La Fin de la laïcité ?
104 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

La Fin de la laïcité ? , livre ebook

-

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
104 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Il y a cent ans, en 1905, la loi sur la laïcité mettait fin aux conflits religieux en France. Finie la guerre civile, ouverte ou larvée, entre catholiques et protestants. Finies les discriminations contre les juifs. L’État se séparait de l’Église pour garantir à chacun la liberté de pratiquer la religion de son choix. Jacques Robert montre pourquoi l’irruption massive de l’islam semble tout remettre en question. L’État peut-il affirmer sa neutralité et restreindre l’exercice d’un culte ? Mais peut-il se renier et laisser la religion envahir l’espace public ? Ne faut-il pas envisager une modification de la loi de 1905 ? Plutôt que des autorisations, des interdictions, des expulsions ou des oukases, n’avons-nous pas besoin d’une charte de la laïcité ? Ce livre examine les nombreuses questions que pose le bouleversement du paysage religieux français et fait le point des solutions envisagées, en évitant tout parti pris et tout jugement de valeur. Jacques Robert, ancien membre du Conseil constitutionnel, est président honoraire de l’université Panthéon-Assas dont il est professeur émérite. Il a publié, notamment, La Liberté religieuse et le régime des cultes, Droits de l’homme et libertés fondamentales, Enjeux du siècle : nos libertés.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 24 septembre 2004
Nombre de lectures 4
EAN13 9782738183880
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,1050€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

© Odile Jacob, septembre 2004
15, rue Soufflot, 75005 Paris
www.odilejacob.fr
EAN : 978-2-7381-8388-0
Le code de la propriété intellectuelle n'autorisant, aux termes de l'article L. 122-5 et 3 a, d'une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l'usage du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation ou réproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (art. L. 122-4). Cette représentation ou reproduction donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo
« Les grandes erreurs politiques viennent presque toujours du fait que les hommes oublient que la réalité bouge et qu’elle est en continuel mouvement »
Henri B ERGSON

« Même de l’abîme de terreur où nous allons aujourd’hui à tâtons, à demi-aveugles, l’âme bouleversée et brisée, je ne cesse de relever les yeux vers ces anciennes constellations qui resplendissaient sur ma jeunesse et me console, avec la confiance héritée de mes pères, qu’un jour cette rechute ne paraîtra qu’un intervalle dans le rythme éternel d’une irrésistible progression ».
Stefan Z WEIG
Avant-propos

L’idée d’écrire ce livre ne m’est pas venue récemment.
Le domaine des libertés publiques est, depuis longtemps, le champ de mes recherches et de mes réflexions. J’ai publié de nombreux livres et articles sur le sujet. Mes familiers reconnaîtront mes idées – inchangées – dans certains des chapitres que je leur confie aujourd’hui. Qu’ils me pardonnent ce qu’ils ont déjà lu sous ma plume et excusent parfois les opinions trop franches que je leur livre. Mais l’occasion qui se présente à nous de débattre sérieusement de problèmes – ô combien compliqués – est trop tentante pour qu’on la laisse s’éloigner en se détournant des questions fondamentales qui nous assaillent.
L’actualité place en effet la laïcité au premier rang des grands débats de ce temps. Mais le prétexte de cette agitation autour d’un principe fondamental de notre République, à savoir la querelle sur le port du foulard dit « islamique », ne doit pas cacher la profondeur du malaise qui s’est emparé tout à la fois de l’opinion publique et des dirigeants du pays.
La pratique de l’amalgame et de la simplification hâtive, qui est tellement séduisante quand on ne veut pas se donner la peine d’analyser, dans tous ses aspects, la réalité d’un problème infiniment complexe, doit être hautement dénoncée si elle aboutit, en obscurcissant toute vision objective, à relancer un débat qui a, jadis, fait tant de mal à la République.
Nul n’ignorait qu’à l’approche du centenaire de la loi de 1905 sur la séparation de l’Église et de l’État certains tenteraient de remettre en cause différentes dispositions de cette loi qui leur semblaient avoir vieilli. L’intention n’était pas condamnable en soi. Mais modifier une loi qui a, tout de même, dans un domaine infiniment passionnel, assuré sans trop de heurts pendant un siècle la paix religieuse en France, n’était-ce pas, pour régler quelques questions effectivement pendantes mais peut-être facilement maîtrisables par des procédures amiables de concertation, risquer de bouleverser un équilibre difficilement maintenu ?
Fallait-il repenser toute la laïcité à la française qui, à l’évidence, a été au départ une spécificité de notre pays mais qui s’est, aujourd’hui, largement répandue de par le monde ?
Il n’y a évidemment pas qu’une seule notion de la laïcité ; mais a fait tache d’huile, dans la plupart des démocraties, l’idée qu’il convient d’assurer la liberté de conscience, de garantir le libre exercice des cultes et de traiter toutes les croyances avec égalité.
À partir de l’acceptation de ce fonds commun, les modalités d’application peuvent ici ou là être différentes. On peut vouloir rejeter totalement les religions dans le domaine exclusif de la vie privée. On peut aussi vouloir ménager d’utiles et permanents rapports entre les Églises et l’État.
Chaque pays réagit en fonction de son histoire, de ses traditions, de son expérience, de ses souvenirs…
La France, en 1905, a opté pour un système de séparation – non pas tranchée et hostile mais sympathisante – entre les Églises et l’État. Elle a eu un singulier mérite dans le climat violemment anticlérical de l’époque. Elle a fait, pour des raisons historiques particulières, un choix différent pour les départements d’Alsace-Moselle. À l’époque, il n’y avait pas de Conseil constitutionnel pour froncer le sourcil sur cette curieuse dérogation à l’unicité de la République. Et les lois constitutionnelles de 1875 ne disaient rien sur ce chapitre. Mais aujourd’hui ?
En 1905, on ne parlait ni de sectes ni d’un réveil quelconque – et lourd peut-être de menaces – de l’islam. La loi ne concernait que les quatre grandes religions reconnues. Celles dont on avait l’habitude… parce qu’elles s’étaient sans doute suffisamment entretuées.
Le nouveau statut ne s’appliquerait qu’à elles seules. On n’avait rien prévu pour celles qui – peut-être – viendraient après. Comment les accueillerait-on ? Quel droit leur appliquer ? Le même qu’aux autres, dans un contexte pourtant radicalement modifié ?
Il y a aujourd’hui en France plus de 5 millions de musulmans. Et l’islam est devenu en importance la deuxième religion du pays.
Or nul n’a voulu – au départ – prévoir une telle évolution. La France n’a jamais eu une politique sérieuse d’immigration.
À l’époque des trente glorieuses, on a fait venir en France, dans le désordre et une illusoire euphorie, des centaines de milliers d’étrangers – d’origine souvent musulmane – dont notre industrie avait besoin. Une main-d’œuvre à bon marché, peu exigeante et d’une grande bonne volonté. On les a logés comme on a pu. Mal la plupart du temps. Après tout, c’était toujours mieux – pensait-on – que dans leurs propres pays ! Ce n’est que plus tard que l’opinion publique et les gouvernants ont pensé aux conséquences qu’allait entraîner cette arrivée massive d’hommes seuls qui venaient travailler chez nous pour renvoyer chez eux une partie de leur salaire destinée à nourrir leur famille.
Et puis allaient-ils accepter de rester éternellement seuls, sans leur famille ? Les textes constitutionnels français, comme les textes européens, ne disposaient-ils pas que « chacun a droit à une vie familiale normale », c’est-à-dire évidemment et d’abord à une « vie familiale » ?
De nombreuses familles arrivèrent donc. On connaît la suite. Celle d’une population musulmane massive, inorganisée, sans institutions représentatives pour dialoguer avec les pouvoirs publics, sans lieux de culte suffisants pour exercer leur religion, sans adaptation des services publics pour leur faire une place.
La querelle du voile posa brutalement le problème. Il fallait pourtant s’y attendre. On n’y avait pas pensé. Elle s’ajouta à la déficience des mosquées, à la formation des imams inexistante…
Mais pour faire face à cette situation inédite, était-il bien nécessaire d’envisager une modification dans son ensemble de la loi de 1905 ?
Comment – depuis de nombreuses années – avaient été abordés et pour certains fort bien réglés les problèmes nouveaux ?
Les pouvoirs publics avaient imaginé des solutions ponctuelles, au cas par cas. Chaque question avait été étudiée et avait reçu un traitement approprié. Sans qu’à aucun moment nul n’ait songé à faire revivre les vieilles querelles théologiques des temps passés. Des coups de canif avaient-ils été portés à la laïcité ? À l’évidence. Mais qu’importait au bout du compte puisqu’un équilibre – satisfaisant pour toutes les religions – avait pu être trouvé ?
Aujourd’hui, en effet, aucune ne se prononce pour la révision de la loi de 1905. Le Conseil des Églises vient officiellement de le faire savoir dans une déclaration publique. Elles prêchent toutes pour le maintien du statu quo . Parce que chacune, instinctivement, redoute que pour régler certains incidents – que d’aucuns estiment superficiels – on ne remette en cause les piliers somme toute fragiles qui soutiennent encore un édifice toujours précaire.
Car il est à craindre qu’une fois le débat largement ouvert, si l’on remet en chantier la construction d’une loi nouvelle, chacun ne reprenne sa liberté et ne se livre à une surenchère de revendications enfouies qui, inéluctablement, ressurgiraient.
Chaque Église voudra garder ses privilèges et celles qui n’en ont pas revendiqueront les mêmes que les autres. Les « laïcards » – de leur côté – remettront en question tous les avantages, de quelque ordre qu’ils soient, dont bénéficient encore les anciennes religions et refuseront toute prise en considération de ceux que demanderont les nouvelles à leur profit.
On verra renaître, dans une opinion qui n’en a pas besoin, les vieilles controverses d’antan. Pour le plus grand profit des nouveaux mouvements religieux qui regarderont avec gourmandise se battre les anciens.
Mais peut-on rester dans la situation présente en attendant, calmement, que les choses se règlent d’elles-mêmes ?
La raison nous y inviterait. Comme une élémentaire prudence. Chaque religion est diverse, composite, contradictoire. Elle charrie des eaux multiples qui se sont anarchiquement mêlées. On ne reconnaît que difficilement dans le flot boueux qui sort souvent de ses berges les apports spécifiques de courants tumultueux et variés.
L’amalgame est alors une solution commode pour simplifier et mieux comprendre certaines alluvions hétérogènes.
Mais peut-on mettre tous les fidèles d’une même confession dans une même catégorie sociologique et spirituelle sans courir de graves erreurs ?
Tous pensent-ils la même chose ? Assurément non. Les réactions et les opinions restent diverses. Comment chiffrer – en proportion – ceux qui croient en une chose et ceux qui espèrent so

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents