Le Sexe, l'Homme et l'Évolution , livre ebook

Odile Jacob - Philippe Brenot , Pascal Picq

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127 pages

Français

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Extrait

Description

Si un « bon sauvage » observait nos sociétés, il serait fort étonné de notre obsession affichée pour le sexe. Comme si les femmes et les hommes découvraient enfin la plénitude du sexe ! De la sexologie à la paléoanthropologie, de multiples disciplines nous font aussi mieux comprendre la complexité de nos désirs et de nos comportements. Cet ouvrage propose une approche ordonnée de la sexualité humaine depuis ses origines lointaines jusqu’à ses problématiques actuelles. Sur tous les sujets, il présente les connaissances scientifiques les plus récentes, mais aussi récuse les idées reçues ou les fausses explications. L’orientation, l’attachement, les sentiments, l’amour, la fidélité, la puberté, les apprentissages, la sexualité adulte épanouie, les nouvelles pratiques, les perversions, la pornographie : tous les thèmes clés qui font notre vie érotique. En fil conducteur, une question centrale : qu’est-ce qui est vraiment humain ? Et qu’en était-il de la sexualité de nos lointains ancêtres ?Auteur à succès d’Au commencement était l’homme et de Lucy et l’obscurantisme, Pascal Picq est paléoanthropologue au Collège de France et spécialiste des origines et de l’évolution des grands singes, notamment de leurs comportements. Auteur du Sexe et l’Amour et d’Inventer le couple, Philippe Brenot est médecin psychiatre et thérapeute de couple, directeur d’enseignement en sexologie à l’université Paris-V et président de l’Observatoire international du couple.

Sujets

Sexualité

sexualité

Sexualité

Human Sexuality

Sociologie, société et politique

Psychology

Informations

Publié par	Odile Jacob
Date de parution	04 juin 2009
Nombre de lectures	5
EAN13	9782738195661
Langue	Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

© ODILE JACOB, JUIN 2009
15, RUE SOUFFLOT, 75005 PARIS
www.odilejacob.fr
EAN 978-2-7381-9566-1
Le code de la propriété intellectuelle n'autorisant, aux termes de l'article L. 122-5 et 3 a, d'une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l'usage du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation ou réproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (art. L. 122-4). Cette représentation ou reproduction donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo
Introduction
Le sexe, l’homme et l’évolution

Si, comme au XVIII e siècle, un bon sauvage venait observer nos sociétés occidentales et leurs mœurs, il serait très étonné de cette obsession affichée pour le sexe, qu’elle soit du domaine du désir ou de la censure. Les médias associent volontiers dans un gentil désordre les livres de Michel Houellebecq et de Catherine Millet, le sexe des bonobos et les fresques de Pompéi, l’érotisme hindou et le fantasme des vahinés. À en croire la couverture des magazines, hommes et femmes découvrent enfin la plénitude du sexe après des siècles d’obscurantisme et, pour conforter cette « évolution », ils font référence à d’autres cultures, à d’autres sociétés, humaines ou animales, dans lesquelles se trouveraient les ressorts de leur intimité. La réalité est qu’aujourd’hui où il n’est plus tabou, le sexe fascine et rend confus, ce qui est aussi le cas d’une grande part des approches scientifiques et culturelles qui méconnaissent l’évolution de la sexualité humaine.
Le sexe a une histoire qui plonge ses racines au plus loin de notre origine. Nous, humains, sommes des vertébrés, mammifères, c’est-à-dire munis de vertèbres et de mamelles pour allaiter nos progénitures, et – à la différence de tous les autres mammifères – nous sommes dépourvus de queue (« anoures »). Mais cette définition, si naturaliste soit-elle, ne nous différencie guère de nos grands cousins primates que sont les chimpanzés, les gorilles et les orangs-outans – tous trois, comme nous, vertébrés, mammifères et anoures. Si certaines particularités, cérébrales et psychiques, nous sont uniques, nous nous distinguons également au plan de la sexualité – considérablement sur certains points, très peu sur d’autres. Le sexe fait donc la différence, car c’est l’un des moteurs de l’évolution.
« Si une évolution est devenue possible, nous dit François Jacob dans La Logique du vivant , c’est que les systèmes génétiques ont eux-mêmes évolué » et que « les deux inventions les plus importantes sont le sexe et la mort ». Nous savons ce que l’évolution doit à la sexualité : la grande diversité des formes du vivant qui crée des individus différents à chaque génération et des espèces successives qui croissent en complexité. Nous avons voulu savoir ce que la sexualité humaine devait à l’évolution.
Pour cela, nous proposons une approche ordonnée et systémique de la sexualité depuis ses origines jusqu’à ses problématiques actuelles. Ce livre n’est ni un traité, ni une encyclopédie du sexe ; il a la seule prétention d’éclairer la question de l’origine et de l’évolution de la sexualité humaine. L’association de nos compétences scientifiques et culturelles complémentaires, avec un socle commun fondé sur l’anthropologie, favorise cette mise au point des connaissances actuelles. Si notre approche est parfois polémique, elle sera toujours critique des lectures habituelles de la sexualité, trop souvent idéologiques ou mono-explicatives.
Le Sexe, l’Homme et l’Évolution développe deux interrogations fondamentales : existe-t-il une nature du sexe ? Qu’en est-il de l’évolution culturelle de la sexualité humaine ?
La réunion de nos compétences se veut aussi un hommage aux grands fondateurs de nos approches anthropologiques respectives, Charles Darwin, qui invente la sélection sexuelle dans son livre de 1871 consacré à l’homme et à son évolution, et Sigmund Freud, lecteur attentif du précédent, et qui fait du sexe et de la sexualité une question scientifique. En d’autres termes, le sexe et la sexualité comme facteurs constitutifs de la phylogenèse et de l’ontogenèse de l’homme, à la fois en tant qu’espèce et individu. Hélas, le rendez-vous entre les sciences de la nature et de la culture a été manqué. Il persiste, notamment en France, une franche aversion entre, d’un côté, l’évolution et la biologie et, de l’autre, les sciences humaines et de la culture. Il est grand temps de revenir au Darwin anthropologue et au Freud naturaliste. Ce livre se fonde sur cette rencontre trop longtemps oubliée.
Nous ne pouvons bien comprendre ce qu’il en est de la nature du sexe qu’en découvrant l’intimité de nos proches parents, leurs modes de vie et leurs stratégies de reproduction, la proximité et les différences de nos comportements respectifs. La paléoanthropologie fait alors des hypothèses sur la sexualité du dernier ancêtre commun avec les primates, sur celle des australopithèques et des premiers hommes. Nulle certitude, mais des idées fortes issues de notre meilleure connaissance de l’évolution biologique et culturelle de la lignée humaine.
La culture du sexe est une tout autre évolution qui soumet l’intimité des humains au filtre de la culture pour, tout d’abord, la réguler, la contrôler, l’institutionnaliser – ce que toute société a fait à l’origine –, puis la libérer des contraintes et des interdits traditionnels – ce que l’Occident expérimente depuis quelques décennies. Il s’agit bien sûr d’une régulation des pulsions mais le sexe des humains n’est pas uniquement physique et la libération actuelle est certainement une étape majeure de l’évolution humaine. « L’expérience de l’amour physique dépasse infiniment le corps », souligne Julien Green dans son Journal . Si la sexualité est un puissant moteur de l’évolution, peut-être le plus influent d’après Charles Darwin, elle est aussi au fondement du lien social et l’ avenir du sexe conditionne celui de l’humanité.
Première partie
La nature du sexe

« Après toi, l’ouistiti et le singe gorille,
le sage hamadryas et le galant babouin,
le subtil sapajou et le puissant mandrill,
jouent déjà le prélude à l’histouar des humains. »
Raymond Q UENEAU ,
Petite cosmogonie portative
Chapitre 1
La sexualité des animaux

Sexe et sexualité
Le sexe et la sexualité sont deux choses trop souvent confondues. Le sexe a pour fonction de faire se rencontrer les patrimoines génétiques – les gènes donc – de deux organismes appartenant à la même espèce, avec la formation d’un individu ou d’individus qui, à la fois, ressemblent et diffèrent de leurs géniteurs. On retrouve la définition de l’espèce biologique qui se reconnaît par l’ensemble des individus susceptibles de se reproduire entre eux, l’interfécondité. Quant à la sexualité , c’est l’ensemble des mécanismes et des comportements qui favorisent ou non la reproduction entre les individus de la même espèce, mais aussi la séparation entre les espèces. On touche ici à l’une des questions les plus complexes de la biologie évolutionniste.
On a coutume de dire que la sexualité sert à la reproduction. Il n’y a pas de terme plus mal choisi. La reproduction, au sens le plus strict de ce terme, consiste à reproduire du même, des photocopies. C’est le clonage. Or la reproduction sexuée a pour fonction ou cause ultime de produire de la différence. Si on parle de « cause ultime », il ne s’agit aucunement d’évoquer une cause finale ou toute sorte d’invention de la vie née d’une nécessité. Le sexe et la sexualité auraient très bien pu ne jamais apparaître, comme il a émergé différents types de sexes et de sexualités au cours de l’histoire de la vie.
Quelle que soit la définition de la vie retenue par les biologistes, on retrouve deux fonctions, celle de duplication ou reproduction, et celle d’évolution. Même au niveau le plus élémentaire, si de grosses molécules se dupliquent, elles doivent nécessairement capter les constituants moléculaires inorganiques les plus simples dans leur environnement. Or il arrive un moment où ces ressources se restreignent. Tout pourrait s’arrêter là si toutes les molécules étaient rigoureusement identiques. Seulement des erreurs de duplication interviennent, ce qui donne des molécules différentes. Ces dernières se retrouvent alors en concurrence pour capter les constituants nécessaires à leur duplication, ce qui provoque de la compétition, de la sélection et donc de l’évolution. La sélection naturelle n’est pas la préservation du plus apte, comme on le lit et l’entend trop souvent, mais le succès reproducteur différentiel des individus, ce qui, aux commencements de la vie, se rapporte au succès différentiel de certaines molécules organiques par rapport aux autres.
Le sexe, dans sa fonction la plus simple et la plus moléculaire, consiste à capter des chapelets de molécules et à les incorporer dans le patrimoine génétique de l’entité reproductrice. Seulement, à ce petit jeu, des entités vivantes, comme les virus, en profitent pour s’installer et détourner la fonction de reproduction de l’organisme hôte à leur profit. Une des origines possibles du sexe aurait justement été d’éviter ce genre de parasitisme. Car, à la base, le sexe se ramène à du parasitisme. Le rôle de la sexualité est de contrôler ce parasitisme.

Sexe ou pas sexe ?
Des chercheurs ont récemment mis en évidence des supervirus d’une taille impressionnante pour ce type d’être vivant. Comme tout bon virus, ils se dupliquent, se reproduisent au vrai sens du terme, et très vite. Cependant, il leur arrive d’être parasités par d’autres virus et, face à cette menace, ils changent de mode de reproduction, optant pour une sorte de sexualité. Que la sexualité ait cette fonction, voilà qui est