L influence qui guérit
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L'influence qui guérit , livre ebook

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Description

Lorsqu'il s'agit de soigner des malades venus d'Afrique, du Maghreb, des Antilles, les « guérisseurs », malgré l'irrationalité de leurs pratiques, sont bien plus efficaces que les médecins armés de leurs médicaments et de leur « science ». Ce livre nous propose de comprendre les méthodes de ces guérisseurs. Il montre aussi comment la psychiatrie occidentale peut s'inspirer de démarches traditionnelles pour aider des patients venus d'une autre culture. Tobie Nathan est professeur de psychologie clinique et pathologique à l'université de Paris-VIII et directeur du centre Devereux d'ethnopsychiatrie.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 février 1994
Nombre de lectures 2
EAN13 9782738162014
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0500€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

© O DILE J ACOB , 1994, AVRIL   2001 15, RUE SOUFFLOT , 75005 PARIS
www.odilejacob.fr
ISBN : 978-2-7381-6201-4
Le code de la propriété intellectuelle n'autorisant, aux termes de l'article L. 122-5 et 3 a, d'une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l'usage du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation ou réproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (art. L. 122-4). Cette représentation ou reproduction donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo .
DU MÊME AUTEUR
aux éditions Odile Jacob
Psychanalyse païenne, 1995, « Poches Odile Jacob », 2000.
La Parole de la forêt initiale (en collaboration), 1996, nouvelle édition sous le titre La Guérison Yoruba, 1998.
Psychothérapies (en collaboration), 1998.
Soigner (en collaboration), 1998.
613, 1999.
à la mémoire de mon maître, Georges Devereux
Remerciements

La pensée est une œuvre collective. J’aime à me savoir le porte-parole de ceux qui ont « co-pensé » un temps avec moi et je me réjouis à l’idée de leur témoigner ma reconnaissance.
J’ai toujours été très étonné de la coopération de mes patients, de leur touchante confiance, quelquefois de leur pathétique abandon entre mes mains. Mais je voudrais surtout les remercier de leur volonté de m’instruire, toujours plus, et toujours en me laissant l’impression que c’était moi qui leur apportais des bienfaits.
L’enseignement est un métier très contraignant. Mes étudiants ont toujours représenté pour moi le « surmoi » exigeant qui m’imposait de penser plus loin et plus précis. Je les remercie d’avoir fait fi des bienséances universitaires et d’avoir accepté, semaine après semaine, de me contrecarrer avec énergie et aussi, souvent, avec tendresse, m’incitant à plus de rigueur.
Mes étudiants de thèse sont allés sur le terrain, là où je n’avais pas pu aller. Si je ne me suis jamais permis d’utiliser leurs observations, leur en laissant toujours la primeur, je dois dire que le changement de perspective qu’ils m’ont apporté a été décisif dans l’orientation de mes recherches. Je voudrais les remercier de m’accompagner encore dans un projet à la fois ambitieux et fascinant. Certains d’entre eux qui ont entrepris de se « faire initier » dans leur propre culture m’ont témoigné l’amitié de partager avec moi leurs sensations si personnelles, leurs réflexions et leurs doutes. Je voudrais ici les saluer, en particulier : Sadok Abdelsalam, Gilberte Dorival, Lucien Hounkpatin, Viviane Rolle, Nathalie Zajde.
Enfin, le travail thérapeutique que nous menons dans les différentes consultations d’ethnopsychanalyse est éminemment un travail collectif. Je voudrais remercier mes cothérapeutes pour leur courage de pensée, leur absolu dévouement aux patients et leur passion pour la découverte scientifique, notamment : Tewfik Adohane, Salhy Aït-Kaci, Thierry Baranger, Denise Barokas, Marième Bâ, Nicole Belaïche, Loubaba Belmejdoub, Armando Beraün, Mohamed Bettiche, Serge Bouznah, Marie-Rose Braizat, Bernadette Buisson, Alhassan Cherif, Paola Cocchi, Dominique Desmedt, Rébecca Duvillié, Léocady Ekoué, Dominique Fourcault, Élise Haule, Lila Hoijman, Joëlle Honikman, Mondher Jouida, Jocelyne Kanner, Sylvia Katz, Jean-Jacques Kowalsky, Kouakou Kouassi, Marianne Lehuédé, Catherine Lewertowski, Moussa Maman, Christine Mannoni, Josiane Mauchamp, Martine de Maximy, Claude Mesmin, Marie-Rose Moro, Marie-Christine Nagy, Joseph Ondongo, Marina Papageorgiou, Abdelhamid Salmi, Maria-Inès Sampaio, Najima Taïeb, Dominique Vossen, Jean Zubédé. Il va sans dire que sans eux, rien n’aurait été possible !
Toute ma gratitude à Gérard Jorland qui, une fois encore, avec son incorrigible optimisme, a su trouver derrière le fatras de mes mots quelques embryons de pensée.
Quant à Philippe Gérin qui a dosé assistance intellectuelle et soutien affectif, qu’il reçoive ici une nouvelle expression d’une amitié vieille de plus de trente ans.
INTRODUCTION
Une théorie de l’influence

Un docteur sait, un médecin soigne, un thérapeute applique une thérapeutique. Si les mots « docteur » et « médecin » découlent d’une sorte de parti pris de prudence, relèvent d’une philosophie où le savoir serein prévaut sur l’activisme aveugle, « thérapeute » n’est qu’un euphémisme mou, une tentative de contourner le paradoxe fondamental de celui qui fait métier de guérir. Car guérir est toujours un acte de pure violence contre l’ordre de l’univers. Et nulle thérapeutique n’est plus violente que celle qui entreprend de guérir l’âme. Car dans les désordres psychiques, ce dont souffre le patient exprime la vérité la plus profonde de son être. Le guérir consiste à l’expulser de ses choix, à lui interdire ses stratégies d’existence décidées dans un moment crucial de sa vie et appliquées systématiquement depuis. Guérir consisterait alors à exercer une influence démiurgique et à se penser par là même l’égal du dieu monothéiste : tout-puissant et transcendant. Mais au nom de quoi, et à partir de quelle certitude ?
Ce livre est né d’un moment de perplexité – un temps d’entre-deux – où faisant retour sur moi-même, je me suis demandé si j’exerçais une telle influence sur mes malades, si je me croyais véritablement capable de les transformer – seulement en surface, ou véritablement, en profondeur ? Cette transformation, si elle existait, était-elle toujours pour leur bien ? Ou bien étais-je inoffensif, voulant leur bien, comme sans doute bon nombre de leurs proches, et assistant, aussi rempli d’illusions que démuni de pouvoirs, à leurs tentatives d’autodestruction ou d’autoguérison ?
D’abord formé à la sociologie et à l’anthropologie, puis à la psychologie et à la psychanalyse, j’ai exercé mon activité thérapeutique dans la plupart des types d’institutions de soins psychiatriques existant en France : en hôpital psychiatrique, en dispensaire d’hygiène mentale, en Centre médico-psycho-pédagogique, en Centre hospitalo-universitaire, en Centre de protection maternelle et infantile. Partout, j’ai trouvé des docteurs (au sens de ceux qui savent) agissant sur des patients et, comme on dit vulgairement, ne « faisant pas dans la dentelle ». Aujourd’hui, je sais que, du moins en psychiatrie, le plus puissant ressort de leur action est avant tout le prestige de la médecine. Mais ils agissent aussi par la magie des molécules – ô combien actives –, par des dispositifs de prise en charge, des relais sociaux, la force aveugle des institutions – et Dieu sait si elles sont contraignantes –, par leur parole enfin, qu’ils prétendent toujours « de vérité ». Et partout où je suis passé, j’ai vu les docteurs prétendre tout de même « laisser s’exprimer la vérité du malade », son « désir ». Ils disaient l’aider sans violence, sans contrainte, l’accompagner dans la découverte de sa nature profonde. Et ces bons docteurs, ces psychanalystes lisses, ces thérapeutes aux mains propres, je les ai toujours vus armés jusqu’aux dents, armés d’une pensée d’abord – qu’ils prétendaient scientifique, démontrée, définitive –, d’une théorie qui toujours justifiait cette idée étrange selon laquelle leurs actes, les torsions qu’ils imposaient au monde concret du patient, n’étaient qu’émanations de ses propres souhaits. Et s’il ne connaissait pas ses désirs secrets, si sa famille se débattait avec une fausse idée de lui-même, c’était, disaient-ils, que des processus morbides, voire l’obscur travail de l’inconscient, les rendaient tous aveugles.
Entendons-nous ! Je sais combien la pratique de la psychanalyse par un véritable professionnel et selon les règles de l’art peut être bénéfique au patient dans une relation contractuelle, librement consentie. Mais lorsqu’elle règne en idéologie maîtresse dans un service de psychiatrie ou dans une consultation médico-psychologique, elle devient, comme tant d’autres prétendues théories scientifiques, un galimatias de causalités naïves et, en dernière analyse, un outil d’autojustification destiné à des apprentis sorciers – quelquefois, mais si rarement – inspirés.
Et jusqu’aux psychanalystes (j’en suis un) se voulant au-dessus de la mêlée, les pires en ce domaine lorsqu’ils travaillent en institution, qui ont même – chacun s’en souvient – clamé un moment qu’ils n’avaient aucune intention thérapeutique et prétendu que leur action n’était thérapeutique que « de surcroît ». Est-ce à dire à leur insu ? de mauvaise grâce ? contre leur gré ? Qui sait ce qu’ils voulaient dire par là ?

La théorie des docteurs
En deux décennies d’activité clinique intense, j’ai vu changer bien des fois les théories des docteurs, mais malgré les petites différences, toutes celles que j’ai rencontrées comportaient un certain nombre de prémisses –  toujours les mêmes – encore présentes dans les théories de ceux que je côtoie aujourd’hui.
D’après toutes ces théories, il existerait une nature des faits que décrit et analyse une discipline s’apparentant peu ou prou à la médecine : la psychopathologie. Cette nature , tout comme par exemple la structure de la matière, serait indépendante de l’observateur et susceptible de descriptions systématiques – peut-être même d’expérimentations. Cette discipline porterait sur le sujet, c’est-à-dire l’« individualité psychologique » superposable à l’individualité biologique, la personne (et moi qui depuis toujours me demandais : « Et pourquoi pas le village, la lignée, les ancêtres ? »). Certains éléments constitutifs de la personne, tels que son « identité culturelle » ou « ethnique 1  » (sa langue, ses coutumes, ses systèmes de représentation), sont toujours représentés comme extérieurs à sa nature, comme les vêtements pour le corps propre ou son terreau pour une plante.
Mais comment les psychopathologistes appréh

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