Schoelcher
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Schoelcher , livre ebook

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Description

« Loin d’être ma muse, elle fut mon souffle de réflexion philosophique. Je la nommerai tout au long de cet essai “ma petite beurette”, et vous comprendrez pourquoi... C’est une fille issue d’une grande famille et d’une longue lignée. Lorsque nous nous sommes rencontrés la première fois, elle était à la recherche de son petit... frère, un petit ange blond, enfant philosophe qui voulait changer le monde. Le drame de son existence est de ne l’avoir jamais revu. Elle m’a dit qu’aux dernières nouvelles, il s’était perdu dans le désert comme nombreuses de nos utopies. »

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 03 avril 2013
Nombre de lectures 1
EAN13 9782342004472
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0060€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Schoelcher
Frédéric Compin
Publibook

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14, rue des Volontaires
75015 PARIS – France
Tél. : +33 (0)1 53 69 65 55
Schoelcher
 
 
 
 « Évoquer Schœlcher, ce n’est pas invoquer un vain fantôme, c’est rappeler à sa vraie fonction un homme dont chaque mot est encore une balle explosive… Schœlcher dépasse l’abolitionnisme et rejoint la lignée de l’homme révolutionnaire : celui qui se situe résolument dans le réel et oriente l’histoire vers sa fin. »
Aimé Césaire, Extrait de « l’Introduction de Esclavage et Colonisation », recueil de textes de Victor Schœlcher, 1948
 
 
 
 
Avant-propos
 
 
 
L’histoire que je vais vous raconter pourrait vous sembler banale, étant le fruit d’une rencontre classique entre l’enseignant de banlieue parisienne que je suis et une jeune femme de vingt ans, originaire de Kabylie. Pourtant, vous découvrirez qu’à bien des égards, l’échange que nous avons eu s’apparente à un long chemin de sagesse.
On dit souvent que lorsque l’élève est prêt, le maître apparaît, je pense aujourd’hui que l’inverse demeure encore plus vrai. C’est sans doute la raison pour laquelle j’ai souhaité vous faire part de quarante de nos échanges, réflexions et conversations. Quarante, car, comme me l’a dit « ma petite beurette », c’est à quarante ans que l’on accède selon sa religion à l’état d’adulte. Loin d’être ma muse, elle fut mon souffle de réflexion philosophique. Je la nommerai tout au long de cet essai « ma petite beurette », et vous comprendrez pourquoi…
C’est une fille issue d’une grande famille et d’une longue lignée. Lorsque nous nous sommes rencontrés la première fois, elle était à la recherche de son petit… frère, un petit ange blond, enfant philosophe qui voulait changer le monde. Le drame de son existence est de ne l’avoir jamais revu. Elle m’a dit qu’aux dernières nouvelles, il s’était perdu dans le désert comme de nombreuses de nos utopies. Je l’ai vue bien souvent rieuse, joyeuse et triste à en pleurer.
On ne peut pas faire le deuil d’un tel petit… frère.
Son petit… frère nous a guidés bien souvent, il suffisait qu’ensemble nous regardions en direction de Proxima du centaure pour qu’un souffle étrange vienne nous murmurer de ne jamais abandonner.
Ma « petite beurette » et moi avons parcouru ensemble la plus belle des aventures philosophiques, refaire le monde à notre convenance pour le bonheur de tous ; c’était osé, avouez-le, et il nous fallut bien du culot, et je rajouterai aussi du talent, pour vous le livrer. A vous de décoder chacune de nos pensées, car si, comme le disait Saint-Just, « le bonheur est une idée neuve en Europe », il est difficile à construire, éphémère à vivre et rapide à compromettre. Alors laissez-vous tenter le soir avant de vous coucher, lorsque vous fermerez les yeux, une « petite beurette » apparaîtra peut-être, elle enfermera dans sa petite main la main de son petit… frère et ensemble vous ferez le plus beau des rêves… vivre de nouvelles utopies…
 
 
 
Rencontre
 
 
 
Elle était blonde aux cheveux bouclés, se tenant debout à la grille du lycée. Je dois avouer que je ne l’avais pas vue lorsqu’elle m’interpella et pourtant, qu’elle était belle avec sa silhouette svelte et son teint légèrement et étrangement bronzé pour un trente et un décembre. Elle avait fière allure, et je semblais ailleurs.
— Bonjour monsieur, me dit-elle
— Bonjour mademoiselle, répondis-je sans faire plus attention à la nécessaire formule de politesse que l’on apprend aux enfants et que les parents oublient si régulièrement.
Le lycée était désert, c’est étrange un lycée en hiver, quand le froid cingle votre visage et qu’aucun bruit d’élèves ne couvre le souffle du vent. Un lycée dépeuplé qui attend le siège d’une rentrée pour se repeupler de vies et de cris, c’est étrange de venir à la saint-sylvestre faire le bilan de son année devant les grilles fermées, et cependant j’étais là. Elle était venue sans dire un mot, sans faire de bruit, sans être annoncée, sans être reconnue, sans m’être connue et pourtant j’en connais des élèves et des étudiants ! Elle avait l’âge de mes étudiantes, vingt ans sans doute, je ne pense pas moins et je ne vois pas plus. Vingt ans est une belle formule pleine de certitude pour faire de beaux projets. Je n’ai jamais imaginé qu’elle aurait pu être ma fille, elle n’imagina jamais non plus que je sois son père.
Cette rencontre était celle de deux adultes, une jolie petite blonde originaire de Kabylie et moi, le narrateur de cette rencontre. Elle aurait très bien pu écrire ce qui va suivre mais elle m’a laissé le faire, non pas que mon talent soit supérieur au sien, mais je l’ai compris plus tard, parce qu’elle savait que ça me ferait plaisir. C’est enfantin le plaisir et pourtant de nombreux adultes l’ont oublié et de nombreux enfants ne l’ont jamais connu ou si peu qu’ils ne s’en souviennent plus. Il faut beaucoup d’altérité pour aimer donner du plaisir, mais j’ai compris plus tard que celui qui donne n’est en rien dépossédé puisqu’il renouvelle sans cesse le bonheur de faire plaisir.
C’est vraiment enfantin le plaisir, un peu comme un gâteau d’anniversaire que l’on partage ; si on le garde pour soi il n’y a pas d’invités et sans invités pas de fête et sans fête pas de gâteau, c’est logique non ?
Elle me fixa, mes yeux s’écarquillèrent.
— C’est un hasard de coïncidence d’être ici, dit-elle !
— un hasard de coïncidence ?
Étrange formule qui s’empara de mon esprit et qui tourne encore les soirs d’insomnie ou les soirs d’euphorie, elle l’avait prononcée sans que je lui pose la question. Ce fut sa première phrase. Elle semblait ne pas avoir froid.
Intuitivement, elle m’avait donné une clé, c’est étrange les clés lorsqu’on n’ouvre pas la bonne serrure, on est souvent embarrassé, et je dois admettre que j’étais intrigué par la multitude de serrures qui se présentaient à moi avec une seule clé.
— vous vous ennuyez de l’école pour être là un 31 décembre ?
— Non, même si cela peut surprendre, mais c’est le jour idéal pour faire le bilan de l’année écoulée, regarder une dernière fois derrière soi.
— Moi non plus je ne vis pas dans le passé, d’ailleurs, c’est trop triste !
— Trop triste ?
— Oui, j’ai perdu mon frère un 31 décembre, il avait des cheveux blonds bouclés, un vrai petit roi du désert, je regarde chaque soir les étoiles et je scrute Proxima du centaure.
 
 
 
…!…
 
 
 
Elle me fixa du regard ; je m’en souviens parfaitement, il était si profond et en même temps déstabilisant.
— C’est étrange, me dit-elle, je me faisais la réflexion que le 31 décembre devait être un jour plus ordinaire que la rentrée pour un prof.
Je retins ma respiration et demeurai sans voix un court instant. Instantanément, cette question m’apparut obscure. Je lui répondis laconiquement
— Ce n’est pas faux pour la plupart d’entre eux.
— Mais vous, vous venez ici pour faire le bilan de votre année, vous n’auriez pas pu rester chez vous un jour pareil ?
A ce moment là, elle me sembla culottée, à l’image de ces enfants qui ne doutent de rien et se permettent innocemment toutes les questions, l’air de ne pas y toucher.
— Je ne vous aurais pas rencontrée !
Cela m’apparut la formule la mieux adaptée et peut-être la plus ironique qui me vint à l’esprit.
— La rentrée, ce n’est pas le jour le plus important ?
Elle insistait lourdement, alors je me mis à philosopher, du moins à essayer, en pensant intérieurement qu’elle lâcherait prise.
— Si, pour ceux qui ont peur, lui répondis-je laconiquement.
— Vous n’avez pas peur alors ?
Nous entamâmes une conversation directe, à armes égales.
— Jamais quand je suis ici, insistai-je à ce moment là, mi-agacé, mi amusé.
— Moi, j’ai vu des profs anxieux, agressifs, paniqués le jour d’une rentrée. D’ailleurs, un prof qui a peur tient un discours répressif, affirma-telle.
— Bon honnêtement, je vais tout vous dire, le 31 décembre est bien plus important que la rentrée car je vis au rythme civil et non scolaire.
Je pensai que la conversation allait s’arrêter et que sa soif de curiosité serait étanchée, mais elle continua.
— vous semblez détaché alors ?
Je ressentis cette question comme une remise en cause personnelle et me justifiai.
— D’après vous, si je l’étais, est-ce que je serais aux portes du lycée aujourd’hui ?
— Non, apparemment ! Mais si on vous écoute, on pourrait penser que vous vivez à côté de l’Ecole et non dans l’Ecole.
— En fait, je vis pour l’Ecole et non à cause de l’Ecole.
Quand je repense à cette réponse, il me vient à l’esprit l’entrée vers un chemin de sagesse. Je compris qu’elle m’aiderait à me révéler à moi-même par ses questions. C’est un étrange sentiment que d’être un maître interrogé par un élève. L’inversion des rôles peut se réaliser si le questionnement est perspicace.
En l’occurrence, il l’était !
— Dans le pays de mon frère, les profs sont nostalgiques lorsqu’ils partent en vacances, ici ils le sont quand ils reviennent, moi j’ai le blues quand je quitte une classe.
— Je comprends, on n’oublie jamais sa première Ecole.
— Mais pour revenir, pourquoi vous ne faites pas le bilan à la fin de l’année scolaire, ça paraîtrait plus logique. On dirait un comptable qui compte les jours !
— vous ne lâchez jamais rien ! Avec vous, on doit tout justifier. Vous devriez être psy !
— D’abord ne me limitez pas à une seule profession et pourquoi ne répondez-vous pas simplement ce que les profs de mon frère disaient, « il faut vivre simplement au rythme des choses et des fleurs mais non au rythme artificiel des idées que l’on impose, il ne faut pas confondre bilan et rituel ; la rentré

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