Le Temps des migrations blanches
158 pages
Français

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Le Temps des migrations blanches , livre ebook

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Description

Ce livre évoque les migrations internationales qui affectèrent l’Amérique du nord et l’Europe du nord-ouest, entre le milieu du XIXe siècle et le milieu du XXe siècle. Tout en décrivant la cartographie des migrations et en faisant le point sur l’histoire des systèmes de contrôle, il accorde une large place à l’expérience des migrants et offre quelques beaux portraits d’hommes et de femmes en migration. Proposant au lecteur une synthèse claire d’une historiographie riche mais difficile d’accès, il rappelle l’ancienneté des migrations de masse dans les pays occidentaux, ainsi que ce que nos sociétés contemporaines doivent à des exodes parfois oubliés.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 20 mars 2012
Nombre de lectures 0
EAN13 9782748380439
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0090€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Le Temps des migrations blanches
Philippe Rygiel
Publibook

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


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14, rue des Volontaires
75015 PARIS – France
Tél. : +33 (0)1 53 69 65 55
Le Temps des migrations blanches
 
 
 
Image de couverture : Carte des migrations XIX e -XX e siècle, reproduite avec l’autorisation de Légendes cartographie, 40 rue des vignobles, 78400 CHATOU.
 
 
 
 
Avant-propos à la seconde édition
 
 
 
Les éditions Aux lieux d’être ont publié, il y a deux ans, la première édition de cet ouvrage. Elles ont depuis disparu et, le tirage épuisé, il était devenu inaccessible, alors même qu’il n’avait pas encore perdu de son actualité et faisait l’objet d’une demande. Une seconde édition apparaissait donc utile. Le temps écoulé depuis la première n’était pas bien long cependant et la production historiographique récente, pour élevées que soient aujourd’hui les cadences de production, ne semblait pas justifier une refonte complète du texte. Aussi avons-nous simplement procédé à un toilettage de celui-ci, rectifiant quelques erreurs et quelques formulations qui à la relecture, ou de l’avis des premiers lecteurs, avaient semblé un peu obscures. Nous avons été aidés dans ce travail par Camille le Doze et David Minger, qui ont rendu possible cette nouvelle édition. Qu’ils en soient ici remerciés.
 
 
 
Avant-propos à la première édition
 
 
 
Ce texte a pour origine un cours d’agrégation, qui en fixait le cadre géographique et chronologique. Abrégé, refondu, il doit pourtant certains de ses traits à cette origine. Il s’applique ainsi à évoquer la multiplicité des sujets abordés par les historiens des questions traitées ici, les dynamiques, parfois contradictoires, d’une historiographie riche, la diversité enfin des zones de départ et d’arrivée. L’auteur ne saurait cependant prétendre à l’exhaustivité. Tant la taille de l’ouvrage que ses ignorances conduisent à des omissions – les domaines français et américains sont ainsi, et de loin, les mieux traités – ou à évoquer rapidement des sujets dont la complexité aurait mérité plus de place. Plutôt que la quête un peu vaine d’une cartographie systématique d’un immense océan de textes, nous avons choisi d’assumer cette contrainte. Plusieurs choix en découlent. Nous avons accordé une large place aux thèmes qui entraient en résonance avec nos propres travaux, également à des discussions en cours dont les enjeux nous semblaient décisifs. De même, nous n’avons pas cherché à dresser un palmarès bibliographique. Les textes cités ici – hormis quelques incontournables – le sont parce qu’ils nous fournissaient des exemples de parcours donnant un peu de chair à un propos qui évoque une histoire riche de rêves, de sueurs et de larmes ; parce qu’ils permettaient au lecteur d’approfondir un thème que nous n’avions guère la place de traiter ou bien parce que l’élégance d’une formulation nous offrait un bonheur d’expression que nous n’aurions pu atteindre. Si l’ouvrage doit beaucoup à ces historiens, qui l’ont nourri, l’auteur est redevable aux collègues et amis qui l’ont encouragé, lu et critiqué. La sagacité de Marie-Claude Blanc-Chaléard, de Nicolas Bourguinat, de Bernard Clerté, d’Eric Guichard, de Patricia Hidiroglou, de Geneviève Massard-Guilbaud, de Nancy Green, de Simone Rygiel, lui a évité des maladresses et des erreurs. Celles qui demeurent lui sont imputables. Cette genèse fait de cet ouvrage une introduction subjective à un domaine et à une historiographie abondante, mais rarement connue du lecteur francophone. Nous espérons que ce livre piquera, plus qu’il ne satisfera, la curiosité du lecteur et lui offrira les moyens de poursuivre son voyage.
 
 
 
Introduction
 
 
 
La splendeur, la richesse, le bonheur de vivre, se rassemblent au centre de l’économie-monde, en son cœur. C’est là que le soleil de l’histoire fait briller les plus vives couleurs ; là que se manifestent les hauts prix, les hauts salaires, la banque, les marchandises « royales », les industries profitables, les agricultures capitalistes ; là que se situent le point de départ et le point d’arrivée des longs trafics, l’afflux des métaux précieux, des monnaies fortes et des titres de crédit. Toute une modernité en avance s’y loge : le voyageur le remarque qui voit Venise au xv e  siècle, ou Amsterdam au xvii e , ou Londres au xviii e , ou New York aujourd’hui […]. Les « libertés » s’y logent, qui ne sont pas entièrement des mythes et pas entièrement des réalités.
 
Fernand Braudel, La Dynamique du capitalisme.
Définition liminaire
Le Robert définit l’immigration comme l’« entrée dans un pays, une région, de personnes qui vivaient à l’extérieur et qui viennent s’y établir, y chercher un emploi 1  ». Rassurante dans sa simplicité et familière, cette phrase nous rappelle que trois éléments entrent dans les définitions du terme, une frontière, ou du moins une limite administrative, la durée du séjour – on ne s’établit pas pour quelques jours – qui se matérialise généralement par la fixation de la résidence et le travail, ce qui permet de distinguer les migrants des touristes, voire des étudiants venus passer quelque temps dans une université étrangère. Le type idéal de l’immigrant est donc le travailleur venu louer ses bras et faire souche. Ajoutons que, dans le langage commun, ce travailleur est, au moment de son entrée, un étranger, doté de ce fait d’un statut, ce que manifestent certains des exemples choisis par les rédacteurs du Robert , telle cette « […] immigration clandestine » qui nous rappelle que le droit règle les conditions de séjour de l’immigrant.
 
Cette définition ne nous dit pas que les phénomènes ainsi désignés sont divers et leurs contours flous. Flous d’abord parce que définir une durée minimale de séjour à partir de laquelle on parlera de migration est, comme toute discrétisation d’une variable continue, une opération arbitraire. Il n’est pas rare, de plus, que le séjour temporaire se prolonge et que le touriste ou l’étudiant se fixe. Enfin, l’immigrant ressemble parfois moins au type idéal ainsi caractérisé que certains migrants intérieurs. Si, en effet, le Canadien anglophone s’établissant aux Etats-Unis devient un immigrant, le paysan breton venu avec ses prêtres en plaine Saint-Denis à la fin du xix e  siècle offrir son travail aux usines parisiennes n’en est pas un, alors qu’il en possède bien des traits.
 
En outre, définir de cette façon l’immigration revient à caractériser l’immigrant par un segment de son parcours, souvent plus complexe qu’un simple déplacement entre deux pays. Il n’est pas rare que les migrants internationaux aient, au cours de leur existence, franchi plusieurs frontières, ni que le départ pour un autre pays ait été précédé d’une ou plusieurs migrations internes. L’autobiographie de Thomas Olszanski nous en fournit une illustration.
 
Né dans un village polonais de Galicie, à la fin du xix e siècle, il se loue jeune dans des fermes de sa région natale. En 1902, il rejoint son oncle en Silésie et y occupe divers emplois. Quelques années plus tard, une affiche apposée à Lvow par une briqueterie prussienne le décide à tenter sa chance en Allemagne. Olszanski y sera terrassier près de Berlin, puis mineur en Westphalie, afin de gagner assez d’argent pour réaliser son rêve, émigrer en Amérique du Sud. Il ne parviendra pas à réaliser ce projet. N’étant pas en règle avec la législation allemande, il doit quitter le pays quelques années avant le déclenchement du premier conflit mondial :
 
« Il fallait quitter […] le territoire allemand. Mais où, dans quel pays aller ? Avec mon ami, nous prîmes une carte de l’Europe et nous regardâmes les pays voisins. La Hollande petite, le Luxembourg encore plus petit. La Belgique petite, en Italie cela ne vaut pas la peine d’y aller, car là-bas ils n’ont pas besoin de travailleurs. Aussi, nous choisîmes la France 2 . »
 
Devenu mineur dans le Nord de la France, il s’y mariera, et prendra la nationalité française. Militant communiste, il sera déchu de la citoyenneté française et expulsé en 1934. Après un long séjour en Union Soviétique, il rentrera en Pologne en 1945. Le cas est, bien sûr, atypique, ne serait-ce que par l’engagement communiste de Thomas Olszanski, rare au sein de l’émigration polonaise, et parce qu’il est particulièrement gyrovague. Il a le mérite cependant, outre sa valeur d’exemple, de mettre en valeur les facteurs qui déterminent ces mouvements successifs. L’évolution des perspectives d’emploi, les bouleversements politiques, les contours des réseaux familiaux, les modes de régulation des flux mis en place par les Etats peuvent pousser à un nouveau déplacement des individus dont le droit au séjour se trouve souvent contesté et qui ne sont pas encore arrimés aux sociétés qu’ils traversent. De plus, et là encore, Thomas Olszanski en est une illustration, les retours, voire le va-et-vient entre plusieurs points, ne sont pas rares. Et le phénomène n’épargne pas les migrations transatlantiques, même les plus anciennes.
 
De fait, la définition usuelle de l’immigration correspond au point de vue d’Etats qui enregistrent et comptent entrées et sorties du territoire et rangent, de façon en partie arbitraire, certains des individus ainsi comptés parmi immigrants et émigrants. Elle ne rend compte, ni de la complexité des parcours, ni de l’expérience des immigrés eux-mêmes. Il faut, pour se représenter le rapport à l’espace du migrant, le concevoir comme l’habitant d’un territoire discontinu, non comme un sédentaire qui se serait un jour déplacé d’un point à un a

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