Entre le couteau et l icône
90 pages
Français

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Description

Trois femmes : Marie l’adolescente écorchée vive, Pouchka, prostituée au grand cœur et Clarisse, directrice d’une maison de correction. Tout les séparait si ce n’est que chacune a sa façon a vu sa vie « brisée » par un homme. Un drame libérateur pour chacune d’elles va les rassembler.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 30 mars 2012
Nombre de lectures 0
EAN13 9782748381160
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0052€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Entre le couteau et l'icône
Viviane Maeder
Publibook

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


Publibook
14, rue des Volontaires
75015 PARIS – France
Tél. : +33 (0)1 53 69 65 55
Chapitre I
 
 
 
Clarence venait de tirer les rideaux dans la loggia vitrée qui lui servait de bureau lorsque la sonnerie du téléphone retentit. Elle s’était servi une tasse de thé à la bergamote et savourait toujours cet instant de la tombée du jour où elle pouvait s’accorder un moment de répit avant une soirée qui ne manquait pas de s’annoncer difficile. Sylvia avait risqué l’overdose dans l’après-midi, et Coralie avait menacé de sauter du balcon de sa chambre, provoquant un vent de panique chez les pensionnaires. Ensuite, il avait fallu calmer les éducatrices. Clarence prit une grande inspiration en décrochant le combiné :
— Foyer Sainte-Thérèse, bonsoir !
— Inspecteur Cervez. Bonsoir. Puis-je parler à la directrice ?
— C’est moi-même (Elle évitait toujours de dire son nom, chaque fois que c’était possible). Que puis-je pour vous ?
— Votre pensionnaire a encore fait des siennes…
— Marie ?
 
Avant même qu’il n’ait terminé, elle savait déjà.
— Marie Laroche. Encore elle. Mais à quoi sert votre foyer ? Vous pourriez quand même les surveiller un peu mieux, vos filles.
— On ne peut tout de même pas leur mettre un boulet aux pieds !…
— Eh bien, cette fois, on l’a retrouvée avec Luigi Vandermo, un dangereux récidiviste qui s’est évadé de prison.
 
Clarence avait entendu parler de Luigi. Vingt-deux ans, attaque à main armée, et déjà trois ans de détention plus deux évasions à son actif. Comment Marie avait-elle fait pour tomber sur lui ?
— Nous vous la ramenons tout à l’heure. Mais dites-lui qu’elle a de la chance. Parce que la prochaine fois, elle ne s’en tirera pas comme ça. Le juge des mineurs sera averti, et son escapade risque de lui coûter cher.
 
Clarence soupira, en terminant ce bref échange téléphonique qui la laissait au bord de l’épuisement. Elle éprouvait une certaine tendresse pour Marie la rebelle, penchant qu’elle s’interdisait d’avouer ; en même temps, la colère d’avoir été bernée et d’être incapable de mâter cette gamine indocile la faisait fulminer. Elle songea avec humeur que son thé allait encore refroidir.
 
 
 
Chapitre II
 
 
 
Marie s’était débattue quand les flics l’avaient fait monter dans le panier à salade. Luigi y était déjà ; on lui avait passé les menottes. Pourtant, elle ne put s’empêcher d’esquisser un sourire en se remémorant la dernière scène, debout près du bar : tout à l’heure, lorsqu’ils étaient venus les cueillir au bistrot du coin, son copain avait eu le temps de lui filer le couteau à cran d’arrêt qu’elle s’était empressée de donner au barman de l’autre côté du comptoir.
 
« Phil je te revaudrai ça. Prends-le et surtout ferme ta gueule. V’là les poulets ! »
 
Les flics, pourquoi toujours eux ? Est-ce qu’ils ne pourraient pas lui foutre la paix une fois pour toutes ?
 
Luigi allait retourner en cabane et elle, au Foyer Sainte-Thérèse. Autrefois, on appelait ça une maison de correction. Maintenant il était de bon ton de prôner les mesures d’encadrement éducatif : elle allait donc avoir droit à dix jours de silence absolu dans le « boudoir thérapeutique » du troisième. Tout ça sans télé et sans clopes avec pour toute compagnie un portrait de Sainte-Thérèse D’Avila l’invitant à méditer sur ses agissements pervers, en vue de réintégrer le droit chemin. Après quoi, on allait sûrement organiser une réunion d’intervenants pour parler de son cas. La directrice n’avait pas de poigne, mais c’était une meuf correcte dans l’ensemble. On ne pouvait pas en dire autant de la mère Gorgier. Une vraie peau de vache, celle-là. Mais le beau psychiatre allait sûrement ramener sa fraise : le Dr Steffanier, que tout le monde appelait Stef. Beaucoup de séduction, avec ses tempes légèrement grisonnantes et son sourire enjôleur. Il arrivait même à faire rougir la directrice ; et Marie se dit qu’elle n’avait pas tort de lui trouver du charme. Par contre, ses petites questions insidieuses l’agaçaient prodigieusement : « Pourquoi as-tu répondu ça ? Qu’est-ce que ça te faisait d’imaginer ton père à ce moment-là ? Que ressentais-tu ? » Elle l’aurait tué. Qu’est-ce que ça pouvait bien lui foutre, ses états d’âme et ses sentiments ? En ce moment, elle n’en éprouvait aucun, même pour Luigi. Juste envie de cogner et de se tirer.
 
Pourtant, elle savait qu’il fallait qu’elle suive son plan jusqu’au bout. Pas question de moisir dix jours au « boudoir ». Elle devait absolument trouver le moyen d’amadouer la vieille quand elle arriverait là-bas.
 
Marie ferma les yeux pour se détendre et secoua sa longue chevelure noire. On lui avait dit un jour qu’elle ressemblait à une jeune jument sauvage et c’était sans doute là le plus beau compliment qu’elle ait jamais reçu.
 
 
 
Chapitre III
 
 
 
Il était presque minuit et Pouchka, dite Poussy Cat, perchée sur ses talons aiguilles, avançait d’un pas menu vers le Rio tout en réajustant machinalement les boucles de sa perruque. Elle venait, comme presque chaque soir compléter les gains de la journée ; mais la soirée s’annonçait plutôt mal. En une heure et demie, elle n’avait eu qu’un seul client potentiel, et encore la somme était trop dérisoire pour qu’elle l’ait acceptée. En face, deux Brésiliennes aux seins siliconés étaient déjà montées plusieurs fois. Il était temps pour elle d’aller boire un verre, histoire de se remonter un peu le moral. Tout à coup, quelques mètres plus loin, un taxi s’arrêta et Pouchka vit la gamine en descendre, la même que l’autre fois, avec sa longue crinière noire et son air de pouliche.
— Poussy Cat, ciao ! C’est moi, Marie, tu te souviens ?
— Mais qu’est-ce que tu fiches encore ici ?
— Je viens bosser, tiens. Mon homme est en cabane, et j’ai besoin de thunes.
— Je t’ai déjà dit de dégager. T’as rien à faire là. Un, t’es mineure, et deux, tu devrais être dans ton pensionnat pour pucelles dévergondées, à sainte machin. Tu veux que je te dénonce aux flics ?
 
Si seulement Marie n’avait pas éclaté en sanglots, si seulement elle n’avait pas souri à travers ses larmes de façon si désarmante. La beauté et la jeunesse de cette gamine, mais aussi toute la souffrance contenue dans ses yeux sombres l’avaient emporté sur la raison de Pouchka :
 
« Eh, ma puce, tu vas pas te laisser aller. Dis-moi ce qui te prend la tête. Allez viens, on dégage ! »
 
Marie s’était accrochée à son bras, et l’avait suivie sans se faire prier à l’entrée du Rio . Comme la dernière fois, elles iraient s’asseoir au bar pour prendre un verre. Elles avaient le temps. Toute la nuit, s’il le fallait. Du coup Pouchka ne voulait plus penser à l’état désastreux de ses finances ni au manque à gagner de la soirée. Pas plus tard qu’hier, Dédé lui avait dit : « Poussy Cat, t’as le cœur trop tendre, tu vas finir par te faire avoir. » Qu’il aille se faire voir, cet enfoiré !
 
Marie se sentait mieux à présent, un verre de gin à la main. Elle avait parlé de son mal de vivre depuis la mort de sa mère, de son besoin continu de s’automutiler. Elle releva sa manche pour que Pouchka puisse voir les fines cicatrices, ciselées comme des dentelles dans la chair. Il y en avait même le long des poignets.
— Tu sais, je le faisais même pas exprès. Dès que je repérais un couteau qui traînait, c’était plus fort que moi, il fallait que je me l’enfonce quelque part, juste pour l’effet que ça me faisait. J’avais tellement envie de voir le sang gicler sur ma peau, et ne plus rien sentir d’autre. J’ai tout essayé, même dans le vagin.
 
Pouchka était effarée. Elle aurait voulu réagir, mais sans transition, Marie avait enchaîné :
— En général, je cassais la baraque...

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