Derniers vestiges de la féodalité
192 pages
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Derniers vestiges de la féodalité , livre ebook

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Description

En 1352 l’évêque d’Aléria excommunie une « secte d’hérétiques » qui prospérait dans le sud de la Corse, les Giovannali.
Pardonnés par le pape Innocent VI puis à nouveau excommuniés sous les accusations de fornication et de mœurs contre nature, ils furent poursuivis sans pitié et exterminés par le fer et le feu jusqu’au dernier, d’après la tradition.
Six cents ans plus tard un jeune étudiant en théologie qui rédige une thèse sur l’Inquisition au XIVe siècle arrive en Avignon pour étudier les archives de la papauté.
Il y découvre de curieux documents sur l’affaire des Giovannali qui le mettront sur la piste du registre de l’inquisiteur qui a instruit leur procès.

Son enquête sur ces âges sombres de la Corse le conduiront de Pise à Aleria et Bastia jusqu’au cœur du maquis corse.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 21 décembre 2012
Nombre de lectures 2
EAN13 9782332532107
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0075€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright




Cet ouvrage a été composé par Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-332-53208-4

© Edilivre, 2013
Intramuros
Quand j’arrivai en Avignon la ville venait de subir une des plus sévères inondations de son histoire. On me prévint que les portes du coté du Rhône étaient fermées et que les bas quartiers de la gare étaient encore inondés. J’entrai donc par la porte Saint-Lazare demeurée seule praticable à pied sec. Dés que je fus installé dans un petit hôtel au pied du Palais des Papes je me précipitai Place Crillon pour observer la crue du Rhône.
Le spectacle était saisissant, la Porte de l’Oulle, une des plus importantes de la ville était barrée par une double rangée horizontale de lourdes planches de chêne solidement ancrées par des rainures verticales ménagées dans les tours qui entouraient la porte, au milieu desquelles on avait tassé un mélange de terre et de fumier.
Furieux d’être ainsi empêché de pénétrer dans la ville le fleuve roulait, à la hauteur de mes yeux ses eaux limoneuses, charriant branches, troncs d’arbres et débris divers. La vision tangentielle de la surface du fleuve en accentuait les turbulences et la vitesse d’écoulement. Ce spectacle m’hypnotisait, le Rhône m’apparaissait comme un long serpent musculeux tentant d’étouffer la ville de ses constrictions. Il me fallut faire un effort pour en détourner les yeux et observer les minces filets d’eau, étonnamment claire, qui sourdaient des interstices des planches pour aller se perdre dans je ne sais quel bas-fond. Je décidai de suivre les remparts vers la droite pour inspecter les autres portes tant l’économie de moyens, la solidité et l’efficacité de ce système anti crue médiéval me paraissait admirable.
Le soleil avait entrepris de percer les nuages et irisait la mousse épinardesque que les fortes pluies des jours précédents avaient fait pousser sur les créneaux et autres mâchicoulis des murailles. Porte de la Ligne il avait fallu rajouter deux planches et pourtant le fleuve en affleurait encore leur bord supérieur. Porte du Rhône, la plus exposée car la plus proche de l’endroit ou le fleuve vient buter sur les remparts avant de s’infléchir et de les longer, encore deux planches supplémentaires. Si jamais elles venaient à céder, me disais-je, des dizaines de milliers de mètres cubes d’eau se déverseraient dans la ville, c’en serait fini de mon séjour dans la cité des Papes et ma thèse prendrait une bonne année de retard.
Pour chasser ces idées je décidai de m’offrir un dîner dans un bon restaurant, quitte à me contenter de pain, de tomate et d’huile d’olive pendant quelques jours. Je m’attablai chez Teste d’Oie, dont l’enseigne et le nom me parurent alléchants, devant une gardiane, sorte de daube de taureau marinée dans du vin rouge, arrosée d’un excellent Cote du Rhône, un Beaume de Venise, je crois.
J’ai toujours adoré ces repas solitaires, en tête à tête avec un bon bouquin. L’espèce de bulle crée par la conjonction du vin, de la nourriture et du livre, l’alternance bien ordonnée de la mastication, de la déglutition et de la lecture me détachent du monde et me vengent des repas pris en commun ou l’obligation d’échanger des propos stériles entre deux bouchées enlève tout plaisir à l’action de se nourrir. Pour l’occasion je sortis de ma poche et étalai soigneusement sur la nappe mon exemplaire fatigué de l’«  Histoire des Papes en Avignon  » et me concentrai sur la période qui m’intéressait, les pontificats de Clément VI et d’Innocent VI.
Le lendemain, dés l’aube, le grand soleil de Provence arrachait des lambeaux de vapeur aux toits de la ville, tout Avignon fumait comme un immense pâté en croûte que l’on vient de sortir du four. Je me dirigeai vers la bibliothèque municipale ou j’avais rendez-vous avec le professeur M. Arrivé à l’angle de la place Saint Didier, j’observai avec intérêt cette imposante maison forte construite pour le Cardinal Ceccano et sa suite vers 1340. Son architecture militaire avait conservé intacts crénelages et mâchicoulis, l’absence d’ouverture au rez-de-chaussée me rappelait les temps troublés où les remparts n’existaient pas encore et ou chaque Cardinal, à commencer par le premier d’entre eux, se retranchait la nuit venue dans sa forteresse. Le professeur M. conservateur du Palais des Papes, recteur honoraire de l’université d’Aix en Provence, président de l’académie de Vaucluse me reçut dans une immense salle aux murs ornés d’un décor peint de quintefeuilles surmonté d’une frise ou alternaient monstres et dragons. Il prit le temps de lire avec soin ma lettre d’introduction et posant ses lunettes sur son bureau.
– Alors, me dit-il avec une certaine emphase, voila que le nouveau monde s’intéresse à nos Papes français !
J’aurais pu lui répondre que les Papes, une fois élus, perdaient leur nationalité mais peut-être voulait-il simplement dire, par une sorte d’anachronisme à l’envers, qu’ils avaient régnés sur un territoire destiné à devenir français bien plus tard. Je jugeai préférable de ne pas relever cette approximation et me contentai de répondre.
– En effet, Monsieur le Professeur.
– Et qu’est-ce qui vous amène en Avignon ?
– Voyez-vous, Monsieur le Professeur, l’inquisition a connu deux âges d’intense activité, au douzième et treizième siècle avec ce que l’on a coutume d’appeler l’inquisition médiévale et au quinzième siècle ou s’épanouit l’inquisition dite espagnole. Entre ces deux époques un trou noir, les amateurs parlent de déclin, le quatorzième siècle. Vous me direz qu’il n’y avait plus de grande hérésie à combattre, la vaudoise et la cathare avaient cessé faute de combattants, et pas encore de convertis à surveiller comme après la reconquista. On sait peu de choses sur cette période sinon que certains Papes français, j’eus peur d’être allé un peu loin mais cela passa comme une lettre à la poste, ont donné des consignes pour adoucir les conditions d’interrogatoire et de détention des prévenus. On cite également quelques cas ou ils n’ont pas hésité à désavouer leurs inquisiteurs pour ingérence dans les affaires civiles. Autre exemple d’adoucissement de l’église, vous n’êtes pas sans le savoir, Clément VI a offert sa protection aux juifs de l’Europe entière alors qu’on les accusait d’avoir propagé la grande peste de 1348. A quoi est due cette relative clémence ? Faisait-elle partie d’une politique d’ensemble ? Quelles en étaient les motivations ? Voila ce que je souhaite approfondir en consultant le bullaire et la correspondance papale conservés dans cette bibliothèque.
Le professeur M. avait écouté courtoisement ma tirade, et, je le sais maintenant, avec bienveillance et indulgence pour mon aplomb.
– Fort intéressant, mon jeune ami, vous savez, je pense, que tous ces documents sont rédigés en latin médiéval, êtes vous armé pour en tirer parti ?
– Certainement, Monsieur le professeur, je suis licencié en littérature grecque et latine.
– Bien, compte tenu de la qualité de vos recommandations je pense pouvoir vous autoriser à y accéder, vous voudrez bien prendre toutes les précautions d’usage pour manipuler ces vieux manuscrits.
– Certainement, Monsieur le professeur.
– Ces documents ne doivent pas sortir de cette salle, je vais donc donner des instructions à mon assistante, Caterina Subasani , pour qu’à partir de demain matin vous puissiez les consulter ici même, et d’un geste de la main il me désigna un renfoncement dans la muraille, une espèce d’alcôve surmontée d’une croisée d’ogive dont les arcs étaient peints alternativement en noir et en blanc, mais dites-moi, poursuivit-il, combien de temps pensez-vous rester dans notre bonne ville ?
– Ma bourse me permet d’envisager un séjour de six semaines.
– Fort bien, dans ces conditions je serai heureux si vous pouviez assister à la prochaine séance de notre académie, elle se réunit le premier vendredi de chaque mois à 17 heures. Vous aurez l’occasion d’y rencontrer tout ce que notre département compte d’érudits et de visiter le Palais du Roure, une de nos plus belles livrées cardinalices.
– J’en serai très honoré.
Le professeur M. se leva et me raccompagna fort aimablement sur le palier du grand escalier que plusieurs chevaux auraient pu monter de front. Très heureux de l’issue de cette entrevue je décidai de consacrer l’après-midi à la visite d’Avignon. Je partis à l’aventure dans le dédale des ruelles qui entourent le Palais des Papes, partout une population affairée nettoyait le pavé à grande eau du limon jaunâtre déposé par l’inondation. Tout en marchant le nez en l’air au gré de ma fantaisie je songeais à ma méthode de travail. Par où attaquer la montagne de documents qui m’attendait dans la grande salle de la bibliothèque Ceccano ? Je me décidai pour le plus simple, l’ordre chronologique, j’allais donc commencer par le pontificat de Jean XXII, le premier Pape à s’être installé en Avignon, dans l’année 1316 si ma mémoire est bonne. Fatigué, je rentrai à mon hôtel à la nuit tombée, dînai simplement et m’endormit d’un sommeil sans rêves.
Le lendemain matin je fus accueilli fort aimablement par l’assistante du professeur M. ; après quelques échanges commandés par la politesse je lui demandai de m’apporter les documents concernant le pontificat de Jean XXII. J’allais m’installer devant une grande table de bois que l’on avait préparée pour moi dans la petite chapelle attenante à la salle capitulaire. Je vis bientôt revenir la jeune fille poussant devant elle un chariot roulant sur lequel étaient posés une dizaine de cartons d’archives. Je l’aidai à les disposer sur la table et constatai que les mentions figurant sur les cartons annonçaient un classement chronologique. J’enfilai mes gants spéciaux, ouvris le plus ancien carton, en retirai le premier parchemin et co

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