Leçons de parole
245 pages
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Leçons de parole , livre ebook

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Description

Comment trouvons-nous nos mots ? Comment produisons-nous des messages verbaux ? Comment déchiffrons-nous ce que nous entendons ? Bref : comment parlons-nous et comprenons-nous ce qu’on nous dit ? Parler, écouter et comprendre : cela paraît simple. Et pourtant, nous ne nous interrogeons que rarement sur les mécanismes mentaux et les procédures qui nous permettent d’articuler jusqu’à deux cents mots à la minute et de traiter des informations verbales. La psycholinguistique traite ces questions. Juan Segui et Ludovic Ferrand nous révèlent toutes ces opérations complexes qui expliquent cet acte si extraordinaire et si courant : parler. Juan Segui est directeur de recherche au CNRS. Il dirige le laboratoire de psychologie expérimentale commun au CNRS et à l’université René-Descartes (Paris-V). Il est directeur de la revue L’Année psychologique.  Ludovic Ferrand est chargé de recherche au CNRS. Il travaille au laboratoire de psychologie expérimentale commun au CNRS et à l’université René Descartes (Paris-V). Il enseigne également la psychologie expérimentale à l’École de psychologues praticiens à Paris.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 janvier 2000
Nombre de lectures 0
EAN13 9782738142375
Langue Français
Poids de l'ouvrage 4 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0750€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

© O DILE J ACOB, JANVIER  2000 15, RUE S OUFFLOT , 75005 P ARIS
www.odilejacob.fr
ISBN : 978-2-7381-4237-5
Le code de la propriété intellectuelle n'autorisant, aux termes de l'article L. 122-5 et 3 a, d'une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l'usage du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation ou réproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (art. L. 122-4). Cette représentation ou reproduction donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo .
INTRODUCTION
Le langage et la structure de l’esprit

La plupart des objets auxquels nous sommes confrontés dans la vie de tous les jours possèdent une structure. Une voiture comprend une série de composantes distinctes dont chacune assure une fonction spécifique : les roues, le volant, les portières, etc. Certaines de ces composantes, par exemple le moteur, sont plus complexes que d’autres et doivent être analysées en sous-composantes afin de mieux comprendre comment et pourquoi sa fonction peut être assurée. Il en est de même en ce qui concerne les êtres vivants. Nous avons compris le fonctionnement de notre organisme quand nous avons conçu celui-ci comme étant constitué d’un ensemble de systèmes (le système respiratoire, le système digestif, le système de locomotion…) dont le fonctionnement est assuré par des sous-systèmes ou organes dont chacun assume un aspect fondamental de ce fonctionnement (le cœur pour le système circulatoire, les poumons pour le système respiratoire, etc.). Qu’en est-il alors de notre esprit ?
En premier lieu, nous pouvons admettre que notre vie mentale est liée principalement au fonctionnement du système nerveux central et fondamentalement à celui de l’organe le plus complexe dont nous ayons connaissance : le cerveau. Mais le cerveau lui-même est à son tour analysable en sous-composantes dont les neurosciences ont mis à jour l’extrême spécificité. Malgré leur apparente symétrie, l’hémisphère gauche et l’hémisphère droit n’assurent pas les mêmes fonctions, et à l’intérieur de chaque hémisphère les différentes parties se distribuent également des fonctions distinctes. Si cela est bien le cas comment pouvons-nous penser que notre esprit constitue un tout homogène ? La réponse à cette question provient sans doute du fait que nous avons l’intuition de fonctionner en fait comme un tout. Je n’ai pas l’impression que la reconnaissance d’un visage familier soit assurée par un système différent de celui que j’utilise pour reconnaître d’autres objets de la nature tels que les arbres ou encore les mots écrits… Cependant, les données des neurosciences et de neuropsychologie nous ont montré que nos impressions sur ce point sont trompeuses. Suite à une lésion du cerveau nous pouvons perdre la capacité à reconnaître les visages familiers tout en conservant intacte la capacité à reconnaître les autres objets et les mots. De même, nous pouvons perdre la capacité à reconnaître les mots tout en conservant celles de reconnaissance des visages et des autres objets. Un travail récent a mis en évidence, chez un agriculteur anglais, une perte de la capacité à reconnaître les visages familiers de ses congénères, mais cet homme a conservé intacte l’aptitude qui lui permet de reconnaître chacune des vaches de sa ferme ! Cela suggère que ces différentes capacités ne sont pas sous-tendues par les mêmes structures de traitement, même si nous n’avons aucune possibilité de prendre connaissance de ce fait par la simple introspection. Les choses vont de même en ce qui concerne nombre d’autres capacités perceptives ou cognitives. Un cas typique est illustré par la perte sélective chez certains patients de la capacité à nommer et à reconnaître les objets appartenant à une catégorie conceptuelle particulière telle que les animaux ou les fruits.
Le cerveau semble ainsi avoir une structure, et l’esprit aussi. Mais quelle est cette structure ?
La psychologie cognitive a cherché à répondre à cette question en avançant l’hypothèse de la modularité de l’esprit. Celle-ci consiste à supposer que notre fonctionnement cognitif n’est pas assuré par un système unique mais par un ensemble de sous-systèmes ou modules spécialisés pour un type donné de traitement lié essentiellement à la nature du matériel à traiter (visages, objets, mots, etc.). Dans le domaine de la cognition humaine la capacité linguistique, c’est-à-dire celle qui nous permet de parler et de comprendre, a été envisagée comme constituant l’un de ces modules. Autrement dit, on va considérer que le traitement des informations linguistiques engage des mécanismes distincts de ceux mis en œuvre pour le traitement d’autres sortes d’informations.
La notion de « modularité de l’esprit » a été introduite par Fodor (1983) en tant que cadre conceptuel susceptible de rationaliser et de guider la recherche en psychologie cognitive. Selon Fodor, les modules sont des systèmes de traitement spécialisés responsables de certaines fonctions cognitives dont le langage.
Afin de caractériser les modules, Fodor a proposé d’attribuer à ceux-ci un ensemble de propriétés dont celles d’être spécifiques à un domaine, rapides, utilisant pour effectuer leurs traitements une base d’informations restreinte, spécifiés de manière innée, ayant une structure neurale propre, etc.
Comme le note Coltheart (1999), les propositions de Fodor ne visent pas à fournir les critères nécessaires et suffisants pour considérer qu’un système de traitement est ou n’est pas de nature modulaire. Il s’agit plus précisément d’avancer des critères de diagnostic permettant d’envisager un système donné comme étant plus ou moins modulaire ou constituant un « candidat » à la modularité.
En accord avec la position défendue récemment par M. Coltheart, nous considérerons dans cet ouvrage que la propriété essentielle pour envisager un système comme étant modulaire est celle de la « spécificité du domaine » en entendant par là le fait que le système en question répond exclusivement à des stimuli d’une classe particulière. Par exemple, du fait que la reconnaissance de visages semble engager des procédures spécifiques de reconnaissance non sollicitées par la présentation d’autres types de stimuli visuels, on va avancer l’hypothèse que cette capacité est sous-tendue par un « module » particulier, celui de la reconnaissance de visages. Cela signifie que même si le système visuel « général » est sans aucun doute impliqué lors des premières étapes d’analyse du visage, le traitement de ce type de stimulus engage à un niveau plus tardif de traitement des procédures et des structures qui lui sont propres.
Du point de vue de la spécificité des informations auxquelles un système modulaire doit répondre, envisager le langage comme un module conduit à admettre que les stimuli linguistiques possèdent des propriétés telles qu’ils justifient la nécessité d’un système de traitement qui leur soit propre. Dans quelle mesure cette hypothèse de la spécificité du langage est-elle plausible ?
Les recherches en linguistique conduites depuis une quarantaine d’années dans le cadre des travaux initiés par Noam Chomsky en vue de formuler une caractérisation précise des différents niveaux d’organisation du langage (phonologique, morphologique, syntaxique, sémantique) ont mis précisément en évidence leur très grande spécificité. Ainsi, la description de la structure syntaxique interne d’une phrase ne peut se faire que dans le cadre d’une théorie particulière de la composante syntaxique de la grammaire.
À cette spécificité d’organisation linguistique semble répondre celle des systèmes psychologiques impliqués dans le traitement du langage. Par exemple, afin d’être en mesure de rendre compte de la perception des sons de parole, il a été nécessaire de faire appel à un système spécifique de traitement qui relie étroitement les aspects moteurs et perceptifs de la parole. De manière analogue à ce qui a été proposé pour la reconnaissance des visages, on formule l’hypothèse que la perception des sons de parole s’effectue grâce à la mise en œuvre des procédures d’analyse distinctes de celles impliquées pour le traitement des autres sortes de stimuli sonores tels que les bruits de la nature ou les sons musicaux.
Supposer que le langage constitue un module ne signifie pas que celui-ci est non décomposable en sous-modules particuliers. Comme nous le verrons par la suite tout permet de penser au contraire que le module « langage » est un système d’une très grande complexité susceptible d’être analysé en sous-composantes particulières. L’essentiel de cet ouvrage consistera précisément à caractériser certaines de ces sous-composantes ; celles impliquées dans la perception et la production du langage parlé.
Arrivé à ce point il est nécessaire d’éviter un malentendu fréquent. Considérer que le langage est un module engageant des systèmes cognitifs et neuronaux spécifiques pour son traitement ne conduit nullement à nier sa dimension sociale ou encore à le détacher d’autres sortes de capacités cognitives auxquelles il est nécessairement lié. Du point de vue qui nous intéresse, ce qui justifie une approche modulariste du langage est lié encore une fois à la très grande spécificité des propriétés qui le caractérisent. Comme nous le montrerons tout au long de cet ouvrage, nous ne pouvons pas rendre compte de la perception et de la production du langage sans tenir compte de son organisation aux différents niveaux phonologique, morphologique, syntaxique, sémantique. Il est donc nécessaire d’associer à chaque sous-module sa propre « base de données ». Cette base de données réfère aux différentes sortes de connaissances qu’un sujet possède des propriétés de sa lang

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