Clément Varennes : suite et fin
740 pages
Français

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Clément Varennes : suite et fin , livre ebook

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Description

Théo Varèse part s’installer dans le petit village de Valdagnes. La trentaine, il mène une existence faite de hasards, de rencontres, de débrouilles. Lui qui n’est autre que le double déchu de Clément Varennes, la star du music hall, se lance dans une nouvelle voie : l’écriture. Un parcours chaotique, ballotté au gré des aléas, au fil des ans...

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 juin 2007
Nombre de lectures 0
EAN13 9782748373240
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0112€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Clément Varennes : suite et fin
Michel Breuzard
Publibook

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


Publibook
14, rue des Volontaires
75015 PARIS – France
Tél. : +33 (0)1 53 69 65 55
Clément Varennes : suite et fin
 
 
 
La lucidité
est la blessure
la plus rapprochée
du soleil
 
René Char
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Première partie
Provence blues
 
 
 
Chapitre premier
 
 
 
Valdagnes. J’avais connu ce village provençal lors de mes précédentes vacances, qui ne dataient que de quelques mois.
J’en gardais le souvenir d’une éblouissante lumière et c’était vers lui que je me dirigeais depuis mon départ, le matin même. J’avais quitté Paris sous une pluie battante. Cette année encore, l’automne ne faisait pas de cadeaux.
C’était comme si la ville tenait à me montrer qu’elle ne me regretterait pas. Je ne suis pas sûr qu’il en fût de même pour moi. J’avais si longtemps cru au Père Noël et cette cité n’en pouvait plus d’offrir aux doux rêveurs ses artifices les plus fallacieux. Pour me faire des illusions, j’étais doué.
Par exemple, de tout temps, j’avais cru en ma bonne étoile. En fait, il s’agissait d’une nova pourrie qui m’avait pété à la gueule dans les grandes largeurs à la première occasion. J’en gardais encore des cicatrices qui ne se voyaient pas trop car, à trente balais, je montrais une fraîcheur dont mes diverses cabrioles auraient dû sonner le tocsin. Cela ne signifie pas que de me regarder dans la glace me procurât une explosion de joie. Disons-le tout de suite, je n’aimais pas ma tronche. Quand il m’arrivait de me croiser, même avec l’habitude, j’en sursautais toujours.
Peut-être s’agissait-il là d’une forme de narcissisme particulièrement prononcée. D’aucuns ne se gênaient pas pour le dire mais j’avais la faiblesse de ne pas les écouter. Il faut avouer que diverses bonnes fortunes plutôt gratinées m’avaient conforté dans ce sentiment. Quand il se passe des choses dès que vous touchez un piano, même sans avoir appris à en jouer, cela crée un confort qu’il est difficile de refuser.
 
 
Bref, je me prenais très au sérieux mais, à ma décharge, il faut reconnaître que, face à face avec moi-même, il ne faudrait pas croire que je me fasse des idées. J’étais, à mon sujet, d’un rare réalisme et je me voulais lucide.
J’appuyai sur la pédale de frein et la voiture se mit à tanguer. Ma Fiat 850 était tout ce qu’on voulait, sauf une automobile. Mais c’était ma première voiture et mon critère d’achat se révélait aléatoire quand on pense que c’était parce qu’un de mes potes en possédait une et qu’elle m’avait paru seyante. Je m’étais jeté sur la première occasion venue. Mon permis était tout neuf et les genoux de ma monitrice d’auto-école n’avaient pas été étrangers au fait que je l’obtienne du premier coup. Ce qui avait sidéré toute personne me connaissant, compte tenu d’une désinvolture et d’une distraction bien connues du personnage.
Tout de même, je n’avais pas appuyé sur le frein sans raison et je battis des paupières devant les pleins phares qu’un abruti, en face de moi, ne crut pas devoir baisser quand il me croisa. Je me cramponnai au volant pour ramener la voiture sur le côté droit de la route. Mais elle tanguait toujours. Un ami m’avait prévenu :
— Ta tire, c’est un veau ! Je ne te donne pas huit cents bornes pour devoir en refaire les amortisseurs… C’est léger, ces engins, ça décolle comme des cerfs-volants mais ce n’est pas fait pour rouler ! Vingt mille kilomètres et t’en vois le bout ! T’en es à combien ?
— Quarante-sept mille, avais-je répondu, piteux.
Il s’était marré et maintenant, je me retrouvais, par chance, à quelques encablures de mon but, avec un outil que le moindre cahot envoyait dans tous les sens.
Je me suis même arrêté. Il tombait des cordes. Ah, la Provence, terre de vacances et d’été ! Les essuie-glaces couinaient et, au ralenti, le moteur toussotait. J’ai protégé mes lunettes de la pluie qui, depuis le matin, n’avait pas cessé.
Je suis reparti et un panneau m’indiqua : Valdagnes, avec une belle flèche. La route serpentait jusqu’à l’entrée du village. Je me rappelais le panorama. Somptueux. Mais, pour l’instant, plutôt liquide. Ruisselant.
Les rues, faiblement éclairées, s’ouvrirent devant mon équipage et je me suis garé sur le terrain vague, en face de la maison. En fait, ce n’était pas ma maison, mais celle de Gilles et Lucrèce. Je raconterai, plus tard. Pour l’instant, le mieux était d’empoigner mes deux valises et de passer par le jardin sur lequel donnait la masure de la propriétaire, une vieille en haillons qui ne devait pas se laver souvent mais qui avait investi des sous amassés avec une féroce pingrerie dans l’immobilier régional. Un petit escalier, au-dessus des toilettes et me voilà sur la petite terrasse. La pluie redoublait.
Bien sûr, j’ai fait tomber les clés et je me suis retrouvé à quatre pattes en train de récupérer le trousseau trempé. Enfin, je suis entré. Comme à l’ordinaire, l’endroit était impeccable. Grande ménagère devant l’Éternel, cette chère Lucrèce me permettait d’emménager dans les meilleures conditions. Il y avait même des fleurs près du divan installé dans la salle de séjour à mon intention.
J’adressai une pensée reconnaissante à ce couple qui avait poussé l’amitié jusqu’à me proposer l’hospitalité, le temps d’installer l’appartement que j’avais loué dans la maison contiguë, toujours à la même vieille, hypocrite et souriante, qui avait bavé de plaisir quand je lui avais donné ses trois mois d’avance.
Cela s’était décidé très vite.
Nous étions à table, sur la terrasse, face à la nuit tiède, avec, très loin, au-delà de la longue plaine bleue du Vaucluse, le serpentin lumineux de l’autoroute du Sud.
Gilles m’avait demandé :
— Tu repars quand ?
— Après demain. J’ai un petit spectacle à faire dans un cabaret, à Tours…
—  La Paix ?
—  Tu connais ?
— C’est une boîte à travelos, ça ? Oh, ce n’est pas pour ça que je connais, mais de réputation…
Lucrèce s’en mêla :
— Tu parles ! Ah, tu sais, Théo, ton copain, il ne faut pas trop prendre ce qu’il raconte au pied de la lettre !…
— Je sais, je sais, mais ce n’est pas parce que je suis porté sur les dames que mon… « portage » va jusqu’à ces folles qui prennent, comme le dit si bien Brassens, Cupidon par le revers…
— Tu es porté sur les femmes, toi ? s’enquit Lucrèce.
— Plus depuis que je te connais, ma chérie…
Gilles arborait son sourire le plus ironique et ses yeux d’acier bleu crépitaient de malice. Quand on voyait le physique plutôt baraqué, quasi masculin, de son amie, on pouvait se poser des questions. Mais Lucrèce avait dû faire le tour de pas mal de pâtés de maisons et elle tirait de sa relation avec Gilles l’exact suc dont elle avait besoin.
On s’entendait bien, tous les trois.
Je me suis étiré et j’ai dit :
— Si je m’écoutais, je resterais ici…
— Qu’est-ce qui t’empêche ?
— Hé, pour les vacances, ça va, mais je ne vais pas squatter votre salon jusqu’à la fin des temps !
Une nouvelle fois, Lucrèce est intervenue :
— Il y a peut-être une solution ; La sorcière, la mère Lecloux (parce qu’en plus, elle s’appelait Lecloux !), elle a parlé d’un petit appart dans la maison à côté…
On n’en a pas dit plus sur le sujet mais, le lendemain, j’ai demandé à visiter. Gilles Florac et Lucrèce Hayoun m’ont accompagné. Ce n’était pas un palais et la peinture s’avérait vétuste. Mais la fenêtre s’ouvrait sur un paysage qui me coupa le souffle. Le même qui faisait le charme de la terrasse de mes amis, sous un angle différent dans la mesure où l’appartement se trouvait au premier étage d’une maison qui, jusqu’alors, n’était occupée que par un légionnaire à la retraite, Maurice, un petit bonhomme porté sur la bibine et que sa discrétion faisait passer quasi inaperçu.
La vieille m’a annoncé le loyer. J’ai tout de suite dit oui. Sur le coup, je ne m’attachai pas au fait que Lucrèce tordait un peu le nez. J’aurais peut-être dû mais, je l’ai dit, je suis sans complexe et puis, je pensais pouvoir être un voisin tout à fait présentable. Il est vrai aussi que quand Lucrèce Hayoun faisait la gueule, cela se voyait. Mais Gilles m’avait adressé un clin d’œil qui avait remis les choses à leur place.
La preuve, ce bouquet de fleurs en guise de bienvenue.
Planté au milieu de la pièce, je me suis gratté la tête et je me demandais par quoi commencer. Le premier geste : me servir un pastis. J’ai fouillé dans les placards, sorti un verre haut, trouvé la bouteille très entamée et me suis servi une bonne dose d’alcool anisé dans lequel j’ai versé l’eau du robinet. Elle n’était pas très fraîche mais la première gorgée me fit un bien fou.
J’ai respiré à fond. La boisson verdâtre entamait son processus normal et j’ai eu faim. Ne pas rester les deux pieds dans le même sabot. Je me suis emparé d’un panier d’osier, et, une fois vérifié que mes papiers étaient toujours dans la poche de mon blouson, je suis ressorti sous la pluie. J’ai dévalé les marches luisantes et me suis rué vers l’auto qui accepta de démarrer sans tergiverser. Je nous ai dégagés du terrain vague et suis passé sur la route. Délestée des bagages censés l’équilibrer, la voiture tanguait de plus en plus.
J’ai roulé entre des haies de canisses que la pluie venteuse faisait frissonner. Les faubourgs de Cavaillon et, tout de suite, le centre-ville. Les lambrequins éclairés d’une boucherie-épicerie-droguerie me tendaient les bras. J’y suis entré et ai acheté de quoi m’offrir une gentille soirée. Un gros steack, quelques patates, un fromage, du dessert, une bouteille de bourgogne et le nécessaire pour le petit-déjeuner.
Une fois le panier à emplettes fou

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