Radioscopie de la communauté antillaise
280 pages
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Radioscopie de la communauté antillaise , livre ebook

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Description

« Comment parler des Antillais, de façon objective et impartiale, si ce n'est en les interrogeant eux-mêmes ? Comment si ce n'est en cherchant à cerner, à décrypter, à travers leurs propos, leurs critiques, leurs confidences, quelles sont leurs préoccupations, leurs aspirations, le sens profond de leurs luttes et de leurs renoncements, leur degré effectif de motivation, d'investissement, dans les objectifs qu'ils se fixent et les défis qu'ils sont prêts à relever pour réussir leurs projets de vie ? »

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 29 juillet 2013
Nombre de lectures 0
EAN13 9782342008005
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0075€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Radioscopie de la communauté antillaise
Romain Fanchonna
Société des écrivains

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


Société des écrivains
14, rue des Volontaires
75015 PARIS – France
Tél. : +33 (0)1 53 69 65 55
Radioscopie de la communauté antillaise
 
 
 
 
Introduction
 
 
 
Comment parler des Antillais, de façon objective et impartiale, si ce n’est en les interrogeant eux-mêmes ? Comment si ce n’est en cherchant à cerner, à décrypter, à travers leurs propos, leurs critiques, leurs confidences, quelles sont leurs préoccupations, leurs aspirations, le sens profond de leurs luttes et de leurs renoncements, leur degré effectif de motivation, d’investissement, dans les objectifs qu’ils se fixent et les défis qu’ils sont prêts à relever pour réussir leurs projets de vie ? Comment si ce n’est en faisant en sorte qu’ils disent, eux-mêmes, sans détours, sans faux-semblants, quels sont leurs handicaps et leurs impuissances, leurs fragilités et leurs limites ; et bien évidemment, quels sont ou quels peuvent être, sur ces points précis, leurs espoirs de progrès les plus immédiats et les plus sérieux ?
 
D’ailleurs, qui d’autre peut, mieux qu’ils ne sont eux-mêmes capables de le faire, ressentir, analyser, exprimer ces choses-là ? Qui d’autre peut, mieux qu’ils ne sont à même de le faire, porter sur leurs propres faits et gestes, un regard à la fois incisif, critique et objectif, qui constitue, tel quel, un premier pas vers une évolution positive des comportements ? Bref, reconnaissons, en toute bonne foi, que, sur ces différents points, rien ne vaut ni n’égale ni ne dépasse ce qu’ils perçoivent et ressentent dans leur for intérieur, et donc, ce qu’ils pensent et disent eux-mêmes, puisque cela relève de leur propre vécu, fait partie de leur réalité, renvoie d’une manière ou d’une autre à une séquence heureuse ou pénible de leur vie. C’est bien pourquoi, nous avons pris soin de recueillir leurs témoignages sur les réalités et les priorités, les enjeux et les défis, les doutes et les espoirs, les joies et les peines, qui régulent, complexifient, assombrissent ou embellissent au quotidien leur existence. Car, en effet, appréhender, sous ses multiples facettes, le vécu de l’Antillais, que ce soit en terre d’exil ou en terre natale, chercher à savoir ce qui peut ou non faire de lui, au sein de l’espace communautaire national, un citoyen actif et intégré, un être social affirmé et épanoui, un acteur concerné et mobilisé par les principaux enjeux de la vie collective, revient à se poser un nombre infini de questions ; mais sans aucune prétention ni certitude de trouver les bonnes réponses ; ou du moins ce que le sens commun considère, en la circonstance, comme telles.
 
Parmi toutes ces interrogations, les premières renvoient, on s’en doute, aux écueils auquel celui-ci se heurte, d’une manière générale, pour accéder à l’égalité réelle des droits et des chances, pour assurer sa présence et sa légitimité dans l’espace public, bref, pour accéder, concrètement, à un statut de citoyen légitime, et reconnu comme tel, sans que les attributs qui y sont fondamentalement attachés ne subissent, à un moment ou à un autre ou pour une raison ou pour une autre, une sorte de « déligitimation » de fait, dans la vie réelle. Les secondes interpellent sans concession l’Antillais sur sa réelle volonté à donner davantage de sens et d’importance aux actes individuels et collectifs de solidarité au sein de sa communauté d’appartenance ; mais aussi sur la pertinence ou l’efficacité de ses différentes formes de mobilisation politique, de militantisme culturel, visant à accéder à plus de responsabilité dans la gestion des affaires de son pays, à défendre dans leurs aspects les plus caractéristiques et les plus révélateurs, son identité et son altérité, sa culture et ses traditions. Disons-le tout de suite, sur ce plan, les choses sont loin d’être évidentes, car dans le premier comme dans le second cas, les Antillais veulent mais en même temps, ils ne veulent pas. Pour être précis et concret, ils veulent être plus autonomes et plus responsables mais en même temps, ils craignent tout autant l’autonomie aussi bien que les changements structurels et les nouvelles formes de responsabilités qu’elle suppose et implique. Ils s’érigent très souvent en défenseurs inconditionnels de la culture créole, du consommer local (ce qui est fort louable), mais la plupart du temps, ils privilégient, dans leurs actes de consommation quotidiens, les produits importés ; et leurs différentes formes d’engagement culturelles ne vont pas toujours, il est vrai, dans le sens de la défense de cette culture créole dont ils se réclament. Nous sommes là au cœur du problème, en son noyau central…
Enfin, les dernières interrogations abordent et explorent, avec circonspection, le contenu et la qualité des rapports qu’entretiennent actuellement les Antillais de la métropole avec leurs compatriotes qui vivent en terre natale. Car, effectivement, on a le sentiment, à entendre les critiques ainsi que les reproches qui fusent de chaque côté, et à voir aussi, la façon dont les choses évoluent, à l’heure actuelle, qu’ils ont de plus en plus de mal à se comprendre. Et, qu’à travers eux, ce sont souvent des identités, des mentalités différentes, ou plus largement deux univers lointains, deux modes ou styles de vie plus ou moins opposés qui s’observent, s’évaluent, se testent, se confrontent, plus qu’ils ne cherchent à trouver, véritablement, un terrain d’expression commun, des lieux et des occasions d’échange et de rencontre.
 
Mais si toutes ces interrogations, au demeurant, fort pertinentes, sont assez simples et évidentes dans leur formulation, il n’en est pas de même, nous le verrons dans les pages qui suivent, des réponses qu’elles supposent ou impliquent, tant les données et les contextes qui sont ici à prendre en compte sont divers et complexes, tant les perceptions et les convictions, des uns et des autres peuvent être divergentes, voire dans certains cas radicalement opposées. En partie, parce que les expériences individuelles restent, dans la majorité des cas, fondamentalement différentes, mais en partie aussi, parce que les individus, en règle générale, analysent et interprètent souvent les faits, les événements, les épreuves auxquels ils ont été confrontés, au cours de leur vie, en fonction de leur tempérament, leur ressenti personnel, leur capacité respective à se défaire de l’emprise corrosive de leur propre subjectivité. Aussi, ce qui est vérité ou certitude pour les uns ne l’est point, ou dans une moindre mesure pour les autres. Ce qui est pour certains, porteur de sens et d’espoir, crée chez les autres le doute ou le scepticisme. Quand quelques-uns sont persuadés qu’ils mènent un combat pour une cause juste, ils trouvent, malgré tout, en face d’eux, bon nombre de détracteurs qui pensent le contraire et défendent des intérêts opposés aux leurs.
 
Et c’est précisément la raison pour laquelle les témoignages des Antillais ont été ici soigneusement recueillis, analysés, décryptés, revus en détail. De sorte que cet ouvrage reflète au mieux leurs ambitions, leurs craintes, leurs espérances, leurs états de bien-être ou de mal-être ; qu’ils ont d’ailleurs exprimé, rappelons-le, de façon claire et nette, et tout aussi massivement, lors de la crise de février 2009. Nul doute que ce puissant mouvement à la fois social, culturel et identitaire intégrait et véhiculait une exigence aiguë d’égalité et de justice sociale ; en ce qui concerne notamment la cherté de la vie insulaire, les disparités salariales, le taux excessivement élevé du chômage, les passe-droits dont bénéficient certains au détriment des autres, par l’intermédiaire des réseaux… Et à ce titre, il a marqué, sans doute à jamais, les esprits et les consciences ; aussi bien en France hexagonale qu’en terre insulaire. Jamais un conflit social, aux Antilles, n’a rencontré, en métropole, un tel écho ni un tel soutien. La preuve en est qu’il a été approuvé, tel que l’ensemble des médias l’ont précisé à l’époque, par 78 % des Français. Mais a-t-il, pour autant, fait avancer les choses ? Rien n’est moins sûr ! Certes, il a amené la France, en raison de son intensité et de son ampleur, à reconsidérer et à reformuler, jusqu’à un certain point, les rapports qu’elle entretient jusqu’à ce jour, avec les populations des collectivités ultramarines. Mais il semble que, pour l’instant, les choses en soient restées là. Car, en dépit des discours éloquents et prometteurs des décideurs politiques nationaux, le plan de modernisation du modèle économique et social, en outre-mer, n’a jamais été à la hauteur des immenses espoirs qu’il a suscités. Aussi, au slogan que scandaient en chœur les Antillais, en février 2009, à savoir « rien ne sera jamais plus comme avant », ils peuvent, désormais, se raviser et lui substituer un autre slogan plus conforme à la réalité, beaucoup plus à l’ordre du jour, à savoir : « rien n’a vraiment changé. »
 
Mais même s’il en est ainsi, c’est-à-dire même si rien n’a vraiment changé, faut-il pour autant, remettre en cause, comme un certain nombre de Martiniquais et de Guadeloupéens ont de plus en plus tendance à le faire aujourd’hui, la légitimité et l’utilité de cette lutte sociale historique contre la « profitasyon » ? À l’évidence, non ! Car tout individu, toute communauté, tout peuple qui se sent opprimé, inégalement traité, doit pouvoir, à un moment ou à un autre, accéder à un certain niveau de conscience réactive, et trouver en lui-même, la force, les ressorts éthiques, l’orgueil ou la fierté nécessaire, pour mener et reco

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