L Autisme aujourd hui
159 pages
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L'Autisme aujourd'hui , livre ebook

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Description

Que sait-on aujourd’hui de l’autisme ? Comment le soigner ? Quelles en sont les origines ? Par-delà les points de vue souvent passionnels des nombreux chercheurs et thérapeutes qui se sont intéressés à l’autisme, l’auteur dresse un bilan lucide des apports de chaque discipline — psychanalyse, neurobiologie, génétique, thérapies éducatives… Michel Lemay a suivi et soigné près de six cents enfants autistes et nous propose ici une somme d’observations hors du commun. Sa pratique thérapeutique le conduit à trois convictions essentielles qu’il développe en détail : on peut pénétrer le monde de l’autiste, les différents professionnels doivent agir ensemble et les parents sont des collaborateurs à part entière de la thérapie. Parents et professionnels puiseront dans ce livre de nouvelles forces pour lutter contre l’autisme. Michel Lemay est pédopsychiatre et professeur de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent. Directeur, pendant vingt-cinq ans, de la clinique de l’autisme et des troubles envahissants du développement de l’hôpital Sainte-Justine à Montréal, il est l’un des spécialistes mondiaux dans ce domaine.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 février 2004
Nombre de lectures 7
EAN13 9782738187017
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0600€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

© O DILE J ACOB , FÉVRIER  2004
15, RUE S OUFFLOT , 75005 P ARIS
www.odilejacob.fr
EAN : 978-2-7381-8701-7
Le code de la propriété intellectuelle n'autorisant, aux termes de l'article L. 122-5 et 3 a, d'une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l'usage du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation ou réproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (art. L. 122-4). Cette représentation ou reproduction donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo
Introduction

C’est d’une aventure clinique que nous allons parler. Elle a commencé il y a plus de vingt-cinq ans avec une toute petite équipe qui a grossi peu à peu et s’est transformée en une clinique d’évaluation et de soins intégrés au grand hôpital pédiatrique de Montréal, l’hôpital Sainte-Justine.
Pour décrire cette démarche, j’utiliserai souvent le terme « je » afin de m’interroger davantage et d’inviter le lecteur à faire de même. Ce je est pourtant inadéquat car il pourrait faire croire que les idées exprimées ne proviennent que de mes tâtonnements, lectures et rencontres cliniques quotidiens. Il n’en est évidemment pas ainsi. Dès que nous nous trouvons confrontés à l’autisme, nous sommes devant l’inconnu, ressentons une certaine fascination mêlée de phases d’impuissance. De tels sentiments ne s’accordent guère avec la solitude. Il faut parler, échanger, confronter, essayer, remettre en cause, réussir sans qu’on comprenne toujours pourquoi, échouer sans pouvoir en retenir les causes.
Il existait d’emblée une conviction. Il fallait réunir des professionnels de plusieurs disciplines (psychanalystes, psychoéducateurs, thérapeutes osant utiliser intelligemment les orientations cognitivo-comportementalistes, orthophonistes, ergothérapeutes) pour utiliser les richesses de chacun sans recherches hégémoniques mais sans nier la spécificité des différents praticiens. Il fallait écouter les parents, s’appuyer sur eux sans les voir comme des « patients porteurs de je ne sais quel problème ». Il fallait s’engager sans tomber dans un militantisme absurde. Il fallait essayer d’entrer dans le monde de l’autiste avec la conviction qu’il était possible de le rencontrer malgré l’étrangeté de ses comportements.
Un bel enfant est en effet devant nous. Il est là mais il est absent bien que vigilant. Il regarde à travers nous sans poser les yeux sur notre visage mais le moindre geste semble noté. Il tient solidement dans l’une de ses mains un objet dur, qu’il tourne et retourne entre ses doigts sans accepter de s’en dessaisir. Il garde ainsi dans sa paume une parcelle de territoire dont il semble vouloir conserver l’étreinte sans vouloir l’intégrer à un jeu à valeur représentative. Il ne parle pas, hormis quelques sons monotones, ou il se parle sans nous adresser la parole. Il se lève et erre dans la pièce, effleure du dos de la main un livre posé sur la table puis, reposant dans un coin du local un tout petit papier tombé de la corbeille, il le saisit délicatement, le flaire, le porte à sa bouche et enfin l’abandonne en reprenant son errance. Tout se répète inlassablement et le temps se fige, l’espace se focalise sur cet enfant bulle qui se dérobe à nos attentes tout en gardant sur le visage un vague sourire. Une idée germe en nous, et elle ne tarde pas à être exprimée aussi par les parents : si on pouvait entrer quelques minutes dans sa peau afin de saisir la nature de son monde intérieur. Si on pouvait comprendre juste quelques instants afin d’amorcer une communication tant souhaitée, afin de sortir de l’inlassable répétition de gestes, de sons et de mimiques dont le sens nous échappe !
Absence ou rareté des échanges réciproques, anomalies des modes d’expression symbolique, comportements répétitifs et intérêts sensoriels inusités sont autant de mots qui tentent de silhouetter un syndrome appelé autisme. Ce fut le génie de Leo Kanner d’avoir su dès 1941 le distinguer de la multitude de ceux qu’on appelait alors les débiles mentaux. Depuis sa description princeps, des centaines de livres ont été publiés. Tout autant de congrès et de colloques ont été tenus. Ces enfants qui ne parlent pas deviennent les pages d’un Rorschach sur lesquelles chaque praticien projette ses désirs puis ses fantasmes. Il apparut peu à peu qu’au-delà de ceux qui demeuraient emmurés dans leur forteresse d’autres enfants moins atteints présentaient des signes de la même série. On parla du « spectre de l’autisme ». On créa de nouveaux termes pour désigner ce que les uns présentaient comme des entités cliniques différentes et ce que les autres soupçonnaient être des trajectoires possibles de handicaps variables dans leur sévérité. Puisque le petit d’homme doit progressivement apprendre à se différencier de son environnement, ces états où l’identité apparaît si indistincte furent considérés par les uns comme la révélation de notre condition originaire, bien que troublée par des facteurs issus de l’environnement. Pour d’autres, ils étaient des troubles du développement dont les manifestations n’avaient guère de similitudes avec notre situation première d’existence puisqu’elles étaient la conséquence de perturbations cérébrales. Il se produisit ainsi d’importantes scissions entre ceux qui traquaient la préhistoire de notre vie psychique et ceux qui s’intéressaient aux tragiques mésaventures de nos constructions identitaires. L’enjeu de ces querelles était de taille puisqu’il risquait de remettre en cause bien des conceptions psychodynamiques chez les uns, bien des hypothèses étiopathogéniques chez les autres. Ce qui aurait pu devenir le point de départ de confrontations enrichissantes devint surtout le lieu de critiques acerbes puis de cheminements au mieux parallèles, plus souvent divergents. Si tout cela restait des oppositions idéologiques dénuées de conséquences thérapeutiques, il n’y aurait pas grand mal, mais tel n’est pas le cas puisque chacun défend âprement sa conception du traitement.
 
Il y a là une impasse tragique, et ce livre voudrait montrer qu’on peut en sortir à condition de ne pas rester dans des positions théoriques univoques où chacun renvoie à l’autre l’image de ses dérives possibles.
Comme tous ceux qui s’intéressent au domaine de l’autisme, je navigue au milieu de nombreux écueils. J’ai parfois l’impression que mon cheminement s’apparente aux explorations maritimes d’autrefois. On croit suivre un sentier vers une direction donnée, et c’est une autre terre qu’on foule aux pieds. J’ai la chance de travailler au sein d’une équipe étonnamment soudée, dont les membres considèrent que les points de vue divergents ne sont pas de vrais obstacles. Ils apportent des éclairages différents qui permettent d’obtenir une vision plus globale et mieux documentée. Après avoir évalué plus de six cents enfants autistes et avoir suivi sur de longues années plus d’une centaine d’entre eux, nous avons accumulé un matériel considérable qui a remis en cause nombre de nos opinions antérieures. Cette expérience, je voudrais la communiquer aux parents et aux professionnels afin qu’ils puissent eux-mêmes s’en servir pour puiser de nouvelles forces.
Je veux tout d’abord remercier la clinique des troubles envahissants du développement et de l’autisme ainsi que les services de soins de jour de l’hôpital Sainte-Justine pour leurs apports précieux. Je veux aussi dire toute ma reconnaissance et mon affection à Édith, mon épouse, et à Catherine, l’une de mes filles, qui m’ont permis d’approfondir ma pensée.
 
J’invite le lecteur à me suivre dans une quête difficile puisqu’elle concerne un syndrome dont les limites, les causes, les évolutions et les formes de traitement demeurent imprécises.
 
Dans un premier chapitre, je décrirai le cadre où se déroulent nos investigations et recherches en définissant les outils que nous utilisons pour mieux comprendre les jeunes enfants reçus. En étroite collaboration avec les parents, nous proposons en effet une démarche diagnostique qui nous permet de cerner relativement bien les difficultés et les aptitudes potentielles ou actuelles de ceux que nous qualifions d’autistes.
De nombreuses données sont ainsi recueillies. Elles peuvent paraître au premier abord confuses et surtout fragmentaires. Comment les décoder selon un schéma qui permet de s’interroger sur la construction identitaire des enfants sans tomber dans le piège de grilles trop standardisées mais sans nier l’importance d’une vision objective ? Le deuxième chapitre essaiera de répondre à cette interrogation.
Le recueil des données nous aura permis d’apercevoir l’existence de sous-groupes dont la qualité et l’intensité des manifestations diffèrent, tout en conservant un certain nombre de difficultés identiques. Le troisième chapitre intitulé « Vers une tentative de regroupement des différents autismes » présentera nos hypothèses par rapport aux syndromes.
L’étiopathogénie de l’autisme et des troubles envahissants du développement demeure un sujet mystérieux. Cette part d’inconnu exacerbe notre désir de savoir et donc la tentation de prétendre au tout savoir. En voulant mieux cerner les causes, nous courons le risque de bâtir des étiologies univoques soit reliées à l’inné, soit reliées à l’acquis. Nous avons beaucoup de mal à pouvoir écouter ceux qui pensent différemment puisqu’ils nous plongent un peu plus dans le désarroi. Confronter honnêtement les positions étiologiques sera l’objectif du quatrième chapitre.
Face à leur enfant étrange dans ses comportements et étranger aux points de repère habituels, les parents s’interrogent. Ils apportent eux-mêmes des solutions tout en attendant de nous des réponses précises. La rencontre avec la famille et le ch

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