L Affaire Bagnères
284 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

L'Affaire Bagnères , livre ebook

-

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
284 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description



Avril 1985, dans un petit village de Maine-et-Loire, près de Cholet. Le directeur d’un collège est sauvagement assassiné sur son lieu de travail. Une première pour la petite commune. Un coupable est vite désigné en la personne de Charles Bagnères, un enseignant. Lorsque le suspect livre ses aveux, la justice s’emballe. La condamnation ne se fait pas attendre : dix-huit ans de prison. Mais les fausses notes du dossier poussent, d’abord par quelque curiosité nostalgique, Didier Ponthieu, un ancien officier de police judiciaire, à s’y intéresser...

Un polar psychologique qui, pour une fois, ne s’intéresse pas autant à l’identité du coupable qu’à sa personnalité. En posant la difficile question des circonstances d’un tel acte de désespoir, « L’affaire Bagnères » introduit une intensité dramatique qui se démarque aisément de l’ordinaire chasse au meurtrier. Car plus encore qu’une simple remise en cause de la justice, c’est la plongée dans la psyché d’un homme brisé qu’il nous propose : un deuil impossible, le chagrin, le désespoir et la haine, puis son cheminement intérieur, entre culpabilité et délivrance. Au-delà des dysfonctionnements menant à l’erreur judiciaire, Médéric accouche d’une enquête atypique, subtile et humaine.




Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 29 septembre 2011
Nombre de lectures 0
EAN13 9782748366884
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0026€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

« Il n’y a entre le crime et l’innocence
que l’épaisseur d’une feuille de papier timbré. »

Anatole France Crainquebille

 

« Souvent, par un seul mot tu perds un innocent. »

Arnauld d’Andilly Stances, De la médisance

 

« Pour paraître innocente, il faut être coupable :
D’une prompte réplique on est bien plus capable. »

Cyrano de Bergerac La Mort d’Agrippine Acte IV, scène II
 
 

Avertissement
 

 

Le 21 avril 1993, Madame Descaves, principale du co l lège Pierre Brossolette à La Chapelle Saint-Luc, dans la ba n lieue de Troyes, fut découverte dans le bureau de son secrétariat, assassinée. L’affaire trouva son épilogue en octobre 2003, soit plus de dix ans plus tard, et à l’issue d’une procédure longue et chaotique, par la condamnation à dix-huit ans de prison de Pierre Dubois, l’un des ense i gnants du collège.
 
Qui connaît cette affaire ne manquera pas de se dema n der si le roman qui va suivre n’en serait pas une simple transposition et n’en proposerait pas une solution, diff é rente, bien sûr, de celle à laquelle est laborieusement parvenue la justice. Il est vrai que le roman est d’abord inspiré par cette affaire, mais il ne prétend nullement en donner une relation fidèle aux faits, simplement plus dév e loppée que celles que l’on peut trouver dans diverses publications, telles, par exemple que les vingt-six pages que Christian English et Frédéric Thibaud y consacrent dans le second tome de leur ouvrage « Affaires non cla s sées » (Éditions Générales First 2004).
 
Les libertés que le roman prend avec les faits réels sont telles que le lecteur ne devrait pas y chercher sur l’affaire Dubois une quelconque information, supposée dissimulée derrière quelque clé. À plus forte raison, serait-ce une e r reur de croire que l’auteur imagine ou suggère avoir trouvé et exposer la vérité de cette affaire, que la justice aurait été impuissante à découvrir. Il est seulement vrai que l’intrigue du roman repose sur une erreur assez gro s sière que la justice, à la recherche de la vérité, a apparemment commise dans l’affaire Dubois. Elle s’est trop vite focalisée sur une chronologie qui était loin d’être assurée et qui, en tout cas, n’était pas la seule. Les reche r ches, peut-être sous l’influence d’une impression première, fruit de rumeurs, se sont trop vite cantonnées et limitées. Ajoutez à cela les aléas de l’« intime conviction » du jury et vous entreverrez sans doute comment naît une erreur judiciaire…
 
Alors, que faire quand on est persuadé que la justice s’est trompée et lorsqu’on se croit capable de rétablir la vérité, avant que l’erreur soit irréparable, n’eût-on pas ou n’eût-on plus qualité pour ce faire ?
 
 

Chapitre 1
 

Mercredi 17 avril 1985
 

 
 

Derrière la haie qui la séparait de l’avenue de Lattre de Tassigny, la cour était inondée de soleil par cette fin d’une chaude matinée de printemps. Désertique, comme il s’y attendait, mais il n’était guère plus de midi ; trop tôt ass u rément pour mettre son projet à exécution. Il poursuivit son chemin, de son pas de promenade, tourna à gauche dans la rue Camille Desmoulins, passant ainsi devant l’entrée du collège, puis le long du petit terrain de sport. Après quelques minutes, il revint sur ses pas. En revenant avenue de Lattre, il aperçut, à l’entrée du bâtiment princ i pal du collège, parallèle à l’avenue, Félix Jarnicoux, le concierge, campé, les jambes écartées.
 

 
Rien d’étonnant. Ce mercredi 17 avril, en pleines v a cances de Pâques, Jarnicoux n’était pas surchargé de travail. Mais il lui faudrait bien aller déjeuner et, alors, la voie serait libre. Il continua donc son chemin sur quelques centaines de mètres ; quand il reviendrait, c’était bien le diable si le bonhomme n’était pas parti. Au moment où il lo n geait à nouveau la cour du collège, il vit un homme franchir le portillon d’entrée et traverser la cour, app a remment pour gagner le petit immeuble collectif, situé derrière l’aile a d ministrative du collège et où étaient logés plusieurs enseignants. L’un des professeurs, sans doute, mais il ne l’identifia pas. Sans doute, allait-il, lui aussi, prendre son déjeuner. Il regarda sa montre : 12 heures 20. Le jardinier était encore là, apparemment occupé à ne t toyer de leurs fleurs flétries les plates-bandes situées à la lisière de l’avenue. Normal, conforme à ses observations habitue l les. Lui non plus ne tarderait pas à aller déjeuner.
 
Tout cela entrait bien dans ses prévisions. Il n’y avait pas à s’inquiéter. Tout était « nominal », comme disent les mil i taires. Il y avait bien réfléchi. Méprisant, arrogant, cet homme ne méritait pas de vivre : s’il avait au moins mo n tré un peu de compréhension pour lui, un peu d’humanité en pensant à sa femme et à ses deux enfants, il aurait peut-être pu lui pardonner, accepter. Mais non, imbu de son autorité, de son statut social, il avait campé sur ses certit u des : il détenait seul la vérité.
 
Il ne trouverait la paix, au milieu des décombres de sa vie – la faute à cet homme – que lorsqu’il l’aurait mis hors d’état de nuire, puisque personne, apparemment, ne vo u lait le faire. Mais il ne voulait courir ni le risque d’échouer ni même, ayant réussi, de subir – paradoxe dont la seule idée lui était insupportable – une punition. Il avait donc bien réfléchi et planifié soigneusement son coup. Lui qui avait depuis longtemps cessé de s’intéresser à la vie quot i dienne du collège, il avait tout fait pour n’en plus rien ignorer. Il pouvait désormais retracer dans le moindre d é tail la vie de l’établissement et, en particulier, il savait sans erreur possible à quels moments il pouvait s’y introduire sans risque d’être surpris.
 
La période des vacances de Pâques était propice à son projet : tout le monde s’était empressé de déserter le co l lège, mis à part le concierge, qui était là pour faire face au moindre imprévu dans cette période d’inactivité, et le ja r dinier, qui devait continuer ses soins aux espaces verts, surtout en cette période de l’année, où la végétation est particulièrement ardente. Si quelque professeur était resté là, ce n’était évidemment pas dans le collège lui-même qu’il se changeait les idées, mais dans son appartement situé dans le petit immeuble collectif de fonction situé à quelques dizaines de mètres derrière le collège, et d’où l’on n’avait aucune vue sur l’entrée du collège lui-même ou sur sa cour. Seul, le directeur, comme il en avait pris l’habitude depuis quelques années, restait là et passait le plus clair de ses journées dans son bureau, profitant des vacances pour mettre à jour ses dossiers que, en périodes d’activité, ses obligations d’enseignement ne lui perme t taient pas de toujours suivre d’aussi près qu’il l’eût voulu.
 
Ce n’est pas cela qui le gênerait dans la réalisation de son projet, est-il besoin de le dire ? Il s’éloigna pour se donner le temps de réfléchir. Mieux valait attendre un peu, pensa-t-il. Quand, un quart d’heure plus tard, il revint d e vant le collège, le jardinier avait disparu. Il avait encore du temps devant lui, aussi décida-t-il de s’éloigner de no u veau et de ne revenir que dix ou quinze minutes plus tard. Mais il restait très calme ; il s’en étonna ; quand il conc e vait son expédition – il l’avait vécu dix fois par la pensée, refaisant et ajustant chaque geste, ciselant les propos ve n geurs qu’il lui jetterait à la figure – quand il en rêvait ainsi, tout se déroulait sans à-coups ni hésitation, comme une mécanique bien huilée ; l’action, en l’empêchant de pe n ser, lui éviterait toute anxiété, tout doute ; mais ce n’était là qu’imagination. Et pourtant, cette attente impr é vue, qu’il s’imposait maintenant, le laissait dans un état de grande paix intérieure et d’assurance, de certitude. Oui, sa volonté était juste, ce calme en attestait ; son geste serait sûr et il retrouverait la paix. Justice serait faite, enfin.
 
En approchant de l’entrée du collège et longeant le te r rain de sport, il s’efforçait de scruter la cour ; la haie n’était pas si haute qu’il ne pût aisément vérifier l’absence de toute personne en vue. Une chance : le portillon qui permettait d’entrer sans avoir à ouvrir le portail n’était pas fermé ; un oubli du professeur qui venait de rentrer, ou du concierge, sans doute, alors que, le collège étant en so m meil, il n’était pas prévisible que quelqu’un s’y présentât a u jourd’hui. Certes, il n’aurait eu aucune difficulté à l’escalader, mais il lui aurait fallu prendre garde d’être aperçu par une personne qui passerait à proximité. Il r e garda sa montre : treize heures cinq.
 
Marchant à demi courbé pour se dissimuler le long de la haie, il se glissa dans l’entrée ; c’est alors seulement qu’il s’avisa que son survêtement vert émeraude lui pe r mettait de mieux se fondre dans le vert de la haie. Tout en souriant de cette découverte, il en éprouvait rétrospect i vement une sorte d’inquiétude : contrairement à ce qu’il croyait, il n’avait donc pas pensé à tout ; le hasard faisait bien les choses, mais il valait mieux ne pas se reposer sur la chance. Il gagna l’entrée vitrée située au centre de l’aile principale du collège, parallèle à l’avenue. Le hall, vide, sans un bruit, paraissait plus vaste que les dernières fois qu’il avait eu à y venir ; c’était bien loin. Il prit à gauche dans le long couloir vitré qui longeait la cour. Au bout, une large porte qui donnait sur le bâtiment des services administratifs.
 
Elle était fermée. Il n’avait pas à s’en inquiéter. Le d i recteur était certainement dans son bureau et il était bien improbable qu’il eût verrouillé la porte qu’il avait dû e m prunter ce matin en s’y rendant. Elle s’ouvrit sans difficulté. En face, une porte portait la mention « M. le Directeur ». C’était là son but.
 
Il eut un instant d’hésitation. Bref. Il n’ignorait pas que, de midi à quatorze heures, ce moment où les tensions de la vie du collège s’apaisent, le directeur avait coutume de fermer son bureau à clé : il ne voulait

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents