Dieux et Bouddhas au Japon
287 pages
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Dieux et Bouddhas au Japon , livre ebook

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Description

Le bouddhisme japonais, héritier direct de la tradition bouddhique chinoise qui s’était épanouie du VIe au VIIe siècle, a conservé fidèlement les enseignements des écoles continentales. Il a su aussi se montrer innovateur en réorganisant les données indiennes et chinoises ou encore en donnant naissance au syncrétisme original et vivace avec les croyances locales. L’un de ses plus extraordinaires aspects est l’essor des doctrines ésotériques (mikkyô) : celles-ci font pendant au tantrisme tibétain et offrent une autre image de cette dimension ultime du bouddhisme. Bernard Frank (1927-1996), premier titulaire de la chaire de civilisation japonaise au Collège de France, fut un incomparable connaisseur des traditions littéraires et religieuses du Japon classique. Il consacra les quinze années de son enseignement à étudier l’iconographie bouddhique japonaise dans ses relations avec les fondements doctrinaux d’une part et son contexte littéraire et historique de l’autre. Voici enfin réunis en un volume les résumés annuels de ses cours, précédés de la leçon inaugurale qui en définit les orientations. Ainsi regroupés, ces textes donnent une présentation cohérente et approfondie de l’une des faces les moins connues du bouddhisme japonais.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 avril 2000
Nombre de lectures 1
EAN13 9782738168436
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,1100€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Collection « T RAVAUX DU C OLLÈGE DE F RANCE  » OUVRAGE PUBLIÉ AVEC LE CONCOURS DU CENTRE NATIONAL DU LIVRE
© O DILE J ACOB, AVRIL 2000 15, RUE S OUFFLOT, 75005 P ARIS
www.odilejacob.fr
ISBN 978-2-7381-6843-6
ISSN : 1265-9835
Le code de la propriété intellectuelle n'autorisant, aux termes de l'article L. 122-5 et 3 a, d'une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l'usage du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation ou réproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (art. L. 122-4). Cette représentation ou reproduction donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo .
Préface


Sous l’apparence érudite de ce livre se cachent les trésors d’une sensibilité religieuse et esthétique exceptionnelle. Il y a, chez tout savant de grande culture tel que fut Bernard Frank, comme une petite musique secrète qui se perpétue toute la vie. C’est l’inspiratrice à laquelle tout se ramène et qui fait de lui un être unique, laissant sa marque dans le style même, dans les goûts, la vision de l’homme et du monde… Si l’on pouvait définir d’un mot la passion qui semble avoir dominé toute la vie de celui à qui j’ai été lié d’amitié un demi-siècle, il me semble que ce serait celle de l’imaginaire religieux sous toutes ses formes. Il a en cherché au Japon les témoins les plus divers, avec une constante qui ne s’est jamais démentie : dans la littérature poétique ou narrative, dans les pratiques et les figures religieuses, populaires aussi bien que savantes… C’était là, pour lui, qu’on pouvait le mieux découvrir l’essence même de la sensibilité japonaise. Il y avait entre lui et le Japon — monde peuplé de divinités de tout genre et jusqu’à ces lutins colorés aux actions imprévisibles connus sous le nom d’ oni , objets de crainte et d’amusement — comme une affinité préétablie. Il était attaché à ce pays par toutes ses fibres. Esprit profondément religieux, mais en même temps le plus ouvert aux diverses formes de dévotion, il cherchait ce qui dans l’homme s’ouvre sur un ailleurs et des profondeurs qui le dépassent. À ces tendances mystiques s’alliait un sens esthétique que sa familiarité avec le Japon n’a cessé d’enrichir et de développer, un amour de la langue qui se reflète dans l’élégance et la clarté de l’expression, la préoccupation du mot juste.
Dès son premier ouvrage, qui avait fait sensation au Japon même par sa nouveauté, la méthode était là et n’a pas changé : celle qui consiste à tenir les deux bouts de la chaîne, le quotidien, le vécu d’une part, ses soubassements doctrinaux, de l’autre. Une des grandes originalités des travaux de Bernard Frank tient justement à son refus de séparer théorie et pratique, à son effort pour les approfondir conjointement. En lisant les journaux rédigés par des aristocrates de l’époque Heian (794-1159), époque qui commence avec la fondation de l’actuel Kyôto, il avait relevé de curieux « interdits de direction », imposés par la présence de divinités stellaires ambulantes, et les moyens de les contourner. Il avait été ainsi conduit à établir, par des recherches patientes et difficiles sur l’astrologie sino-japonaise, le système étonnamment complexe qui présidait à ces étranges tabous. La démarche était neuve, inhabituelle. Elle impliquait tout à la fois, outre les qualités indispensables au vrai savant, finesse et intuition, étendue des connaissances et intimité avec l’objet des recherches. Sur ce qui devait devenir son domaine d’étude préféré — les doctrines et l’iconographie du bouddhisme de l’ancien Japon —, beaucoup de travaux de détail excellents avaient déjà été produits. Mais ils manquaient de ce qui pouvait en faire la cohérence : l’image commune que les Japonais se faisaient des figures de leurs cultes, tout ce qui en somme pouvait leur rendre vie. L’histoire des dogmes, celle de l’art, celle des groupements religieux et des fêtes, constituaient jusqu’alors autant de domaines séparés. Les envisageant au contraire comme indissociables, Frank, qui avait joint la connaissance du sanskrit et du chinois à sa pratique courante du japonais, se fit ethnographe en même temps que savant, puisant le plus possible de données concrètes à toutes les sources, aussi bien figurées que littéraires au sens le plus large (récits en prose, poèmes et journaux intimes, dictons, expressions familières…). Personne avant lui ne s’était attaché à acquérir au Japon une telle familiarité avec les lieux de culte célèbres, mais aussi avec les sanctuaires obscurs et négligés des campagnes. Pour ce qu’il appelait « l’articulation des croyances sur la vie quotidienne », il collectionna jusque dans les coins les plus reculés de l’archipel près un millier de ces talismans connus sous le nom d’ ofuda  : simples feuilles ronéotées, introuvables sitôt le tirage épuisé, portant des inscriptions et l’image exacte de la divinité locale avec ses attributs, et tablettes de bois à usage dévotionnel ou prophylactique. Dans ces images pieuses, méprisées par les savants, il sut voir de précieux témoins de l’idée que les gens simples se faisaient de leurs dieux protecteurs, ravi d’y trouver parfois des cultes qui n’étaient pas attestés ailleurs. La maladresse et la naïveté de ces figures le séduisaient autant que l’art le plus raffiné : les statues de saints, plus ou moins orthodoxes, sculptés dans la pierre ou dans le bois, de cette Bretagne où il avait choisi de s’installer en été lui inspiraient la même tendresse.
 
L’iconographie des divinités bouddhiques japonaises occupe la part la plus importante de ce livre. L’introduction qu’on doit à l’un de ses plus fidèles et savants disciples fournit un petit guide à qui veut profiter de l’immense érudition de Bernard Frank, ou du moins se faire quelque idée de la richesse et de toutes les implications d’une recherche approfondie et assidue. Cette série d’exposés bien ordonnée est en effet indispensable à qui veut s’initier à cette religion foisonnante que fut le bouddhisme, et plus précisément à celui qui fut particulier au Japon, bouddhisme du Grand Véhicule où s’associent étroitement monacat et monde laïque, fortement marqué par l’ésotérisme introduit de Chine au début du IX e  siècle et enrichi par le célèbre Nichiren au XIII e , marqué aussi par la formation des grandes sectes aux XII e et XIII e  siècles et par l’importance de ses emprunts aux divinités autochtones. D’emblée, Frank définit l’objet de sa recherche : les origines indiennes et sérindiennes, la transmission de l’Inde à la Chine et de la Chine au Japon, les adaptations et les syncrétismes japonais, les formes de dévotion et de pratiques populaires, les figures et leur réalité religieuse et psychologique. Il étudie les grandes divinités du panthéon bouddhique japonais et tout ce qu’implique leur connaissance sur les plans de l’iconographie, des pratiques de dévotion, de l’art, leurs différents aspects, leurs formules, leur rituel, leurs attributs iconographiques, leurs symboles, leurs gestes manuels… les formules magiques, les ma nd ala (microcosmes figurés sous la forme de diagrammes et de peintures qui sont de grande importance pour la cosmographie et l’iconographie bouddhique et servent de support aux pratiques de concentration psychosomatique) ; l’histoire de l’ésotérisme à travers les traductions qui furent faites en Chine d’originaux indiens au cours des siècles ; l’usage à fin de dévotion des sceaux pour la reproduction indéfiniment répétée de figures bouddhiques, les rouleaux de peintures ou « modèles d’images »… Bien plus que des comptes rendus d’enseignement, ce qu’ils étaient dans leur principe, ce sont autant d’articles fondamentaux.
Ce monde où foisonnent les dieux locaux, dont chacun est doué d’attributs et de pouvoirs particuliers, possède en même temps un panthéon organisé. On retrouve là un des dogmes fondamentaux du bouddhisme : le multiple s’y ramène à l’un et l’un se réfracte dans le multiple. C’est une multitude de cultes à l’intérieur d’une grande doctrine de salut, « tout à fait comparable, écrit Frank, par sa vocation universelle, à celle dont les idéaux nous ont formés ». Il avait la conviction que monothéisme et polythéisme se rejoignent dans le sentiment religieux, dans l’art, la littérature, et que cette harmonieuse cohabitation aurait pu se produire dans la culture occidentale si les traces du polythéisme ancien n’y avaient été effacées avec tant de soin. « Mais, disait-il, l’antique polythéisme s’est fondu en Europe dans la religion, alors qu’il est resté vivant au Japon. » Des correspondances s’établirent entre divinités bouddhiques et antiques divinités japonaises, comme il s’en fit entre dieux grecs et latins, païens et chrétiens. Un bon exemple en est Inari, dieu des récoltes abondantes, qu’on retrouve sous la forme d’une divinité du bouddhisme ésotérique. Au Japon comme ailleurs, le bouddhisme fut accueillant à tous les cultes. La popularité exceptionnelle de certains Bouddhas, Bodhisattva (êtres qui, ayant réalisé ce qu’est la délivrance et pourraient donc entrer en nirvâna, restent dans le monde pour le sauver), dieux, rois de science ou rois gardiens de l’espace, s’explique sans doute par leur fusion avec d’antiques divinités locales. De certaines d’entre elles, les Japonais firent même des avatars de divinités bouddhiques. Il y eut donc greffe et communauté cultuelle entre traditions autochtones et religion importée du continent. Aussi bien, lorsqu’à l’ère Meiji, qui commence en 1868, fut créée une religion nationale, le Shintô, dont on s’efforça de couper brutalement et de façon artificielle les liens que l’ancien Japon avait entretenus si longtemps avec le bouddhisme, la cohabitation avait été trop étroite pour ne p

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