Le Naufrage imprévu
284 pages
Français

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Le Naufrage imprévu , livre ebook

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Description

Dans le Paris du début XXe, tout ne sourit pas à Antoinette. Fille d’une famille de boulangers modestes, d’un physique somme toute assez ordinaire, elle tente par tous les moyens de subvenir à ses besoins matériels qui sont immenses. Ce qu’elle a trouvé de mieux : être entretenue par un mari et par défaut par un amant. Mais dans la grande bourgeoisie parisienne tout se sait, et pour arriver à ses fins, Antoinette devra ruser plus d’une fois...

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 juin 2009
Nombre de lectures 0
EAN13 9782748373462
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0090€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Le Naufrage imprévu
Claire Guillaume
Publibook

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


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14, rue des Volontaires
75015 PARIS – France
Tél. : +33 (0)1 53 69 65 55
Le Naufrage imprévu
 
 
 
 
 
 
 
Un petit peu émue, Melle de St-Hubert quittait l’hôtel particulier de l’avenue Carnot, à deux pas de la place de l’Etoile à Paris, ce 1 er juillet 1921. En effet, après huit ans de bons et loyaux services en tant que préceptrice de Valentine Choblet-Montigny, celle-ci ayant atteint l’âge fatidique de onze ans devait entrer en 6 ème au pensionnat de l’institution Ste-Marie.
"Mazelle" comme l’appelait Valentine depuis qu’elle avait trois ans, n’avait plus sa place au sein de cette maison et devait donc retourner dans sa famille normande ; à moins que, si Madame voulait bien parler en sa faveur à l’une de ses amies, elle ne puisse être embauchée par une autre famille que Madame lui recommanderait, afin de finir sa carrière de préceptrice. C’était déjà par ce genre de cooptation qu’elle était entrée au service de Madame, recommandée par une amie de Madame. Mazelle était très désargentée et ne pouvait se passer de travailler ; elle avait encore sa pauvre vieille mère et son manoir normand à entretenir.
Pourtant, depuis l’âge de trois ans, Valentine, que tout le monde avait surnommé Valène, apprenait à lire, écrire et compter avec Mazelle, qui lui faisait la classe tous les matins et l’emmenait au parc l’après-midi. C’était une petite-fille très sage et très obéissante, un peu triste aussi. Elle était seule, n’avait aucune petite camarade puisqu’elle était l’unique élève de sa classe personnelle. A peine si elle pouvait jouer un peu au tas de sable, quand il ne pleuvait pas, à Bagatelle ou « au Bois » comme on disait alors en parlant du Bois de Boulogne, où Mazelle et elle se faisaient conduire par le chauffeur.
— Valène, surtout ne vous salissez pas, faites bien attention à vous, lui recommandait chaque fois Mazelle, soucieuse de sa bonne tenue.
C’était qu’elle n’avait pas envie de se faire réprimander par Madame.
Depuis quelque temps, Valène, avait fait remarquer à Mazelle qu’elle mettait toujours le même chemisier, à minuscules carreaux verts et jaunes. Elle ne comprenait pas, car sa mère, elle, changeait de tenue chaque jour et même parfois plusieurs fois par jour.
— C’est parce que je n’ai pas les moyens d’en changer, je n’en ai qu’un, lui avait avoué Mazelle.
— Mais alors, vous êtes pauvre ! s’était exclamé Valène à la fois surprise et indignée.
Pour elle, gosse de riches, les gens pauvres étaient les ivrognes ou les paresseux. Mais Mazelle, elle n’en revenait pas. Sa mère lui avait alors expliqué que ce n’était pas une tare et elle avait dû s’excuser. Du coup, vexée, Madame avait augmenté un peu Mazelle, pour qu’elle puisse s’acheter un nouveau corsage.
*
"Madame" c’était Antoinette Choblet-Montigny, née Guédeur, d’une famille de boulangers à Chaussy, près de Mantes. Elle avait refusé obstinément de vivre cette vie simple, pauvre et obscure que pouvait avoir une famille de boulangers dans les années 1900, à la campagne. Pas de vacances, pas de loisirs, levée à l’aube, couchée comme les poules. La farine volant partout et salissant tout. Les horaires décalés entre le père et le reste de la famille. Si elle restait au pays, quel serait son avenir ? De toute façon, la boulangerie devait revenir à son frère Daniel. Elle, que deviendrait-elle ? Elle se marierait avec le fils du boucher ou celui du charcutier, appelés l’un et l’autre à reprendre l’entreprise familiale ? Elle ne se voyait vraiment ni bouchère, ni charcutière.
Elle avait de l’ambition, Antoinette Guédeur. De taille moyenne, mince et ronde à la fois, elle savait qu’elle était dotée d’un charme ravageur qui plaisait aux hommes. Elle se sentait irrésistible, à dix-huit ans. Elle avait un porte-feuille à la place du cœur et l’intelligence juste assez développée pour savoir exactement ce qu’il fallait faire pour fuir sa condition et se propulser "dans le monde".
Son amie Marcelle Rivaud, camarade d’école à Chaussy, qui avait un an de plus qu’elle, avait fait ce qu’il fallait l’année passée pour sortir de sa condition. Elle avait rapidement trouvé un "protecteur" très bien, qui était fourreur près de l’église St-Augustin, à Paris, et qui l’avait installée dans un ravissant petit deux pièces, une bonbonnière, rue Tournefort, derrière le Panthéon. Il payait tout, le loyer, le pétrole pour mettre dans les lampes, le mobilier et même ses toilettes, ses chaussures, son coiffeur, sa modiste. Il lui payait même une domestique qui lui faisait son ménage et ses repas. Il la sortait beaucoup, surtout dans le quartier de Montparnasse ou celui de la Madeleine ; enfin un peu partout où il fallait être vu par les gens "de la haute".
Antoinette se disait que si Marcelle l’avait fait, pourquoi pas elle. Franchement, sa vie était bien plus agréable que la sienne. Il fallait absolument qu’elle se lance à Paris, c’était sa seule chance.
Son échec au certificat d’études avait accéléré sa prise de décision. Antoinette était donc déterminée à se lancer "dans la galanterie". Elle serait une "femme entretenue". Elle avait fait quelques économies sur l’argent que son père avait bien voulu lui donner quand elle aidait à la boutique. Avec ça, elle avait acheté une jolie toilette, verte avec des broderies dans le bas de la robe et, sur le décolleté, des dentelles montant jusqu’au menton mais laissant entrevoir la naissance des seins. Munie de cette seule richesse, elle était allée prendre le car pour la Porte Maillot.
 
— Bonjour ma chérie, j’espère que tu as reçu ma lettre et que ça ne t’ennuie pas trop que je m’installe ici pendant quelque temps, dit Antoinette en arrivant chez Marcelle.
— Mais non, penses-tu ? Je suis ravie de te revoir et de pouvoir t’aider.
— Je veux faire comme toi et trouver quelqu’un qui me sorte de ma boulange. J’ai envie de connaître enfin la vie parisienne et ne pas rester une campagnarde, lui réclama Antoinette. Je souhaite que tu m’indiques les bons endroits et les gens biens à fréquenter. Depuis un an que tu es là, tu dois en savoir des choses, dit-elle avec gourmandise.
— Quand j’ai reçu ta lettre, je me suis renseignée un peu autour de moi et j’ai justement repéré qu’Antoine Charny n’était plus accompagné depuis un petit moment. Je pense qu’il pourrait te plaire. Il n’est pas mal du tout. Il est éditeur et aime bien faire la fête. Son ancienne petite amie était maigre et un peu souffreteuse. Je ne sais pas ce qu’elle est devenue. En tout cas, il y a quelques semaines que je ne la voie plus avec lui et il erre comme une âme en peine. C’est un ami du mien. Mets ta belle toilette, car nous allons au Café de Paris ce soir et je suis sûre qu’il sera là.
*
— Regarde, c’est lui qui entre là, indiqua Marcelle à Antoinette. Il n’est pas mal non ?
— Oui, pas mal du tout. Et… il est riche ? demanda avidement Antoinette qui était plus attachée à l’allure du compte en banque qu’à celle du monsieur en question.
— Oh oui ! Il a une maison d’édition qu’il a reprise après son père et qui marche très bien. C’est lui qui a édité les Mystères de Paris, il a fait fortune avec ça, lui répondit Marcelle. Attends, je vais lui faire signe dès qu’il nous regardera.
— Bonjour Antoine, dit Marcelle en levant la main et forçant un peu la voix pour se faire repérer. Venez à notre table, ne restez pas tout seul. J’ai quelqu’un à vous présenter.
— Ah ! Mesdemoiselles, vous êtes vraiment charmantes, s’émerveilla Antoine.
— Asseyez-vous avec nous, je vous présente Antoinette, mon amie d’enfance. Elle vient d’arriver à Paris, vous devriez la faire danser, vous feriez connaissance, suggéra Marcelle de façon un peu appuyée.
— Mais bien sûr, convint Antoine qui avait compris le message. Vous permettez que je vous appelle Antoinette ? Appelez-moi Antoine. Vous voyez, nous sommes déjà faits pour nous entendre, dit-il en entraînant Antoinette sur la piste.
— Oh ! Monsieur, vous me gênez un peu, minauda-t-elle, mais si vous y tenez…
 
En fait, dès qu’il l’avait rencontrée, il en était tombé fou amoureux à son insu. Son petit nez retroussé, ses yeux noisette et les cheveux d’or qui entouraient son visage qu’elle éclairait d’un sourire enjôleur, lui donnaient un attrait auquel aucun homme ne pouvait résister. De plus, elle avait dix-huit ans et lui quarante-cinq. Sa voix était chaude et enjouée et elle savait parfaitement jouer de ses atouts. La seule fausse note dans ce joli concert : un rire un peu fort et appuyé qui révélait cette origine moins distinguée que ce qu’elle voulait faire croire.
Antoine se sentit troublé. Il ne savait pas définir ce trouble. Pourtant, la petite Antoinette n’était pas d’une beauté renversante, loin de là. Son corps semblait très appétissant certes, mais ce petit nez en trompette manquant totalement de distinction lui donnait un petit air canaille qui était amusant. Elle n’avait vraiment aucune classe et cependant, il était fasciné par ce petit bout de femme. Il ne comprenait pas pourquoi, mais voulait rester près d’elle.
Bien entendu, le soir même, il lui donnait rendez-vous pour le lendemain. Il semblait déjà ne plus pouvoir se passer d’elle.
Antoinette avait parfaitement conscience de l’effet qu’elle avait fait sur Antoine et cela lui ouvrait des horizons. Elle se disait qu’elle était capable de plaire non seulement aux garçons de fermes de son enfance, mais aussi aux messieurs du beau monde et ça, c’était bon pour son avenir.
Bien sûr, elle se rendit dès le lendemain au rendez-vous, même lieu, même heure. Ils se retrouvèrent ainsi plusieurs jours, m

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