L Esprit fort
224 pages
Français

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L'Esprit fort , livre ebook

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Description

Après avoir assisté à un baptême, Pierre se souvient de sa jeunesse, et ses interrogations sur la foi ressurgissent. De son départ en pension à son séjour dans un sanatorium, 20 années de sa vie défilent. Né dans une famille bourgeoise catholique, Pierre n’aura de cesse de chercher dans ses rencontres féminines et ses convictions politiques une porte vers la liberté.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 20 mars 2012
Nombre de lectures 4
EAN13 9782748380316
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0090€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

L'Esprit fort
Jacques-Adrien Perret
Publibook

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14, rue des Volontaires
75015 PARIS – France
Tél. : +33 (0)1 53 69 65 55
L'Esprit fort
 
 
 
 
 
 
Je ne crois pas au « surhomme » et je ne le crains donc pas, mais je suis persuadé qu’à un moment de son évolution culturelle et scientifique l’homme éprouvera le besoin d’une « surévolution ». Ce qui n’est pas la même chose. Je crois qu’il sera alors capable d’engendrer un homme plus complexe, plus raffiné, plus subtil, plus éloigné de l’animal qu’il ne l’est aujourd’hui. Le nouvel homme descendra de l’homme.
 
Daniel Cohen
« Les gènes de l’esprit »
 
 
 
 
 
 
 
Il venait d’assister au baptême d’une femme de trente ans. La fille d’un ami. Elle tenait à ce qu’il soit là et lui dit : « Je sais que tu n’y crois plus, mais que tu as de bons restes ».
C’était une belle femme. Entourée ce jour-là d’amies de son âge. Fort jolies aussi. C’est, en effet, en spectateur qu’il avait assisté à cette cérémonie à laquelle il ne croyait plus. Une heure et demie de redondance pour dire que Dieu est « Amour » et qu’à ses côtés on « tressaille de joie » : ça le dépassait.
« Il y a tant de misères dans le monde depuis des siècles et des siècles, disait-il souvent en s’emportant, auxquelles lui aussi pourrait tenter de remédier, ou sa mère si experte en apparitions et miracles ». Mais à défaut de croire à un Dieu Tout Puissant, il avait appris à être tolérant.
Elle lui dit un jour : « Ce que je vis est inexplicable. A certains moments, quand je prie, Dieu est là. Je sens sa présence. On se parle. » Mais que dire, quand on n’est pas gratifié de telles relations !
C’était une cérémonie très fraternelle où certains paroissiens étaient venus proclamer leur engagement. Leur foi. Le Vatican n’avait toujours pas décrété la prêtrise des femmes, mais il y avait un net progrès puisqu’on les voyait participer, maintenant, autour de l’autel, aux offices. On ne pouvait pas dire que rien n’avait changé. C’était d’autant plus vrai qu’en ce même jour cette jeune femme avait fait : son baptême, sa première communion et sa confirmation. Un accéléré qui ne lui aurait pas déplu, de son temps.
Mais que lui offrir ? Il avait trouvé un livre sur l’histoire des religions. En dédicace, il lui avait mis : « Il y en a qui ont besoin de croire pour mieux comprendre et d’autres de comprendre pour croire. Chacun son chemin sur la route de l’amour du prochain ».
« De toi, ça ne m’étonne pas, lui avait-elle dit. Mais j’aimerais bien que tu m’expliques, un jour, comment tu as pu cesser de croire ? »
« Je ne sais pas, lui avait-il répondu. Je crois que je suis comme saint Thomas : victime de la preuve par neuf. C’est arrivé petit à petit. A vouloir trop comprendre, je ne comprenais plus rien. On me disait que je faisais « l’esprit fort », alors que j’essayais tout simplement d’y voir clair dans tout ce que l’on me proposait de croire ». C’est pourquoi lui vint l’idée de revenir sur ce passé. Son passé. Tout ce temps que l’on met à grandir. A faire front sous les coups de la vie. A douter. A forger ses premières vérités. Et à devenir, insensiblement, ce que l’on est.
 
 
 
I. L’enfant de Dieu
 
 
 
1
A la recherche des circonstances où, dans sa petite enfance, il avait eu le sentiment de découvrir l’existence de Dieu pour la première fois il ne trouvait que des images fugitives.
Il n’avait bien sûr aucun souvenir de son baptême. Ni du sel et de l’eau qui l’avaient fait « Enfant de Dieu et de l’Eglise ». Car ce n’est que plus tard qu’il avait compris qu’il n’était plus un païen. Qu’il avait échappé aux limbes : ce lieu réservé aux enfants morts sans avoir été baptisés. Et que les théologiens situent à la frange du Paradis. L’antichambre en quelque sorte de l’éternelle contemplation de Dieu.
Il revoyait sa mère qui l’invitait avec tendresse à faire, avant de s’endormir, un baiser sur les pieds du Petit Jésus « mort sur la croix pour racheter les péchés du monde ». Cette croix qu’elle portait si joliment à son cou et qui s’avançait vers lui quand elle se penchait pour l’embrasser.
Il revoyait, aussi, sa sœur aînée, Madeleine, que tout le monde appelait Mado, et qui s’amusait à lui apprendre à faire le signe de la croix.
« Ce n’est pas difficile, lui disait-elle, tu commences par la main qui te sert à prendre des bonbons. Et, après, c’est tout simple ». Comme il n’était pas gaucher tout allait bien, au début. Ensuite, tout se compliquait. Et ça la faisait rire.
Les églises ! A quel âge y était-il entré pour la première fois d’une façon consciente ? A l’âge de sa communion privée, certainement. Il ne s’en souvenait bien. Mais, avant ?
Avant, il se souvenait de sa frayeur aux côtés de ses parents quand, sur le parvis de l’église, il voyait des pauvres en haillons, plus ou moins estropiés, avec des têtes de Quasimodo. « N’aie pas peur petit Pierre, disait sa mère, ce sont les mêmes mendiants qui dans la semaine viennent sonner à la maison et auxquels nous donnons un morceau de pain et fromage ».
 
Une autre scène lui revenait aussi en mémoire. C’était à Douvres-La-Délivrande, près de Caen. Il devait avoir cinq ou six ans peut-être. C’était l’été. Il était avec sa mère et sa tante Jeanne, sa marraine : celle qui sur les photos le tient sur les fonts baptismaux. Une grande dame mince, élégante qui portait toujours un chapeau avec une voilette.
« Regarde la Vierge qui est là-bas, lui dit sa mère, là où il y a des cierges. Avec ton petit cousin tu vas porter ces fleurs juste au pied de la statue. » Tenant Paul par la main, il monta alors avec application l’allée centrale pour déposer les fleurs, mais grand fut leur étonnement. « T’as vu, lui dit Paul, elle est noire la Sainte Vierge. Elle a du cirage sur la figure. » Il regarda, comme lui, et vit, en effet, que l’enfant qu’elle portait dans ses bras était noir, aussi. Mais pris d’un fou rire devant tout le monde c’est en cachant leur visage qu’ils tentèrent de regagner leurs places.
« Pierre, lui dit sa mère, tout en lui serrant le bras pour l’entraîner dehors, c’est une honte de se comporter ainsi devant la Sainte Vierge et les gens qui sont venus en pèlerinage. Le Petit Jésus n’est pas content. »
Il ne se sentait pas coupable. Personne ne l’avait prévenu. Pourquoi était-elle noire, la mère du Petit Jésus ? Et son fils, aussi, Le Bon Dieu ? Ils étaient blancs dans les autres églises…
2
C’était la veille de Noël. Il dormait avec son frère aîné, Luc, dans une chambre au premier étage. Près de la cage d’escalier qui montait au grenier. Une chambre pas très loin de celle de ses parents. Il avait du mal à s’endormir. Il entendait des craquements sur les marches et n’osait pas réveiller Luc. Une fois de plus, il se moquerait de lui, en disant : « Petit Pierre a peur du loup. » Il se rassurait en parlant presque tout haut : « Petit Jésus, c’est toi ? Dis-le, si c’est toi. » Mais il s’était levé, sans vraiment s’en rendre compte, pour ouvrir la porte de la chambre et ce qu’il vit, alors, lui parut incroyable. Sa mère était là, en chemise de nuit en train de descendre des paquets et puis remontait pour en prendre d’autres. C’était bien elle. Il faisait sombre dans l’escalier. Il discernait mal la forme des paquets. Maintenant, elle en tenait un gros. Tout en longueur. Mais plus effrayé encore que tout à l’heure, quand il entendit du bruit sur les marches, il alla se recoucher, la tête sous les draps.
 
Le lendemain, c’est Luc qui vint lui dire : « Lève-toi vite. Tout le monde est dans la chambre des parents, devant la crèche. On n’attend plus que toi pour ouvrir les cadeaux. » Il se dirigea tout de suite vers le gros paquet étalé sur plusieurs paires de chaussures. « Non, ce n’est pas pour toi. C’est pour les grands, lui dit sa mère. Pour toi, c’est sur tes chaussures. » Mais il fit celui qui ne comprenait pas… Le gros paquet, c’était un jeu de croquet pour Mado, Luc et Christine. Les trois aînés. Pour lui, c’était bien le mécano qu’il avait demandé. Mais il avait la tête ailleurs. Il repensait à ce qu’il avait vu cette nuit, tandis que de tous côtés il entendait : « Alors ! petit Pierre, réveille-toi ! C’est Noël. Ce n’est plus le moment de dormir. »
 
Après le petit déjeuner, comme il restait à l’écart, Mado lui dit :
— Qu’est-ce que tu as ? Tu as mal dormi ? Tu n’es pas content de ton mécano ?
— Si, mais ce n’est pas le Petit Jésus.
— C’est qui, alors ?
— C’est maman, dit-il désemparé.
— Mais, comment le sais-tu ?
— Je ne dormais pas. J’entendais du bruit. J’ai ouvert la porte et je l’ai vue avec les cadeaux.
— Elle t’a vu ? s’inquiétait de nouveau Mado.
— Non. Je n’ai pas fait de bruit. Elle ne m’a pas vu. Mais, moi je l’ai vue.
— Tu ne savais pas, mon petit Pierre, lui dit-elle d’un air faussement interrogatif. Tu es grand, maintenant. Tu peux comprendre. Ce sont les parents qui offrent les jouets, avec le Petit Jésus.
— Mais, le Petit Jésus qu’est-ce qu’il fait ? C’est lui qui choisit les cadeaux ?
— Il aide les parents à gagner de l’argent, lui répondit sa sœur, sans grande conviction.
— Tu sais, lui dit-il, comme pour conclure : je m’en doutais un peu. A l’école, Claude, mon petit copain, il m’a dit que c’était son père et sa mère. Je lui ai répondu : « Pas chez moi ». Mais, maintenant, je sais vraiment.
 
Dans la soirée, au moment d’aller se coucher, sa mère vint le voir et lui dit :
— Mado m’a tout raconté. Alors ! tu ne dormais pas ? Ce n’est pas bien de regarder ce que l’on ne doit pas voir. Enfin, maintenant tu sais pour le Petit Jésus.
— Oui, dit-il pressé d’en savoir plus. Mais, à l’ég

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