Le Cerveau sur mesure
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Description

Notre cerveau n’est pas un organe figé une fois pour toutes quand nous devenons adultes. Il évolue tout au long de notre vie, en fonction aussi de notre histoire, de notre culture. Et cette plasticité ouvre des perspectives pour tous ceux qui sont atteints de troubles liés à un traumatisme ou à une maladie dégénérative. Peut-on envisager de recouvrer la parole après un accident vasculaire cérébral ? Va-t-on vers une médecine régénératrice ? À côté du cerveau réparé, n’est-ce pas un cerveau augmenté, voire dopé, qui se profile grâce aux programmes d’entraînement cognitif, aux psychostimulants, aux molécules « intelligentes » et autres implants ? Mémoire surpuissante, vision nocturne parfaite, contrôle à distance de robots : que nous préparent les nouvelles neurosciences ? Et si l’immortalité n’était pas seulement un rêve ? Auteur du Voyage extraordinaire au centre du cerveau et de Biologie des passions, membre de l’Académie des sciences et de l’Académie de médecine, Jean-Didier Vincent est professeur émérite à l’université Paris-Sud et a dirigé l’Institut Alfred-Fessard du CNRS à Gif-sur-Yvette. Il a reçu en 2010 le prix Fémina essai. Pierre-Marie Lledo, médaille de bronze du CNRS, a reçu le prix de neurologie de la Fondation pour la recherche médicale en 2010. Membre de l’Académie européenne des sciences, il dirige le laboratoire de recherche Perception et mémoire à l’Institut Pasteur et le laboratoire Gène, synapse et cognition du CNRS. 

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 12 janvier 2012
Nombre de lectures 1
EAN13 9782738181954
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0600€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

© ODILE JACOB , JANVIER 2012
15, RUE S OUFFLOT , 75005 P ARIS
www.odilejacob.fr
EAN : 978-2-7381-8195-4
Le code de la propriété intellectuelle n'autorisant, aux termes de l'article L. 122-5 et 3 a, d'une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l'usage du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation ou réproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (art. L. 122-4). Cette représentation ou reproduction donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo
À la mémoire de mon père, qui a inspiré le titre de cet ouvrage. À ma très chère mère pour son indéfectible amour. À toi seule, tu incarnes toute l’injustice d’une maladie neurodégénérative devenue malheureusement trop fréquente. P.-M. L. À mes enfants et petits-enfants, dont le cerveau porte les espoirs de mon génome. J.-D. V.
Introduction

« L’homme et son cerveau, quelle affaire ! »
Anonyme.

Quelle merveille ! devrait-on dire. Le cerveau d’un humain n’appartient qu’à lui, mais il n’en éprouve pas la présence, de la même façon qu’il ne sent pas sur son corps un costume si bien ajusté à ses mesures qu’il en est comme oublié. La tête est parfois lourde et douloureuse mais, paradoxe, le cerveau, organe de toutes les sensations, est en lui-même insensible : une masse molle qui s’offre sans douleur au bistouri du neurochirurgien. Taillé sur un patron qui est le même pour toute l’espèce, il exprime l’être propre de chaque individu , autrement dit de son âme – avec toute la prudence qui convient à l’emploi d’un mot chargé de métaphysique.
Longtemps, la forme de ces 1 500 grammes de matière molle et grisâtre a résisté à l’analyse des observateurs. L’évêque Niels Stensen, nommé aussi Nicolas Sténon 1 (1638-1686), et dont l’Église catholique a fait un saint, était un grand savant, un anatomiste, un géologue et aussi un théologien, avant de se consacrer à la conversion des luthériens. Il dénonçait « la prétention de ces gens [Descartes et consorts] qui ont l’affirmation si prompte [et] vous donneront l’histoire du cerveau et la disposition de ses parties avec la même assurance que s’ils avaient été présents à la composition de cette merveilleuse machine et que s’ils avaient pénétré dans tous les desseins de son grand architecte 2  ». Aujourd’hui, après trois siècles d’anatomie et soixante années de neurosciences modernes 3 , bien des voiles se sont levés sur la forme du cerveau et les fonctions qui en dépendent. Ceux-ci sont les produits d’une histoire et, grâce à Darwin et à sa théorie de l’évolution des espèces, il n’est plus nécessaire de faire appel aux desseins d’un grand architecte. Que les amateurs de mystère se rassurent cependant, le temps n’est pas encore venu, malgré les efforts constants des chercheurs, de comprendre où se nichent tous les secrets de l’âme humaine ; au grand dam des constructeurs de machines destinées à lire les mystères de la pensée, lesquelles pourraient se révéler n’être que des machines à décerveler 4 .
L’histoire du cerveau humain se confond avec l’odyssée de notre espèce. Celle-ci apparaît, il y a environ deux cent mille ans, porteuse d’un cerveau moderne qui n’a pas évolué depuis. Qui sont ces hommes qui apparaissent au début de l’ère quarternaire ? Mâles ou femelles, ils vont peau nue et chevelus. « Lui » a appris très vite à protéger son pénis des regards des autres et des offenses des sentiers épineux. « Elle » exhibe volontiers ses seins pendulaires et ses fesses charnues, blasons de sa féminité. Ils n’ont ni honte ni pudeur ; les vêtements viendront plus tard avec la morale et la loi. Aucune émotion ne leur est étrangère, mais ils sont avant tout doués de compassion, caractère issu de la sélection naturelle, fondement sur lequel l’espèce s’est développée. Jamais ces êtres aux canines courtes et dépourvus de griffes n’auraient pu survivre sans l’entraide et la capacité de pénétrer l’âme d’autrui pour y lire des intentions ou des sentiments personnels. Leurs pas rythment leur pensée qui circule librement d’un cerveau à l’autre. Leurs yeux éclairent le jour et en chassent la solitude. Ils s’endorment la nuit, écrasés par le poids des étoiles que soulèvent vaguement les flammes du feu.
Ce que tout jardinier sait est vrai aussi pour l’homme : c’est un produit de la terre. Il est donc naturel que son sort soit lié à celui du sol qui l’a fait naître. Il y a de cela six à sept millions d’années, l’Afrique de l’Est subit une sécheresse qui amène la disparition de la forêt humide, remplacée par une savane arborée. Impropre aux déplacements de branche en branche, celle-ci favorise l’essor de la bipédie chez les grands singes et leur locomotion terrestre 5 . Ils sont l’avant-garde de l’humanité avec un cerveau de moins de 400 grammes. La fameuse Lucy est le fleuron de ces australopithèques qui peuplent la Terre à la fin de l’ère tertiaire. Viennent ensuite les Homo . Si le genre Homo habilis se cantonne à l’Afrique, un autre Homo , erectus , colonise l’Europe il y a deux millions d’années.
Au commencement de cette préhistoire, on ne retrouve qu’une poignée d’individus d’un drôle de genre. Ils sont debout, la tête droite sur les épaules. Ils vont de l’avant ; leurs yeux étonnés regardent le monde 6 . Ils sont dispersés 7 sur un territoire correspondant au sud de l’Éthiopie actuelle, autour de la basse vallée de l’Omo, près du lac Turkana 8 . Ces Homo habilis maîtrisent des techniques très efficaces de débitage des pierres, galets et silex pour produire des lames et outils. Deux millions d’années avant notre ère, ces pèlerins du monde ont accompli la lente conquête de la surface terrestre. L’artisan habile n’était pas encore un intellectuel accompli : il attendra pour cela que son cerveau double de taille 9 . La priorité pour lui est maintenant de savoir se servir de sa tête. Pour contrer les changements climatiques et pouvoir se nourrir au-delà des terres natales, le genre Homo choisit la dissuasion intellectuelle en développant son encéphale et adopte un régime à large spectre alimentaire, viandes comprises. Le fait omnivore et son opportunisme se sont imposés au même titre que le fait intellectuel. Les deux ont d’ailleurs partie liée. Adaptation au fait carnivore, les canines d’ Homo se sont raccourcies. Elles ont été remplacées progressivement par des outils et par une tolérance accrue à l’égard des congénères qui préféraient occuper leur temps à perfectionner leurs modes de chasse et à partager la nourriture que de se mordre les uns les autres.
Avec ses 900 grammes de cerveau en moyenne, Homo erectus a inventé la société, c’est-à-dire le partage du travail, la domestication du feu, la cuisson des aliments et les technologies de l’argile. C’étaient encore la Terre et son climat qui commandaient les modifications de l’espèce humaine. Neuf âges glaciaires s’étalent entre – 900 000 et – 15 000 ans ; signes encore visibles aujourd’hui des oscillations climatiques lentes qui ont perturbé la surface du globe 10 .
Arrivés en Europe il y a plus d’un million d’années, les premiers hommes, y compris le fameux Cro-Magnon, se sont retrouvés pris au piège par les glaciations. Ces longues périodes glaciaires avaient modifié profondément les paysages, le contour des terres et le niveau des mers ; un pont continental de plus de mille kilomètres reliait alors l’Alaska et la Sibérie.
L’archéologie paléolithique a mis au jour quelques-uns de ces lointains mystères qui jalonnent ces périodes si fécondes en événements capitaux qui ont scellé le destin de l’homme moderne. Les paléoanthropologues nous apprennent que nous aurions quatre ancêtres communs appartenant au phylum des hominidés 11 . C’est en particulier grâce à l’avènement de la génétique anthropologique que cette classification a été réalisée. Ainsi distingue-t-on facilement le néandertalien d’ Homo sapiens par leurs gènes respectifs, mais représentaient-ils vraiment deux espèces différentes 12  ? La question reste posée dans la mesure où certaines populations de sapiens possèdent jusqu’à 2 % de gènes néandertaliens, entre autres le peuple français. Cette contribution néandertalienne au génome de l’homme moderne, très discrète, mais incontestable, montre que l’interfécondité a été possible entre Neandertal et Homo sapiens 13 . Serions-nous devenus des Homo neandersapiens  ?
Homo floresiensis a été découvert en septembre 2003 dans une caverne de l’île de Flores (à Java) en Indonésie. Il vient compliquer cette saga. On date entre – 12 000 et – 95 000 les restes de cet Homo doté d’un petit cerveau (380 cm 3 ) et dont la capacité crânienne est plus proche de celle du chimpanzé que celui de sapiens . Pourtant, cette ébauche d’ Homo était déjà capable de fabriquer des outils aussi complexes que son cousin sapiens . Le mystère reste donc entier.
Enfin, une fillette ayant vécu il y a plus de cinquante mille ans a été découverte sur le site archéologique de Denisova, au sud de la Sibérie occidentale 14 . Nouvelle espèce d’hominidé ou une sous-espèce de Neandertal ? Les spéculations sur l’existence de ces denisoviens vont bon train. D’aucuns suggèrent voir ici la preuve de l’existence d’un néandertalien asiatique fort distinct du genre Homo . D’autres, au contraire, y voient plus volontiers la preuve d’une nouvelle espèce ayant vécu avant les néandertaliens, une sorte d’ante-néandertaliens. De nouveau, ce sont les analyses génétiques qui viennent apporter leur lot de surprises. Les denisoviens se seraient reproduits avec les Homo sapiens puisque les analyses génétiques réalisées chez les sapiens originaires de Mélanésie et de Nouvelle-Guinée montrent la présence de gènes denisoviens. Force est de constater que l’évolution de l’homme moderne ne

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