Les Communards
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Description

ENTRE MARS ET MAI 1871, Paris connut une insurrection révolutionnaire qui devait rapidement aboutir à la mise en place d’un conseil populaire, la Commune. Moins de deux mois plus tard, les insurgés capitulaient devant les troupes régulières et le gouvernement de Thiers, replié à Versailles. La répression fut sanglante.


La Commune est un moment singulier dans l’histoire de France et demeure encore aujourd’hui l’enjeu d’une bataille mémorielle.


Dans ce texte d’une grande clarté, richement illustré, Jean-Pierre Azéma et Michel Winock évoquent l’avènement puis la chute de la Commune, mais également ses représentations ultérieures et ses conséquences à long terme


Jean-Pierre Azéma est historien, spécialiste de la Seconde Guerre mondiale, et plus particulièrement de l'histoire du régime de l'État français et de la Résistance.


Michel Winock est historien, spécialiste de l’histoire de la République française ainsi que des mouvements intellectuels et politiques.


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Informations

Publié par
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EAN13 9782362800719
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0075€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

E NTRE MARS ET MAI 1871 , Paris connut une insurrection révolutionnaire qui devait rapidement aboutir à la mise en place d’un conseil populaire, la Commune. Moins de deux mois plus tard, les insurgés capitulaient devant les troupes régulières et le gouvernement de Thiers, replié à Versailles. La répression fut sanglante.
La Commune est un moment singulier dans l’histoire de France et demeure encore aujourd’hui l’enjeu d’une bataille mémorielle.
Dans ce texte d’une grande clarté, richement illustré, Jean-Pierre Azéma et Michel Winock évoquent l’avènement puis la chute de la Commune, mais également ses représentations ultérieures et ses conséquences à long terme.


 
 
COLLECTION OCTETS DIRIGÉE PAR JOËL FAUCILHON
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© 2015 Éditions Thierry Marchaisse ISBN (ePub) : 978-2-36280-071-9


 
Jean-Pierre AZÉMA Michel WINOCK
L es C ommunards
Octets • THIERRY MARCHAISSE


LE TAUREAU PAR LES CORNES


A U MOIS DE MARS 1871, LA FRANCE ÉTAIT EN QUÊTE d’un régime politique. Le 4 septembre 1870, en pleine guerre, la République avait été proclamée, devant une foule enthousiaste, du balcon de l’Hôtel de Ville  ; mais, passé le siège de Paris et passé l’armistice, l’Assemblée nationale, élue en février 1871, remettait en question, par sa majorité de députés monarchistes, un régime républicain qui n’avait d’autre fondement que les suffrages de la rue parisienne.
La France venait de perdre la guerre, et une confusion extrême s’était établie depuis la déshonorante capitulation du mois de janvier. À trois jours du printemps, la confusion tourna en insurrection. Sur une initiative du gouvernement Thiers, décidé à la mater, la ville de Paris en quelques heures passa de la résistance à la dissidence.
Le matin du 18 mars 1871, Montmartre ne prit pas le temps de s’étirer dans son lit. Les femmes, tôt levées, découvrirent les premières la troupe qui était en train de faire main basse sur les canons du peuple. Monsieur Thiers était venu saisir les canons de la garde nationale, pour l’achat desquels, pendant le Siège, le peuple de Paris s’était cotisé.
Lorsque, le 26 février, le bruit courut que les Prussiens allaient entrer dans Paris, on les avait entreposés en lieux sûrs : place des Vosges, aux Buttes-Chaumont, à Belleville, et le plus grand nombre au sommet de la butte Montmartre. Et ces canons que l’ennemi n’avait pas su prendre, voici que Thiers s’avisait de les confisquer à la ville meurtrie.
La nouvelle brûle le pavé, tout le quartier est vite au fait des événements de la nuit : les soldats, avant l’aube, se sont emparés des pièces d’artillerie ; il n’y a pas eu de combat ; seul, un garde national de faction a été tué. En ce moment, la troupe achève sa besogne, attelle des canons à des chevaux qui arrivent, pour les traîner hors de Paris. La foule grossit. Dans les quartiers où sont entreposés les autres canons, on s’attroupe aussi, on s’étonne, on s’émeut, on menace.
Des affiches, de blancheur officielle et toutes fraîches collées, font l’exégèse des opérations :
« … Les canons dérobés à l’État vont être rétablis dans les arsenaux, et, pour exécuter cet acte urgent de justice et de raison, le gouvernement compte sur votre concours. Que les bons citoyens se séparent des mauvais ; qu’ils aident à la force publique au lieu de lui résister… »
C’est le style manichéen de Monsieur Thiers qui pèse dans la balance nationale les âmes des citoyens. D’un côté, les bons, entendez : « la grande et honnête opinion conservatrice », les propriétaires paisibles et circonspects ; de l’autre, les mauvais , comprenez : les claque-faim des faubourgs et les locataires insolvables. Depuis la capitulation, les bougres s’agitent : il faut les faire plier, et d’abord reprendre les canons dont ils disposent.
Monsieur Thiers, au soir d’une vie féconde en honneurs, travaillait à parvenir au suprême : être le premier dans l’État. Pour le moment, chef du Pouvoir exécutif, il avait deux objectifs immédiats : «  Conclure la paix, et soumettre Paris ». Conclure la paix, en dépit de tous ces Parisiens patriotes, ce sera jeu d’enfant, grâce à la sage Assemblée de notables pacifiques que le suffrage universel a élue le 8 février dernier. Mais soumettre Paris était autrement périlleux. Il fallait pourtant couper court aux rodomontades de cette ville enragée. « Que faire tant qu’il y a des canons ! », disaient en effet le commerce, la banque, les affaires, les honnêtes gens. Mais cette maudite garde nationale, en partie insoumise, exutoire de tous les bas-fonds de la Ville, n’obéissait plus à son chef, le général d’Aurelle de Paladines ; elle suivait les consignes d’un commandement occulte, illégal, qui s’affublait du nom de Comité central. Puisque la garde nationale refusait de déposer les armes, c’est de nuit, subrepticement, quand tout le monde dort, qu’on va attaquer. Attaquer , oui, les militaires ne s’embarrassent pas d’euphémismes : « Il fut donc décidé qu’on attaquerait », déclara plus tard le général Vinoy. Il s’agissait bien d’une guerre en vérité, dont l’initiative revenait à Thiers, la guerre que devait mener l’armée de l’ordre contre « l’armée de la dérriagogie », cette dernière expression étant du général Trochu, le superbe défenseur de Paris pendant le Siège.
Voilà donc les soldats noctambules, dépêchés par Monsieur Thiers, pour désarmer Paris. L’expédition, au début, semble réussir aisément : partout les canons sont atteints sans embarras. Mais, à la sortie de la nuit, quand Paris s’éveille, tout se gâte, car les pièces prises n’ont pu être évacuées. Pourquoi ce retard stupide, qui va se révéler irréparable ? Dans l’enquête parlementaire sur les événements du 18 mars, ce fut une réponse quasi unanime, que le rapporteur résumait ainsi : « Il aurait fallu que les attelages de l’artillerie arrivassent en même temps que la troupe. Malheureusement, il n’en fut rien. » Les chevaux, dirent les témoins, sont arrivés avec un retard de plusieurs heures. Quoi qu’il en fût, il s’agissait d’une opération longue et délicate, qui exigeait d’être minutieusement préparée. Or, d’évidence, ou elle a été organisée à la légère, ou elle a été conçue, comme certains l’ont affirmé, comme une provocation : à huit heures, les soldats sont toujours là, et la population est avertie.
Les tambours battent le rappel : d’un côté – à Belleville, à Montmartre – ceux des fédérés (c’est le nom des gardes nationaux appartenant aux bataillons groupés au sein de la Fédération des bataillons de la garde nationale, dont la tête est le Comité central) ; d’un autre côté, dans les bons quartiers – l’ouest de Paris surtout –, ce sont les tambours du général de Paladines, en quête de défenseurs de l’ordre. Mais le tambour ne résonne pas également ici et là. Du côté de Passy, l’enthousiasme chôme : « La générale fut battue pendant plusieurs heures, dit Thiers. Il nous arriva peut-être cinq ou six cents hommes. » En revanche, du côté de Ménilmontant, on accourt en quelques minutes, la baïonnette au canon.
Un mouvement prend forme d’abord à l’est de la Butte, dans le quartier Clignancourt, où des gardes nationaux se sont rassemblés, ainsi que des femmes, nombreuses et décidées, et toute une ribambelle d’enfants qui font les hommes. On monte vers le sommet de la Butte. Premier barrage de soldats. Ils ne résistent que mollement : les femmes leur donnent à boire ; on discute ; vite, ils se rallient au mouvement. La foule ainsi renforcée continue à monter. Mais voici d’autres soldats, plus nombreux, qui ont l’air mieux commandés. La même scène se reproduit : en avant-garde, les femmes vont offrir des vivres aux fantassins et du vin, et des paroles de fraternité : « Vous n’allez pas tirer sur vos frères ! » De proche en proche, la troupe est cernée, enveloppée, submergée bientôt. Elle n’est pas très nombreuse, en effet : il a fallu répartir les hommes au gré de. la dispersion des canons. Le général Lecomte, qui commande la brigade, craint d’être enfermé. Il fait alors des sommations sans résultat. Puis, percevant que ses hommes et lui-même vont être complètement engloutis par cette tourbe, il ordonne le feu. Les soldats n’obéissent pas. Le général se fâche, menace, réitère son ordre. Peine perdue ! C’est tout juste si des sergents de ville, qui étaient là, ont tiré quelques coups de fusil. Mais, dans la troupe, un sergent a pris une autre initiative : « Camarades, arme à terre ! », s’écrie-t-il. « Vive la Ligne ! », répondent les pékins. Et voici qu’on met les crosses en l’air, et qu’on s’embrasse. Pendant cette effusion, des soldats sont tombés sur les épaules du chef, qui avait peu avant puni des hommes rétifs à ses ordres ; alors, autant pour le protéger que pour l’emprisonner, des gardes nationaux l’emmènent avec quelques-uns de ses officiers, au Château Rouge, bal public devenu quartier général des bataillons de Montmartre.
Sur l’autre versant de la Butte, rue Lepic, la troupe s’est ralliée, et la foule a ramené les canons qu’on tentait de faire descendre. A Belleville, aux Buttes-Chaumont, partout, les soldats fraternisent avec la foule, l’armée s’étiole dans la cohue. D’un cœur léger, les troupiers acceptent le pain et le vin qu’on leur tend : ils n’ont presque pas dormi et ils n’ont rien mangé depuis la veille. Les officiers qui esquissent un mouvement de résistance sont hués par leurs hommes, et quelques-uns sont enfermés dans les arrière-boutiques des environs. Après le seul affrontement sérieux – qui eut lieu à Pigalle, à 11 heures –, l’attaque est repoussée, les bataillons fédérés tiennent le terrain, les rues se dépavent.

L’affrontement de la place Pigalle. Reproduit dans le livre My Adventures in the Commune , E.

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