Ma vie d autiste
98 pages
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Ma vie d'autiste , livre ebook

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Description

Traduit de l'américain par Virginie Schaeffer. Diagnostiquée autiste dès l'âge de six mois, Temple Grandin s'est jouée du verdict des experts et a entrepris, des années plus tard, des études supérieures et mené à bien une carrière internationale comme conceptrice d'équipements agro-alimentaires. Si les mots de Temple Grandin nous touchent, c'est parce qu'ils nous montrent l'autisme de l'intérieur, dans ses manifestations les plus intimes ; si son témoignage nous étonne, c'est parce qu'il proclame que cet autre monde mental n'est pas si éloigné du nôtre.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 septembre 1994
Nombre de lectures 3
EAN13 9782738185679
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0600€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

DU MÊME AUTEUR aux éditions Odile Jacob
Penser en images et autres témoignages sur l’autisme, 1997.
L’édition originale en langue anglaise de cet ouvrage est parue aux éditions Arena Press sous le titre : Emergence : Labeled Autistic © Arena Press, 1986
Pour la traduction française : © ÉDITIONS ODILE JACOB, 1994, 1998, JANVIER 2001
15, RUE SOUFFLOT , 75005 PARIS
www.odilejacob.fr
EAN : 978-2-7381-8567-9
Le code de la propriété intellectuelle n'autorisant, aux termes de l'article L. 122-5 et 3 a, d'une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l'usage du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation ou réproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (art. L. 122-4). Cette représentation ou reproduction donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo
À ma famille, avec tout mon amour
Préface

Temple Grandin nous raconte une vie d’autiste surdouée. Elle nous dit qu’elle fut une enfant autiste, et qu’elle a surmonté ses difficultés avec succès. Cette auto-observation, tout à fait exceptionnelle, mérite d’être commentée. Certes, nous savons bien que chaque enfant autiste est un cas particulier mais, au premier abord, de telles affirmations peuvent surprendre. On voit mal comment une autiste dont les troubles concernent très précisément la communication avec les autres pourrait leur exprimer, avec toute la précision et le talent d’un narrateur, ses difficultés, ses sentiments et ses angoisses personnelles. Par ailleurs, si l’on sait que certains enfants autistes peuvent réaliser de grands progrès, on connaît vraiment peu de cas de réussite sociale.
Pourtant, la lecture de ses écrits nous convainc que cet auteur fut bien une enfant autiste et qu’elle présente aujourd’hui encore des particularités qui caractérisent cet état. Bien plus, son auto-observation peut contribuer à la compréhension de certains mécanismes neurophysiologiques sous-jacents à l’autisme. Enfin, son message peut être utile aux autres. Il s’adresse à la fois aux chercheurs pour les encourager à ne pas omettre tous les facteurs qui peuvent être à l’origine de cette affection, et aux familles pour leur dire que l’enfant autiste peut progresser tout au long de sa vie.
 
Temple Grandin fut bien une enfant autiste. Elle présente aujourd’hui des particularités qui caractérisent cet état.
 
Son histoire n’est pas celle d’une petite fille modèle. Elle avait constamment envie d’être seule. Elle fuyait le contact de sa mère. Elle ne témoignait aucun intérêt pour les autres enfants. Elle ne parlait pas encore à trois ans. Elle se complaisait dans des activités solitaires comme s’asseoir toute la journée sur la plage en faisant couler le sable entre ses doigts. Certains jeux étaient inattendus, comme le barbouillage de sa chambre avec ses selles. Elle était sensible à la moindre contrariété et manifestait son opposition par des colères et par des hurlements ; elle était intolérante aux changements de programme comme aux événements imprévus.
L’autisme de l’enfant a été décrit pour la première fois par le pédopsychiatre Léo Kanner, en 1943. Il concerne quatre enfants pour dix mille dans les formes pures et vingt enfants pour dix mille dans les formes associées à d’autres troubles, avec une prédominance chez les garçons. L’enfant présente une incapacité à établir des relations, se replie comme dans une coquille, éprouve une grande difficulté à s’exprimer ; il exécute des gestes bizarres, répétés de façon inlassable ; enfin, il a besoin d’un environnement immuable et se montre très perturbé par le moindre changement. Un psychologue américain, Bernard Rimland, a proposé plus tard de détailler et de regrouper ces signes d’autisme dans une échelle appelée E2, qui a été remplie par la mère de Temple Grandin et que l’on retrouvera à la fin du livre. On y verra que les « scores » réalisés par elle sont élevés. Il en est de même si l’on reporte les signes qu’elle décrit dans ce livre sur une échelle construite par notre équipe (1), « l’évaluation résumée des comportements autistiques ». On y retrouve l’isolement, les troubles de la communication, les bizarreries de comportement et d’autres difficultés sur lesquelles nous reviendrons.
Temple Grandin nous raconte que ses troubles sont apparus très tôt. Dès les premiers mois, sa mère constate qu’elle est une enfant trop calme, trop « sage ». À l’âge de six mois, elle se raidissait quand on la prenait dans les bras ; elle paraissait fascinée par les objets ; elle semblait sourde et se montrait pourtant hypersensible au bruit. Kanner a lui-même noté chez le tout-petit une sorte d’absence de réaction : l’enfant ne tend pas le visage et ne bouge pas les épaules lorsque la maman veut le soulever. Si l’on utilise des films vidéo enregistrés par des parents bien avant que le diagnostic d’autisme ne soit évoqué, on retrouve sur ces films des signes très précoces, qui se manifestent dès la première année (2) : l’enfant ne tend pas les bras à la personne qui le sollicite, il ne répond pas à son gazouillement, il ne cherche pas le contact par le regard, il paraît indifférent au monde sonore, il semble trop calme ou bien se manifeste au contraire par des cris et des colères… L’intérêt du dépistage précoce vient de ce que des conseils donnés très tôt aux parents peuvent prévenir certains troubles. Il s’agit de déceler, de décoder les tentatives, même discrètes, de communication de l’enfant et d’y répondre de façon opportune pour favoriser l’établissement du contact avec autrui.
Plus tard, Temple Grandin nous parle du développement exceptionnel de certaines capacités. Cela ne surprendra pas les personnes qui ont vu le film Rain Man, qui les a initiées aux réalisations d’un cas rarissime d’autisme surdoué. Elles auront observé, chez le héros de Rain Man, une certaine discordance entre le déficit des fonctions de socialisation et d’adaptation à la vie quotidienne et l’hypertrophie de fonctions très spécialisées de la mémoire visuelle et du calcul mental. Chez d’autres enfants ou adultes, c’est le dessin, la sculpture ou plus modestement la réalisation presque instantanée de puzzles qui sont privilégiés. Mais Rain Man n’est que le héros d’un film et ses difficultés, comme ses possibilités, nous sont montrées de façon caricaturale.
Temple Grandin, elle, est une héroïne de la vie. Grâce à ses dons exceptionnels, à un entourage très éclairé et à une volonté de fer, elle a su utiliser au mieux ses capacités de reconstruction visuelle de l’espace, développer ses dispositions pour la recherche et concevoir des plans et des dispositifs nouveaux.
Pourtant, certaines difficultés subsistent. Il ne m’a pas semblé opportun de les répertorier lors de notre récente rencontre à Tours : elle venait visiter l’équipe de notre laboratoire pour des échanges scientifiques. Je ressentais par ailleurs pour elle beaucoup de respect et même d’admiration, un peu le sentiment qu’on éprouve lorsqu’on nous présente une championne qui vient de réaliser le tour du monde à la voile en solitaire. Temple Grandin est d’abord et avant tout une personne très intelligente, émouvante et fascinante, particulièrement à l’aise dans les discussions scientifiques. Il est cependant difficile à un médecin de s’abstraire totalement de son métier et de ne pas remarquer les signes qu’il a appris à rechercher. Chez Temple, quelques indices discrets nous montrent le chemin qu’elle a parcouru pour se retrouver parmi nous : sa démarche un peu raide, comme empruntée, son expression distante, même quand elle aborde un sujet familier, et sa voix parfois un peu monotone. Lorsqu’on la rencontre pour la première fois, on est à la fois frappé par son intelligence, son assurance, mais aussi par une sensation de distance imperceptible qu’elle déplace autour d’elle. Tous ces petits signes, discrets chez Temple, sont retrouvés avec une intensité infiniment plus forte chez les enfants et adultes autistes venant comme patients, en consultation.
Oliver Sacks 1 , qui a examiné Temple Grandin, décrit avec son œil de neurologue et son talent d’écrivain un certain nombre de symptômes qui font partie de ce qu’on considère comme des séquelles de l’autisme. Nous donnons ici quelques extraits de sa très remarquable description.
Au cours d’une conversation téléphonique préliminaire concernant le trajet par la route qu’il devra suivre pour joindre son bureau, il demande à Temple de préciser un détail et constate alors qu’elle répète en entier toutes ses indications, un peu comme une litanie, avec les mêmes mots.
Lorsqu’il arrive, elle le reçoit sans la moindre cérémonie, sans avoir recours à ces conventions préliminaires qui marquent habituellement l’accueil d’un invité, comme : « Vous avez fait bon voyage ? »
Oliver Sacks note également que son maintien et sa conversation donnent parfois l’impression de la récitation, de phrases d’un manuel indiquant « com-ment se comporter dans telle ou telle situation ». Elle-même lui explique qu’elle éprouve une réelle difficulté à saisir les interactions humaines et qu’elle a emmagasiné une vaste bibliothèque d’expériences, lui permettant de prévoir comment les gens se comportent en différentes circonstances. Elle est bien au courant des signaux sociaux, elle a appris comment y répondre mais elle ne peut spontanément participer directement à cette communication « magique ». Elle éprouve la plus grande difficulté à saisir les allusions, l’ironie, le sens d’une plaisanterie. Oliver Sacks insiste sur son aspect figé, sur sa démarche empruntée, dont certains aspects peuvent même évoquer une « ataxie ». La main se tend bien pour inviter à la poignée de main, mais se tient un peu trop haut comme fixée par une

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