Les Nuits pourpres
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Les Nuits pourpres , livre ebook

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Description

Karim Afer ne voit le monde que sous un angle esthétique. Déçu du sort qu’on lui réserve, il préfère voyager et multiplier les aventures sexuelles sans lendemain. Il cherche malgré tout un sens à donner à sa vie, bien qu’il souhaite la mort. Les aventures de Karim vont lui permettre d’atteindre une distance philosophique bien à lui.


Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 12 août 2013
Nombre de lectures 0
EAN13 9782332607805
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0064€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composé par Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-332-60780-5

© Edilivre, 2015
Citation


The mystery of death is greater than the mystery of life.
O.W.
Chapitre I Aux origines
Karim – le Généreux –, tel est mon prénom. Il n’a pas la consonance religieuse de Brahim, nom du patriarche Abraham dans l’Islam. Quant à mon patronyme berbère – Afer – il ne signifie rien d’autre que l’Africain.
Je n’ai jamais été croyant, car je considère que chaque homme doit tracer son propre chemin. Nul besoin d’avoir recours en une Providence aveugle et éloignée de tout. J’ai d’avantage foi en Moi, et je doute fort qu’il existe un dieu lointain, qui se repaît du spectacle, o combien risible, de la médiocrité humaine. Je connais bien d’autres valeurs que celles qu’inculquent la religion ou la superstition : l’Art et le Beau.
En mon charme, je crois d’avantage et avec raison. J’ai 26 ans et je mesure 1m75. J’ai les yeux bleus ainsi que les cheveux bruns. On me dit mignon, mais j’ai cette beauté des personnes éteintes, que l’on continue à admirer après leur mort.
Il est vrai que j’accorde une certaine importance à mon apparence physique. L’élégance me rassure : elle comble le vide intérieur que je peux ressentir. Ainsi, si je ne sacrifie à aucune divinité, j’idéalise Narcisse. Pourtant, loin de moi l’idée d’être vaniteux, ce serait là un crime, que dis-je, de la médiocrité.
J’aime me livrer à des expériences, dont le pékin de banlieue n’a pas entendu parler. Porter des pannes de velours, et des cuissardes, de bordel parisien. Avoir le visage peint, comme celui d’une demi-mondaine de Toulouse-Lautrec. Boire des cocktails de Maiden Blush , qui font rougir les joues : mandarine, bitter, vin rouge, thuyone, et champagne.
Mon but est de paraître aussi mélancolique qu’un dandy, si névrosé qu’un esthète, si livide qu’un ivrogne, je cherche à chavirer, sous le poids des voluptés, comme une courtisane.
Je rêve de devenir une prostituée, comme Theodora, qui a accédé au pouvoir et à la richesse, en devenant l’impératrice de Byzance et l’épouse de Justinien Ier. Peu m’importe que des femmes, contraintes par la force, ou les circonstances économiques de faire commerce de leur corps, soient rejetées, par la société, et ne parviennent pas à changer de position sociale. Je ne crois pas avoir la moindre trace de cette morale, qui infecte les rapports humains.
Je songe aux geishas japonaises, dont le rôle est de divertir un homme ou un groupe d’hommes, par leur conversation, et leur maîtrise des arts traditionnels : danse, chant et musique. Cultivant l’ambiguïté entre l’état de courtisane et celui de prostituée, mon désir est être plus doué, que les autres femmes, plus intelligent, et plus raffiné, plus célèbre et plus courtisé, de façon à servir de confident intime, à un homme puissant.
Je voudrais ressembler à Louise Brooks, qui jouait le rôle d’une jeune fille, que sa rage de vivre menait à la destruction, dans Die Büchse der Pandora , 1929, de G. W. Pabst, et celui d’une prostituée, dans Das Tagebuch einer Verlorenen . J’aurais désiré être l’incarnation de la sensualité, dans le monde de la décadence et de la violence masculine. Mes rêves sont pourpres, de cette couleur du sang et de l’amour.
J’aime prendre à rebours toute convention de façon à n’être que le représentant d’une seule et unique norme : l’artifice. Je hais le naturel : l’Art ne naît que de la fausseté, puisque tous les sentiments humains sont en réalité surjoués. Je n’ai d’autre profession que de cultiver le Beau dans ma personne, et j’ai un goût immodéré, pour ma toilette, et ma coiffure, mais ma « décadence » est bien plutôt lié à un besoin d’extrême originalité, qui inverse toutes les limites du bon goût et de la convention sociale.
Je ne supporte pas la vulgarité, non parce que je me crois supérieur, je ne suis pas un aristocrate, mais parce que je suis un déclassé, désœuvré, dégoûté de tout ce qui m’entoure. Je prends soin de ressembler à un astre sur le déclin, qui reste sublime, alors qu’il sombre, dans la mélancolie. J’ai, d’ailleurs, une prédisposition génétique à la dépression, liée à une sensibilité anormale à un neurotransmetteur, du nom d’acétylcholine.
Je considère ma « décadence », comme une bonne chose, et j’entretiens mon état maladif. Ma névrose se manifeste par des troubles d’anxiété, un état de malaise ou d’appréhension permanent, et une réaction excessive au stress. Les accès de panique, qui la caractérisent, sont des épisodes d’appréhension ou de peur aiguë, accompagnée de symptômes physiques : palpitations, sudation excessive, sentiment d’oppression, et raideur musculaire.
Pour soigner ma neurasthénie, j’oins mes tempes, à base d’une huile essentielle, très amère. à base de grande absinthe, qui contenait une substance toxique, du nom de thuyol, qui provoque, de temps à autre, chez moi, des crises de type épileptique. Je consomme aussi de la liqueur d’absinthe, à laquelle j’ajoute de la menthe poivrée, du fenouil et de l’anis.
Je voudrais ressembler à une Parisienne New Look, aux fines épaules, et à la taille de guêpe. Je porte, comme emblème, une ceinture Dior, marquée du monogramme « CD », et un médaillon, de style Louis XVI. Parfois, je mets des chemises noires Dior, désignées par Hedi Slimane, sur le modèle des vêtements de David Bowie, lors de sa période berlinoise. Pour moi, Dior est le Watteau de la haute-couture, plein de nuances, chic et délicat.
J’ai décidé de présenter ma vie au regard du monde, afin que chacun puisse me juger. J’ai longtemps réfléchi avant de prendre cette décision délicate mais je me soumet de plein gré au lynchage public. Je demeure persuadé que nul n’a le droit de me lancer la première pierre. Je doute avoir fauté plus que le quidam anonyme. Bien au contraire, je suis parvenu à trouver en moi la force de relater les faits tels qu’ils se déroulèrent et d’en assumer la teneur. Je n’éprouve aucune honte à en parler aujourd’hui.
L’Algérie.
C’est par la terre-mère de mes parents qu’il me faut commencer. Le doux pays d’al Djazair, en arabe ou de Tamazgha, en berbère, fut de tout temps la cible d’envahisseurs : Phéniciens, puis Romains, Vandales, Byzantins, Arabes, Ottomans, Français …
Cible privilégiée de bien des convoitises, en proie à des disputes intestines, le Maghreb central peina à se doter d’une identité politique, contrairement à ses voisins tunisien et marocain. Proches de la porte du désert, près des montagnes ocres du massif des Aurès, sont nés mes parents. Tous deux sont issus de la même tribu : les Ahl ben Ali. Ils descendraient dit-on du gendre de Mahomet.
Une légende veut que le quatrième calife fût à l’origine d’al Khantara, un défilé rocheux qu’il aurait séparé en deux grâce à son sabre. Mythologie locale qu’aucune vérité ne soutient. Au-delà de cette brèche pathétique, après les dernières pentes du Tell, où d’étranges sursauts rocheux crèvent la terre en orgues immenses et sublimes, en citadelles grises et inhabitées, se révèle brusquement le désert et ses oasis, où nomadisaient mes ancêtres.
Mon père était plus âgé que ma mère, lors de leur mariage, mais la coutume le justifiait et l’on ne trouva rien à redire. Ma mère avait un caractère farouche et elle aimait à grimper aux arbres. Cela lui valut quelque mésaventure, comme lorsqu’elle aperçut un homme uriner contre un arbre, alors qu’elle était perchée sur un palmier. Mon père, quant à lui, perdit ses parents très tôt, et il apprit jeune la rudesse de la vie. Il en conserva un caractère sévère et austère. Il était capable de colères froides, voire d’une certaine violence.
Mon père combattit pour le FLN et acquit ainsi un prestige guerrier. Il fit partie de la première génération d’immigrés, arrivés en France, bien avant l’indépendance de l’Algérie. Il ne connaissait que des rudiments d’arabe littéraire et ce fut par les voyages qu’il apprit le français. Ma mère devait bientôt le rejoindre.
J’ai du mal à imaginer quelle put être leur vie. La France, depuis 1950, avait favorisé la venue de nombreux ressortissants Nord-Africains et une main d’œuvre sous-payée était disponible pour les secteurs du bâtiment et de l’automobile. Ces hommes déracinés provenaient des anciennes colonies.
Etrangers face à un peuple hostile, une vie dans des baraques insalubres, en bois et en tôle, près de Nanterre, des descentes de polices régulières, la peur des rats, des incendies fréquents… Un W.C unique, des rues étroites, sales et boueuses, pleines de déchets, décharge à côté. Les « maisons » étaient formées d’une seule pièce insalubre et les fenêtres fermées avec des ficelles.
Le racisme se présentait déjà, démon sournois qui se pare du masque de l’hypocrisie. En avril 1966, dans l’enquête de la revue ESPRIT, l’Algérien était considéré comme « cruel, vicieux et malpropre ». De tels propos induisaient un comportement de rejet d’une grande partie des populations. Cela endurcit mes parents, les aigrit et fit naître chez eux un sentiment étrange de soumission et de haine sourde.
Je fus le dernier né d’une nombreuse fratrie, et loin d’être désiré. Ma mère prenait, en effet, la pilule mais celle-ci se révéla défaillante. Ce fut la cause de ma naissance. Je ne reçus jamais l’amour que j’étais en mesure d’attendre de ma mère. Peut-être cachait-elle ses sentiments, mais je dus en souffrir avant de comprendre combien il était inutile d’attendre quelque marque d’affection de la part de ma génitrice. J’ignore quel respect je devrais avoir pour une femme qui profita d’un quart d’heure de plaisir pour me concevoir.
Chapitre II L’Algérie
Lorsque j’eus vingt ans, je décidais de me tourner vers la terre de mes origines, la France m’ayant déçu par sa xénophob

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