Le Murmure des eaux troubles
172 pages
Français

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Le Murmure des eaux troubles , livre ebook

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Description

Henriette était une femme pétrie de rêves. Celui de voir son domaine se développer. Celui de voir l’héritage de ses ancêtres perdurer. Celui de devenir arrière-grand-mère. Mais les rêves sont-ils faits pour être vécu ?

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 24 mai 2006
Nombre de lectures 0
EAN13 9782748370911
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0082€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Présentation et Avant propos

Henriette d’Estremont  est la digne descendante d’une famille paysanne originaire des plaines du Massif Central, dont un membre était venu s’installer en Provence avec l’ambition démesurée de créer un riche patrimoine destiné à sa génération future. Son vœu le plus cher était de voir se perpétuer son nom dans une nouvelle région.
Hélas, au fil des ans , Henriette aura vu s’effriter la belle exploitation que son aïeul avait fait prospérer avec tant d’enthousiasme.
Patrimoine et patronyme se sont évanouis.
A l’automne de son existence, il ne restait à cette vieille rescapée de l’hécatombe familiale qu’un souvenir impéris-sable des mystérieux entretiens qu’elle avait eus avec son ami de toujours : l’Huveaune, un ridicule petit cours d’eau qui, depuis sa naissance, s’en va directement se jeter à la mer en portant par conséquent le nom de fleuve. Malgré l’outrageuse pollution qu’il subit tout au long de son cours, Henriette ne voyait dans le lit de ce ruisseau qu’une eau pure sortie de la source du vallon de Castelette dans le Var. Elle n’entendait dans ce faible débit que le son cristallin d’une onde cahotante qui semblait lui répondre quand elle lui parlait.
Elle a vécu ainsi auprès de son ami en lui contant ses joies et ses peines et elle s’est endormie de son dernier sommeil sur sa rive. Elle s’en est allée avec le beau ruisseau-fleuve qui allait lui-même finir sa vie en se jetant dans les flots bleus de la Méditerranée.
1 – La vallée de l’Huveaune

Tout cours d’eau si mesquin soit-il, qui, partant de sa source va se jeter directement à la mer, est considéré comme fleuve. L’Huveaune, qui prend sa source dans le vallon de Castelette dans le Var, parcours cinquante kilomètres en arrosant successivement quelques petites localités : Saint-Zacharie, Auriol, Roquevaire, Pont-de-l’étoile, Aubagne, La Penne-sur-Huveaune et, venant directement se jeter dans la mer Méditerranée sur la plage du Prado à Marseille, est par conséquent un fleuve.

Entre Aubagne et la cité phocéenne, il traverse une magnifique plaine qui fut, avant que l’urbanisme envahissant ne s’en mêle, un site resplendissant de verdure luxuriante, source d’inspiration de bon nombre de passionnés de la plume qui ont donné à leur ouvrage le titre trop souvent utilisé : «  La vallée de l’Huveaune  ».
Je suis un de ceux-là !
Dans un lointain passé, en parcourant la route nationale 8 qui longe ce site, le promeneur pouvait être séduit par la beauté du décor. Aujourd’hui, dans les nombreuses agglomérations qui ont vu le jour et ne cessent de croître, la sombre asphalte des voies a remplacé le beau vert des pairies et le triste gris du béton a fait place aux grands arbres centenaires qui, jadis, dressaient majestueusement leurs grands bras noueux vers le ciel.
C’est dans une agglomération aujourd’hui appelée : «  le Charrel » , commune d’Aubagne, que naquit en 1928 Henriette d’Estremont dans une ferme depuis longtemps disparue, comme bien d’autres, qui dans le temps abritaient des familles de paysans vivant là de l’exploitation d’une terre fertile et d’élevage.
Les parents d’Henriette n’étaient pas des Provençaux d’origine. Au début du vingtième siècle, un certain Philippe d’Estremont, cultivateur de père en fils, était venu s’installer dans la région avec la ferme intention d’y créer et de faire prospérer une exploitation agricole.
Il était le fils aîné d’une grande famille de paysans originaires des plaines du Massif Central. A la suite du décès de ses parents, qui avait donné lieu à de nombreux désaccords, l’exploitation familiale fut vendue au profit de la descendance. Sa part d’héritage en poche, il avait décidé de quitter son sol natal. Il était venu s’installer dans la région aubagnaise où il avait acquis une vieille ferme qu’il avait restaurée, sur un vaste terrain qu’il avait fertilisé, ensemencé, fait prospérer et agrandi au fil des années.
Aujourd’hui, plus rien ne reste de tout cela et Henriette d’Estremont, bonne vieille grand-mère de soixante-quinze ans, est contrainte de terminer la dernière étape de son existence dans un pavillon, sans prétention, bâti au bord de l’Huveaune sur une modeste parcelle de terre située au quartier de Pont-de-Vivaux à Marseille.
La vieille dame avait pu sauver cette propriété des déchéances successives qui s’était abattues sur ses ascendants.
Qu’importait pour Henriette la modestie de son petit pied-à-terre. Situé à quelques mètres de sa terrasse, elle pouvait contempler l’insignifiant cours d’eau qu’elle avait qualifié elle-même de mini-fleuve et qu’elle affectionnait comme un ami sûr et sincère.
Pourtant, elle ne pouvait voir dans ce faible courant qu’une eau polluée, tout au long de son parcours, par les rejets pirates de quelques riverains indélicats, qui sans scrupule, y rejettent leurs résidus ménagers au mépris des lois interdisant la pollution des cours d’eau naturels.
Mais Henriette, qui était née, avait grandi et passé sa vie au bord de ce cours d’eau douteuse, ignorait les injures qui lui étaient faites et ne voyait, dans le lit qui la transportait, qu’une eau pure de la source du beau vallon de Castelette.
Sa vie durant, élevée comme une petite sauvageonne, elle n’avait jamais eu d’amis. C’est donc à l’Huveaune qu’elle venait conter ses joies et ses peines. Par un étrange engouement, du triste bilan de son existence où elle avait dû essuyer de terribles coups durs, il ne lui restait que ce compagnon fidèle qui ne l’avait jamais déçue.
Car à part ce ridicule petit filet d’eau qui porte le nom de fleuve, la vallée de l’Huveaune n’avait été pour elle qu’une pitoyable vallée de larmes.

* * *

Par une belle après-midi printanière, Henriette était prête à se rendre à la réunion de l’association caritative du troisième âge dont elle faisait parti. Son amie Amarante, devait passer la prendre pour la conduire, en voiture, au lieu de rendez-vous. Elle attendait devant son interphone l’appel de son accompagnatrice quand le timbre strident de l’appareil se fit entendre.
— C’est vous Amarante ? Répondit Henriette pour s’assurer de la visite.
Mais à son grand étonnement, une rude voix d’homme répondit :
— Non, c’est la police. Ouvrez je vous prie Madame, nous avons une nouvelle à vous annoncer.
« Une nouvelle à vous annoncer » , se répéta en elle-même Henriette soudain angoissée, car sa vie durant, elle dut tant de fois faire front à des nouvelles qu’on venait inopinément lui annoncer qui, souvent, s’avérèrent fort tristes. «  Enfin, celle-là ira avec les autres » , conclut-elle en déclenchant l’ouverture automatique du portillon qui donne sur le boulevard de Pont-de-Vivaux.
Du seuil de sa maison, Henriette pouvait surveiller l’entrée de sa propriété et s’assurer ainsi des visiteurs. Elle vit un homme, accompagné d’une femme, qui s’engageait sur l’allée gravillonnée qui conduit au pavillon. Elle reçut les deux visiteurs sur le seuil de sa porte. L’homme se présenta en montrant sa carte d’officier de police :

—  Je suis l’inspecteur Brochier et voici mon assistante, l’inspecteur Dessange. Nous appartenons à la brigade des stupéfiants. Nous avons bien affaire à Madame Henriette d’Estremont ?

— Oui, c’est bien moi, qu’avez vous à m’annoncer de si important ?
— Permettez nous d’entrer, s’il vous plaît madame, nous serons mieux à l’intérieur pour parler.
— Mais je vous en prie, dit Henriette en s’effaçant.
D’une façon fort civile les visiteurs furent invités à s’asseoir dans le petit salon du modeste pavillon.
— Alors, questionna l’hôtesse, quelle est votre nouvelle ?
Bien que très anxieuse, Henriette ne laissa rien paraître de son inquiétude car les calamités qu’elle avait essuyées tout au long de sa vie l’avaient habituée à maîtriser ses émotions.
Après un bref moment d’hésitation qui décelait une certaine gêne, l’inspecteur se décida à parler :
— Vous êtes bien la grand-mère d’un certain Romain d’Estremont, employé comme chauffeur-livreur aux laboratoires SEFAL domiciliés à Allauch ?
— Oui, c’est bien de mon petit-fils qu’il s’agit. Que lui arrive-t-il ?
— Madame, j’ai le pénible devoir de vous annoncer son décès.
Là, le flic crut bon de marquer une pause pour permettre à la grand-mère d’accuser le coup car un tremblement nerveux, qu’elle ne put contenir, venait de s’inscrire sur son visage. C’est alors que l’assistante, qui paraissait plus humaine, crut bon d’intervenir charitablement :
— Vous ne vous sentez pas bien Madame ? Voulez vous que nous fassions appel à une assistance médicale ? Croyez bien que nous sommes désolés d’avoir à annoncer aux gens de si tristes nouvelles.
Henriette prit bonne note de cette marque de sympathie qui contribua à ramener un peu de couleur sur ses joues qui avaient pâlies. Enfin, ayant maîtrisé son émoi, elle questionna :
— Mais que diable est-il arrivé à ce petit qui pas plus tard qu’hier paraissait être en parfaite santé ?
— Madame, reprit l’inspecteur, votre petit fils est mort d’une overdose de morphine. C’était un drogué chronique et cette fois il a abusé…
Henriette révoltée ne laissa pas au fonctionnaire le temps de poursuivre une telle accusation qui lui paraissait totalement absurde :
— Quoi ? Que me dites-vous ? Mon petit Romain un drogué chronique ? Mais c’est absolument faux et archi-faux. Malgré mon vieil âge, je suis une personne avertie qui connaît les excentricités auxquelles se livre la jeunesse actuelle. Donc, si mon petit-fils s’était adonné tant soit peu à la toxicomanie, je suis certaine que je m’en serais rendue compte. Il faudra trouver autre chose pour justifier son décès, Monsieur l’inspecteur.
La colère avait fait place à l’état d’hébétude provoqué par la triste nouvelle. Et voilà Henriette d’Estremont : éternelle battante devant l’adversité et Dieu sait qu’elle eut tant de fois à y faire face. Mais l’inspecteur Brochier n’avait pas l’intention de s’en laisser conter. Les sentiments de compassion passés, il constata qu’il avait affaire à une nature coriace et en bon flic qui doit

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