Couple, Filiation et Parenté aujourd hui : Le droit face aux mutations de la famille et de la vie privée
295 pages
Français

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Description

Creuset où se construit la personne, mais aussi cellule de base de la vie sociale, la famille est aujourd’hui un enjeu central de société. Retard et diminution des mariages, accroissement du nombre de divorces, des familles recomposées et monoparentales, accession plus tardive des jeunes à l’autonomie face à ces mutations, quels points de repère se donner pour construire l’indispensable politique de la famille dont notre pays a besoin ? En matière de filiation, d’autorité parentale, de mariage, de divorce, de concubinage, de succession et de protection des enfants, comment adapter le droit aux réalités actuelles ?Irène Théry, sociologue, auteur du Démariage, propose dans ce rapport un état des lieux de la famille et de la vie privée d’aujourd’hui et présente les fondements de ce que devrait être une démarche ambitieuse et novatrice pour la France.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 juin 1998
Nombre de lectures 4
EAN13 9782738141248
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0750€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

© O DILE J ACOB , JUIN  1998 15, RUE S OUFFLOT , 75005 P ARIS
www.odilejacob.fr
ISBN : 978-2-7381-4124-8
Le code de la propriété intellectuelle n'autorisant, aux termes de l'article L. 122-5 et 3 a, d'une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l'usage du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation ou réproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (art. L. 122-4). Cette représentation ou reproduction donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo .
Remerciements

Je tiens à remercier très vivement toutes les personnes qui ont contribué à l’élaboration de ce rapport.
En effet si, conformément à la mission qui m’était confiée, ce texte est une réflexion personnelle dont les conclusions n’engagent que moi-même, mon travail est loin d’avoir été solitaire.
Il a bénéficié, en particulier, de la réflexion collective de la commission « Prospective de la famille », qui a travaillé sans relâche dans des délais extrêmement courts.
Que toutes celles et ceux qui, au sein de cette commission, m’ont fait bénéficier de leur compétence, de leurs critiques et de leurs suggestions trouvent ici l’expression de ma chaleureuse gratitude.
Je remercie également le Service des droits des femmes du ministère de l’Emploi et de la Solidarité, qui a accueilli très aimablement nos travaux dans ses locaux.
Enfin, je dois à Marianne Schulz, qui m’a assistée pour l’ensemble de ce travail, et à Muriel Moritz, qui en a assuré le secrétariat, plus que des remerciements. Sans elles, ce rapport n’aurait simplement pas pu voir le jour.
PREMIÈRE PARTIE
Les transformations de la famille
Pour une nouvelle approche


La famille a changé. Ce qui pouvait passer il y a trente ans pour une péripétie est désormais reconnu comme une véritable mutation. Les indices démographiques sont les indicateurs les plus éloquents de ce bouleversement, qui affecte tous les pays occidentaux, à des rythmes et des degrés divers, mais dans des directions semblables. La France, qui sera le seul pays étudié dans ce rapport, occupe dans l’ensemble au regard de ces changements familiaux, une position moyenne en Europe. Dans notre pays, les chiffres classiquement retenus sont connus, et semblent parler d’eux-mêmes :
baisse du taux de nuptialité : 6,2 pour mille en 1980 ; 4,9 pour mille en 1997,
baisse du taux de fécondité : 1,9 enfant par femme en 1980 ; 1,7 en 1997,
augmentation des couples non mariés : 4,2 millions de personnes parmi les 29,4 millions vivant en couple en 1994,
augmentation des naissances naturelles : 11,4 % des naissances en 1980 ; 37,6 % en 1995,
augmentation du taux de divortialité : 22,5 % en 1980 ; 38,3 % en 1996,
sur fond d’un allongement spectaculaire de l’espérance de vie : elle atteint, en 1996, 74,1 ans pour les hommes et 82 ans pour les femmes.
(Voir l’ Annexe 1  : données statistiques par Henri Leridon et Catherine Villeneuve-Gokalp.)
Pourtant, tout se passe comme si nous ne parvenions pas à établir une véritable analyse de ces changements. Nous mènent-ils au désastre et à la « mort de la famille » comme certains le prétendent ? Nous conduisent-ils à l’inverse à un renouveau du lien familial, émancipé des modèles autoritaires du passé ? Ou ni l’un ni l’autre ? L’opinion hésite, ballottée entre des messages contradictoires.

I. Famille/individu : une alternative récurrente
Pourquoi est-il si difficile d’interpréter la mutation de la famille ?
Certes, le changement, quand il est profond, porte inévitablement sa part d’opacité. En l’occurrence, personne n’avait prévu les renversements qui ont commencé à se produire au milieu des années soixante. Non seulement la tendance est de prolonger l’existant, mais le modèle de la famille des années cinquante avait été théorisé, sous l’influence du sociologue américain Talcott Parsons, comme le plus conforme au développement des forces productives (Parsons, 1955). Les « surprises du démographe » (Roussel, 1985) ont incité à la précaution, et il s’est bien écoulé une dizaine d’années entre les premiers renversements des courbes démographiques et la conscience, dans l’opinion, d’un changement très profond. Tout cela est normal.
La question en revanche se pose bien différemment trente ans après. La sociologie de la famille a connu un essor très important. Au-delà, les travaux sur la famille se sont accumulés dans toutes les disciplines des sciences humaines, prenant une mesure plus exacte des phénomènes, explorant la diversité des comportements contemporains, proposant des interprétations nouvelles. En outre, l’expérience même du changement, les années passant, puis les décennies, aurait dû conduire à un certain consensus social sur la signification des bouleversements à l’œuvre. Pourtant, ni ces travaux, ni cette expérience n’ont vraiment réussi à faire émerger une interpétation commune dans l’opinion. Tout se passe comme si rien n’avançait. Pourquoi ?
On doit mesurer ici l’impact déterminant du caractère fortement idéologique de la question familiale. Il est très ancien. Depuis deux siècles, le débat social sur la famille demeure marqué par l’opposition entre « familialistes » et « individualistes ». Cette opposition, qui prolonge la dichotomie entre la famille et l’individu, deux valeurs entre lesquelles il faudrait choisir, n’est pas propre à la France. Aux États-Unis, en Grande-Bretagne, on retrouve le même affrontement, parfois plus accusé encore que chez nous. En France, nous pouvons en quelque sorte dater historiquement le phénomène : l’opposition entre les deux « camps » a pris naissance dans les années décisives qui mènent de l’aube de la Révolution – qui promulga des lois véritablement révolutionnaires en matière familiale – au Code Napoléon de 1804, premier Code civil des français. Elle s’est toujours poursuivie depuis. Quand l’ampleur des bouleversements contemporains est devenue patente, elle a structuré d’emblée le cadre d’analyse des changements, au sein duquel s’affrontent les adversaires.
On doit comprendre que ce n’est pas le manque d’interprétation qui fait l’opacité et l’incertitude actuelles, mais à l’inverse le poids de la surinterprétation. Le jugement, positif ou négatif, s’est imposé avant tout et a forgé, sans que l’on en prenne conscience, un cadre obligé au débat.

A. Débat sur la famille : un cadre imposé
Quel est ce cadre ? Un paradoxe demeure aujourd’hui très peu compris. Le débat social sur la famille, très fortement marqué par les désaccords idéologiques, est aussi consensuel sur le cadre global d’analyse qu’il l’est peu sur les jugements portés. Il y a peu de discussion sur les indicateurs retenus, la liste en est quasi obligée et semble aller de soi. Il y a peu de discussion sur le basculement du milieu des années soixante, et l’opposition presque absolue qu’il dessine entre les deux périodes de l’après-guerre. Il y a peu de discussion enfin et surtout sur l’interprétation des changements.
L’interprétation communément admise rapporte les mutations de la famille à trois grandes transformations :
Une transformation des références : l’individualisation. Elle est perçue comme passage de la référence au groupe à la référence à l’individu. L’individu devient la véritable « cellule de base » de la société, la famille étant désormais non un groupe prédéfini mais le réseau que dessinent a posteriori des échanges interindividuels de plus en plus autonomes et électifs. Le risque induit par cette redéfinition de la référence est l’atomisation du groupe, tendance en partie contrebalancée par les besoins affectifs et les intérêts matériels des individus.
Une transformation des normes : la privatisation . Conséquence de la transformation précédente, elle la relaie et l’assure. L’individu prenant le pas sur le groupe, la norme collective en est radicalement dévaluée. Toute intrusion de la règle, en particulier quand elle prend une forme prescriptive, apparaît comme une immixtion de la société dans l’espace privé de l’autonomie individuelle. Parce que l’individu ne prend sa véritable valeur que dans l’accomplissement de son authenticité singulière, les échanges intersubjectifs ne peuvent être régulés que par la négociation personnelle, la communication privée. Le droit reflue au profit de la régulation gestionnaire.
Une transformation des modèles : la pluralisation . Le passage de la famille (au singulier) aux familles (au pluriel) est à son tour la conséquence des deux premières transformations. L’individu cherchant à accomplir son authenticité, privilégiant l’échange électif et intersubjectif, la famille se diversifie : familles légitimes et naturelles, familles biparentales, monoparentales et recomposées, marquent une profonde diversification du paysage familial. Ces catégories structurent désormais le débat public, qui est passé imperceptiblement de la notion de diversité des situations à celle de pluralisme des modèles familiaux.
Individualisation, privatisation, pluralisation de la famille : les sciences humaines n’ont pas échappé au cadre d’analyse imposé par le contexte socio-politique, et ont parfois contribué à le théoriser. Mais la force de ce cadre d’interpétation, qui n’a pas bougé depuis près d’un quart de siècle, est ailleurs. Elle tient d’abord à ce qu’il nourrit en permanence les affrontements idéologiques sur lesquels il s’est construit, en particulier l’opposition entre la « valeur famille » et la « valeur individu ».
De l’ individualisation , on retiendra d’un côté, l’individualisme et l’égotisme, le refus des engagements, le désir à court terme, le triomphe du chacun pour soi. De l’autre, l’épanouissement, l’authenticité, l’élection affective et le triomphe de l’amo

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