Fictions documentées
106 pages
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Fictions documentées , livre ebook

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Description

Comment les créatrices parlent-elles de la manière dont elles documentent les fictions qu’elles élaborent ? Comment les créateurs le font-ils à leur tour ? Comment conçoivent-elles – et comment conçoivent-ils – le geste de documentation de leurs créations artistiques et littéraires, destinées à la scène ou à l’imprimé ? Par ce geste de création, que révèlent-elles d’ellesmêmes et des autres – que révèlent-ils d’eux-mêmes et des autres ?
Les contributions des chercheur·e·s et des artistes rassemblées dans ce volume abordent par l’analyse d’oeuvres, l’entretien et le témoignage, différentes modalités de documentation : du recueil de voix à l’enquête photographique, en passant par le réveil des archives. Les trajets, dans leurs distinctions individuelles, mobilisent des stratégies qui esquivent de clarifier le réel : elles en suspendent l’évidence au contraire, quitte à l’opacifier, le reconfigurer ou le poétiser. La dynamique de documentation est intégrée à l’oeuvre et exposée, projetée en fond de scène, lisible dans un personnage, élaborée en protocole de recherche-création. Sous tous ces modes, les « fictions documentées » relèvent de la quête de « soi comme un·e autre » et l’expérimentent sous une forme artistique.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 16 décembre 2020
Nombre de lectures 0
EAN13 9782304048858
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0500€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Sous la direction de AMarie Petitjean
Fictions documentées
Genre(s) et création
é ditions Le Manuscrit
Paris


Dans la même collection
Le Féminin chez J.-M.G Le Clézio , Christelle Sohy, 2010
Noirs secrets , Christiane Chaulet Achour, 2009
Féminité et expression de soi , Brigitte Riéra, 2008
Le corps à l’œuvre , Sylvie Brodziak, 2007
Pères en textes - Médias et Littérature , Christiane Chaulet Achour, 2006
Frontières des genres , Christiane Chaulet Achour, 2006
Conte et narration au féminin , Christiane Chaulet Achour, 2005

ISBN 978-2-304-04884-1
© Décembre 2020


La collection Genre(s) et création
À l’heure du combat pour la reconnaissance du droit à l’autodétermination de l’identité de genre, la création, sous toutes ses formes, demeure le lieu privilégié pour la révéler et l’affirmer. Qu’elle soit littéraire, artistique ou scientifique, il s’agit de questionner, de déconstruire, de subvertir les classifications sociales et culturelles du féminin et du masculin fabriquées par le système sexe/ genre binaire et normatif. Cette collection se propose d’une part de publier en langue française des ouvrages théoriques fondamentaux pour la réflexion, d’autre part de faire connaître des travaux de recherche susceptibles d’enrichir les savoirs et de dynamiser les pratiques.


Introduction : les fictions documentées interrogées comme geste artistique
AMarie Petitjean
Invention, it must be humbly admitted, does not consist in creating out of void, but out of chaos: the materials must, in the first place, be afforded: it can give form to dark, shapeless substances, but cannot bring into being the substance itself. Mary Shelley, Frankenstein 1 .
L’ouvrage qui s’ouvre ici porte sur la caractérisation d’un geste particulièrement fréquent dans la création contemporaine qui consiste à monter un protocole de documentation pour faire œuvre fictionnelle. Il s’inscrit dans le fil des analyses nombreuses qui justifient de lui accorder une place centrale aujourd’hui (Demanze 2019 ; James & Viart 2019 ; Bloomfield & Zenetti 2012 ; Gefen 2020 2 ), et participe d’une enquête collective menée sur les pratiques créatives pour enrichir le pôle critique et méthodologique de la recherche-création 3 .
Le recueil prend appui sur deux journées d’études intitulées « Fictions documentées », programmées en liaison avec des spectacles de la scène Points communs, au sein de l’axe « Création » du laboratoire Agora 4 . La formulation originale « fictions documentées » se départit volontairement de l’enjeu typologique présent dans l’expression « fictions documentaires ». Cette expression plus volontiers présente dans le discours cinématographique est en particulier utilisée par Jacques Rancière 5 . Préférer l’expression « fictions documentées » oblige à passer d’une problématique de repérage des effets de scénarisation d’une œuvre de non-fiction, à une problématique de rassemblement du matériau qui fera œuvre de fiction, selon une logique de dynamique de création. Le projet critique est explicitement de participation à une pragmatique du geste artistique, comme l’envisage Laurent Demanze qui sera souvent mentionné dans cet ouvrage 6 .
La dynamique de documentation, intégrée à l’œuvre et donnée à voir, s’écarte aujourd’hui clairement des enjeux de classement que l’on pouvait encore reconnaître dans l’enquête naturaliste. Elle semble toucher plutôt à un mouvement princeps du récit à la Ricœur 7 , qui ne cherche pas seulement dans le réel une impulsion initiale ou l’assurance d’une adhésion du lecteur/spectateur, mais part à la quête de « soi comme un autre » et l’expérimente sous une forme artistique 8 . C’est ainsi la « tension éthique » déjà repérée dans les enquêtes littéraires contemporaines que cet ouvrage cherche à documenter dans différents arts du langage, en donnant la priorité aux créatrices, mais sans écarter pour autant les témoignages de créateurs.
Engager la réflexion sur les processus de création artistique en donnant la priorité aux créatrices devrait relever de l’évidence. Non seulement la visibilité des femmes artistes réclame tous les efforts d’une époque qui a le devoir de corriger leur effacement de l’histoire des arts 9 , mais les chiffres montrent leur présence majoritaire aujourd’hui dans les écoles d’art et les cursus en écriture créative 10 , et un désir de plus en plus flagrant chez les jeunes écrivain·e·s, dramaturges ou chorégraphes de centrer leurs créations sur les questions de genres. Certes, la détermination genrée est beaucoup plus communément envisagée comme une convention sociale et politique que comme une convention artistique 11 . Créer n’est pas genré, ou ne se veut pas tel. Si l’histoire des arts a retenu que les femmes artistes sont moins nombreuses que les femmes muses, sous le regard esthète des hommes, le constat est rarement renvoyé à une conception de la création artistique. Les logiques à l’œuvre semblent devoir s’analyser dans les mêmes termes de répartition conventionnelle des statuts et de déséquilibre des pouvoirs que l’on trouve dans toute catégorie sociale. Pas d’espace critique possible pour penser un style artistique féminin sans sentir poindre le danger du sectarisme et de l’essentialisme. Pourtant la dénaturalisation de la répartition des rôles par le concept de genre (propre à révéler comme construit « ce qui était pensé comme le produit de différences biologiques 12 ») est bien intéressante à utiliser comme outil critique pour révéler des manières de créer. La perspective demande à prendre en compte certains points névralgiques de nos représentations collectives, comme la dimension d’autorité que comporte, dès l’étymon, la notion d’auteur 13 . Elle invite également, dans un renversement intéressant des places assignées, à interroger l’analogie fichée au cœur de la notion de création entre la capacité à façonner des œuvres et la capacité à leur donner naissance 14 . Autrement dit, c’est tout un « roman de la création » qui est en jeu, et qui déporte la réalité sociale des femmes artistes vers la question des représentations influentes, susceptibles d’innerver le cœur même des œuvres 15 . Il s’agit là, assurément, d’une pierre supplémentaire à l’évidence d’un retour du sujet dans les discours critiques sur l’art, « tournant éthique » opposé au linguistic turn des théories littéraires, à la mort de l’auteur et aux excès de la clôture de l’œuvre sur elle-même. En considérant la détermination genrée comme outil critique, c’est sans perspective argumentative prédéfinie que nous entamons un parcours à la fois dans les œuvres et dans les discours des artistes. La détermination du genre ne sera d’ailleurs pas examinée pour elle-même, mais à travers ce geste de documentation pour faire œuvre fictionnelle dont on interrogera en filigrane le caractère partagé.
Les contributions rassemblées dans cet ouvrage sont celles de chercheur·e·s et de créatrices·eurs (en littérature et spectacle vivant) interrogées par ces mêmes chercheur·e·s. L’ouvrage fait entendre la parole vivante des femmes qui créent, par des présentations de travaux doctoraux en cours, en recherche-création, et par la retranscription d’entretiens d’artistes sur leurs processus de création. Leur souhait d’aborder frontalement la question de la place des femmes dans le champ de la création, ou au contraire leur effort pour esquiver la question de l’identité genrée, donnent des pistes d’analyse qui ont été regroupées selon trois axes : celui du choix des sujets représentés, celui des modalités de l’enquête et celui de la composition et du montage. Chaque contribution analyse l’univers d’une créatrice ou d’un créateur, ou encore compare plusieurs trajets, en interrogeant, sans impératif de distinction ni de convergence de vues, les manières singulières des artistes pour élaborer leur œuvre en la documentant.
En invitant explicitement chacun·e à considérer l’ hic et nunc d’un geste de création, c’est finalement une vaste réflexion sur les enjeux que l’on assigne à la création artistique pour rendre signifiant le chaos du présent qui se trouve engagée. Tiphaine Samoyault le dit, en avant-propos de Fixxion n° 18 : « User du document, ce n’est pas seulement le classer ou l’interpréter, c’est se laisser conduire par son absence de tri et de signification immédiate, son obscurité et sa promesse. » C’est ainsi à une réflexion sur le rôle d’un processus de création, tentant de mettre en ordre la confu

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