La Mémoire ne suffit pas
278 pages
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La Mémoire ne suffit pas , livre ebook

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Description

Paolo Pirelli est professeur à l’Université de Los Angeles. Marié et père d’une petite fille, il est en proie à une profonde dépression et voit toutes ses nuits troublées par des cauchemars plus traumatisants les uns que les autres. Robert Hill est financier indépendant à New-York. Célibataire et homosexuel, il n’a plus goût à la vie et n’arrive plus à dormir depuis que celui qu’il aime a mystérieusement disparu il y a un an de cela. Ces deux hommes que tout semble opposer vont pourtant se rencontrer, et s’apercevoir que chacun détient la clé qui permettra à l’autre de s’épanouir enfin.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 02 février 2006
Nombre de lectures 0
EAN13 9782748370904
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0067€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Chapitre 1 20 novembre


Paolo Pirelli prend ses affaires et embrasse furtivement sa femme avant de s’engouffrer dans sa Ford cabriolet bleue. Comme chaque matin, il lui faut au moins trois cafés avant d’être opérationnel. Il en a déjà pris deux au déjeuner et prendra le dernier en arrivant à l’Université. Le réveil est toujours pour lui un moment pénible. L’effet des antidépresseurs le maintient dans un état comateux jusqu’à midi. Il sait qu’il va devoir affronter une nouvelle journée de galère et cette idée ne l’enchante guère. Comment en suis-je arrivé là, se demande-t-il. Sa femme, Laura, est superbe et sa fille, Sahra, vient juste d’avoir onze mois. Paolo est professeur de sociologie à l’Université de Los Angeles. Il se passionne pour son métier et lui consacre la plupart de son temps. Pourtant, jour après jour, il ressent un sentiment de vide absolu dans sa vie. Son coeur, qui d’un point de vue fonctionnel est en parfait état, n’enregistre aucune émotion. Il est profondément perturbé car il n’arrive pas à cerner la cause de son mal-être. Il s’y emploie depuis plusieurs mois avec l’aide de son psychiatre, le docteur Andreï Panowski. Mais sans résultat. En arrivant à l’Université, il se rend à la cafétéria et boit un café avec le professeur d’anthropologie, Alec Pelton. Il ne le connaît que depuis une année mais apprécie ses capacités professionnelles ainsi que sa personnalité. Comme ils ont presque été engagés en même temps à l’Université de Los Angeles, ils ont eu un besoin commun d’intégration à la vie du campus et de compréhension de la part de leurs collègues. Cela les a rapprochés dès le départ. « As-tu passé un agréable week-end, demande Alec.

— Oui, répond Paolo d’un ton peu convaincu. Je suis allé marcher avec ma femme et ma fille samedi après-midi. Dimanche, comme il ne faisait pas beau, je n’ai rien fait de spécial. Et toi ?
— Je suis parti à Disneyland avec ma femme. Elle a toujours gardé son esprit enfantin et j’espère qu’elle le conservera encore longtemps. C’était super ! Heureusement qu’il y a encore des attractions qui nous offrent une part de rêve et d’imaginaire. Au fait, as-tu trouvé les documents que tu cherchais vendredi dernier concernant la sociologie de la famille ?
— Oui, merci. Je suis allé à la bibliothèque et j’ai eu de la chance. Il restait un exemplaire de Passage des familles nucléaires aux familles monoparentales . J’en avais besoin rapidement car je donne une conférence dans trois jours sur le sujet. »
En quittant Alec, Paolo lui demande s’il est disponible pour venir manger à la maison le lundi soir de la semaine suivante. Alec accepte avec un plaisir non dissimulé. Les deux hommes se rendent compte qu’ils ne se sont jamais fréquentés en dehors du travail. Ils s’apprécient mais n’ont jamais trouvé le temps de faire des activités communes, hormis celles qui concernent le cadre professionnel.
Paolo Pirelli enseigne avec entrain. C’est le seul domaine d’activité dans lequel il s’investit. Les élèves le trouvent intéressant et dynamique. Ils ne connaissent évidemment pas sa vie privée mais ils seraient très certainement surpris de voir le décalage qui existe entre cet homme qui se passionne pour les questions sociologiques et anime ses cours de manière remarquable, et ce même homme, passif, fatigué et déprimé une fois rentré au foyer.
Il quitte le parking de l’Université et emprunte Victoria street. Il passe devant le cabinet de son psychiatre. L’enseigne placardée sur le devant de l’immeuble le replonge immédiatement dans son état normal : un état de profond malaise. Il n’éprouve aucune joie à retrouver Laura, sa sculpturale femme. Elle est pourtant si intelligente, si subtile et si spirituelle qu’il n’arrive pas à comprendre pourquoi ses sentiments ont changé à ce point depuis une année. Il n’y a jamais eu de disputes graves entre eux. Elle ne l’a jamais trompé ou tout au moins ne l’a-t-il jamais su. Il ne parvient pas à se rappeler du moment exact qui a créé cette cassure, si tant est qu’il y en ait eu une.
En pénétrant dans la maison, Laura l’accueille avec un large et franc sourire. Elle l’embrasse amoureusement et le débarrasse de sa serviette qu’elle pose soigneusement sur son bureau. « Tu as passé une bonne journée, demande-t-elle d’un ton enjoué tandis que Sahra pleure toutes les larmes de son coeur à quatre pattes par terre.
— Très bonne. Les étudiants étaient particulièrement attentifs aujourd’hui. Au fait, j’ai invité Alec et sa femme à venir manger lundi soir prochain, poursuit Paolo »
Laura marque un temps d’arrêt. L’espace d’un instant, les traits de son visage se durcissent mais elle se reprend instantanément. Elle n’aime pas recevoir du monde mais décide de faire un effort pour son mari. « D’accord, dit-elle finalement. Ce sera l’occasion de faire leur connaissance.
— Oui. Alec est vraiment quelqu’un que j’apprécie beaucoup. Il me semble que nous pourrions collaborer à la rédaction d’un livre sociologique. Je vais d’ailleurs le lui proposer.
— Sa femme n’est-elle pas ce mannequin que l’on voit sur toutes les affiches de la ville pour vanter les mérites d’une marque de rouge à lèvres ?
— Absolument. Mais ne te fie pas aux apparences. C’est une femme très intelligente en plus d’être extrêmement séduisante. Elle a un sacré sens de la répartie. Tu pourras t’en rendre compte par toi-même. Ce qui est sûr, c’est qu’elle n’a pas la langue dans sa poche !
— En effet, j’aurai l’occasion de voir. Mais je t’ai déjà dit que je voulais que tu me consultes avant d’inviter du monde.
— Tu ne vas pas en faire une histoire. On n’invite jamais personne, alors pour une fois.
— C’est vrai, mon chéri, conclut Laura en bondissant sur ses pieds pour aller préparer le repas. »
Paolo reste seul sur le canapé en cuir qui a valu une fortune et regarde sa femme prendre la direction de la cuisine. Elle est si belle dans son chemisier de soie bleu et son pantalon beige. En fait, tout ce qui l’entoure est esthétique. La maison est moderne et démesurément grande. Le mobilier design qu’ils ont choisi ensemble, dans des tons bleus et noirs, lui apporte un certain réconfort. Pourtant il ne peut s’empêcher de penser qu’il ne se souvient pas de la date exacte de l’achat de ces meubles. Il a l’impression qu’ils ont toujours été là. Comme lui d’ailleurs.
Il prend soudain conscience qu’ils n’ont pas fait une seule invitation depuis une année. Bien sûr, il y a déjà eu des repas avec des connaissances, mais c’était toujours des imprévus. Je n’ai pas de famille, se dit Paolo. Laura non plus. Mais tout de même, ce n’est pas une raison.
Chapitre 2


Robert Hill se trouve dans son vaste bureau qui surplombe une grande partie de New-York. La vue est superbe. Le loyer est assez élevé mais cela en vaut la peine, se dit-il. Robert est indépendant depuis qu’il a quitté la banque dans laquelle il a travaillé plus de huit ans. Il ne lui a pas fallu longtemps pour se constituer une clientèle nombreuse et fidèle. Il prend le dossier de Monsieur Stanfield, l’un de ses richissimes clients qui vient juste de quitter les lieux, et le classe parmi les nombreux autres dossiers dont il s’occupe. Je n’ai plus une minute à moi, se dit-il. Mais cela ne va pas durer, quelque chose va se produire, lui souffle une petite voix intérieure qu’il s’empresse de faire taire au plus vite. Depuis qu’il a ouvert son propre cabinet de gestion de fortune, Robert Hill travaille en moyenne quinze heures par jour. Son assiduité s’est avérée payante car les clients et le montant des fortunes mises entre ses mains ont augmenté à une vitesse vertigineuse au cours des derniers mois. Cependant, la bonne marche de ses affaires ne comble pas le vide sentimental qui s’est emparé de lui depuis une année. C’est incroyable comme tout peut basculer d’une minute à l’autre, regrette-t-il. Je vivais avec John Bevin depuis déjà trois ans. Nous nous entendions à merveille. Pourquoi cette soudaine disparition ? C’est encore pire que la mort. Avec cette dernière, même s’il est difficile, voire impossible de s’en remettre, il y a toutefois la possibilité de faire le deuil. Les choses ont au moins le mérite d’être clair. Avec une disparition, les questions tourbillonnent dans la tête jusqu’à vous enivrer, vous lobotomiser. Il n’y a pas un jour où l’on n’essaie de trouver une explication, de se remémorer les phrases, les gestes qui précédaient le drame. Tout est analysé pour savoir si la personne a disparu de son plein gré ou si elle a été enlevée. Peut-être John est-il mort, soupire Robert. Cette pensée lui glace le sang.
Ils s’étaient rencontrés dans un club de tennis. Robert était alors employé pour le compte d’une grande banque tandis que John travaillait à la rédaction du journal « Today’s News ». Lors d’un tournoi interne, ils s’étaient affrontés. Le niveau très proche et le score extrêmement serré les avaient incités à jouer ensemble régulièrement. De simples adversaires, ils étaient rapidement devenus amis, et d’amis, ils étaient presque tout aussi rapidement devenus amants. Entre eux, tout semblait aller de soi. Les deux hommes avaient des situations familiales très éloignées. John était orphelin et n’avait aucun frère et soeur, si bien qu’il n’avait pas eu besoin de révéler son orientation sexuelle à des membres de sa famille. Il a ainsi échappé à une étape cruciale et parfois lourde de conséquences. Pour Robert, la situation était tout autre. Ses parents et son frère, une fois l’effet de surprise passé, avaient très bien accepté. Après trois années de vie commune, John était intégré dans la famille Hill aussi bien que s’il avait été de sexe féminin. Il faut dire que les deux hommes vivaient leur amour en toute discrétion, sans provocation, mais sans se cacher non plus, dans le respect l’un de l’autre.
En rencontrant John, Robert s’était révélé. Il avait découvert de nouvelles facettes de sa personnalité. Depuis ses vingt ans, il était devenu indifférent quant à son avenir sentimental. Il était désabusé e

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