Les pays d Islam et la Franc-maçonnerie
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Description

L’islam dans sa perception et ses rapports avec la Franc-maçonnerie serait-il à ce point plus menaçant à l’égard de l’Ordre que ne l’a été le catholicisme jusqu’à un passé récent ? Dans le cas de l’islam, ce serait simplifier outrancièrement la réalité que d’isoler la religion du politique et des pouvoirs étatiques. Il serait trop réducteur d’aborder la problématique de la Franc-maçonnerie dans les régions du monde où la religion et la culture musulmanes se sont imposées, en faisant fi de la gouvernance politique des États. L’histoire de la maçonnerie dans ces pays a été rythmée par des bouleversements politiques nationaux et la création de l’État d’Israël. Il nous faudra distinguer deux moments : le temps des Colonies et celui des Indépendances. Avec une question qui interpelle de manière lancinante : et si après tout, la maçonnerie ne s’était révélée n’être qu’un produit d’exportation de l’Occident et de sa culture judéo-chrétienne ?

Historien, chercheur au Fonds national de la recherche scientifique et docteur en Philosophie et Lettres, il enseigna à l’Université libre de Bruxelles à partir de 1970 ; il en fut le recteur (1982-1986) et le président du Conseil d’administration (1986-1995). Parallèlement, il mena une carrière politique (sénateur, député, ministre) entre 1987 et 2007. Il a présidé l’Institut d’étude des religions et de la laïcité de l’ULB pendant de très nombreuses années, ainsi que le Centre de l’égalité des chances et la lutte contre le racisme (2008-2011). Il a été élu Secrétaire perpétuel de l’Académie royale des Sciences, des Lettres et des Beaux-Arts de Belgique à la fin de l’année 2007. Auteur de onze livres et de plus d’une centaine d’articles scientifiques, directeur de nombreux ouvrages collectifs, il fut aussi éditorialiste de presse écrite et animateur en télévision d’émissions de philosophie et de morale laïque.

Sujets

Informations

Publié par
Nombre de lectures 4
EAN13 9782803103379
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0030€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

LES PAYS D'ISLAM ET LA F RANC-MAÇONNERIE
HERVÉ HASQUIN
Les pays d'islam et la Franc-maçonnerie
Académie royale de Belgique rue Ducale, 1 - 1000 Bruxelles, Belgique www.academieroyale.be
Informations concernant la version numérique ISBN : 978-2-8031-0337-9 © 2012, Académie royale de Belgique
Collection L’Académie en poche Sous la responsabilité académique de Véronique Dehant Volume 13
Diffusion Académie royale de Belgique www.academie-editions.be
Crédits Photo de couverture : Académie royale de Belgique Conception et réalisation : Grégory Van Aelbrouck, Laurent Hansen, Académie royale de Belgique
Publié en collaboration avec
L'Aurore - Editions numériques rue de Verlaine, 12 - 4537 Seraing-le-Château (Belgique) contact@laurore.net www.laurore.net
Informations concernant la version numérique ISBN 978-2-87569-029-6
A propos L’Aurore est une maison d’édition contemporaine, intégrant l’ensemble des supports et canaux dans ses projets éditoriaux. Exclusivement numérique, elle propose des ouvrages pour la plupart des liseuses, ainsi que des versions imprimées à la demande.
Pour que Fatma et Ismael entretiennent la concorde autour du Temple de Salomon.
Avant-propos
Lsa perception et ses rapports avec la Franc-maçonnerie serait-il à ce point plus’islam dans menaçant à l’égard de l’Ordre que ne l’a été le catholicisme jusqu’à un passé récent ? À l’évidence, l’ébullition et l’intolérance religieuse qui submergent nombre de pays à majorité musulmane au Proche-Orient, en Afrique et en Asie pourraient suggérer qu’il en est bien ainsi. Après tout, il y aurait une logique : chaque religion du livre prétend être la seule vraie. Débusquer, convertir, voire dans certains cas extrêmes, éliminer les infidèles, les hérétiques, les mécréants, est une marque de fabrique commune à ces courants de croyances qui prétendent, au travers de leur clergé ou de ce qui en tient lieu, s’arroger la légitimité du discours vrai. Chaque religion a ses intégristes, ses radicaux. Dans le cas de l’islam, ce serait simplifier outrancièrement la réalité que d’isoler la religion du politique et des pouvoirs étatiques. Que peut la religion sans le concours et la connivence des régimes politiques ? Mais les gouvernants n’ont-ils pas plus souvent qu’à leur tour instrumentalisé la croyance de leur peuple à des fins idéologiques pour renforcer la mainmise de leur pouvoir et étouffer les velléités d’indépendance intellectuelle ? Le monde arabo-musulman est truffé d’exemples. L’expérience la plus affutée fut l’œuvre de Kadhafi qu’on fit passer longtemps pour un intégriste ou un suppôt des Frères musulmans. Certes, il était acquis à une symbiose du temporel et du spirituel, mais il imposa progressivement en Libye une vision très personnelle de l’islam. Il fit coup double. Ce champion du nationalisme arabe mit sur la touche les muftis, les ulémas et les marabouts tout en se libérant d’une multitude de contraintes pour ne conserver que celles qui résultent du Coran ; ses contraintes politiques se ramenaient à un seul dogme, si je puis dire, « Obéissez à Dieu ! Obéissez au Prophète et à ceux d’entre vous qui détiennent l’autorité » (Cor, 4, 59). Mais il est aussi des religieux qui n’ont pas hésité à s’emparer du pouvoir et à soumettre le politique à la religion. L’exemple de Khomeyni en Iran en est le cas de figure le plus emblématique. Il serait par conséquent trop réducteur d’aborder la problématique de la Franc-maçonnerie dans les régions du monde où la religion et la culture musulmanes se sont imposées, en faisant fi de la gouvernance politique des États. Certes il ne faut pas sous-estimer le poids de laFatwa du Collège de Jurisprudence islamique (la Mecque, 15 juillet 1978) : elle assimile la Franc-maçonnerie aux organisations les plus dangereuses et les plus destructives de l’islam et de la Communauté des Musulmans. Elle est l’une des plus connues, mais n’est pas la première. L’histoire de la maçonnerie dans les pays musulmans a d’abord été rythmée par des bouleversements politiques nationaux et la création de l’État d’Israël. Globalement il nous faudra distinguer deux moments : le temps des Colonies et celui des Indépendances. Avec une question qui interpelle de manière lancinante : et si après tout, la maçonnerie ne s’était révélée n’être qu’un produit d’exportation de l’Occident et de sa culture judéo-chrétienne ?
CHAP ITRE I
Dans le sillage des Puissances coloniales
1. Une maçonnerie coloniale ? Si l’on excepte la période des Croisades qui dans l’imaginaire musulman reste une plaie béante, les grandes nations européennes se lancèrent à la conquête de lointains continents à e e partir des XV et XVI siècles, une odyssée qui ne s’acheva véritablement qu’avec la Seconde e e Guerre mondiale. Née dans les îles britanniques aux confins des XVI et XVII siècles, la e Franc-maçonnerie ne prit véritablement la forme qu’on lui connaît qu’au début du XVIII siècle en Angleterre. Ce pays s’affirmait à l’époque comme la première puissance maritime et industrielle du temps. Son système politique original et précurseur de nos démocraties contemporaines, le climat de liberté qui y régnait comparé à la plupart des régimes absolutistes d’Europe continentale, fascinaient. Ah, cette anglomanie du siècle des Lumières ! La maçonnerie et sa sociabilité originale apparaissaient comme l’une des facettes les plus séduisantes d’un royaume dont une armada de négociants, des diplomates, des ingénieurs et techniciens, et bien sûr des militaires arpentaient l’Europe entière. Quoi de plus interpelant et attractif à la fois qu’une « société » où l’on croyait en un Dieu, une Puissance supérieure, un Grand Architecte ou un Être suprême qui transcendait les religions, qui mettait largement en pratique la tolérance religieuse, qui instaurait une égalité entre ses membres, peu importe leur statut social dans la vie profane. En quarante ans, des loges maçonniques seront créées dans quasiment tous les États et principautés d’Europe : dans l’immense majorité des cas, des ressortissants des îles britanniques en furent les initiateurs. La maçonnerie trouva un terreau favorable à son expansion. Une fois la première implantation réussie, les autochtones, les « nationaux » prenaient le relais. À la veille de la Révolution, le royaume de Louis XVI en comptait environ trois cents. e Au XVIII siècle, le rôle de l’Angleterre a également été déterminant dans l’Asie musulmane. Des maçons anglais ont fondé des loges dans quelques grands comptoirs qui jouxtent les mers et les océans : par exemple à Calcutta en 1729 – le Bengale passera sous domination britannique en 1757 –, dans l’île de Sumatra en 1765 ; les Hollandais avaient fait de même à Jakarta (Java) en 1759. À l’intérieur de l’empire ottoman, des loges anglaises sont signalées à Smyrne (Izmir) et à Alep (Syrie) dès 1738 ; il y en eut bien d’autres en Turquie. La « Mère » loge Saint-Jean d’Écosse de Marseille avait également essaimé à Istanbul en 1768 et un peu plus tard à Salonique, possession de la Sublime Porte jusqu’en 1913, et à Smyrne. Combien de loges ont-elles vu le jour dans le monde musulman avant 1800 ? Il est impossible de les dénombrer. Certaines n’eurent qu’une existence éphémère, au gré de la personnalité de tel ou tel ambassadeur ou consul britannique. Ainsi l’un d’entre eux paraît avoir été particulièrement actif en Turquie au nom de la Grande Loge d’Écosse. Du temps de Bonaparte, l’expédition d’Égypte a été un élément déclencheur de la présence maçonnique. Une loge aurait vu le jour à Alexandrie en 1798 à l’instigation de Kléber, mais l’élan décisif se situe en 1802. e Le milieu du XIX siècle fut surtout la période au cours de laquelle la Grande-Bretagne et la
France fragilisèrent le pouvoir ottoman au Maghreb et au Moyen-Orient. Ces territoires basculèrent progressivement sous le régime du Protectorat, à l’exception de l’Algérie qui devint une colonie dans le plein sens du terme au début des années trente, avant d’être intégrée à la France avec la création de trois départements. Le Grand Orient de France s’engouffra dès 1832 à Alger et Annaba ; la conquête fit le lit de la maçonnerie française : elle comptait au moins une quarantaine d’ateliers à la fin du siècle. Les pays de « protectorat » – Égypte, Syrie, Liban, Tunisie, Maroc – forment un champ d’action privilégié des grandes loges britanniques (Angleterre, Écosse), ainsi que des Grands Orients de France et d’Italie. L’Égypte fut véritablement un kaléidoscope de la maçonnerie européenne. Des loges anglaises, françaises, italiennes côtoient des loges allemandes et grecques notamment. La « grande » Syrie qui comprend à l’époque le Liban est « fertilisée » dans les années 1860. La Grande Loge d’Écosse et le Grand Orient de France ont investi Beyrouth respectivement en 1862 (la Loge de Palestine) et en 1869. Le Liban s’annonça rapidement comme une terre propice à la diversification des obédiences. Ce fut au cours de la même décennie que les Grands Orients d’Italie et de France établirent de premières loges à Damas. Des loges françaises s’installèrent en Tunisie immédiatement après l’instauration du protectorat (1881), mais au total, treize loges italiennes avaient vu le jour entre 1812 et 1881, fréquentées pour l’essentiel par des réfugiés issus de la Péninsule et qui résidaient dans les grandes villes de la Régence. Au Maroc, Tanger accueillit des loges françaises et espagnoles dans la dernière décennie du siècle alors que les deux États européens avaient contraint quelques années auparavant le sultanat à accepter leurs productions ; ce n’était que le signe annonciateur du protectorat imposé à partir de 1906. Quant à la Libye, le Grand Orient d’Italie y prit pied, à Tripoli, dans la foulée de la conquête italienne de 1911-1912. L’empire britannique poursuivit ses avancées en Orient et dans l’océan Indien. De premières loges virent le jour au Yémen (Aden, 1850), au Pendjab (Lahore, 1858), en Afghanistan (Kaboul, 1880), au Soudan (Khartoum, 1901), à Zanzibar (1903), Protectorat britannique depuis 1890, tandis qu’elles devenaient de plus en plus nombreuses sur l’actuel territoire de l’Inde. Une loge est mentionnée à Téhéran en 1858. Sur la côte atlantique de l’Afrique, une première loge est établie au Nigéria, à Lagos, en 1867. Bref, à la veille de la Première Guerre mondiale, les obédiences maçonniques originaires des principales puissances maritimes européennes étaient ancrées partout dans le monde musulman. La prédominance britannique était impressionnante en Asie et en Afrique de l’Est ; la bande côtière de la Méditerranée qui s’étendait de la Tunisie au Maroc était un quasi monopole français ; on trouvait des loges italiennes sur tous les rivages de la Méditerranée orientale.
2. Des maçons musulmans ? e e Au XVIII siècle et dans la première moitié du XIX siècle, il était exceptionnel, si pas quasi impossible de trouver, mis à part des juifs, des non-chrétiens en loges. L’unanimité se faisait parmi les commentateurs ou théoriciens maçons pour fermer l’Ordre aux Infidèles, les 1 Mahométans et lesPaïens. Le Frère de la Tierce, traducteur en français des Constitutions d’Anderson en 1742 et dont les écrits firent longtemps autorité, se montrait intransigeant. Sa pensée profonde aurait pu se résumer par la formule, « Hors le vrai Chrétien, il n’est pas de vrai maçon ! ». Le poème qu’il adresse à l’impératrice de Russie Catherine II en 1773 (Le Temple de la Gloire) est limpide : il importe que les nations chrétiennes s’unissent pour bouter les musulmans le plus loin possible. Voir Christ en Orient dominer Puissances de l’Europe, Ah soyez donc unies ! Ne verra-t-on jamais vos forces réunies, Arracher au sultan un empire usurpé, Par des Césars chrétiens autrefois occupés ! Faites au moins qu’il soit relégué dans l’Asie Voir Christ en Orient dominer de nouveau.
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