Mauvaise cuvée
94 pages
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Mauvaise cuvée , livre ebook

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Description

En Gascogne, Frédéric Duroc trouve un emploi temporaire de maître de chai dans les établissements Markurell Armagnac. Dans un bar, il rencontre Isabelle, veuve avec un enfant, dont il s'éprend très vite. Il aime retrouver Georges et Baba dans un café où il prend son déjeuner. Jusqu'au jour où Georges lui montre une photo de la prostituée avec laquelle il couche régulièrement : sur la photo, Frédéric reconnaît Isabelle... Ce court roman noir est une histoire de vengeance et de règlement de comptes sur fond de trafic de drogue. Le pays de l'Armagnac ne semble pas réserver que des bonnes surprises : outre les vignes et les champignons, on peut aussi buter sur les cadavres...

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 15 mars 2017
Nombre de lectures 1
EAN13 9782342151794
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0041€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Mauvaise cuvée
Jean-François Mollere
Publibook

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


Publibook
175, boulevard Anatole France
Bâtiment A, 1er étage
93200 Saint-Denis
Tél. : +33 (0)1 84 74 10 24
Mauvaise cuvée
 
Introduction
Cela faisait longtemps, vraiment longtemps que je ne m’étais pas levé aussi tôt. Des mois à ne rien foutre, ça vous détruit un homme aussi sûrement qu’une balle dum-dum. J’étais vraiment tombé très bas, et pour ne rien arranger, je me payais un horrible mal de dents depuis trois jours. C’était sans doute à cause de cela que je déambulais tristement dans la cuisine, à 8 heures du matin. Mes réserves monétaires avaient fondu au même rythme que mon inflexible volonté, inexorablement. Je me situais au-dessous de zéro. C’est dire tout le bien que je pensais de moi.
 
Il est vrai que je n’étais pas le seul responsable de cette situation ; mais ça, c’est une autre histoire. De mauvaises affaires en arnaques, je me trouvais au bord du gouffre et, le plus drôle, c’est que je ne voyais pas le moyen de m’en sortir. Mais il faut croire que même les cas les plus désespérés recèlent leur propre rédemption. L’ange s’incarna en la personne de madame Monette. Je vis son visage s’encadrer dans un carreau sale de la cuisine. Surpris et intrigué, je lui ouvris la porte. Je connaissais bien madame Monette, elle faisait partie de ces rares personnes qui avaient su rester dignes quand l’ouragan s’était abattu sur ma famille, un ouragan qui nous avait déracinés et dispersés aux quatre coins du pays.
Quatre ans déjà que je vivais de petits boulots et de combines plus ou moins juteuses, quatre années au cours desquelles j’avais accumulé des montagnes de haine et de dépit. Oui, il n’y avait que madame Monette qui éclairait mon visage d’un peu d’humanité, madame Monette qui était vieille et innocente comme le sont les personnes de ce coin de Gascogne. Je lui serrai la main qu’elle me tendit et elle s’assit sur une chaise bancale, près de la table. Après avoir parlé du temps qu’il faisait, elle vint au but de sa visite :
— Tu es toujours sans travail ?
— Toujours.
Elle sortit de la poche de sa veste un bout de papier froissé qu’elle déplia devant moi :
— Regarde ça, j’ai pensé à toi, comme l’âge correspondait…
C’était un bout de journal qui avait été consciencieusement découpé. Je pouvais lire : « Maison d’Armagnac recherche homme 25-35 ans désirant assurer travail de chai… »
Évidemment, l’âge correspondait mais c’était tout. Madame Monette me jeta un regard interrogateur :
— Alors, tu vas écrire ?
Sans conviction, je répondis par l’affirmative. Quand elle s’en alla, après avoir bu l’infâme café que je lui avais servi, je repris ce petit bout de papier et, sans un regard, le posai sur le dressoir. S’il y avait une chose dont j’étais sûr, c’est que je n’avais nullement envie de rester sans rien faire, mais de là à m’enfermer dans un chai…
Les hyènes
C’était un petit studio, aux murs gris, à la moquette sale, où étaient disposés çà et là une table ronde en Formica, deux chaises en bois, un canapé en cuir fauve et, séparé par un léger rideau fleuri, on y trouvait aussi un lit bas, et côte à côte un berceau où dormait un nouveau-né.
La jeune femme écrasa nerveusement dans le cendrier la cigarette qu’elle allait mettre entre ses lèvres. Son visage était pâle et ses cheveux blonds mal coiffés accentuaient encore plus cette impression de fragilité qui émanait de sa personne. Elle ne cessait de regarder sa montre comme si le mouvement des aiguilles l’avait obsédée au point d’oublier sa propre vie. Elle attendait. Lentement, elle se dirigea vers l’une des deux fenêtres de son logement et jeta un coup d’œil dans la cour intérieure. Il n’y avait personne. Les bruits du dehors lui provenaient à peine étouffés : klaxons de voitures, pétarades de mobylette, hurlements de moteur…
Elle habitait cet appartement depuis quelques mois et, pourtant, elle ne s’était pas encore habituée à ces agressions quotidiennes. La campagne lui manquait, Jean aussi. Mais c’était déjà si loin, comme un rêve, un mauvais rêve.
 
Deux silhouettes la firent sursauter. Elle n’eut que le temps de distinguer la couleur jaune d’un vêtement. C’était sûrement eux, ça ne pouvait être qu’eux. Des pas se firent entendre dans l’escalier de pierre et des coups frappés à la porte la tirèrent brutalement de sa torpeur. Elle tremblait. Malgré elle, ses doigts tournèrent la clé dans la serrure et ils entrèrent. Celui qui portait un vêtement de sport de couleur jaune était le plus jeune, environ quarante-cinq ans. Il était gros, le visage bouffi, le cheveu gras mais sa voix était extraordinairement douce :
— C’est moi qui ai téléphoné, on ne te dérange pas ?
Devant cette politesse inattendue, elle reprit confiance en elle :
— Non, pas du tout, je vous ai fixé le rendez-vous pour cet après-midi.
Intriguée, elle regardait l’autre homme. Il n’avait encore rien dit, s’abritant derrière la corpulence massive de son ami. L’autre remarqua le regard interrogateur de la jeune femme. Il fit un pas de côté et désigna son copain de la main :
— Lui, c’est Baba. Il a voulu m’accompagner, si tu n’y vois pas d’inconvénient…
Ses yeux bleus détaillèrent le dénommé Baba. Il devait avoir une soixantaine d’années, petit, sec, très brun, avec quelques dents en moins. Soudain, sans un mot, le gros se dirigea vers les fenêtres et ferma les volets. En un éclair, la jeune femme comprit que la situation lui échappait. Elle voulut réagir :
— Pourquoi faites-vous ça ? Il ne fait pas encore nuit !
Le gros se planta devant elle :
— Non mais, tu voudrais pas que tout le monde nous voie à poil, des fois…
Elle devint livide :
— S’il vous plaît, ne parlez pas si fort, j’ai ma fille qui dort à côté.
L’autre ricana :
— Ça, ce n’est pas mes oignons, on est venu voir une pute, pas une nounou…
Content de lui, il s’esclaffa bruyamment. Derrière lui, Baba émit un grognement admiratif. Le gros s’impatienta :
— Assez rigolé, tu prends combien ?
Soudain, Isabelle se sentit vaciller, ses traits se figèrent, elle écarquillait les yeux mais c’était bien la réalité qu’elle voyait. Ces deux hommes étaient venus pour satisfaire leurs besoins sexuels, ce n’était plus un jeu, il la voulait afin de jouir de son corps. Baba s’approcha doucement d’elle et lui caressa les cheveux :
— J’ai vraiment envie de te sauter, petite…
En dépit de la répulsion instinctive qu’elle éprouvait pour cet homme, elle n’arrivait pas à détacher son regard du visage de Baba. Seuls ses yeux globuleux semblaient vivre en lui. Le soleil avait creusé de profonds sillons dans sa peau comme de multiples canaux parcourant un désert aride.
Isabelle sentit son odeur de tabac froid et de boisson anisée. Il puait, Baba.
— Depuis que Georges m’a montré la photo que tu lui as envoyée, chaque soir, je me branle en pensant à toi. Tu vois que je t’aime, petite…
Le gros Georges lui tapa sur l’épaule :
— C’est un vrai sentimental, ce vieux Baba, pas vrai ? Alors, combien ?
Son ton devenait menaçant, il exigeait son dû. Isabelle était effrayée par ces hommes frustrés mais, après tout, c’était bien elle qui avait mis la main dans l’engrenage et qui voyait, maintenant, la partie basculer dans l’horreur.
Désemparée, elle balbutia :
— Excusez-moi, je ne veux plus, partez maintenant !
Baba ouvrit la bouche et découvrit ses dents cariées. Il ne comprenait plus. Le visage de Georges devint cramoisi, sa fierté de mâle était atteinte :
— Petite conne, tu nous prends pour qui ?
Il s’approcha d’Isabelle et la poussa violemment contre le mur. D’une main, il lui serra le cou et il appliqua l’autre sur sa bouche. Isabelle suffoquait, ses yeux allaient de l’un à l’autre, implorant un pardon. Son cerveau était en feu, incapable de penser :
— Écoute bien, salope : si tu dis un mot, si tu gueules une seule fois, ta fille, tu ne la reverras plus. Compris ?
Les yeux de Georges transperçaient sa proie, il savait qu’il avait gagné et que bientôt il profiterait de son jouet. Tout à coup, le bébé cria mais il se tut presque aussitôt. Un rictus sinistre contracta le visage du gros :
— Tu vois, la môme non plus elle n’aime pas le bruit, compris ?
D’un hochement de la tête, Isabelle acquiesça. En même temps, Georges relâcha son étreinte et attira la jeune femme contre lui. Brutalement, il lui prit la tête entre ses mains et l’embrassa goulûment. Il la souleva alors à bout de bras et l’assit sur la table :
— Allonge-toi là-dessus !
Sa voix était redevenue douce et mélodieuse. Isabelle obéit. Elle ne se sentait plus concernée, sa volonté était annihilée, ce n’était plus elle mais une autre qui était couchée sur cette table. Baba s’approcha d’elle, il n’en croyait pas ses yeux. Il entendit seulement la voix de Georges qui lui disait :
— Vas-y mon p’tit Baba, déshabille-la…
Mauvaise pioche
On a beau être riche, les relations à sens unique avec votre compte en banque ont toujours une triste fin. Mon dernier relevé indiquait un nombre à deux chiffres, il était donc temps de réagir.
J’avais pratiqué pas mal de métiers dits rémunérateurs et pourtant, je ne m’étais pas enrichi. J’étais sans doute pour quelque chose dans ces fiascos successifs mais il est toujours très difficile d’admettre ses propres carences. J’en étais là, quand je me souvins de la visite de madame Monette et de son petit bout de papier. C’est dans un pot de yaourt que je le découvris, seulement depuis, il avait singulièrement rétréci. Toutefois, il était encore lisible. Et c’est de ma plus belle plume que je composai un curriculum vitae acceptable. Après tout, j’avais un peu d’i

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