La Part de la mère
164 pages
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Description

Dans la Part du Père (1981), Geneviève Delaisi déchiffrait la réalité physique et psychique de la paternité. Revenant aujourd'hui à un thème qui lui est cher (la "fabrication" et l' "élevage" des bébés), elle clôt son cycle par la condition maternelle. A travers son activité clinique dans un service hospitalier de gynécologie-obstétrique, Geneviève Delaisi entend au quotidien des mères, des parents qui déroulent devant elle des fragments de vie, histoires parfois incroyables, mélange de réalité, de vérité et d'actualité dont elle interroge le sens. Et qui toutes peuvent constituer des jalons pour une mythologie de la maternité. La Part de la Mère est donc le récit d'une trentaine de ces histoires, véritables "nouvelles" cliniques, dans un lieu qui fonctionne à la fois comme une gigantesque horloge et comme un formidable révélateur de notre société. Cela conduit Geneviève Delaisi à réfléchir par exemple à la manière dont le phénomène de l'exclusion peut se conjuguer au féminin: à émettre l'hypothèse que dans certains cas les mères sont peut-être les vraies prolétaires des temps modernes; à s'interroger sur les conséquences du diagnostic prénatal qui peut conduire à des interruptions médicales de grossesses; ou encore à réfléchir sur la spécificité du deuil périnatal (quel est le travail de deuil de parents qui perdent un bébé in utero, avant la naissance?)Un essai poignant et stimulant sur la maternité saisie par la médecine et par la loi. Psychanalyste, Geneviève Delaisi a publié aux Editions Odile Jacob Enfant de personne (1994).

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 mai 1997
Nombre de lectures 0
EAN13 9782738168153
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0750€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

D U MÊME AUTEUR
OUVRAGES
L’Art d’accommoder les bébés. 100 ans de recettes françaises de puériculture (avec S. Lallemand), Paris, Seuil, 1979.
La Part du père , Paris, Seuil, 1981.
L’Enfant à tout prix. Essai sur la médicalisation du lien de filiation (avec A. Janaud), Paris, Seuil, 1983 ; nouvelle édition, coll. « Points actuels », 1987.
Enfant de personne (avec P. Verdier), Paris, Odile Jacob, 1994.
DIRECTION D’OUVRAGES
Les Sexes de l’homme , Paris, Seuil, 1985.
Objectif bébé : une nouvelle science, la bébologie (avec J. Bigeargeal), Paris, Autrement, 1985 ; nouvelle édition, Paris, Seuil, coll. « Points actuels », 1987.
© O DILE J ACOB, MAI 1997 15, RUE SOUFFLOT , 75005 PARIS
www.odilejacob.fr
ISBN : 978-2-7381-6815-3
Le code de la propriété intellectuelle n'autorisant, aux termes de l'article L. 122-5 et 3 a, d'une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l'usage du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation ou réproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (art. L. 122-4). Cette représentation ou reproduction donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
www.centrenationaldulivre.fr
Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo .
À mes filles et à ma petite-fille qui m’ont beaucoup appris de la maternité, et en souvenir de ma mère, récemment disparue.
P RÉFACE

L’hôpital est la scène du grand théâtre de la vie. Chamarrée ou grise, la foule des acteurs s’y anime, s’y mélange, s’y abandonne, dans une quête bigarrée d’assistance, un grouillement perpétuel d’émotions partagées, un foisonnement d’échantillons bariolés de la condition humaine. On y naît, on y souffre, on y meurt. La comédie côtoie le drame, le miracle la tragédie. Le surnaturel succède au tragique et les Mystères de la vie aux Mystères de Paris.
Un moment, c’est l’éternité, l’hymne à la joie, le jaillissement du cri d’un nouveau-né, l’émerveillement originel devant un petit d’homme qui vient au monde à peu près dans le même dépouillement de l’acte et la même nudité que du plus loin des temps et du plus reculé des points du globe.
Le moment d’après, surgit le sordide : la brutalité, individuelle ou collective, la bêtise, le racisme, la précarité, le viol, l’inceste, la mort subie ou préméditée. La nature charrie autant que l’homme son contingent de violence. Elle engendre sans préavis des enfants malformés, voués, pire encore qu’à la mort, à une vie de calvaire, qu’il faut brusquement interrompre. Il lui arrive de foudroyer les mères d’un cancer ou d’une tumeur au cerveau.
Viennent aussi, et à ce point c’est un peu nouveau, s’échouer là comme dans un havre de secours bien des misères qui demandent asile. Enceintes, ces femmes ne sont malades que de la surdité de leur famille ou de la société. Elles vivent dans un tunnel aveugle un cauchemar éveillé, sans autre issue peut-être que de retourner contre elles la violence meurtrière, tant les panique une grossesse qu’elles ne peuvent assumer. Impossible de se dérober. L’assistante sociale, le médecin s’il veut bien, incarnent leur dernier recours, leur planche de salut avant le mur. Elles souhaitent, accouchées anonymes, abandonner leur enfant dès la naissance malgré la déchirure, ou demandent à interrompre leur grossesse. La bonne conscience médicale ou la loi quelquefois n’y trouvent pas leur compte. Séisme déontologique où l’ange de la vertu, qui refuse d’arrêter une vie, s’empoigne avec le démon de la compassion et de la révolte, qui finit, lui, par accepter. Ponce Pilate s’est lavé les mains, mais Simon a porté la croix, au mépris des forces de l’ordre, pour se charger d’une part du fardeau.
F. appartient à une période un peu antérieure à la saga de ce livre, mais son histoire en éclaire certains traits. Elle avait quinze ans, elle était enceinte, dans une famille nombreuse, religieuse et intraitable. Elle ne pouvait rien dire. Jusqu’au terme, elle a masqué sa grossesse. Elle a accouché seule, la nuit, dans les toilettes du domicile familial. Au petit matin, elle a été trouvée exsangue, transférée à l’hôpital et sauvée par miracle. Son enfant est mort pendant l’accouchement. Inculpée pour infanticide, personne n’avait rien remarqué. Elle n’avait rencontré à l’école aucun adulte, aucune enseignante, aucune infirmière, aucune assistante sociale à qui elle osât se confier. C’était hier, à Paris, pas du temps d’Eugène Sue ou de Zola. Que chacun s’interroge pour savoir si, la fois suivante, sollicité, il refuserait de tendre la main, au risque du scandale. Mort, où est ta victoire ?
« Pour dire que la vie est absurde, la conscience a besoin d’être vivante », écrivait Albert Camus dans L’Homme révolté . Avec patience, avec tact et discrétion, Geneviève Delaisi a écouté ces femmes en détresse, elle les a entourées et elle les a aidées. Du rose au noir d’encre, du pastel à la gouache et à l’eau-forte d’une gravure sur plomb, elle raconte admirablement une tranche de vie à l’hôpital, quelques mois de sa vie d’ethnopsychanalyste en maternité.
Aujourd’hui, je sais pourquoi je lui ai demandé de rejoindre l’équipe : pour mettre son talent au service de ces femmes qui souffrent. Pas seulement pour les assister, mais aussi pour témoigner, pour faire vivre notre conscience, pour faire connaître et expliquer ces gémissements de l’âme que risquent d’étouffer les cris des nouveau-nés.
L’hôpital ne se résume pas à des pansements ou à des médicaments, à des opérations réussies ou à des naissances heureuses. Il se nourrit aussi de cette humanité dont les maladies ne figurent pas dans les traités de médecine : la solitude, l’angoisse, le chômage, l’exclusion sociale, la déstructuration familiale, la souffrance ou la culpabilité du deuil de l’enfant, le sida, la toxicomanie, la fatalité génétique. Elles ne font pas l’objet de publications dans les journaux scientifiques à comité de lecture. Quelqu’un se devait donc de prendre l’initiative d’en parler.
Geneviève Delaisi en parle très bien parce qu’elle a un secret : elle sait les écouter, toutes ces déracinées, ces paumées, ces victimes. Elles ne demandent que très peu, tout juste un peu d’attention. Et Geneviève Delaisi sait la leur donner. Elle les écoute, elle les rassure, elle les réchauffe. Mère, sœur et confidente autant que psychanalyste, elle déchiffre avec elles l’énigme de leur déchéance et leur restitue ce dont elles se croient à jamais mutilées : leur propre dignité.
Intelligent, son livre est émouvant, car il lui vient du cœur. Tour à tour poignante, pittoresque, attendrissante et fraîche, sa chronique nous emporte comme un flot impétueux.
Comme le tumulte de la vie.
Pr Jacques M ILLIEZ
À mes premiers lecteurs (Nathalie, Estelle et Charlotte), aux critiques « maternellement » constructives, à mon mari qui a veillé à ne pas me laisser mourir de faim et de soif,
 
à Christophe Guias qui a bien voulu « paterner » cet ouvrage.

   
SOCRATE  : Mon art de maïeutique a les mêmes attributions que celui des sages-femmes. Mais il diffère du leur en ce qu’il délivre les hommes 1 et non les femmes, et que c’est leurs âmes qu’il surveille en leur travail d’enfantement, et non leurs corps. Mais le plus grand privilège de l’art que, moi, je pratique est qu’il sait faire l’épreuve et discerner, en toute rigueur, si c’est l’apparence vaine et mensongère qu’enfante la réflexion du jeune homme, ou si c’est un fruit réel et vrai. J’ai d’ailleurs cela en commun avec les sages-femmes qu’enfanter en sagesse n’est point en mon pouvoir, et le reproche qu’on m’a souvent fait d’interroger les autres sans que je ne donne jamais mon avis personnel sur aucun sujet parce que je n’ai en moi aucune sagesse, est un reproche qui ne manque pas de vérité.
P LATON , Théétète , VII, 150a-150e 2

   

1 . Comme le voulait l’époque, Platon entendait ce mot au sens d’homme, en référence au masculin ; pour ma part, j’interprète évidemment ce terme au sens de genre humain.

2 . Je me suis fortement inspirée de deux traductions classiques, celle d’émile Chambry ( Théétète, Parménide , Paris, Garnier-Flammarion, 1967, p. 71) et celle d’Auguste Diès ( Parménide, Théétète, Le Sophiste , Paris, Gallimard, coll. « Tel », 1926, p. 71).
R EMERCIEMENTS

Mes premiers remerciements vont à ces patientes qui m’ont tant appris sur la part de la mère dans l’enfantement. Évidemment, j’ai veillé à préserver l’anonymat de tous les protagonistes. Mais — ce point est essentiel au regard de ma déontologie propre — c’est aussi leur personne que j’ai respectée.
Mes remerciements vont ensuite — et c’est bien plus qu’une formule de politesse — au professeur Jacques Milliez qui m’a autorisée à publier ces histoires et a bien voulu les introduire.
Je remercie enfin chaleureusement l’équipe de la Maternité (médecins, surveillantes, sages-femmes, assistantes sociales, infirmières, aides-soignantes, brancardiers, secrétaires) qui m’ont fait confiance et m’ont accompagnée dans ce « voyage en maternité », et particulièrement les docteurs Jacques Bouillé, pédiatre, Béatrice Guyard-Boileau, gynécologue-accoucheur, Nicole Mulliez, fœtopathologiste et Marie-Françoise Reznikoff, immunologiste.
L’ EXOTIQUE EST QUOTIDIEN 1

Ce livre constitue un journal de bord de mon activité clinique (deux jours de présence par semaine) pendant six mois, en 1996, dans le service de gynécologie-obstétrique de l’hôpital Saint-Antoine, à Paris 2 . Pour éviter les effets de manche ou de sensationnel dans le choix et l’articulation des « cas », j’ai préféré à un découpage méthodologique ou thématique cette chronologie courte, me fiant au hasard qui avait amené sur le chemin de l’hôpital les patients dont je raconte l’histoire.
Certaines de ces histoires sont dramatiques. Je ne voudrais pas cep

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