La Psychanalyse
426 pages
Français

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Description

Que peut-on dire de la psychanalyse, après en avoir fait sa principale activité pendant plus de soixante ans ? Le but de ce livre est de répondre à cette question.


Mémoire vivante du champ freudien, à cheval sur plusieurs langues et plusieurs cultures, Moustapha Safouan a commencé son analyse alors que Freud était mort quelques années auparavant et Lacan encore presque un inconnu.


Il présente ici les éléments fondamentaux de la psychanalyse, et l’éclaircit en suivant les trois fils de ses avancées théoriques successives, de sa fonction thérapeutique singulière et de son histoire institutionnelle mouvementée.Une référence pour les spécialistes, qui servira tout aussi bien d’introduction pour les profanes ou les étudiants.


« Il faut être profond dans l’art ou dans la science, pour en bien posséder les éléments. Les ouvrages classiques ne peuvent être bien faits, que par ceux qui ont blanchi sous le harnais. C’est le milieu et la fin qui éclaircissent les ténèbres du commencement. »
Diderot, Le neveu de Rameau


Moustapha Safouan est né en 1921, à Alexandrie. Analyste dès 1949, il a été parmi les premiers à suivre l’enseignement de Lacan. Ses nombreux ouvrages sont largement traduits et ses propres traductions de Freud, La Boétie et Shakespeare font référence dans le monde arabe.

Sujets

Informations

Publié par
Nombre de lectures 2
EAN13 9782362800436
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0060€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

MOUSTAPHA SAFOUAN
LA PSYCHANALYSE
SCIENCE, THÉRAPIE – ET CAUSE
 




 
© 2013 Éditions Thierry Marchaisse
Diffusion-Distribution : Harmonia Mundi
 
Conception visuelle : Denis Couchaux Mise en page intérieure : Anne Fragonard-Le Guen
 
Ouvrage publié avec le concours de l’association Espace Analytique
 
Éditions Thierry Marchaisse 221 rue Diderot, 94300 Vincennes
http ://www.editions-marchaisse.fr
Diffusion-Distribution : Harmonia Mundi
 
ISBN (ePub) : 978-2-36280-040-5 ISBN (papier) : 978-2-36280-043-6
 



 
à P. P.


INTRODUCTION
Que peut-on dire de la psychanalyse, après en avoir fait sa principale activité pendant plus de soixante ans ? Le but de ce livre est de répondre à cette question.
 
La première partie propose un regard rétrospectif sur le mouvement freudien, qui reprend à nouveaux frais l’histoire singulière des débuts de la psychanalyse. Le fait est qu’elle est apparue sur la scène du monde comme un mouvement, une cause à défendre. Ses premiers partisans, qui se sont ralliés à Freud à partir de 1902, étaient des marginaux, qui voyaient sa découverte de l’inconscient comme le moyen d’une libération de l’individu, et même de la société. La reconnaissance académique est arrivée par la suite, sous l’égide de Bleuler , via la clinique psychiatrique de l’université de Zurich. Dès 1906-1907, elle a fait affluer vers le 19 Berggasse de jeunes psychiatres venus du monde entier. Des Russes, des Polonais, des Hongrois, mais aussi des Allemands et des Américains ont frappé à la porte de Freud, ouvrant ainsi la possibilité d’une internationalisation du mouvement psychanalytique.
La création de l’Association psychanalytique internationale, communément nommée sous son sigle anglais d’IPA, est alors devenue une nécessité pour Freud, et même une urgence. À sa grande surprise, en effet, il avait constaté qu’un praticien passé par l’expérience d’une analyse personnelle n’était nullement à l’abri de déviations ultérieures. Or, celles-ci pouvaient le conduire jusqu’à nommer « psychanalyse » des choses de son cru, n’ayant aucun rapport avec elle, voire à se retourner contre son propre enseignement. Il fallait un remède. Il fallait prendre en main la formation des analystes, de façon que nul ne puisse se dire « analyste » qui n’ait reçu l’aval de quelques esprits au-dessus de tout soupçon. Où trouver ces esprits miraculeux ? Chez ses élèves les plus fidèles, tant à sa personne qu’à son œuvre, puisqu’aux yeux de Freud l’une était indiscernable de l’autre.
Depuis lors, on peut dire que les apories, les drames et les dissensions n’ont cessé de scander l’histoire de la psychanalyse. J’ai choisi de les étudier en commençant par suivre le fil rouge que nous offre la constitution, sur la suggestion de Jones, du comité des « paladins » de Freud. Car ce comité secret n’a pas peu contribué à la transformation de l’IPA en Église, avec ses cardinaux et ses hérétiques. On y croisera, notamment, Otto Rank et Sándor Ferenczi, les deux principales figures dissidentes du mouvement freudien, dont les vies tragiques et les innovations trop audacieuses nous interpellent encore aujourd’hui.
 
La seconde partie est consacrée au cœur même de la psychanalyse, à savoir la théorie psychanalytique de l’Éros. Le lecteur sera peut-être étonné de constater qu’elle commence par un exposé consacré à la linguistique. Mais je suis persuadé qu’on ne saurait apprécier à sa juste mesure la refondation lacanienne des découvertes freudiennes, si on la sépare de ce que certains linguistes ont appelé « la subversion ontologique de Ferdinand de Saussure ». Ce détour apparent est donc en fait un raccourci, qui nous permettra de mieux suivre, ensuite, les avancées théoriques de Lacan et leurs mises en formules logico-mathématiques.
Sous la dénomination de « pulsion », Freud a forgé un concept aussi révolutionnaire que la gravitation des corps, ou l’évolution des espèces. Sa portée réside en ce qu’il permettait, pour la première fois, l’abord scientifique de l’Éros, ce dieu certes plein de ressources par son père, Poros, mais dont les manques viennent de la pauvre Pénia, sa mère, qui selon Platon n’a pu l’enfanter qu’en profitant du sommeil de Poros pour s’en faire engrosser. Faute d’avoir des objets appelant des actions spécifiques (comme le besoin), Éros les retrouve dans les locutions et les métaphores mortes de la langue, qui alimentent nos rêves et nos symptômes, tout en fécondant nos palabres.
Ce paradoxe fondamental de l’Éros, tout à la fois sans objet et non sans objet, Freud l’a résolu en lui en assignant un objet perdu  : celui de la première satisfaction. Mais dès lors, comment ne pas s’arrêter sur ce phénomène étrange que constitue l’apparition précoce du désir ? Comment se fait-il que ce dans quoi réside tout le potentiel de la vie sexuelle surgisse si tôt dans la vie humaine, à un moment où il est impossible d’y satisfaire ? Et qu’est-ce que cet objet, qui nous est inaccessible, et vers lequel nous nous dirigeons cependant d’autant plus immanquablement qu’il est celui « de l’amour et de la première dépendance » ?
La perplexité des analystes face à l’apparition précoce de la sexualité s’est longtemps attestée dans leurs cogitations divergentes sur la « phase phallique », qui surgit en même temps. Ces divergences étaient tout à la fois inévitables et insolubles. Car de telles élaborations en restaient au plan de « l’avoir », coincées dans cette vaine alternative (où se laisse soupçonner l’origine sexuelle de la logique aristotélicienne elle-même) qui oppose ceux qui ont le phallus et celles qui ne l’ont pas. Or, il est un tiers non exclu, en l’occurrence, et même décisif, c’est que ni les uns ni les autres ne sont le phallus. On touche par ce biais à un des apports clés de Jacques Lacan, à un moment où la science pilote était non plus la biologie mais la linguistique.
En centrant le complexe d’Œdipe autour de la fonction de castration, induite par la métaphore paternelle, Lacan a fondé le désir dit « génital » sur un manque à être distinct de la castration organique, où les pulsions prégénitales ou régressives trouvent leurs assises. De fait, avec l’entrée en jeu de ce que Freud appelait « le grand seigneur Pénis 1   », et qui renvoie chez Lacan à l’objet imaginaire symbolisé par la lettre «  φ  », les autres pulsions se sexualisent. Ce qui nous vaut un sein phallique et des fesses qui le sont tout autant ! En somme, avec l’Œdipe, tel que Lacan l’a reformulé, il y va d’un mécanisme qui conserve la valeur phallique, mais en l’accrochant à d’autres objets, dont la fonction s’en trouve par là même éclairée. On ne saurait donc exagérer l’importance de cette reprise lacanienne de la théorie freudienne de la sexualité. Et j’ai tâché d’en présenter les éléments et les enjeux principaux.
 
La troisième partie est consacrée à la saga lacanienne. Elle commence par un coup de tonnerre. Plus d’un demi-siècle après sa création, l’IPA pose comme condition à l’affiliation de la Société française de psychanalyse de rayer les noms de Jacques Lacan et de Françoise Dolto de sa liste de didacticiens. C’est cette « excommunication » initiale qui a incité Lacan à fonder sa propre école, et à essayer d’y mettre en œuvre une pratique qui soit conforme aux exigences de la psychanalyse telle qu’elle doit être : une science, comme telle transmissible.
À moins qu’il n’ait à peu près mon âge, ce qui m’étonnerait beaucoup, le lecteur imaginera difficilement l’effet vivifiant suscité par les débuts de l’enseignement de Lacan, en 1951, et la valeur de régénération qu’il annonçait. Car la théorie psychanalytique apparaissait certes, à l’époque, comme une construction grandiose, mais qui menaçait de s’effondrer sous le poids de ses contradictions et de ses zones d’ombre. Comment le transfert pouvait-il être à la fois le moteur principal de la cure et l’obstacle majeur à son effectuation ? D’où venait la menace de castration dont le père était censé être l’agent ? Comment l’Œdipe pouvait-il être inséparable de la théorisation infantile sur la sexualité, et voué à disparaître avec l’advenue de la puberté, alors même que le caractère œdipien du désir se manifeste en tout premier lieu chez l’adulte ? Mystère de l’amour. Mystère non moins opaque de l’objet de la première satisfaction…
Le génie clarificateur de Lacan a changé la donne théorique sur tous ces points, et sur bien d’autres. Son inventivité s’est aussi déployée dans la proposition de la procédure de « la passe ». Elle était destinée à renseigner les psychanalystes sur ce désir qui fait l’analyste, et plus précisément sur le point de passage de l’analysant à l’analyste. Malheureusement, sa mise en œuvre a montré que ce qu’on pouvait en attendre ne correspondait à rien que l’on pût cataloguer comme un savoir. On verra l’effet de choc qu’a eu cet échec. Et d’abord pour Lacan lui-même, puisqu’il allait à l’encontre du but auquel il avait voué sa vie. En même temps, l’école qu’il avait fondée se dégradait au fil des ans, malgré ou plutôt à cause de son succès extraordinaire. Et elle a fini par n’être plus qu’une corporation professionnelle de plus, guère différente des autres institutions.
Plusieurs chapitres de la troisième partie sont consacrés aux causes de ce double échec et aux leçons à en tirer. Les autres ont un tour plus personnel. Ils explorent un des paradoxes de l’enseignement de Lacan, qui m’implique comme son élève. Il se trouve, en effet, qu’il a été le seul maître qui m’a permis d’apprendre quelque chose de la psychanalyse, sans avoir jamais manifesté le moindre désir de me transmettre, ou de m’enseigner, quoi que ce soit. Il n’en était que plus étonnant de voir à quel point son désir de transmission reprenait libre cours dans ses séminaires, dès lors qu’il s’adressait à ceux qu’il regroupait, je dirais, par simple addition, sous le vocable de

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