La loi (Frédéric Bastiat) , livre ebook

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La loi pervertie ! La loi — et à sa suite toutes les forces collectives de la nation, — la Loi, dis-je, non seulement détournée de son but, mais appliquée à poursuivre un but directement contraire ! La Loi devenue l’instrument de toutes les cupidités, au lieu d’en être le frein ! La Loi accomplissant elle-même l’iniquité qu’elle avait pour mission de punir ! Certes, c’est là un fait grave, s’il existe, et sur lequel il doit m’être permis d’appeler l’attention de mes concitoyens.
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Date de parution

17 septembre 2023

Nombre de lectures

11

Langue

Français

Frédéric Bastiat
La loi
Mawarid Publishing
La loi
La loi pervertie ! La loi — et à sa suite toutes
les forces collectives de la nation, — la Loi, dis-je,
non seulement détournée de son but, mais appliquée à poursuivre un but directement contraire ! La Loi devenue l’instrument de toutes
les cupidités, au lieu d’en être le frein ! La Loi
accomplissant elle-même l’iniquité qu’elle avait pour mission de punir ! Certes, c’est là un fait grave, s’il existe, et sur lequel il doit m’être permis
d’appeler l’attention de mes concitoyens. Nous tenons de Dieu le don qui pour nous les renferme tous, la Vie, — la vie physique, intellectuelle et morale. Mawarid Publishing2
La loi
Mais la vie ne se soutient pas d’elle-même. Celui qui nous l’a donnée nous a laissé le soin de l’entretenir, de la développer, de la perfectionner. Pour cela, il nous a pourvus d’un ensemble de
Facultés merveilleuses ; il nous a plongés dans un
milieu d’éléments divers. C’est par l’application
de nos facultés à ces éléments que se réalise le
phénomène de l’Assimilation, de l’Appropriation, par lequel la vie parcourt le cercle qui lui a été assigné.
Existence, Facultés, Assimilation — en d’autres termes, Personnalité, Liberté, Propriété, — voilà l’homme. Mawarid Publishing3
La loi
C’est de ces trois choses qu’on peut dire, en dehors de toute subtilité démagogique, qu’elles sont antérieures et supérieures à toute législation
humaine. Ce n’est pas parce que les hommes ont édicté des Lois que la Personnalité, la Liberté et la Propriété existent. Au contraire, c’est parce que la Personnalité, la Liberté et la Propriété préexistent que les hommes font des Lois. Qu’est-ce donc que la Loi ? Ainsi que je l’ai
dit ailleurs, c’est l’organisation collective du Droit
individuel de légitime défense.
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La loi
Chacun de nous tient certainement de la nature, de Dieu, le droit de défendre sa
Personne, sa Liberté, sa Propriété, puisque ce sont les trois éléments constitutifs ou conservateurs de la Vie, éléments qui se complètent l’un par l’autre et ne se peuvent comprendre l’un sans l’autre. Car que sont nos Facultés, sinon un prolongement de notre Personnalité, et qu’est-ce que la Propriété si ce
n’est un prolongement de nos Facultés ?
Si chaque homme a le droit de défendre, même par la force, sa Personne, sa Liberté, sa Propriété, plusieurs hommes ont le Droit de se concerter, de s’entendre, d’organiser une Force
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La loi
commune pour pourvoir régulièrement à cette défense. Le Droit collectif a donc son principe, sa raison d’être, sa légitimité dans le Droit individuel ; et la Force commune ne peut avoir
rationnellement d’autre but, d’autre mission que
les forces isolées auxquelles elle se substitue.
Ainsi, comme la Force d’un individu ne peut légitimement attenter à la Personne, à la Liberté,
à la Propriété d’un autre individu, par la même raison la Force commune ne peut être légitimement appliquée à détruire la Personne, la
Liberté, la Propriété des individus ou des classes. Mawarid Publishing6
La loi
Car cette perversion de la Force serait, en un cas comme dans l’autre, en contradiction avec nos prémisses. Qui osera dire que la Force nous
a été donnée non pour défendre nos Droits, mais
pour anéantir les Droits égaux de nos frères ? Et
si cela n’est pas vrai de chaque force individuelle,
agissant isolément, comment cela serait-il vrai de
la force collective, qui n’est que l’union organisée
des forces isolées ? Donc, s’il est une chose évidente, c’est celle-ci
: La Loi, c’est l’organisation du Droit naturel de
légitime défense ; c’est la substitution de la force
collective aux forces individuelles, pour agir dans
le cercle où celles-ci ont le droit d’agir, pour faire ce que celles-ci ont le droit de faire, pour garantir Mawarid Publishing7
La loi
les Personnes, les Libertés, les Propriétés, pour maintenir chacun dans son Droit, pour faire régner entre tous la Justice.
Et s’il existait un peuple constitué sur cette base, il me semble que l’ordre y prévaudrait dans
les faits comme dans les idées. Il me semble que
ce peuple aurait le gouvernement le plus simple, le plus économique, le moins lourd, le moins senti, le moins responsable, le plus juste, et par
conséquent le plus solide qu’on puisse imaginer,
quelle que fût d’ailleurs sa forme politique. Car, sous un tel régime, chacun comprendrait
bien qu’il a toute la plénitude comme toute la responsabilité de son Existence. Pourvu que la Mawarid Publishing8
La loi
personne fût respectée, le travail libre et les fruits
du travail garantis contre toute injuste atteinte, nul n’aurait rien à démêler avec l’État. Heureux, nous n’aurions pas, il est vrai, à le remercier de
nos succès ; mais malheureux, nous ne nous en
prendrions pas plus à lui de nos revers que nos
paysans ne lui attribuent la grêle ou la gelée. Nous
ne le connaîtrions que par l’inestimable bienfait
de la Sûreté. On peut affirmer encore que, grâce à la non-
intervention de l’État dans les affaires privées, les
Besoins et les Satisfactions se développeraient dans l’ordre naturel. On ne verrait point les familles pauvres chercher l’instruction littéraire avant d’avoir du pain. On ne verrait point la ville Mawarid Publishing9
La loi
se peupler aux dépens des campagnes, ou les
campagnes aux dépens des villes. On ne verrait pas ces grands déplacements de capitaux, de travail, de population, provoqués par des mesures législatives, déplacements qui rendent si incertaines et si précaires les sources mêmes de
l’existence, et aggravent par là, dans une si grande
mesure, la responsabilité des gouvernements. Par malheur, il s’en faut que la Loi se soit renfermée dans son rôle. Même il s’en faut qu’elle ne s’en soit écartée que dans des vues
neutres et discutables. Elle a fait pis : elle a agi
contrairement à sa propre fin ; elle a détruit son
propre but ; elle s’est appliquée à anéantir cette
Justice qu’elle devait faire régner, à effacer, entre
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