Kounda
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Kounda , livre ebook

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Description

À la fin de ses études, le jeune Kounda, qui a eu maille à partir avec les autorités de son pays, le Paix Land, est confronté au délicat problème de la recherche de l’emploi qui attend tout jeune fraîchement sorti d’université. Après de multiples petites activités qui permettaient au jeune homme à peine de survivre et dépité de l’injustice à laquelle est confrontée la jeunesse de son pays, Kounda décide d’emprunter le dangereux chemin de l’émigration clandestine. Mais malheureusement le jeune homme décède peu après son arrivée à Las Palmas, destination finale du Dorossi, chalutier à bord duquel il s’était embarqué grâce à la complicité de Rahim, un ami à lui qui travaille sur le bateau battant pavillon italien.


Un bout de papier retrouvé dans l’une des poches du jeune homme décédé témoignera tout sur le désarroi d’une jeunesse africaine confrontée à l’impossibilité de profiter des immenses richesses dont regorgent leurs pays de naissance, confisquées et mal gérées par leurs dirigeants, souvent avec la complicité des dirigeants du monde occidental. Ce qui contraint souvent bon nombre d’entre eux à tenter l’émigration à tout prix vers le continent européen et ailleurs en Amérique du Nord.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 13 juillet 2022
Nombre de lectures 0
EAN13 9782342364491
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0067€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Dédicace
 
À toute cette jeunesse désespérée et désemparée d’une Afrique trahie par ses dirigeants et par le monde.
Copyright













Cet ouvrage a été édité par les Éditions Publibook,
Immeuble Le Cargo, 157 boulevard Mac Donald – 75019 Paris
Tél. : 01 84 74 10 20 – Fax : 01 41 684 594
http://www.publibook.com

Tous droits réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-342-36448-4

© Éditions Publibook, 2022
Kounda
 
C ette année-là était la dernière de quatre longues années de leurs études universitaires.
En dépit de la grève estudiantine suivie de multiples manifestations de rue qui avaient sérieusement secoué le milieu universitaire, l’année précédente, Kounda et Ousmane avaient obtenu la moyenne leur permettant le passage en classe supérieure. Grèves et manifestations de rue étaient en effet interdites dans le Paix Land en vertu d’un décret présidentiel lu sur les antennes de la radio nationale au lendemain du premier scrutin présidentiel qu’avait connu le pays ; scrutin émaillé d’incidents graves ayant même conduit à des morts d’hommes. Preuve éloquente d’un apprentissage difficile de l’ère démocratique par un peuple rescapé de plus de vingt ans de dictature stalinienne qui avait endeuillé tant de familles et poussé des milliers de jeunes intellectuels et bras valides à opter pour l’exil dans des pays frontaliers et ailleurs en Europe, voire en Amérique.
On avait frôlé la catastrophe cette année-là, car sur les neuf mois d’études que comptait habituellement l’année académique, seuls trois avaient été entièrement étudiés. La rumeur propagée dans le campus annonçant la menace imminente d’une année blanche, associée au désespoir croissant de voir satisfaite leur plateforme revendicative – de meilleures conditions d’études et de prise en charge – avait finalement contraint les jeunes grévistes à reprendre le chemin des salles de classe et autres amphithéâtres. Les programmes étaient donc, à n’en pas douter, loin, très loin de finir, mais les instructions fermes données par le chef de l’État, tenant coûte que coûte à sauver plus son régime mafieux que l’année académique, avaient conduit à programmer les examens de fin d’année dès la reprise des cours. Il fallait donc aller à l’examen, programmes achevés ou pas. D’ailleurs, avait-on jamais achevé les programmes à l’université depuis quelques années ?
Lors du deuxième des trois scrutins présidentiels qu’avait connus le pays depuis l’arrivée de ce mode de gouvernance adopté par les Paix Landais à l’issue d’un référendum où le oui l’emporta largement sur le non – preuve d’une adhésion complète de la masse populaire aux principes et aux fondements démocratiques –, le calendrier universitaire avait été bouleversé. Depuis lors, les programmes annuels étaient rarement exécutés à plus de trente pour cent. De leur côté, les responsables des différents départements avaient donné consigne aux professeurs de ne pas faire le moindre cadeau aux étudiants qui, à leurs yeux, n’avaient aucune raison valable de déserter le campus et devaient donc chèrement payer cet écart de comportement. La radio nationale avait d’ailleurs diffusé, dans les jours qui avaient suivi la reprise des cours à l’université, un communiqué avertissant très solennellement les étudiants et leurs parents de la suppression très prochaine des bourses d’études qui, dit le ministre de l’Enseignement supérieur, « coûtent énormément à l’État qui étouffe sous le poids des bourses d’entretien des étudiants ». Le communiqué se terminait par cette information en forme d’avertissement : « C’est seulement au Paix Land que l’État a encore la gentillesse de verser de l’argent à ses étudiants. »
Les sujets des examens avaient donc été, comme les étudiants devaient s’y attendre, très difficiles cette année, les professeurs ayant pris soin de poser des questions renvoyant parfois à des programmes bâclés et même inachevés de classes antérieures pour – les jeunes l’avaient compris à leurs dépens – amener le plus grand nombre à repasser des matières lors de la session de seconde chance ou de rattrapage, communément connue dans le milieu estudiantin sous le nom de session. Certains professeurs, peu soucieux de l’éthique et de la noble mission rattachée à la vocation d’enseignant qui doit être la leur, attendaient cette occasion pour réaliser de « bonnes affaires ».
Par miracle, Kounda avait pu se faufiler au travers des mailles des filets sans avoir aucune matière à reprendre lors de la session. Ousmane s’en tira avec seulement deux matières à refaire à cette seconde composition, si redoutée par les étudiants. Cet obstacle n’était cependant pas impossible à surmonter pour qui se met au diapason de la marche des affaires dans ce pays où l’argent fait office de clé universelle capable de faire sauter les barrières les plus verrouillées de la nation paix landaise. Il put ainsi accéder en classe supérieure non seulement après avoir repris les deux matières, mais aussi en ayant versé à chacun des professeurs en charge des matières reprises la modique somme de deux cent mille francs paix landais pour être certain de ne pas avoir à reprendre la classe. Ainsi était programmée la marche du monde dans le milieu universitaire du Paix Land : tout pouvait s’acheter, même le passage en classe supérieure, et le rang de l’étudiant tenait plus au montant que l’intéressé pouvait débourser ou des relations qu’il s’était tissées qu’à sa valeur intrinsèque. Et quiconque ne voulait pas se voir lamentablement recalé n’avait qu’à se conformer à la règle, qui devenait de plus en plus règle d’or dans ce pays.
* *       *
 
O riginaire du Grand Est, issu d’un milieu social démuni – son père dirigeait un foyer d’école coranique et N’na Fanta, sa mère, s’adonnait à l’orpaillage, l’une des activités favorites de la gent féminine dans le Sorodou –, Kounda avait réussi un remarquable parcours scolaire, sortant victorieux de tous les examens qu’il avait eus à affronter jusqu’au niveau du « concours-sélection », barrière supplémentaire dressée à l’issue du secondaire et qu’il fallait obligatoirement franchir pour avoir accès à l’université dans le Paix Land, en dépit des deux années de baccalauréat que tout jeune lycéen devait absolument affronter. Cette fois-là, donc, en dépit du courage et de la détermination qui l’avaient toujours habité, Kounda recommença pour la première fois de sa vie un examen : il fallait en effet être investi d’un courage exceptionnel doublé d’un coup de pouce divin pour franchir, sans trébucher, cette barrière dressée sur le chemin de pauvres jeunes gens aspirant tous à poursuivre leurs études universitaires pour devenir les grands cadres de demain. Le décrocher du premier coup sans mettre la main à la poche relevait donc de l’exploit chez le jeune lycéen. Le « concours-sélection » était en effet devenu pour nombre de hauts cadres de l’Éducation paix landaise plus une source de revenus qu’un test servant vraiment à sélectionner les meilleurs enfants du pays devant accéder à l’enseignement supérieur ; pour l’avoir sans grande souffrance, le parent de l’élève n’avait qu’à débourser cinq cent mille francs à un réseau de mafieux qui s’était constitué dans le pays et qui tirait grand profit du malheur de milliers de pauvres jeunes gens. C’était une somme astronomique en ce temps-là, dépassant largement les capacités du citoyen moyen dans un Paix Land où plus de la moitié de la population avait un revenu de misère et vivait avec moins d’un dollar par jour. Que de jeunes avaient vu ainsi leurs rêves d’accéder à des études supérieures fondre comme neige au soleil, moins parce qu’ils ne le méritaient pas que parce que leurs parents démunis ne pouvaient leur acheter le précieux sésame ! Que d’espoirs avaient été ainsi déçus dans des familles où des enfants réputés brillants s’étaient vus contraints de jeter l’éponge après des années successives d’échecs au « concours-sélection », au terme de treize ans passés sur les bancs de l’école, sans avoir acquis aucune expérience professionnelle ! Kounda, comme la grande majorité des élèves dans le Paix Land, n’était pas issu de cette couche aisée de la société qui pouvait tout s’offrir en faisant automatiquement prévaloir sa capacité à débourser l’argent qui donnait accès aux forteresses les mieux tenues.
De deux années son cadet, fils de bergers né à Pétoun, dans les hautes montagnes, Ousmane avait eu la chance divine de décrocher le « concours-sélection » dès sa première tentative et d’être admis en faculté de droit à l’université Sarens de Consale, capitale du Paix Land. Cette même institution d’enseignement supérieur que Kounda venait d’intégrer.
Décrocher le « concours-sélection » et être orienté directement dans la capitale sans avoir à mener d’autres démarches ! Un nouvel étudiant du Paix Land ne pouvait rêver mieux, preuve d’un autre coup de pouce du Bon Dieu. Tout admis au « concours-sélection » souhaitait de tous ses vœux être orienté vers l’université de la capitale, le Sarens. Pourquoi donc voulaient-ils tous étudier dans la capitale ? Les conditions d’existence y étaient-elles meilleures ? Ou étudiait-on mieux à l’université Sarens que dans les autres instituts d’enseignement supérieur créés de toutes pièces, sans le moindre souci pour l’infrastructure souvent très inadaptée, et dispersés ici et là dans les différentes régions du pays ? Certainement non. Consale est en effet réputé être la ville la plus chère de la trentaine de circonscriptions et de provinces que compte le Paix Land : Le loyer d’une chambrette de quelques mètres carrés seulement, dite « entrer-coucher », atteignait au moins le million de francs dans la capitale du Paix Land où le moindre déplacement relevait du parcours du combattant en plus des frais de transport nettement au-dessus de la bourse du citoyen moyen.
En outre, cette grande agglomération abrite à elle seule plus du tiers de la population de tout le Paix Land et croule sous le poids de centaines de mi

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