Sortir de l'impasse postcoloniale , livre ebook

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Certains de nos concitoyens relient nos difficultés présentes à la brève histoire des conquêtes coloniales réalisées par la France au XIXe siècle. Pour eux, la France continuerait de vivre une situation coloniale et traiterait ses « indigènes », issus de ses anciennes colonies, comme elle l'aurait fait autrefois, par le mépris et la relégation. Ils appellent donc notre pays à exprimer une contrition, seule à même de nous permettre de sortir d'un passé colonial qui perdurerait de nos jours et nous entraverait. Ce livre va donc essayer de relire cette histoire coloniale, non pas à la lumière de ce que nous en savons après coup, mais de ce qu'en percevaient les contemporains qui eux n'en connaissaient pas la fin. Dix personnages qui furent célèbres à l'époque coloniale et qui depuis sont tombés dans l'oubli vont servir comme une anamorphose à autant de réglages permettant d'y voir globalement plus clair. Relier les difficultés du présent au passé, même bien partiel, en l'occurrence le passé colonial, n'est pas en soi illégitime. C'est la manipulation partiale de ce passé recomposé qui transforme l'exercice en grenade explosive. Dans un pays au bord de la crise de nerfs, voire de la guerre civile, l'exercice n'est donc pas anodin. Empêcher que le processus en cours ne dégénère en des haines inexpugnables mérite qu'on y consacre le temps nécessaire. Ici, déconstruire un discours de victimisation qui enferme, déresponsabilise et conduit à une impasse. La fulgurance des rapprochements entre certains faits ou attitudes de l'époque et notre présent nourrit alors une réflexion plus complexe, respectueuse du passé qui est ce qu'il est, mais qui ne saurait sans réaction être recomposé au profit d'un projet de rupture politique d'une autre nature.

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Date de parution

14 décembre 2016

Nombre de lectures

2

EAN13

9782342059045

Langue

Français

Sortir de l'impasse postcoloniale
Philippe San Marco
Mon Petit Editeur

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


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175, boulevard Anatole France
Bâtiment A, 1er étage
93200 Saint-Denis
Tél. : +33 (0)1 84 74 10 24
Sortir de l'impasse postcoloniale
 
Retrouvez l’auteur sur son site Internet :
http://www.philippesanmarco.com
Introduction. Une anamorphose du refoulé colonial
La France déstabilisée face à de nouveaux défis. La montée du repli nationaliste. Une nouvelle exigence religieuse. Le retour du refoulé colonial. Les indigènes de la République. Vers une société racialisée. La mise en cause du modèle républicain. L’imposition du prisme religieux. La victimisation par la manipulation du passé. Dix exemples pour donner du sens.
 
La France de ce début du xxi e siècle est confrontée à une globalisation de l’économie-monde qui menace des pans entiers de son industrie, de ses services et de son agriculture. Le financement du modèle social qui la caractérise en est directement menacé. Or les moyens de l’État pour y faire face sont désormais réduits, et parfois même inexistants. Outre les contraintes de la construction européenne, le montant de la dette publique est tel qu’il nous interdit non seulement le simple entretien des services publics, désormais en péril, mais aussi toute action d’adaptation structurelle et d’investissement d’avenir. L’accumulation annuelle pendant près d’un demi-siècle des déficits du budget de l’État, mais aussi de ceux de la Sécurité Sociale et des hôpitaux ou encore de ceux des grandes entreprises publiques, aura finalement servi, non pas à se réformer et à s’adapter, mais au contraire à repousser sans cesse les ajustements nécessaires. Nous avons ainsi financé à crédit le maintien d’un système devenu déséquilibré. Cela ne pouvait pas durer toujours. La transition ne peut pas être facile.
 
C’est face à ce défi-là que la France n’arrive pas à se repositionner assez vite. Elle semble stagner et accroît son retard. Les politiques publiques, de droite comme de gauche, apparaissent désormais également inopérantes. C’est pourquoi les postures et la théâtralité de la scène politique et sociale sont perçues comme mensongères.
 
Or, cette difficulté de la France explique principalement la montée d’une réaction populaire de repli nationaliste portée par un sentiment d’abandon et de défiance des « élites ». Bien sûr il faut tenter de vaincre cette crispation que traduit le vote en faveur du Front National. Mais sans se contenter de la culpabiliser en évoquant de manière sentencieuse les « heures les plus sombres de notre histoire », comme le fait généralement la classe politico-médiatique, dont la coupure avec les couches populaires est flagrante. Car ce courant de pensée ne saurait se réduire au racisme d’avant-guerre, au régime de Vichy ni aux nostalgiques de l’Algérie française. Il s’agit de millions de Français qui ne vivent ni dans l’assistance ni dans l’aisance, ni dans les banlieues les plus déshéritées ni dans les centres-villes privilégiés. Des gens qui voient bien que les services publics se dégradent et d’abord celui dans lequel ils mettent tous leurs espoirs, celui de l’enseignement public de la maternelle à l’université. Des personnes qui se sentent aujourd’hui négligées et se tournent de plus en plus vers les options radicales.
 
Mais cette même difficulté de la France à s’adapter à la nouvelle économie-monde qui déstabilise son modèle économique et social explique dans le même temps l’émergence d’un communautarisme identitaire s’appuyant sur l’exacerbation de nouvelles exigences religieuses. Des gens issus des minorités d’origine étrangère confrontées au chômage massif et aux discriminations de tous ordres que génère inévitablement une société bloquée et inquiète. Des gens qui n’investissent plus désormais que le champ sans limites de la revendication ethnoculturelle. Bien sûr qu’il faut aussi combattre ce nouveau front, sans faiblesse ni complaisance, mais sans jamais oublier qu’il est plus une conséquence qu’une cause de nos difficultés, et que sa force est directement proportionnelle aux faiblesses de la République.
 
C’est dans ce contexte compliqué qu’est réapparue la référence au colonialisme d’antan. Non pas en tant que fait d’histoire. Ce qu’il est. Et qu’il n’est pas question d’occulter ou de négliger. Mais en tant que clé de compréhension des blocages présents. Ainsi c’est le colonialisme qui expliquerait les difficultés françaises d’aujourd’hui. Celles-ci n’impliqueraient donc pas une adaptation au monde globalisé, laquelle apparaît alors comme un prétexte, un leurre. Au contraire pour sortir de nos difficultés actuelles il faudrait une contrition face au passé colonial qui perdurerait de nos jours et qui nous entraverait. Car la France continuerait de vivre une situation coloniale et traiterait ses « indigènes », issus de ses anciennes colonies, comme elle l’aurait fait autrefois, par le mépris et la relégation. Dans cette optique, l’exigence d’une nécessaire et traditionnelle intégration devient révélatrice au mieux d’un conservatisme teinté de mélancolie impériale, et au pire de racisme et d’islamophobie, une grande partie des personnes issues des récentes immigrations postcoloniales étant musulmanes. La solution serait au contraire de reconnaître les différences, de les valoriser, et donc d’accepter enfin la cohabitation sur le territoire national non seulement de personnes mais de groupes ayant des valeurs différentes, reconnues et s’il le faut protégées par des statuts différents. Ce que résume l’exigence en forme d’incantation abstraite de « respect ». Cette valorisation de la différence se voulant en même temps et surtout volonté de revenir sur le passé pour se faire pardonner d’avoir il y a plus d’un siècle violenté des « races » qualifiées d’« inférieures ». Les politiques migratoires contemporaines étant un élément utilisé pour accélérer un processus dont l’objectif central est la fin du modèle républicain traditionnel qui serait disqualifié, précisément, par les guerres coloniales.
 
Cette mobilisation d’un passé recomposé à des fins politiques conjoncturelles n’a en soi rien de bien nouveau. Toute l’histoire de France telle qu’elle nous est racontée et transmise en est un exemple constant. De la redécouverte de Vercingétorix sous le Second Empire à la geste gaullienne d’une France toute entière résistante et « libérée par elle-même ». Le récit national est par nature une construction subjective. De la fabrique des grands hommes aux processus de reconstruction de la mémoire des conflits, l’histoire est toujours réinterprétée, hybridée et frôle souvent la fiction. Mais chaque fois jusque-là il s’agissait, fut-ce par le mythe, de mobiliser, de rassembler, pour avancer. Avec le retour de la mémoire coloniale en forme d’abjection absolue, il faudrait au contraire reconnaître et assumer les divisions au profit d’un récit en rupture avec une histoire de France souillée par le colonialisme. Bref, comme cela me l’a été expliqué avec impatience et condescendance, il s’agirait de « solder les crimes coloniaux avec les descendants des indigènes parmi nous, qui pour la plupart sont encore prêts à aimer la France. Or avec cette nouvelle islamophobie et ces crispations identitaires, nous ringardisons la France, nous la tirons en arrière pour 20 ans. Cela nous empêche de régler une question très ancienne, celle de faire de la France la nation multiculturelle et multiconfessionnelle qu’elle a elle-même, en un sens, aspiré à être depuis très longtemps. J’ai honte pour nous, pour notre degré de vilenie. Car il y a aujourd’hui une collusion criminelle entre le vieil anticléricalisme, l’attachement atavique aux hiérarchies coloniales, et le soutien aveugle a un projet israélien devenu celui d’un « État ethnique ». Le tout mis bout à bout a pour conséquence l’expression publique et décomplexée d’une haine des musulmans. J’ai honte pour mon pays que j’aime. J’ai honte pour nos valeurs. » L’affaire est sérieuse car une partie de la jeunesse française se retrouve dans cette posture qui se veut à la fois accusatrice et généreuse. Elle trouve un écho dans le travail de l’historien Camerounais Achille Mbembe. Celui-ci dit de la France qu’elle « décolonisa sans s’autodécoloniser ». Il appelle à renouveler la lecture de Franz Fanon à la lumière de ce qui lui semble être la fin de l’hégémonie européenne au sein de la mondialisation en cours. Et il s’interroge : « cette relégation de l’Europe signera-t-elle l’extinction du racisme, avec la dissolution de l’un de ses signifiants majeurs, le Nègre ? ». En tout cas, Mbembe nous intéresse ici parce qu’il affirme que « Démocratie, plantation et empire colonial font objectivement partie d’une même matrice historique. Ce fait originaire et structurant est au cœur de toute compréhension historique de la violence de l’ordre mondial contemporain ». Difficile de ne pas entendre cette voix.
 
De son côté l’extrême gauche a pensé utile à son combat de transfigurer la figure du prolétaire opprimé par celle du musulman discriminé. Le Nouveau Parti Anticapitaliste (NPA) de Besancenot s’interrogeait récemment en interne en ces termes : « Il n’y a aucune possibilité de minimiser la question de la place de l’Islam dans le pays, l’imposition d’un prisme religieux remplaçant des questions sociales. La construction de la « question musulmane » est en France le fait de la faillite des principes républicains formels, des effets mortifères des difficultés sociales persistantes, du racisme et des repliements identitaires, et, fondamentalement de la crise des alt

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