- Des romans ? - Non : leurs vies !
464 pages
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Description

Existe-t-il des points communs entre les rapports à l'écrit de femmes migrantes qu'elles soient écrivaines ou inscrites à des cours d'alphabétisation ? C'est à travers de remarquables histoires de vie de femmes hispanophones vivant en France au XXIe siècle que cet ouvrage propose de répondre à cette question. Récits oraux, littérature et écrits ordinaires se croisent, tentant de rompre avec les cloisonnements habituels entre personnes lettrées et non lettrées. Au-delà des catégorisations qui leur sont associées, ils mettent en tension, pratiques d'écritures avérées et déclarations parfois contradictoires de leurs auteures. L'enquête ethnographique se focalise sur ce qui sera dénommé « auteurisation » - capacité visible d'écrire (être auteure) et celle du pouvoir d'agir (s'autoriser)- et interroge le doute déclaré ou sous-jacent concernant le pouvoir/savoir écrire. Les parcours d'écritures sont exposés au fil de situations biographiques variées qui résonnent singulièrement entre elles (des relations amoureuses à la liste de courses). Ainsi le récit inédit d'une réfugiée espagnole, ayant appris à lire et écrire tardivement trouve un écho surprenant avec des expériences de migrations plus contemporaines. Inclus : le récit inédit d'Isabel Gille, Une Andalouse en Bourgogne.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 07 juillet 2017
Nombre de lectures 0
EAN13 9782342154245
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0082€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

- Des romans ? - Non : leurs vies !
Delphine Leroy
Connaissances & Savoirs

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


Connaissances & Savoirs
175, boulevard Anatole France
Bâtiment A, 1er étage
93200 Saint-Denis
Tél. : +33 (0)1 84 74 10 24
- Des romans ? - Non : leurs vies !
 
Image de couverture : © Enhel 2017 Tous droits réservés
 
 
 
À Elvira et Hortense et toutes celles et ceux qui font œuvre du Quotidien
 
Préface
Sept femmes présentes le temps de se dire et sitôt disparues. « — Un Roman ? – Non leurs vies ? » l’ouvrage de Delphine Leroy à travers des rencontres improbables, un constant souci de l’autre, défie les frontières de l’ethnologie. Certes comme le disait G. Apollinaire dans le calligramme La lettre à l’océan  : « Tu ne connaîtras jamais bien les Mayas » et pourtant grâce à une empathie certaine, une certaine complicité, une attention aigue accordée à ses interlocutrices jusqu’aux moindre détails, Delphine Leroy donne sens à ces vies qui se disent le temps de rencontres savamment construites.
Amalia, Marisol, Anna et Moniqua ou Maria London, Isabel Gille, Silvia Baron Supervielle se révèlent tout au long de leur engagement dans une relation où elles se content, se dévoilent en racontant leur histoire de femmes ou d’écrivaines.
Quatre récits de vie de femmes migrantes, une voix consignée dans un texte inédit, ici intégralement reproduit, le récit fouillé d’un long parcours migratoire en contrepoint un échange trop vite interrompu avec une écrivaine reconnue.
Célèbres ou invisibles seules des femmes sont à l’œuvre, chacune à sa manière s’affirmant comme auteure.
Les récits de vie abrégés de quatre immigrées se recoupent pour dire les vicissitudes de la migration. Des parcours oh ! combien similaires à ceux de nombreuses autres femmes migrantes.
Ambiguïté des ruptures avec la famille : des parents chéris autant qu’haïs, des enfants restés au pays ou trop lourde charge pour une mère seule, des maris violents, malveillants ou impécunieux, voire, trop tôt décédés.
Nostalgie du temps passé, âge d’or injustement regretté au regard des difficultés rencontrées par des femmes immigrées.
Invention de nouveaux liens imposés par la distance : appels téléphoniques, skipe, photos, envois de cadeaux.
Heurs et malheurs de la vie en France : amitiés, rencontres sentimentales, travail, chômage, insécurité, précarité.
Des fragments de vie que les femmes s’approprient au fil de leur narration au risque de se sentir coupables, voire de se dénigrer mais ayant aussi pour enjeu une certaine estime de soi, la reconnaissance de l’autre, le secret espoir que leurs récits paraissent dans un livre. Être écoutées, entendues, partager sa vie, prétextes offerts par la nécessité, le désir, la difficulté d’apprendre le français.
Car tel fut le point de départ de la relation. Une institution dispensant des cours de langue.
La poétique de rencontre diffère pour celles qui ont affronté l’écriture, conduit à terme des ouvrages : Maria réfugiée chilienne, Isabelle réfugiée espagnole et Silvia auteure reconnue.
Isabel est l’auteure d’un manuscrit jamais publié. Elle entend laisser à ses enfants la mémoire de son parcours de réfugiée, son histoire inscrite dans l’Histoire. Le texte de ce récit Une Andalouse en Bourgogne , intégralement publié au cœur de l’ouvrage de D. Leroy, témoigne des hésitations, des scrupules d’une femme à se faire auteure. Le texte relégué dans un « garde mémoire », oublié, n’était pas destiné à un large public. Isabel le réservait à ses descendants. Une écriture inédite, un devoir de mémoire en somme.
Le rapport à l’écriture de Maria est plus sinueux. Son ouvrage El hilo del medio , saga familiale reconstruite à partir de multiples recherches, notamment auprès des membres de sa famille, est publié au Chili puis retiré des librairies à la demande même de cette dernière pour qui l’auteure aurait dû rester incognito, ne pas se dévoiler. Néanmoins l’auteure persiste et publie son texte en France sous le titre Tisseuse de mémoires de la Patagonie aux Balkans. Devenue auteure pour témoigner, aidée puis empêchée par sa famille, Maria persévère dans son être d’écrivaine et publiera d’autres livres.
En contre point une expérience, une conversation suivie, puis brusquement interrompue, avec une écrivaine reconnue, de renommée internationale. Des mots, des paroles d’une écrivaine. Découverte faite au hasard des promenades de D. Leroy, Silvia a publié, entre autres, un ouvrage intitulé Le Pays de l’écriture dans lequel elle revient sur son expérience d’auteure. Un tel titre ne pouvait échapper à D. Leroy. Elle s’en saisit pour proposer échanges et connivences avec Silvia. Relation annulée lorsque Delphine soumet ses transcriptions brutes à Silvia. Eléments d’intimité, style oral, l’auteure ne souhaite pas aller plus avant dans la relation qui risque, craint-elle, de trahir son image.
De récits adressés, en écritures déléguée, de femmes « apprenantes » en auteures confirmées – Des romans ? – Non leurs vies nous mène sur des chemins inédits.
Le livre est attachant, parfois déroutant, toujours stimulant de par son ouverture à l’autre, son souci constant de ne pas trahir celles qui ont confié des fragments de leur vie à celle qui entendait les publier.
Faire parler pour écrire pourquoi ? Pour qui ? C’est finalement à une réflexion sur les implications, pour les femmes, du dire et de l’écrire que ce livre nous convie.
Catherine Quiminal Professeure émérite URMIS. Université Paris Diderot
 
Préambule : pourquoi ce livre ?
L’écriture de cet ouvrage ne s’est pas inscrite dans la droite lignée de la thèse, comme une prolongation évidente, mais bien dans un travail de maturation quant au sens que cette publication recouvrait. Plusieurs fois, des collègues-amis m’ont conseillé de rédiger des articles à partir de mon travail de doctorat plutôt qu’un livre, dans une visée de reconnaissance universitaire et de potentialité de carrière.
Je n’ai pourtant pas suivi ces précieux et judicieux conseils, non pas par mépris de la reconnaissance de mes pairs, ni par la volonté express de saborder tout plan de carrière, mais parce que ce choix ne paraissait pas en adéquation avec mon travail de recherche et la visée qu’il recouvrait.
La distance entre ce projet et sa possibilité matérielle m’a aussi amenée à redéfinir ce qui me semblait important de publier et les raisons profondes de ce désir. L’achèvement de mon travail de recherche était l’écriture de la thèse, qu’est-ce qui me poussait donc à vouloir publier ?
La première chose essentielle est l’une des phrases récurrentes des interviewées : elles pensent toutes, au moment de nos entrevues, malgré mes multiples dénégations, que je vais écrire un livre à partir de leurs histoires. Elles me racontent leurs parcours dans l’espoir et/ou l’envie qu’il soit inscrit et visibilisé. Publier leurs récits est une forme de contre-don, de respect d’une promesse qu’elles ont formulée, presque à mon corps défendant. C’est de l’ordre de la parole, du rêve que l’on a suscité et auquel on souhaite restituer une petite partie aux principales intéressées. J’ai écrit ce livre surtout parce que je crois qu’Amalia, Mari-Sol, Maria et Anna en avaient le désir 1 .
Ensuite, la conviction profonde, qui a traversé mon sujet de recherche, que l’exposition de parcours singuliers est à même de parler au plus grand nombre et d’éclairer des pans peu visibles de nos sociétés de l’hyper. Il semble que nous soyons à la fois dans des enjeux de sur-médiatisations et de normalisation excessive de ce qui est exposé en matière de récits migratoires. Proposer à la lecture des expériences contrastées et qui se jouent des cadres – lettrées/non lettrées ; pouvoir/vouloir apprendre – dans lesquels le sens commun tente de les réduire, me paraissait de nature à complexifier et donc enrichir nos représentations communes sur le sujet.
Enfin il y a eu un contretemps majeur : je ne parvenais pas à retrouver la trace des enfants d’Isabel Gille, qui m’avaient précédemment donné leur accord pour travailler sur le récit d’ Une Andalouse en Bourgogne dans le cadre de ma thèse
Alors que cette quête paraissait impossible, je m’apercevais que publier un ouvrage, sans le récit inédit d’Isabel Gille n’aurait pas ou peu de sens 2 . Je souhaitais vraiment que des lecteurs puissent avoir accès à cette histoire, produite alors même que son auteure était en cours d’alphabétisation. Il y a eu beaucoup de joie à retrouver les deux fils d’Isabel (décédée en 2011) et à échanger sur ce projet qui devenait ainsi un peu le leur.
C’est donc stimulée par ces attentes individuelles et collectives que je me suis auteurisée à vous proposer la lecture de cet ouvrage, qui, je l’espère répondra aux attentes que chacun-e y placera.
Enracinements et intuitions
Le questionnement qui alimente cet ouvrage émerge en 2008, alors que je réalise des entretiens ethnographiques avec « Nora 3  », inscrite en cours d’alphabétisation depuis des années dans son quartier. Elle me dévoile que non seulement elle est lettrée dans sa langue maternelle (l’arabe) mais qu’elle rédige en secret son autobiographie, en français, pour ses enfants. Cette révélation va produire un basculement important dans mes représentations de l’écrit et notamment sur les catégorisations employées en formation d’adultes 4 . En effet, deux des principales catégories employées dans les cours de langue pour les personnes migrantes sont les cours d’alphabétisation et les cours de FLE 5 qui correspondent à une démarcation importante vis-à-vis de l’appropriation de l’écrit. L’assignation à u

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