Les Sociétés de pensée depuis l Ancien Régime en Bretagne et en Côtes d Armor
308 pages
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Les Sociétés de pensée depuis l'Ancien Régime en Bretagne et en Côtes d'Armor , livre ebook

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Description

Pour les loges franc-maçonnes, les sociétés de pensée et les chambres de lecture, la Révolution Française a constitué une date-pivot, un tournant capital. Certaines y ont vu l’occasion d’appliquer leurs projets et leurs utopies ; d’autres, malheureusement, n’ont pas résisté à un élan libertaire et populaire qui a rapidement désenchanté. Eclosion, vie et dégénérescence de la franc-maçonnerie et des sociétés bretonnes, tels sont les sujets étudiés et décryptés par Claude Devallan qui, au cours de cette riche reconstitution historique, met à jour l’influence que toutes ont eue sur la société pré- et post-révolutionnaire en Bretagne.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 juin 2009
Nombre de lectures 0
EAN13 9782748372960
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0105€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Les Sociétés de pensée depuis l'Ancien Régime en Bretagne et en Côtes d'Armor
Claude Devallan
Publibook

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Les Sociétés de pensée depuis l'Ancien Régime en Bretagne et en Côtes d'Armor
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
1 Introduction
 
 
 
 
 
 
Contrairement aux « think-tanks » d’aujourd’hui, les sociétés de pensée du siècle des lumières réunissent des hommes ayant les mêmes idées ou les mêmes valeurs et qui désirent, au commencement, les partager sans volonté d’influer sur le monde. La franc-maçonnerie qui essaime dans toute la France, est alors la plus prestigieuse des sociétés de pensée. Elle inaugure à Paris en 1732 son premier temple. A la veille de la Révolution plusieurs centaines de loges fonctionnent.
Les frères maçons mettent en place un réseau de sociétés profanes qui s’étend dans tout le royaume. Ils installent des cercles thématiques qui diffusent la pensée à la mode ou nouvelle pourvu qu’elle soit de progrès, au travers de la littérature, des sciences, des gazettes, de l’agriculture, des arts (des métiers), du commerce, du patriotisme, des jeux, thèmes réputés qui connaissent un franc succès. Ils concurrencent ainsi sans difficulté les conservatrices corporations et académies qui ne réunissent dans leur domaine réservé que des spécialistes émérites qui n’ont pas la tâche de médiatiser la connaissance ou de la manipuler. Ce sera le rôle des sociétés de pensée ouvertes aux curieux de toute chose.
 
Elles comprennent trois niveaux.
 
Au premier, celui des sociétés littéraires ou chambres de lecture, les membres se pénètrent de « saine littérature », s’instruisent, s’informent des événements et des derniers progrès, et causent. Tous les esprits curieux capables de payer une cotisation annuelle élevée se retrouvent nombreux dans leurs salons pour consulter et commenter les nouvelles du moment. Les sociétés fleurissent dans chaque ville même modeste. C’est de là que partent les bruits et les rumeurs. C’est là que se forge « l’opinion publique ». Elles sont un média puissant.
 
Au second niveau, celui des modernes académies, les membres écrivent, publient, expérimentent, entreprennent et discourent. Ils sont choisis par leurs pairs qui désignent les plus aptes, selon leur jugement, à participer aux projets développés dans l’une des deux académies bretonnes.
La première et la doyenne, est la Société d’Agriculture, du Commerce et des Arts, fondée en 1757. Avec l’argent des états de Bretagne elle propose, avec parfois un certain succès, des méthodes radicales dans ses domaines de compétence. Elle invente l’agriculture intensive et l’agro-industrie avant l’heure, expérimente des cultures nouvelles, introduit des plantes étrangères. Elle aide au développement de l’industrie naissante et à la formation de jeunes apprentis en difficulté sociale. Elle est déjà dans le 21 ème siècle. En effet, elle encourage le libre échange et les exportations. Les entreprises engrangent sans partage les profits, quand ils existent, pendant que la collectivité fait son affaire des investissements et des pertes.
La seconde académie, la Société Patriotique de Bretagne, ébauchée en 1769, connaît son plein essor en 1774. Elle s’affilie en 1787 au musée de Paris que préside Monsieur, frère du roi. En réaction au « despotisme ministériel de Versailles » elle fait parler la « nation bretonne ». L’esprit breton s’éveille. En 1788, pendant trois mois elle unit le « contrat » de feu la duchesse Anne de Bretagne, au « contrat social » de feu Jean Jacques Rousseau. Le quatrième mois, elle ressuscite le trône de la défunte duchesse. Le cinquième, elle le laisse tomber. Elle jette aux orties l’éphémère nationalisme breton et se lance à corps perdu dans le nationalisme français, avant de disparaître emportée dans le tourbillon révolutionnaire.
Parmi ses membres zélés, le frère Beaudouin de Maisonneuve natif de Châtelaudren deviendra un révolutionnaire jacobin ennemi haineux des chouans. Le patriotisme entre temps a changé de camp. Il est devenu français.
La société patriotique renaîtra en 1805 sous le nom d’académie celtique. Cinq frères maçons, Beaudouin de Maisonneuve déjà cité, Denoual, Duplessix, Le Maout et Piou signent l’acte fondateur. Ils tiennent la première réunion au palais du Louvre à Paris.
 
Les chambres littéraires et les académies se fondent d’abord sur l’exercice de la discussion. Elles réfléchissent au gouvernement idéal ou, dans le cas de l’académie d’agriculture, à l’économie du futur. Pas un auteur en 1770 qui ne présente son sauvage ou son ingénu et n’entreprend la révision des lois de son pays avec son Iroquois de confiance. Elles croient au progrès et inventent, dans une société imaginaire, de nouvelles règles de vie ou expérimentent de nouvelles recettes. Leurs rêves audacieux les éloignent du réel.
Au contraire des sociétés maçonniques, les travaux dans les associations profanes ne sont pas secrets. On consulte librement livres, journaux et documents. On produit dans la société patriotique des maximes du genre : "si une oppression universelle est le premier inconvénient de la multiplication des soldats, leur oisiveté en est le second" ou "augmentation de soldats, diminution de courage". Ces discours n’atteignent pas les gens concernés. Heureusement, car le tisserand de Quintin se gondolerait en entendant que "la cupidité est un sentiment si utile au public, lorsqu’il se renferme dans le cercle des choses honnêtes". Le paysan se roulerait par terre de rire en écoutant l’agronome en chambre de la Société d’Agriculture qui s’intéresse à sa santé : "Laboureurs, mes chers amis, vous êtes si utiles à l’univers, qu’enviant votre condition, je ne puis assez m’intéresser pour vos santés… Vous éprouverez que les légumes sont bons aux sains, aux malades, que les racines sont excellentes, que les plus petites choses sont capables d’exciter votre appétit, lorsque n’en ayant point, vous n’avez à manger que du pain gagné à la sueur de votre front. En plusieurs pays, vos confrères mangent le matin du pain avec de l’ail ou de l’échalote qui leur donne de l’appétit…".
L’agronome n’est pas du métier ; il s’enorgueillit de philosophie et va aux champs un Virgile dans une main, un Rousseau dans l’autre. Il n’a qu’à parler, et à des parleurs. Certains y jouent mieux que d’autres. Les esprits sincères et vrais se trouvent dépaysés et s’éloignent d’un monde dont ils se sentent étrangers. D’eux-mêmes les plus légers prennent le haut, les plus lourds chargés de réalité tombent. C’est l’épuration automatique.
On refait le monde. Les rêveurs développent des doctrines abstraites et absolues. Ils dérivent vers le radicalisme. Ils s’amusent aux jeux de la liberté, de l’égalité et de la philosophie. Ils bâtissent la cité du futur faite de citoyens libres et égaux. Cette vision ne va pas au delà de la salle des conciliabules. En dehors, l’égalité reste une abstraction, et la liberté s’arrête là où l’intérêt personnel commence.
 
Au troisième niveau, le sommet de la hiérarchie de la pensée, se situe la maçonnerie. Les frères accèdent à la connaissance qui décide ce qui est bien et ce qui est mal pour le bien public en général et pour celui des citoyens en particulier. Ils sont cooptés dans les trois ordres par les frères aristocrates proches du pouvoir royal.
En 1730 les frères sont de bons vivants. Les agapes maçonniques sont joyeuses et sont l’occasion de discussions animées qui inquiètent les conservateurs. La police royale les surveille de près et intervient jusqu’à fermer provisoirement les établissements où se réunissent les gais lurons qui s’éclatent dans des dîners bien arrosés. Mais les encyclopédistes de l’âge suivant sont graves. Tous les clubs qui pensent adoptent leur ton sérieux. L’ironie remplace la gaieté, la politique les plaisirs, la fête devient une cérémonie, la coterie un empire. Leur point de vue fait l’opinion, « la nouvelle reine du monde » dit Voltaire qui salue son évènement.
La première loge maçonnique qui ouvre à Paris est une loge d’aristocrates. En 1771, le duc de Chartres, futur Philippe Egalité, père de Louis Philippe roi des Français, fils du duc d’Orléans, prince du sang, est désigné grand maître de l’ordre. Il est entouré, de ducs, de comtes, de marquis, de colonels, de conseillers du roi, de directeurs de la Compagnie des Indes La noblesse qui occupe les hautes charges royales envahit les temples et la place de la roture est réduite.
En 1742, Paris compte 22 loges et la province plus de 200.
En province les nobles français en résidence ne sont pas assez nombreux pour remplir les temples. Ils ouvrent largement les portes aux bourgeois et aux gentilshommes. Les privilèges dus à la naissance sont abandonnés à la porte du temple. Les nouveaux frères portent en loge le cordon porte-épée autorisé seulement à l’extérieur à la noblesse française. Ils trouvent une égalité qui leur est refusée dans la cité. Mais elle reste symbolique. Les vénérables sont aristocrates et inamovibles. Certains sont propriétaires de leur loge comme d’autres d’une charge ou d’un régiment. Une majorité de frères prend goût à l’égalité et condamne ouvertement cette situation.
La franc-maçonnerie porte en germes, dès sa naissance, les changements à venir. Les frères admettent que le monde est en train de changer. Ils défendent les idées nouvelles. Mais aucun ne conspire et n’envisage encore la mort du roi. En 1788, le frère maçon, l’abbé Willart de Grécourt de Tours, écrit :
" Un franc-maçon est un bon citoyen, u

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