La Veleta
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La Veleta , livre ebook

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Description

Début du XVIe siècle, à Rome. Raphaël, peintre de commandes, déroge à ses habitudes et décide de créer une toile à seule fin esthétique. Tout autant pour perfectionner ses techniques que pour accoucher du Beau. Pour cela, il engage un modèle, une femme que l’histoire retiendra sous le nom de la Veleta. Une Sicilienne au parcours aventureux, marié à un homme dont la bassesse l’a projetée jusque dans les geôles de Tunis. Une femme nourrie de culture musulmane, joueuse et vive, qui loin de se cantonner à un rôle représentatif, questionnera le démiurge sur ses méthodes, les fondements de sa peinture. Inaugurant ainsi un pas de deux au cours duquel s’imposera toute une philosophie de l’art, au moment même où Leonardo met au point sa « machine à voir ».

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 20 mars 2012
Nombre de lectures 0
EAN13 9782748379600
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0022€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

La Veleta
Christian Petit
Publibook

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


Publibook
14, rue des Volontaires
75015 PARIS – France
Tél. : +33 (0)1 53 69 65 55
La Veleta
 
 
 
 
Personnages
 
 
 
RAPHAËL, artiste peintre
 
LA VELETA, modèle
 
 
 
Décor
 
 
 
La scène représente l’atelier de travail de Raphaël, à Rome, en 1515.
 
À cette époque, la Renaissance italienne est en plein essor. Les Turcs ont pris Constantinople en 1453, les Espagnols ont reconquis Grenade en 1492, et le conflit en Méditerranée entre ces deux puissances, qui se terminera par la bataille de Lépante en 1571, alarme beaucoup la Papauté, qui doit également faire face aux ambitions françaises en Italie et à la montée des courants de contestation religieuse (condamnation de Savonarole à Florence en 1498, thèses de Wittenberg de Luther en 1517, mariage d’Henri VIII avec Anne Boleyn en 1533). Ce contexte politique et social très agité n’empêche cependant pas Rome d’être un foyer culturel très dynamique, ni les négociations diplomatiques entre pays méditerranéens. La mise en scène pourra inclure ce contexte dans les éléments du décor (costumes, meubles, décorations d’intérieur, outils…) à son choix. Par exemple, des copies ou esquisses de la Création d’Adam par Michel-Ange et de l’Annonciation de Léonard de Vinci conviendraient bien.
 
Les seuls objets vraiment indispensables au déroulement du spectacle sont en nombre réduit : un chevalet, une table, deux chaises ou tabourets, des feuilles de papier à dessin et des « crayons » (des fusains, bâtons de craie noire, plume et encre), des pinceaux, de l’huile, des pots de poudre de couleur (pas de peinture en tubes), une palette, un cadre de bois sans toile (dimension 82 x 60 cm environ), et un ou plusieurs autres de même taille avec toile (avec dessins dessus préparés à l’avance).
 
Pour les costumes, il suffit d’une chemise sans col, sur laquelle on mettra soit une robe de couleur avec décolleté, soit un habit plus sombre sans col également, comme on les voit sur les portraits réalisés par Raphaël (ex : La Veleta, La Dame à la Licorne, La Belle Jardinière, Autoportrait, Autoportrait avec un ami). Le voile, de couleur unie crème clair, est sans broderie ni dessin, et doit être assez long pour descendre de la tête jusqu’en dessous des deux coudes, soit avoir au moins deux mètres de long et pouvoir être facilement utilisé pour des jeux de scène par ses changements d’usage.
 
L’essentiel réside en fait dans le rythme avec lequel les deux personnages vont occuper la scène physiquement et verbalement.
À chaque acte de la pièce est associé un mouvement prédominant symbolisant le thème propre de l’acte.
- Dans l’acte I, il s’agit d’un mouvement brownien de particules élémentaires.
- Dans l’acte II, LA VELETA est assise au centre de la scène et RAPHAËL tourne autour d’elle.
- Dans l’acte III, c’est l’inverse : il est au centre et c’est elle qui tourne autour de lui.
- Dans l’acte IV, le chevalet est au centre et RAPHAËL et LA VELETA avancent et reculent en ligne droite pour faire varier la distance qui les sépare.
- Dans l’acte V, le chevalet est toujours au centre, et sert de pivot aux mouvements de LA VELETA et de RAPHAËL qui tournent autour de lui, avec plus ou moins de distance par rapport à ce pivot, comme les extrémités d’un couple aimanté.
 
Une pièce avec deux personnages peut difficilement se dérouler selon les péripéties d’une intrigue calée sur la survenance d’évènements extérieurs. C’est donc le jeu des acteurs qui doit faire percevoir la progression de ce qui se passe à l’intérieur de chacun des deux personnages, et qui, par l’intermédiaire de leur dialogue sur la production de l’œuvre d’art, les conduit finalement à une modification de leurs rôles initiaux respectifs (le peintre et son modèle) en faveur d’une situation d’égalité et d’équilibre (le couple).
Dans cette optique, LA VELETA doit alterner ses deux leitmotivs «  C’est comme dans la vie  », «  C’est comme dans le Coran  », avec des variantes d’expression replaçant de façon insistante et itérative son interlocuteur devant une impossibilité d’unifier dans son tableau les oppositions entre corps et âme, visible et invisible, instant et éternité, objet et sujet, créateur et créature, actif et passif…
De son côté, après chacune des citations du Coran et autres poètes et philosophes arabes, qui sont ciblées par LA VELETA pour le déstabiliser dans sa culture d’artiste (qui suit une logique de créateur incompatible avec celle d’une création divine du monde qui ne lui laisse qu’une position de créature), RAPHAËL doit, face à ces interpellations d’un style inattendu pour lui, marquer de brefs temps d’incompréhension, avant de s’en défendre jusqu’à l’épuisement avec ses arguments de technique picturale : cadrage, esquisse, géométrie, distances, symétries, couleurs, beauté…
Ce jeu interactif des deux acteurs pourra être facilité en retenant, pour le personnage de LA VELETA, soit l’option d’un style nord-africain avec accent arabe plus ou moins caricatural selon les répliques, soit celle d’un style italien d’agréable désinvolture et plus chantant. Pour RAPHAËL, le style sera ou bien celui d’un commercial vantant avec conviction son produit et sa technique, ou bien celui de l’artisan consciencieusement attelé à sa tâche manuelle. Le tout doit réussir, au cours de cette pièce plutôt longue pour deux personnages, à entretenir suffisamment de tension pour rendre perceptible et vivant le thème central de la création artistique, jusqu’à son abandon une fois l’œuvre terminée au dernier acte.
 
Ce thème est en opposition latente avec celui de la reproduction et transmission massive d’images par les médias modernes. Aussi la mise en scène pourra, si elle le souhaite, utiliser un anachronisme pour concrétiser visuellement le décalage entre la culture médiatique moderne et l’humanisme de la Renaissance, à l’occasion des passages critiques concernant la « machine à voir » de Leonardo.
Au départ, on mettra dans un coin de la scène un tas de vieux matériels de télévision, sono, caméras, ordinateurs personnels, téléphones, et autres. Dans le prologue, LA VELETA s’étonnera que ces déchets n’aient pas encore été enlevés par les machinistes et profitera de sa brève sortie en coulisse pour leur demander à haute voix de le faire, ce que l’arrivée de RAPHAËL sur la scène retardera. Ensuite, quand la « machine à voir » sera évoquée, ils pourront, à leur gré et avec une note d’agacement, critiquer la lenteur des machinistes comme des acteurs protestant contre une carence de gestion du théâtre qui les accueille. Les machinistes apparaîtront sur scène à la fin de l’acte V scène 2 (sans avoir été spécifiquement appelés cette fois là), pour les débarrasser de ce tas de vieux matériels.
 
 
 
Prologue
 
 
 
LA VELETA
(Elle est sans voile).
Avez-vous bien éteint la télé ? Oui ? Alors, merci ! Et merci d’être venus ici ! Et vos téléphones portables ? Oui ? Merci aussi. Les consoles de jeux des enfants ? C’est moins sûr !
(Elle regarde vers un point précis de la salle).
Fini de travailler sur le PC là-bas ? Surtout, ne l’oubliez pas en partant !
(Elle regarde un autre point précis de la salle).
On ne lit pas un journal sans lumière. D’ailleurs le spectacle va commencer ! Pourquoi donc attacher de l’importance à ces actualités fugaces plutôt que prendre le temps de s’arrêter un moment ? Un seul petit moment ! Pour réfléchir à une seule image ! Et une image de moi !
(Elle insiste, toute fière, sur le moi, et attend comme si on devait l’applaudir, puis s’étonne de ne rien entendre).
Eh bien, soit ! Arrêtons nous un moment. Laissons notre imagination revenir en arrière dans le temps, et dans l’espace. Nous sommes en 1515. Une date facile à retenir : 1515 ! Deux fois 15, cela sonne comme une trompette de victoire. Mais nous ne sommes pas dans ce Milanais que va bientôt quitter Leonardo da Vinci, en emportant tous ses projets vers la France. Nous sommes plus au sud, à Rome, dans l’atelier d’un autre artiste, Raphaël d’Urbino. Il m’a donné rendez-vous ici. Je l’attends.
(Elle attend un moment, puis s’impatiente).
Qu’est-ce qu’il fait ? Mais qu’est-ce qu’il fait ? Qu’est-ce qu’il peut bien faire ? Il n’aurait quand même pas oublié de venir !
(Elle regarde les papiers sur la table de Raphaël).
C’est bien aujourd’hui qu’il m’a demandé de venir. Bizarre ! Attendez un tout petit peu. Je vais voir s’il arrive.
(Elle va brièvement jeter un coup d’œil dans les coulisses, puis revient en regardant la scène).
Une scène vide ! C’est comme dans la vie ! On commence toujours par une scène vide, une page vierge, une feuille blanche… avant le premier cri.
(Elle se remet à regarder les papiers sur la table de travail. En coulisse, sorte de bruit de tonnerre roulant comme un « big bang » de création du monde).
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Acte I
 
 
 
Scène 1
 
 
 
RAPHAËL
(Il arrive essoufflé et s’emporte en la voyant regarder ses papiers avec une sorte de cri primal d’enfant qui vient de naître).
Tu es là pour être regardée, pas pour regarder !
LA VELETA
Mais, mais… je t’attendais !
RAPHAËL
Tu es là pour être regardée, et pas autre chose.
LA VELETA
(Elle se met en face de lui)
Eh bien ! Regarde moi !
RAPHAËL
(Il la regarde et se calme)
Merci de m’avoir attendu. Excuse moi, Excusez moi. Je suis en retard même si on dit souvent que je suis en avance sur mon temps.
LA VELETA
Qu’est-ce que tu faisais ?
RAPHAËL
J’arrivais ! J’arrivais dans ce monde moderne.
LA VELETA
J’y suis payée à l’heure, pas au forfait.
RAPHAËL
Je

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