478
pages
Français
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2011
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Publié par
Date de parution
29 septembre 2011
Nombre de lectures
0
EAN13
9782748366860
Langue
Français
Publié par
Date de parution
29 septembre 2011
Nombre de lectures
0
EAN13
9782748366860
Langue
Français
A Ann, Ingrid et Astrid.
Mon premier comité de lecture et de correction.
Votre enthousiasme a été le meilleur des encouragements.
Prologue
Jeudi 12 janvier 2006, douze heures vingt.
Le Président Hautecourt – cela ne s’invente pas – remercie le Docteur Kurkowski, expert psychiatre , et le libère. Il s’adresse alors à l’ensemble des présents et a n nonce :
— L’ a vocat général m’a gentiment fait part du temps qu’il souhaite pour son réquisitoire. Il l’estime à deux he u res. Les débats reprendront dès lors cet après-midi à quatorze heures.
Il se lève et quitte la salle d’audiences . M ajestueusement , comme il sied à quelqu’un de son rang.
— « Pendez-les » veut nous obliger à nous contenter d’un sandwich, se plaint à mes côtés H ervé Tellier, mon confrère de L a Dépêche du Sud .
Hervé fait le même job que moi, auprès d’un quotidien concurrent. Nous nous retrouvons fréquemment au t ribunal d e pu is plusieurs années et j’oserai affirmer que nous sommes assez liés. En cour d’a ssises, nous nous arra n geons pour nous asseoir l’un près de l’autre.
Il a appelé le Président par son surnom. Un surnom qui n’a rien à voir avec une quelconque propension du magi s trat à faire pencher la balance de Dame Justice en faveur de la potence . D’ailleurs, la peine de mort n’est plus appliqu ée chez nous d e puis des lustres et, auparavant, la pendaison n’a jamais été le type de peine capitale en Be l gique . Non, le surnom trouve son origine dans la prononciation de son patronyme par un confrère italien venu suivre le procès d’un de ses compatriotes il y a que l ques années. Ce confrère parlait du Président Hautécourt, et nous en avions fait « haut et court ». D’où la dérive.
— Tu grignotes avec moi, poursuit Hervé ?
— Volontiers. Si nous ne nous éloignons pas trop, il doit être possible d’ingurgiter un plat du jour et un café en moins d’une heure trente.
Au besoin, je me passerai de mon cigarillo. Ou plutôt, je le remettrai à ce soir.
Il y a une grande brasserie en face du Palais de Justice. Nous y entr on s dix minutes avant la grosse affluence. L’espoir de tenir les délais en dépend.
— Eh bien, f a it mon confrère en choquant son verre de He i nek k en contre le mien, tu en penses quoi, toi, de cette affaire Courtenoy ?
— Elle me paraît limpide comme du jus de chique. Je te p a rie un verdict de culpabilité en moins de deux heures.
— Tu prends des risques.
— Tu imagines une autre issue ?
— Non, imbécile. Je pense seulement au temps qu’il faut pour installer les jurés dans la salle des délibérations, à celui que le Président prendra pour bien leur expliciter leur mission. Sans compter qu’ils voudront recevoir des boi s sons qu’il faudra commander et réceptionner.
— C’est bien pour cela que j’ai parlé de deux heures. Sinon, trois quarts d’heure suffiraient.
— Il n’y a rien qui te gêne dans ce procès ?
— Non, vraiment pas. Toutes les preuves vont dans le même sens. Il ne manque que les aveux de l’accusé . J’ai rarement eu une sensation aussi précise et aussi nette d’une culpabilité. Tu as relevé un argument contraire ?
— Pas du tout. Ce qui me gêne, et je croyais que tu l’aurais remarqué également, c’est la façon dont l’ accusé nous regarde. Il y a quelque chose d’indisposant dans ce regard. Observe-le tout à l’heure. Je crois qu’il nous na r gue.
— Je n’ai rien noté de pareil. Je trouve même qu’il fait preuve d’une certaine hu milité vis-à-vis des magistrats pour quelqu’un de connu pour son arrogance.
— Tout à fait d’accord avec toi. Il reste poli et discret. C’est le banc de presse qu’il toise.
— J’essaierai de mieux l’observer cet après-midi.
S alle d’audiences, quatorze heures cinq .
L e Président, pourtant réputé pour son extrême pon c tualité et pour ses vifs reproches envers ceux qui n’en font pas preuve avec la même rigueur , n’est pas en place .
Pire, je me rends compte au bout de trois ou quatre m i nutes que l’ a vocat général et l’avocat de la défense font également défaut.
L’attente dure, dans un chahut grandissant. A quatorze he u res trente-quatre, le Président fait son entrée et a n nonce d’une voix mal assurée :
— En raison d’un fait nouveau de première importance, les débats sont suspendus. Je ne suis pas en mesure de vous faire savoir actuellement quand ils reprendront. Re s tez à l’écoute des huissiers. Je suis désolé.
Il d o it l’être réellement. Rien de tel n’a j amais dû se produire au cours des procès qu’il a dirigés de main de maître.
C’est la ruée vers les couloi rs et vers les marches de l’imposant escalier extérieur. Les transmissions par GSM ass u rent en un jour le bénéfice trimestriel des opérateurs. Chacun tente de prévenir sa rédaction. Moi, j’essaie plutôt de trouver quelqu’un qui soit au courant. Quelqu’un qui puisse me doc u menter sur les raisons de ce coup de thé â tre.
Cela fait plus de trente ans que je hante les intermin a bles couloirs du Palais de Justice. C’est bien simple, si on v e nait à en perdre les plans, je crois que je pourrais me montrer très utile pour les reconstituer. Je suis sûr d’y connaître des recoins o u bliés de tous.
Mon flair me guide vers les pièces les plus discrètes et je f i nis par en dénicher une où se tiennent deux avocats stagiaires de Maître Radenot qui assure la défense de R i chard Courtenoy . Je dépasse l’entrée et me rends bruyamment au bout du couloir où je fais claquer la porte de sortie. Je r e viens alors sur mes pas, silencieusement et en priant que personne ne s’aperçoive de mon manège. Je m’arrête près de la petite salle et tends l’oreille pour su r prendre la conversation des deux jeunes gens.
Au bout de dix minutes, j’en sais assez pour m’éloigner et téléphoner à mon boss.
Le Vieux, – c’est son surnom dans la maison, bien qu’il n’ai t que trois ans de plus que moi – décroche presque immédiat e ment. Il sait déjà qu’il y a du neuf au procès.
— Oui, Dheyve ?
— Monsieur, je voulais vous prévenir . Cela bouge très fort ici.
— Je suis déjà au courant. Il y a eu un flash spécial à la r a dio. Vous avez appris quelque chose ?
— J’ai espionné deux assistants de Radenot qui se t e naient à l’écart. Il leur semble que la cause soit entendue : il s’agirait finalement d’un suicide !
— Nom de Dieu. Et sur quoi basent-ils cette certitude ?
— Aucune idée. Je n’ai surpris qu’une partie de leur conve r sation. Ils m’ont paru convaincus et donc ils do i vent détenir une preuve, mais j’ignore laquelle. Vous comptez tirer une sp é ciale ?
— Non, Dheyve. Ce n’est pas la peine. Tous nos concu r rents détiennent la même information . R ien pour nous différe n cier.
— Mais le suicide ?
— Il nous donne une heure ou deux d’avance, pas plus. Nous ne gagnerons pas un lecteur avec cette information. Nos confrères sont également capables de faire mousser un titre. L’arrêt du procès suffira à intéresser le lectorat.
— C’est vous qui décidez, Monsieur. Et si j’arrive à en a p prendre plus sur la fameuse preuve ?
— Nous doublerons le tirage demain. Comme je vous connais, je préviens l’imprimerie.
Mon coup de téléphone suivant est pour Eveline, ma femme. Que je trouve ou non des informations compl é mentaires, mon emploi du temps est tout tracé. Je vais m’offrir une nocturne pour rédiger mon article à paraître demain. Elle ne doit surtout pas m’attendre à dîner ce soir.
Je fais un effort de mémoire pour me remémorer le scén a rio des événements qui ont conduit l’ accusé devant la c our. Sans consu l ter mes notes. En me fiant à ce que j’ai retenu des débats.
Je remonte le temps. Sept mois et demi se sont écoulés d e puis les faits.
Le l undi 16 mai 2005 , lundi de Pentecôte, Richard Court e n o y éprouv e le besoin de se rendre dans ses bureaux. Il racontera aux enquêteurs qu’il devait récupérer certains doc u ments dont il av ait besoin le lendemain. Pour un rendez-vous à l’extérieur, chez un des plus importants clients du c abinet Pa s zyk & Courtenoy , experts comptables, fi s caux et consultants réputés .
Arrivé sur les lieux, il est intrigué par diverses anom a lies : le courant est coupé, la vidéosurveillance, pourtant racco r dée à une alimentation électrique de secours , ne fonctionne pas , une porte à l’arrière, donnant accès au sous-sol , est entrebâillée.
Il entre malgré tout. Il se croit seul en ce jour férié.
Quelle n’est pas sa surprise de découvrir le bureau de son a s socié Andréas Paszyk ouvert alors que l’ac cès en est protégé par un code.
Il pénètre dans le local et y trouve le corps sans vie de son ami, celui avec qui il a créé la société voici une qui n zaine d’années.
Tout laisse supposer un suicide. Andréas Paszyk est affalé sur son bureau, un revolver à la main. Il s’est tiré une balle dans la bouche. La mort remonte au samedi 14 mai.
C’est presque une enquête de routine qui est confiée au juge Rannebecq.
Il va toutefois falloir compter avec lui. Un homme qui ne l â che rien. Qui s’émeut du moindre détail insolite . Qui veut une explication logique à tout.
Le juge d’instruction commence par relever une empreinte partielle de Richard Courten o y sur l’arme. Ce dernier pr é tendra avoir touché l’arme dans l’affolement qui a suivi la découverte du cadavre. Comme il donne l’impression d’être quelqu’un de particulièrement maître dans l’art de dominer ses émotions, Rannebecq le prend dans son co l limateur.
L’alibi que Courten o y invoque pour le samedi est démenti par son épouse.
Partant du principe qu’un mensonge a toujours une bonne raison d’exister, le juge pousse plus avant . Il ne trouve à Cou r tenoy ni maîtresse , ni passe-temps inavouable justif iant un emploi du temps fictif.
Mieux, il établit que Courten o y est passé au bureau le sam e di. La vidéosurveillance fonctionnait encore et son arrivée fut enregistrée. Pas sa sortie, car à ce moment la panne était effe c tive. Il prouve ainsi que son suspect s’est trouvé sur les lieux à un moment où Andréas Paszyk viva