Juste avant l aurore terrestre
150 pages
Français

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Juste avant l'aurore terrestre , livre ebook

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Description

Un voyage de classe très ennuyeux, pour la bonne élève qu’est Amandine, se transforme en calvaire et la traumatise quand elle est victime d’un viol. Elle tente alors de se reconstruire petit à petit, malgré sa colère, sa haine et ce lourd secret qu’elle porte comme un fardeau.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 20 mars 2012
Nombre de lectures 0
EAN13 9782748380514
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0067€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Juste avant l'aurore terrestre
André Streel
Publibook

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


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14, rue des Volontaires
75015 PARIS – France
Tél. : +33 (0)1 53 69 65 55
Juste avant l'aurore terrestre
 
 
 
à ma fille
 
 
 
La haute mission de l’art est de préfigurer par ses illusions une réalité supérieure de l’univers, de cristalliser les émotions du temps dans une pensée d’éternité.
 
Le Livre d’Urantia
 
 
 
Avant-Propos
 
 
 
J’ai des jours morts de vie, étourdis, éblouis,
Ecrasés par le vol de rêves qui passèrent,
J’ai des jours rampant mal au fond de l’éphémère,
Entre les feux éteints et les espoirs meurtris.
J’ai des jours trop pesants, trop étroits, trop petits,
J’ai des jours qui sont nuits, et sans la moindre étoile,
Tremblant de peur, de froid, dessous leur brumeux voile,
J’ai des jours fous de ciel, sans la force d’un cri.
J’ai des jours qui sont vieux et qui n’ont pas d’amis,
Des jours portant le deuil, des jours pleurant la pluie,
Des jours courant jusqu’où la fête s’est enfuie,
Jusqu’au trop haut zénith du soleil de l’esprit.
J’ai des jours animaux, enragés, abrutis,
Des jours puant la guerre, empêchant de renaître,
Où je suis cravaché par d’invisibles maîtres
Me labourant d’orgueil et de creux paradis !
Et leurs jours de métal serrent tels des étaux,
Voulant aussi menu que mon corps tout mon être,
Voulant dans l’apparent me faire disparaître,
J’ai des jours plus que laids qui sont encore beaux !
Plus je meurs au dehors, plus mon roi secret vit,
Plus la souffrance vainc, plus je chante victoire,
Plus ce qui est dit vrai redevient illusoire,
Plus mon regard s’attriste et plus mon âme rit.
Soudain ressuscités, ces souvenirs jaunis !
Les voici de retour, nos instructeurs cosmiques,
Nos chasseurs de faux dieux, nos semeurs d’idyllique,
Nos princes du bonheur ramenant l’infini !
 
 
 
Chapitre I. En bateau
 
 
 
Amandine aurait voulu voler, tout le temps, bien plus loin même que la Terre, voilà ce qu’à l’instant elle venait de confier à son roi Arthur, Rimbaud bien entendu.
Il volait, lui, vraiment, à ses côtés, mais heureusement personne d’autre qu’elle ne le voyait. Ils n’étaient donc pas dérangés. Surtout, le cadre était propice, les Ardennes, ses Ardennes à lui, qui par le fait même devenaient aussi ses Ardennes à elle. Un souffle puissant l’inspirait, lui, comme jamais. Déjà contente, elle, depuis son physique de mortelle où elle restait empêtrée, de se laisser aspirer un tant soit peu, de bouger malgré tout, à ses côtés, même si ce n’était jamais qu’aussi lentement que l’autocar. Son Superman poétique se freinait à mesure, ce qui permettait de continuer d’échanger, bien en silence évidemment :
 
— Que non ! mon cher Arthur, “A” n’est pas noir mais blanc tout au contraire ! soutenait-t-elle, à présent presque vindicative. Il est le début, il contient toute la suite des couleurs.
— Disons qu’il est bleu nuit puisqu’il n’est déjà plus tout à fait la nuit, puisqu’il est le début de ce qui n’est plus la nuit : de son sommet en pointe il commence à crever la nuit, il est l’aurore si ténue, si fragile, il est l’espérance, Amandine jolie.
— J’aurais pourtant juré !
— Normal que tu le voies blanc puisque tu vois tout en rose. J’ai eu dix-sept ans moi aussi… Tu passes du noir au blanc directement, tu escamotes comme un enfant. Après tout, vois-le bien comme tu veux ce que tu n’as même pas encore vraiment commencé d’écrire !
— Normal, n’est-ce pas, de s’y tromper ? D’aussi bas justement, depuis les sens…
— Tu dors quand tu crois vivre. Quel réveil va-t-il te falloir pour te faire tomber du lit, toi qui veux te réveiller avant tout le monde ?
— Mon adorable prophète de malheur ! Ah voir enfin comme toi, ce qui s’appelle voir ! Qu’est-ce que je t’envie, mon bon ami !
— Que crois-tu donc ? Je me suis trompé aussi quand j’étais tout en bas comme toi. Il faisait toujours vraiment nuit quand j’ai cru me réveiller et voir pointer un soleil d’or. Las, il n’était encore que sa propre esquisse en moi, immatérielle, abstraite, mais à ce point éblouissante pourtant que je n’ai plus vu que lui partout, au point même de le chercher jusque dans l’or, tout trivial, tout métallique, de la Terre. Alors un bon conseil, ne te rendors pas une fois que tu auras ouvert les yeux.
— Je ne puis les ouvrir davantage !
— Ce ne sont pas tes vrais yeux ! Regarde par moi en attendant de voir par toi !
 
Silencieuse au fond du car surexcité, Amandine se mit à jubiler, elle aussi : il était là, cette fois elle en était sûre, elle n’avait rien inventé, il lui avait vraiment répondu, son géant d’amour ; sans vers ni façons il avait quitté les pages plates des recueils et dansait avec la beauté de voyelles aussi vivantes que lui-même, tellement plus vivantes que ces copains et copines de collège et de voyage, tristement gais, braillards, criaillantes, plus ou moins ivres, réputés en fête.
Celle qui aimait s’étonner aurait voulu avoir peur de ces rochers, froncés, ridés, torturés à plaisir, qui à l’improviste jetaient leurs méchantes souffrances sur les vitres du véhicule, près de griffer, avant de les rentrer, rancunes, sous la ténébreuse toison de sapins. Ces cœurs de pierre, Amandine les voyait sanguinolents…
Comme elle leur préférait le décolleté impromptu de ces clairières frémissant de toutes leurs couleurs, à vif, tandis qu’à l’occasion, coquetterie suprême, l’un ou l’autre cube de neige en bonnet pourpre se mettait à califourchon sur l’horizon, contre le bleu magique, avec des airs de maison !
Le monstre à roues, lui, n’arrêtait pas de dépasser le passé, de trouer des images de bois et de villages, dont les vagues en déferlant de part et d’autre du sillage n’arrêtaient pas, elles, d’engloutir des murs trop lourds d’école, de recouvrir d’espace l’inextricable écheveau de sa ville, morte hier.
 
— Avant tout “A” comme Amour ! C’est lui qui reprit, impromptu.
— Mais au fait, pourquoi peindre uniquement les voyelles, mon bien-aimé précurseur ?
— Au temps où j’étais petit homme d’il y a un siècle, je fus tellement ravi de ma découverte que j’en perdis mon pinceau.
— Et “N” est en vérité sombre comme la nuit, n’est-ce pas, puisqu’il enferme à double tour le cercle d’or du soleil de tout son “NON” de “haine”.
— Ne pense qu’à “M” et “aime” sans frein ! Alors tu peux vraiment me goûter ce “OUI”, si vibrant et d’abord feu au zénith ! allumant un “U” de soleil central aussi vert que ces collines.
— Chouette, un soleil vert, je voudrais bien voir çà ! Lire, vraiment lire, jusqu’aux couleurs !
— Avec les yeux du cœur !
— Comme elles doivent être ravissantes, toutes ces lettres !
— Tu ne peux pas savoir ! Comme vous toutes, chacune a sa robe et chaque robe, sa couleur, inimitable, la plus belle des couleurs que tu puisses admirer de tous tes petits yeux est si laide en comparaison !
— Et toutes les lettres se marient et font des mots.
— Tellement plus diaprés que les bouquets de fleurs riant au bord de ce ravin.
—  Et tous ces mots multicolores se jettent à leur tour dans des phrases.
— Qui s’élargissent en alinéas, paragraphes, chapitres.
— Avant de se fondre dans l’océan des livres.
— Oui, des vrais livres, qui ne jaunissent jamais, puisqu’ils ne sont plus en papier.
— A l’envi multipliés.
— En autant de féeries.
— Vertige, doux vertige !
— Et tu ne sais pas tout, chaque lettre est aussi note.
— Couleur, musique, elles brillent, elles chantent, et quoi encore ?
— Elles se comptent même, chacune a son nombre, comme les corps simples, leur valence, si tu veux.
— Divine chimie des mathématiques françaises !
— Et capricieuse orthographe qui dans sa dénomination même s’affuble d’un THETA entêté ou d’un PHI philosophique pour mieux faire régner l’harmonie de l’esprit !
— “Nous partons pour la grande guerre, la grande guerre de l’amour !”
— “Emportés par l’immense amour, ils entreprendront quelque jour le voyage vers la lumière !”
— “Elle est retrouvée. Quoi ? L’éternité.”
— Du présent.
— Oui, je les vois au présent, tes vers, tes enfants, qui sont pour tous les enfants de la Terre, je les vois ondoyant sous une brise subtile qui court si bien jusqu’au bout de ce qui paraît vide aux yeux paraissant voir.
— Ce qui point ne commence ni ne finit nous attend tous…
 
A la moindre occasion de repli, Amandine repartait, sous alibi de rêve, dans son monologue pluriel, avec celui qui à la longue était devenu bien plus que ce voyant d’anthologie…
Elle n’était plus que ce “OUI” complet, amoureux, offert à l’ange, non plus seulement au meilleur de cet unique mais au meilleur de tous les meilleurs. Et de plonger alors par les gouffres de la mémoire, dans ce “Bateau” plus que jamais “Ivre”, jusqu’à cette heure de fond de classe, pleine à ras bord de lois physiques, si merveilleusement arides qu’elles avaient fini par exploser en toutes sortes de poésies, suscitant cet actif abandon, par le dedans, à qui d’autre que ?…
 
Fin juin 1969, un an déjà et un mois après qu’avait failli fleurir le premier printemps humain. Une excursion de trois jours réunissait les oisillons prêts à s’égailler, ultime communion de ces rhétoriciens, évadés des examens par des blagues de plus en plus lourdes et des rires de moins en moins fous : de quoi exorciser quelques années de surimpression intellectuelle à l’ombre encombrante de Platon, Hugo et compagnie…
Jusqu’alors Amandine avait donc été là sans y être, intégrée même au chœur de ses camarades, mais à raison d’un seul chef-d’œuvre de leur répertoire gaillard, pour une fois d’accord, à son degré, avec la morale qui s’en dégageait, « Qu’est-ce qu’on s’emme

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