appuyant sur un demi-siècle d'observations quasi ininterrompues de plusieurs générations d'anthropologues. Car depuis son séjour pionnier dans les années 60 beaucoup de choses ont changé, et aujourd'hui les Baruya (hommes et femmes) jouent gros jeu aux cartes, tout en suivant les cours du café à la radio.
L'histoire de cette petite société offre un exemple particulièrement clair des effets conjoints du christianisme et du capitalisme mondialisé. On peut y lire en miniature les caractéristiques de notre monde et y voir tout à la fois l'occidentalisation forcée d'une société tribale et la résistance de ses valeurs traditionnelles.
 
MAURICE GODELIER est directeur d'études à l'EHESS, Médaille d'or du CNRS, Prix de l'Académie française. Sa renommée mondiale en fait l'un des plus grands anthropologues vivants. Il a publié, entre autres classiques, L'énigme du don, Métamorphoses de la parenté et, plus récemment, un magistral Lévi-Strauss .


MAURICE GODELIER
Suivre Jésus et faire du business
Une petite société tribale dans la mondialisation


 
© 2017 Éditions Thierry Marchaisse

Conception visuelle : Denis Couchaux
Mise en page intérieure : Anne Fragonard-Le Guen
Couverture : photo de Anne-Sylvie Malbrancke
Deuxième et troisième de couverture : photos de Pierre Lemonnier
 
Éditions Thierry Marchaisse
221 rue Diderot
94300 Vincennes
http://www.editions-marchaisse.fr

Forum des lecteurs
Marchaisse
Éditions TM

Diffusion-Distribution : Harmonia Mundi

ISBN (ePub) : 978-2-36280-162-4
ISBN (papier) : 978-2-36280-161-7
ISBN (PDF) : 978-2-36280-163-1


 
Tsimia, Yanyi, juin 1985
La tsimia est la grande maison cérémonielle où se déroulent les initiations masculines chez les Baruya de Nouvelle-Guinée. Les femmes, conduites par plusieurs shamanes hommes et femmes, apportent des centaines de bottes de chaume pour la recouvrir. Les hommes sont remontés vers le faîte pour se protéger des « flèches » des femmes. Celles-ci vont en effet d’abord tourner en courant autour de la tsimia plusieurs fois, comme si elles l’encerclaient. Puis, elles s’arrêteront pour jeter leurs chaumes aux hommes, en les visant soigneusement et en se moquant d’eux. C’est une sorte de combat fictif « à plaisanterie ».
Photo Pierre Lemonnier.


À Koumaineu et Ouroumiannac, mes amis et collègues de travail
 


Avant-propos
En 2015, mon ami Thierry Marchaisse, fondateur d’une maison d’édition encore jeune, mais qui va grandir, vint me voir, très enthousiaste. Il avait – je ne sais trop comment – exhumé un texte dont j’avais presque oublié l’existence et désirait fortement le republier. Cet article, rédigé en 1987, s’intitulait : « Trahir le secret des hommes 1  ». J’acceptai en principe sa proposition, sous réserve que j’aie relu ce texte et vérifié s’il fallait le modifier ou le compléter, car après la parution de l’article, en 1988, j’étais retourné une dernière fois chez les Baruya et on m’en avait dit plus.
Lecture faite, il m’est apparu qu’en effet il fallait expliquer mieux la nature des « secrets » des hommes baruya, si l’on voulait vraiment comprendre le rôle de la trahison dans la genèse et le fonctionnement de cette société, notamment dans la peur collective permanente qui la caractérise, cette peur qu’un initié vienne justement « trahir le secret des hommes ». Mais au-delà de ces nécessaires ajouts et remaniements, il m’a semblé qu’autre chose encore justifiait la reprise de mes analyses des trahisons subies ou fomentées par les ancêtres des Baruya. Car je pouvais – je devais – en profiter pour retracer, à l’aide de mes matériaux et de ceux de mes jeunes collègues venus ensuite me rejoindre chez les Baruya, les transformations successives de cette petite société tribale qui, jusqu’en 1960, se gouvernait elle-même, ne connaissait ni l’État, ni l’économie de marché et encore moins la « vraie » religion, celle du Christ évidemment.
 
Le contexte n’est plus du tout le même aujourd’hui. La société baruya a profondément changé sous l’impact de la colonisation australienne (1951), de l’accès à l’indépendance de la Papouasie-Nouvelle-Guinée (1975), de l’économie marchande et surtout de la christianisation, menée par diverses Églises protestantes américaines ou australiennes. Que sont donc devenus les « secrets des hommes », existent-ils encore ? Que sont devenus les Grands Hommes et les Grandes Femmes, qui servaient d’exemples et de supports à cette société, avant que les « Blancs » ne la découvrent et ne la soumettent à leur ordre ?
Pour répondre à ces questions, je commencerai par retracer brièvement les circonstances et les raisons qui m’ont conduit chez les Baruya, afin d’y vivre et d’y travailler, avec d’autres, pendant des années. Puis, je rappellerai quelques éléments clés de l’histoire de cette société tribale et ce qu’il faut savoir pour comprendre les mécanismes qui font de la trahison l’une de leurs formes de reproduction sociale.
Tout ceci étant rappelé en guise d’introduction, le lecteur pourra alors prendre connaissance de ce que j’avançais dans « Trahir le secret des hommes », mais dans une version nouvelle qui améliore largement le texte original, et le complète sur un point décisif. Je ferai ensuite une sorte de pause méthodologique, pour mieux préparer le saut temporel qui est au centre de cet essai. J’en profiterai pour faire passer le lecteur dans les coulisses de mon travail d’anthropologue et pour insister notamment sur le rôle qu’ont joué la photographie et surtout le cinéma dans mes recherches avec et sur les Baruya. Enfin, dans la troisième partie, j’aurai la chance assez exceptionnelle de pouvoir décrire, un demi-siècle après, ce qu’il reste des initiations masculines et féminines en pays baruya, et ce que sont devenus, désormais, les rapports entre les hommes et les femmes.
Cette dernière partie repose essentiellement sur les données recueillies par les jeunes collègues qui m’ont aidé et m’ont succédé. On les rencontrera au fil des pages qui suivent, mais je me fais un plaisir de les nommer ici, et de saluer d’abord Jean-Luc Lory et Pierre Lemonnier, qui ont été longtemps sur le terrain avec moi. Puis Pascale Bonnemère, qui a continué avec Pierre le travail après mon départ. Et enfin Anne-Sylvie Malbrancke, qui a repris tout récemment le flambeau.


1 Le Genre Humain , n° 16-17, 1988, p. 243-265.


Introduction
En 1966, je suis arrivé à Canberra, en Australie, afin d’obtenir des autorités australiennes un « visa de recherche » pour aller faire du terrain en Nouvelle-Guinée. C’était impératif à l’époque et le reste encore aujourd’hui. J’y allais aussi pour apprendre le tok pisin ( pidgin english ) dans un laboratoire de linguistique. Le pidgin est une langue qui est née dans les plantations européennes de Nouvelle-Guinée et des îles avoisinantes, où des centaines d’hommes provenant de dizaines de tribus aux langues complètement différentes ont été recrutés pour travailler ensemble, pendant des années, sous le commandement d’Européens. Une langue commune s’est alors développée, faite d’un mélange d’anglais, d’indonésien, d’espagnol, de mots polynésiens, et elle a été finalement adoptée par l’administration australienne, puis par les différentes organisations missionnaires qui créaient des écoles primaires là où elles s’implantaient.
À l’origine, la Nouvelle-Guinée, la plus grande île de l’Océanie, a été colonisée par trois puissances européennes, qui s’en sont partagé le territoire. La partie ouest de l’île fut colonisée par les Pays-Bas, qui lui donnèrent alors le nom de Nouvelle-Guinée néerlandaise (fin XIX e  siècle jusque 1962), mais cette partie de l’île a changé plusieurs fois de nom depuis. Aujourd’hui, l’ouest de l’île, devenue indonésienne, s’appelle « Papua ». La partie est, par contre, fut divisée en deux par le milieu. Le territoire au sud devint une colonie de la Grande-Bretagne sous le nom de « British Papua » (1884-1975). Le territoire au nord devint une colonie de l’Allemagne sous le nom de « Neuguinea » ou, plus exactement, « Kaiser-Wilhelms-Land » (1884-1973/1975).
Après la Première Guerre mondiale, l’Allemagne perdit toutes ses colonies et finalement la Société des Nations confia le territoire de la Kaiser-Wilhelms-Land en tutelle à l’Australie, à laquelle la Grande-Bretagne céda également le sien. En 1975, le gouvernement (travailliste) australien octroya leur indépendance à ces territoires, qui furent unifiés sous le nom de « Papua New Guinea ». De leur côté, les Pays-Bas avaient été contraints d’accorder l’indépendance à leurs colonies dites des « Indes orientales néerlandaises » et lorsqu’ils abandonnèrent la partie occidentale de l’île, l’État indonésien qui se constituait annexa celle-ci à son territoire sous le nom de « West Irian ».
 
Les Baruya, quant à eux, ne furent « découverts » qu’en 1951, par une expédition militaire australienne, et c’est seulement en 1960, c’est-à-dire dans les toutes dernières années précédant l’indépendance de la Nouvelle-Guinée, qu’ils furent « colonisés ». En ce sens qu’ils perdirent définitivement leur souveraineté sur eux-mêmes et leur territoire, et que désormais leur avenir n’a plus dépendu seulement d’eux-mêmes et de leurs rapports avec les tribus voisines, amies ou ennemies, mais de décisions prises par des centres de pouvoir qui leur étaient auparavant totalement inconnus et étrangers : État, missions, plantations,

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