Les Hyakinthies à l'époque hellénistique, un témoignage de l'évolution de Sparte ? , livre ebook

publibook - Aude Prieur

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166 pages

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À l'époque hellénistique, la panégyrie des Hyakinthies célèbre le renouveau de l'année chez les Spartiates depuis l'époque archaïque (800 avant notre ère) et, à ce titre, une série de rites ont cours pendant deux jours : processions, sacrifices et repas. Honorant à la fois Hyacinthe, héros spartiate, et Apollon, les rites sont diamétralement opposés. Les Hyakinthies et leurs rites permettent d'approcher une société spartiate très différente de ce que nous en livrent les auteurs de l'époque hellénistique et les hommes de lettres postérieurs. Mais jusqu'à quel point cette puissance et cette austérité spartiate qui faisait la réputation de la cité sont-elles devenues un « mirage spartiate » ? C'est grâce à un travail méticuleux sur les sources et une réflexion se démarquant des images d'Épinal qu'Aude Prieur définit ici la panégyrie de l'époque hellénistique et ses rapports avec l'organisation de la cité, avant de livrer une étude sociale du banquet des Hyakinthies et de dévoiler les réalités de Sparte à l'époque hellénistique par le témoignage de la panégyrie. Riche et pertinente, mais sans prétendre avoir clôt un sujet peu abordé, son analyse permet de replacer correctement Sparte dans cette époque : malgré quelques rares spécificités héritées de son passé, on y découvre une cité grecque ouverte au reste de la Grèce, en pleine uniformisation.

Sujets

Philosophie et théologie

Coutume

Sparte

Apollon

Grèce

Europe

Informations

Publié par	publibook
Date de parution	05 juin 2014
Nombre de lectures	0
EAN13	9782342024425
Langue	Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0082€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Les Hyakinthies à l'époque hellénistique, un témoignage de l'évolution de Sparte ?
Aude Prieur
Publibook

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Les Hyakinthies à l'époque hellénistique, un témoignage de l'évolution de Sparte ?

Un grand merci à mon compagnon, Tony MEUNIER et à ma famille. Je tiens également à remercier mon directeur de recherche, Catherine GRANDJEAN, et ma correctrice Marie-Hélène LEVESQUE

Michael Pattersson définit les Hyakinthies comme un culte propre aux Spartiates, avec des fondements très anciens et des rites particuliers. Cette définition est seulement une ébauche de ce que peut être la panégyrie dans sa forme totale mais elle permet de l’étudier profondément sous différents axes. Plusieurs historiens se sont attachés à traiter des Hyakinthies sous divers aspects : les témoignages littéraires, l’archaïsme de la fête, la place des personnages et enfin le banquet de la panégyrie. Et c’est en regroupant tous ces aspects que l’on peut dresser la définition complète des Hyakinthies.

Les Hyakinthies ont été abordées par plusieurs chercheurs qui ont visé une étude particulière chacun. Les différents aspects de la panégyrie ont intéressé de plus en plus d’historiens ces cinquante dernières années essentiellement. À savoir Michael Pattersson de l’université de Stockholm, Margarita Moreno Conde de l’université de Madrid, Louise Bruit de l’université de Paris Diderot, Nicolas Richer de l’École Normale supérieure Lettres et Sciences Humaines de Lyon, Henri Jeanmaire de l’École pratique des hautes études, Angelo Brelich de l’université de Rome et Claude Calame de l’École des Hautes Études en Sciences Sociales de Paris.

Michael Pattersson aborde la fête des Hyakinthies dans Cults of Apollo at Sparta. The Hyakinthia, the Gymnopaidiai and the Karneia 1 . Il étudie la question des trois plus importantes fêtes spartiates, les Hyakinthies, les Gymnopédies et les Carnées, afin de comprendre la religion spartiate. En effet, ce travail cherche à montrer que les trois cultes forment un cercle rituel unitaire. Pour lui, la nourriture et le repas des Hyakinthies sont un élément du culte. Il fait une énumération des mets du banquet et travaille sur le contexte religieux de ce repas. Il énumère également les mets du « dessert » dont il était déjà question pour le repas communautaire, les syssities, et qui se retrouvent dans la kopis , banquet des Hyakinthies. Mais il travaille essentiellement sur la fête en elle-même, et plus précisément sur les rites de passage que comportent les Hyakinthies, dans la continuité des travaux d’Henri Jeanmaire 2 .

Margarita Moreno Conde a réalisé sa thèse, de laquelle est tiré l’ouvrage Regards sur la religion laconienne : les Hyacinthia à la lumière des textes et de l’archéologie 3 , qui expose la panégyrie en l’honneur d’Hyacinthe et le sanctuaire lui-même. Elle étudie, dans la première partie de son ouvrage les questions de temporalité, de protagonistes et de mythes mais également ce qu’on pourrait appeler les détails techniques comme le chiton dont nous verrons plus tard la signification ou encore l’espace où se déroulent les Hyakinthies. Dans la seconde partie, elle travaille plus particulièrement sur l’histoire du sanctuaire de l’Amyclaion, sur le matériel trouvé lors des fouilles et réalise un essai sur le devenir de ce sanctuaire. Son étude éclaire considérablement celle qui est réalisée présentement car elle apporte des précisions sur ce que sont les Hyakinthies et permet de se questionner sur le rapport avec la transformation de la cité lacédémonienne à l’époque hellénistique.

Nicolas Richer, dans son article intitulé « Les Hyakinthies de Sparte 4 » expose le déroulement des Hyakinthies. Il aborde essentiellement les problèmes de temporalité de cette panégyrie et travaille sur la date dans le calendrier spartiate mais aussi sur l’ancienneté des Hyakinthies. Son étude, qui utilise des sources classiques et plus précisément Hérodote, permet une datation approximative récente. En effet, d’autres historiens avant lui plaçaient les Hyakinthies à l’automne et lui, il apporte une nouvelle approche sur le moment de la panégyrie dans le calendrier laconien. Il exprime l’idée d’une panégyrie au printemps, liée à la mort d’Hyacinthe dans la mythologie, qui marquerait la nouvelle année.

Louise Bruit travaille exclusivement sur le banquet des Hyakinthies dans « The meal at the Hyakinthia : Ritual consumption and offering 5 ». Elle se concentre sur la fonction du sacrifice lors des fêtes des Hyakinthies. Son étude cherche quelle est la place du repas en tant qu’offrande et en tant que nourriture, et, plus largement, comment la même nourriture est utilisée dans d’autres contextes, et notamment le repas quotidien, les syssities. C’est pourquoi Louise Bruit met en relation les repas spartiates connus : le repas des Hyakinthies et les repas en commun. Elle définit le repas de fête et cherche à savoir si le repas communautaire festif est un repas à part entière, puisque la notion de communauté est au centre de la vie spartiate et des repas. Elle détaille les deux types de banquet communautaire de fête – celui suivant la célébration d’Hyacinthe et celui suivant la célébration d’Apollon ( kopis ) –, et se penche sur ce « dessert » ou « supplément » qui est servi aux citoyens après le repas ( kopis ) des Haykinthies tout comme pendant les repas en commun. Elle s’inspire des travaux de Jean-Pierre Vernant et de Marcel Detienne La cuisine de sacrifice en pays grec 6 , afin de le comparer au sacrifice offert à Apollon durant les Hyakinthies de Sparte. Son étude montre la fonction de la nourriture dans le cadre de la fête, et elle remarque que le banquet des Hyakinthies est proche du repas communautaire. Elle travaille sur le fait que le repas de fête est un repas rituel, avec le contexte festif et civique.

Henri Jeanmaire a axé son étude dans Couroi et Courètes. Essaie sur l’éducation spartiate et sur les rites d’adolescence dans l’antiquité hellénistique 7 sur le festival – et notamment celui des Hyakinthies – et étudie tous les éléments qui se rapportent à la notion de culte en l’honneur d’un dieu : les objets, les processions, les sacrifices. Ses travaux, auxquels feront suite ceux d’Angelo Brelich, sont venus éclairer d’un jour nouveau la problématique. Les Hyakinthies embrasseraient, en fait, tous les traits d’une fête initiatique dont le mythe conserverait la trace ; autrement dit, la mort du héros Hyacinthe serait à lire comme le passage, définitif et sans retour, au monde adulte. Angelo Brelich, dans son ouvrage Paides e parthenoi 8 , devait cependant franchir un pas de plus ; ce que d’autres auteurs, comme Claude Calame 9 ou Bernard Sergent 10 , feront à leur tour après lui. Ces auteurs voient dans les Hyakinthies une fête du renouveau total qui faisait déjà dire à Angelo Brelich : fête de capodanno 11 . L’axe d’étude des Hyakinthies de ces trois historiens est véritablement le rite de passage en rapport avec le calendrier spartiate, que d’autres reprendront par la suite car ils étudient la place des jeunes gens – enfants, jeunes hommes et jeunes filles – à travers les processions, les chants et les danses afin de montrer un rite de passage.

À l’époque hellénistique, les Hyakinthies sont une panégyrie qui revêt une apparence et une fonction révélatrice nouvelles pour Sparte. Fête publique en l’honneur de deux divinités, elle permet de montrer que la cité communautaire de Sparte à l’époque hellénistique a subi quelques modifications. Contrairement au mythe d’Hyacinthe, les connaissances sur les Hyakinthies sont relativement rares et éparpillées. Mais nous disposons quand même de quelques indices qui permettent de retracer l’histoire de cette panégyrie. En effet, il a été retrouvé des offrandes de valeur dans le temple d’Apollon et d’Hyacinthe à Amyclées vers 750 avant notre ère – chaudrons de bronze, petites figurines animales, etc. Toutefois les premières mentions historiques de cette panégyrie ne sont introduites que par Hérodote 12 lorsqu’en -479, les Athéniens demandent de l’aide aux Lacédémoniens et que cette demande se déroule durant les Hyakinthies :
« En ce moment les Lacédémoniens étaient en fête, – ils célébraient la fête d’Hyakinthos, – et ils attachaient la plus grande importance à remplir leurs devoirs religieux. Les députés d’Athènes étant arrivés à Lacédémone avec ceux de Mégare et de Platées, qui les avaient accompagnés, s’adressèrent aux éphores. […] Les éphores remirent leur réponse au lendemain ; le lendemain, au jour suivant, et ainsi de suite pendant dix jours, renvoyant les Athéniens d’un jour à l’autre 13 . »
Par ailleurs, Thucydide nous permet de confirmer l’existence des Hyakinthies à l’époque classique en nous renseignant sur la trêve signée entre Sparte et Athènes en – 421 :
« Celui-ci [le traité] sera renouvelé chaque année ; pour cela, les Lacédémoniens se rendront à Athènes au moment des Dyonisies, et les Athéniens à Sparte au moment des Hyacinthies. Chaque peuple dressera une stèle : l’une, à Sparte, près du temple d’Apollon d’Amyclées […] 14 »
Par le biais de ce témoignage, il montre également la grande importance des Hyakinthies.

Le repas des Hyakinthies revêt une importance toute particulière dans la transformation de Sparte à l’époque hellénistique. Ces repas étaient les banquets des fêtes publiques qui succédaient à la thusia . Le sacrifice sanglant – thusia – était le repas du dieu ; les hommes brûlaient les os et les graisses de l’