Oxalis
164 pages
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Oxalis , livre ebook

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Description

L’évocation des mythes grecs, l’échappée dans les dunes ou les réflexions de l’âge mûr sont complétées par les jeux d’enfants au cœur des beautés de la nature, à la découverte de soi et des autres. Prenez le temps de vous asseoir sur les berges de cette rivière, ressemblant à une « veine gonflée de sang, le sang de la vie et de l’amour. »

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 06 février 2013
Nombre de lectures 0
EAN13 9782342001839
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0082€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Oxalis
Marlyse Roux Dehais
Publibook

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


Publibook
14, rue des Volontaires
75015 PARIS – France
Tél. : +33 (0)1 53 69 65 55
Oxalis
 
 
 
 
 
En route…
 
 
 
— Alors grand-père, tu dors ?
— Et toi, tu te prends pour un jeune homme ?
Cette phrase, Marilou la pensait si fort, qu’il la perçut peut-être. Elle la retint juste à temps au bord de ses lèvres délicatement ourlées. Prêt à sortir, le trop plein de sa rancœur !…
La voiture se déporta à gauche et doubla la « tortue » ainsi que la qualifiait Jacques son époux. Il faut avouer qu’il conduisait de main de maître, à vitesse savamment dosée, à la fois intrépide et prudent. Parfait sur la route, à part quelques écarts de langage du genre de celui-ci.
Ils se rendaient chez les parents de Jacques, en Bretagne, et apparemment, ils n’étaient pas les seuls à pérégriner ainsi dans la même direction. C’était le long week-end de la Pentecôte. Leurs enfants n’avaient pas voulu les accompagner. Respectivement âgés de 17, 15, et 14 ans, ils étaient partis de leur côté, presque en sens inverse, faire de la marche sac au dos, sur les ballons d’Alsace, avec une bande d’amis.
Marilou frisait la quarantaine, et Jacques l’avait quelque peu dépassée. Un beau couple au dire de leurs amis, mais qui venait d’être secoué par la tempête. Une secrétaire, celle de Jacques, vite indispensable au fil des jours, trop indispensable… Trop exigeante aussi… et qui ne pouvant obtenir le partage en sa faveur, s’éloigne, non sans dignité. Une fin heureuse, en somme, mais si douloureuse pour tout le monde !
« Je ne m’en remettrai jamais » pensait Marilou. Moi qui l’ai soutenu pendant toutes ces années difficile, qui l’ai aidé de toutes mes forces à « réussir »… Nous commencions à être vraiment heureux, je le croyais… Et c’est comme cela qu’il me remercie. D’ailleurs j’ai bien failli être remerciée, c’est le cas de le dire ! Le repos du guerrier, ça ne se prend pas chez soi !… »
Jacques était séduisant et plaisait aux femmes. Autrefois, quand il n’avait d’yeux que pour elle, elle le lui disait en riant et il haussait les épaules en la serrant dans ses bras. Maintenant elle se taisait… Le silence régnait donc dans la voiture. D’un air excédé, il tourna le bouton de la radio. Aurait-il souhaité qu’elle « parle » ?… Ce serait nouveau alors ! Sous la clarté lunaire, le paysage défilait à vive allure. Ils étaient isolés de tous comme dans une navette spatiale…
— Nous allons nous arrêter à la prochaine station-service. J’ai besoin d’essence, dit Jacques en jetant un coup d’œil à son tableau de bord.
Elle ne répondit pas. Elle semblait dormir, les paupières closes pour retenir ses larmes. Tous les jours à venir seraient-ils empoisonnés par certains souvenirs ? Le bonheur n’était-il plus possible ? Sans doute aurait-il mieux valu divorcer ? De toutes ses forces elle avait rejeté cette éventualité. Il n’était plus temps de le regretter !…
Faisant mine de se réveiller, ce fut elle qui alla à la pompe pour remplir le réservoir. C’était un de leurs rites, et pendant ce temps, Jacques attira son carnet de chèques, en signa un, le tendit à la caissière avec un mot aimable, puis reprit place au volant. Dans une centaine de kilomètres Marilou le remplacerait…
Traversant le faisceau lumineux des phares, une jeune fille s’approcha, vint frapper à la vitre. Une auto-stoppeuse, 20 ans peut-être, jolie, séduisante, malgré le harnachement qu’elle avait sur le dos… en jeans délavés et en baskets…
Il baissa la vitre.
— Je vais à B… Est-ce votre route monsieur ?
— Non, il me faudrait faire un petit « crochet ».
— C’est la réponse de tous les automobilistes… Ou bien dans le meilleur des cas on me propose de me laisser en pleine campagne !
Mais, elle riait quand même, elle avait du cran !
— Nous ne sommes pas si pressés. Je vais vous conduire à destination.
Son coté « bon samaritain » Marilou le connaissait trop bien. Si seulement il s’était tourné vers elle pour lui dire : « N’est-ce pas chérie ? ». Mais il était certain de son accord, réticent ou non !
« Ca toujours été comme ça, pensa-t-elle amère. Je n’ai pas su me faire reconnaître. »
Et puis pendant tout le trajet, il allait plaisanter, discourir, se montrer galant, trop, et les bleus qu’elle avait à l’âme lui feraient mal comme s’il faisait exprès d’appuyer dessus. Contrainte, elle garderait un silence buté : elle aurait le mauvais rôle quoi !
— Ecoute Jacques, j’ai envie de me reposer et de prendre quelque chose à la cafétéria.
— De toute façon, après avoir déposé cette jeune fille, tu es obligé de repasser par ici. Je t’attendrai.
Il parut déçu.
— Ca ne vous ennuie pas, madame ? s’enquit la jeune personne.
— Absolument pas. Vous pouvez faire confiance à mon mari ajouta-t-elle.
— Je n’ai pas peur. D’ailleurs j’ai un flair incroyable pour dénicher l’automobiliste à faible risque !…
Marilou pensa aux conseils de prudence qu’elle donnait à ses propres enfants. Mais peut-être que loin d’elle ils n’en faisaient qu’à leur tête ! Elle eut un geste désinvolte de la main.
— Allez à toute à l’heure, ne roule pas trop vite Jacques.
Sans doute était-il surpris de lui voir tant de détachement, auquel justement elle ne l’avait pas habitué. Car, il le savait, elle n’aimait pas prendre d’auto-stoppeur, sans raison particulière. Trop repliée sur elle-même, voilà tout ! De son côté, elle était sure que s’il ouvrait aussi facilement sa portière, c’était un peu, beaucoup, pour l’énerver.
Ces agacements réciproques étaient à demi inconscients. L’un et l’autre auraient été bien en peine de les arrêter en plein vol et de les mettre à plat pour les étudier. Dommage !
Marilou entra dans la salle du restoroute, et s’assit dans un angle près de la baie vitrée. De là, elle pouvait suivre le ballet des voitures, dont les phares semblables à de grosses lucioles lumineuses perçaient l’obscurité… Et sous les yeux, elle avait toute la salle : des couples, certains avec enfants, des personnes âgées, des conducteurs de poids lourds. Elle pensa que si son mari était parti pour toujours, elle serait de ces femmes que l’on voit seules au cinéma, au restaurant… comme elle, aujourd’hui ?… Bientôt aussi ses enfants s’éloigneraient… De là à vouer à Jacques une reconnaissance éternelle, il y avait un monde !…
— Un café, madame ?
Elle se sentit soudain en appétit :
— Pourriez-vous me préparer une omelette au jambon ?
— Mais certainement madame.
La salle était comble. Un homme approcha ;
— Vous permettez ? Il n’y a plus de table libre.
Il attira une chaise.
— Mais, si je me trompe je vous prie de bien vouloir m’excuser, il me semble vous
reconnaître.
— Pas moi, dit-elle d’un ton sec.
— Ne seriez-vous pas Marilou Duval ?
Elle le regarda à nouveau.
— Et vous Etienne Duteil ?

Ils éclatèrent de rire en même temps, et se serrèrent vigoureusement la main par-dessus leurs assiettes ;
— Quelle coïncidence !
— La première fois que nous nous sommes vus, ça remonte à…
Elle l’interrompit vivement :
— Inutile de préciser, je m’en souviens !
Comme leurs noms étaient d’une orthographe voisine, à l’écrit du bac, ils s’étaient retrouvés assis l’un près de l’autre. Marilou ne brillait pas en mathématiques. C’était la matière qui lui faisait le plus peur, avait-elle confié à Etienne.
— Moi ça va. Je mettrai ma copie de façon que tu puisses y jeter un coup d’œil, en douce.
Elle avait protesté, tout en le remerciant : elle ne voulait devoir sa réussite qu’à elle-même. N’empêche qu’elle avait été « collée », mais cet échec ne fit que freiner un peu sa course aux diplômes !
Ainsi qu’Etienne, elle avait entamé des études de médecine, et ils se croisaient souvent au hasard des stages. Entre deux concours, il l’invitait parfois à aller danser dans des « boites » aux alentours. Il était très amoureux et se faisait pressant. Brutalement elle avait interrompu leurs relations. Elle ne voulait pas se retrouver femme de médecin, dans le rôle parfois ingrat qui lui est si souvent dévolu. Sa famille à lui, très bourgeoise, à qui il l’avait présentée, n’aurait pas admis qu’elle en préféra un autre plus personnel.
Puis elle avait rencontré Jacques, jeune ingénieur, frais émoulu d’une école supérieure d’informatique. La passion qu’elle éprouvait pour lui avait balayé tous ses « principes ». Abandonnant ses chères études, elle l’avait suivi dans ses diverses affectations. Trois enfants étaient nés. Le bonheur quoi !… Puis l’établissement dans la capitale. La vie qui devient facile. Trop, peut-être ? Enfin une secrétaire aguichante qui redistribue les cartes. La lutte pour le garder, lui. La victoire, mais elle ne croyait pas qu’elle aurait un goût aussi amer… S’il était parti… Elle était jeune encore… Une seconde vie…
— Tu sais que je prépare ma thèse ?
— Bravo, mais ce n’est pas trop dur de reprendre ?
— Un peu. Mais il le fallait bien.
— Et Jacques ? dit-il
— Dans la nature ! fit elle avec un geste évasif de la main.
Et elle eut en même temps conscience de l’ambiguïté de sa réponse. Soudain volubile, il se mit à lui parler de sa carrière : spécialiste de renom, il exerçait aussi à l’hôpital, et donnait quelques heures d’un temps très précieux à un dispensaire de la région parisienne. Il était devenu tel qu’elle le redoutait autrefois : dévoré par sa profession.
— Marié ? dit-elle.
— Comment veux-tu ? Mais rassure-toi, je ne suis pas un saint…
Il mit la main sur la sienne, et elle hésita quelques secondes avant de la retirer. Une belle main soignée, aux phalanges déliées.
— Tu n’as pas changée, dit-il. Tu… Vous… me semblez encore plus belle qu’autrefois.
Ce changement d

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