Sexe et Sensualité : La culture érotique des Anciens
148 pages
Français

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Sexe et Sensualité : La culture érotique des Anciens , livre ebook

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Description

 « Oui, les Anciens étaient sensuels. Autant que nous, autrement que nous. D’abord à Athènes et ensuite à Rome éclôt une véritable culture érotique qui réunit l’art d’aimer, la recherche du plaisir, la civilité du désir, l’amour homosexuel, l’ironie phallique et l’importance exemplaire du féminin. Tantôt idéalisé dans une distance infranchissable, tantôt pillé hors contexte, le monde classique reste mal connu. Il nous faut refaire le voyage à Cythère avec un bon guide amoureux. Le voici. » G. S. Sur le désir et le plaisir, la différence des sexes et la fluidité des genres, la discipline sentimentale et le savoir-faire voluptueux, les Anciens ont encore tant à nous apprendre ! Où mieux que dans l’Ithaque de Pénélope, la salle de banquet platonicienne et la Rome d’Ovide pourrait-on être initié de façon aussi magistrale à toutes ces stratégies d’enchantement qui transforment le sexe en sensualité ? Pour un nouvel art d’aimer, plus libre, plus inventif, plus complice, plus raffiné, qui, comme en Grèce et à Rome, fait la part belle aux sens et aux corps désirants, sans figer de manière rigide les rôles, les genres et les identités. Giulia Sissa est professeur de théorie politique et de civilisations de l’Antiquité à UCLA, en Californie. Chercheuse au CNRS, elle a notamment publié Le Plaisir et le Mal. Philosophie de la drogue et L’Âme est un corps de femme.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 08 septembre 2011
Nombre de lectures 156
EAN13 9782738185914
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Giulia Sissa
SEXE ET SENSUALITÉ
La culture érotique des Anciens
 
Les termes grecs sont ici retranscrits dans une orthographe volontairement simplifiée.
Une première version de ce livre a été publiée chez Laterza sous le titre Eros tiranno. Sessualità e sensualità nel mondo antico
© 2003, GIUS. LATERZA & FIGLI.
Pour la présente édition  : © Odile Jacob, septembre 2011 15, rue Soufflot, 75005 Paris
ISBN : 978-2-7381-8591-4
www.odilejacob.fr
Table

INTRODUCTION. Retour à Cythère
PREMIÈRE PARTIE. En Grèce : Éros Roi
Chapitre 3
CHAPITRE PREMIER. Désir
Éros, c’est moi !
Une sexualité théâtrale
Vorrei e non vorrei
Le temps de Pénélope
Corps sensibles
Désir archaïque
La lettre, le poème
Désagréable désir
Le chant de Pénia
Désir insatiable
Cause ou objet ?
Une rivière dans un vase
Désir désagréable
CHAPITRE 2. Plaisir
La dolce vita
La vie démocratique
Vivre sans vergogne
Éros kalos
La poikilia athénienne
Homosensualité
Le souci de l’autre
CHAPITRE 3. Corps
Histoire d’une différence
L’érection
La sensualité féminine
Pédérastie et puberté
CHAPITRE 4. Relations
Le mariage
La filiation
Marions-nous pour ne pas nous déchirer
Sexualité et communauté
Sexualité et tragédie
Clytemnestre : l’anti-Pénélope
Déjanire : comme Pénélope, et plus encore
DEUXIÈME PARTIE. À Rome : voilà Vénus !
Chapitre 3
CHAPITRE PREMIER. Leçons d’amour
L’art doit gouverner l’amour
Così fan tutte
Savoir mentir
Amour sceptique
Cent sont les causes qui font que j’aime
De Protée à Pygmalion
Je n’aime que si on me blesse
CHAPITRE 2. Pouvoir et mollesse
Poésie et puberté
Amour moelleux
L’art en prose, ou l’école buissonnière
Le tournant chrétien
CONCLUSIONS. Sexes, sexualité et sensualité
Le sexe : une différence et quelques hybrides
Le corps : une construction à contrainte
Le corps : un modèle de métamorphose
Le désir : des corps à vivre
Désir de désir : la dialectique de la sensualité
NOTES
BIBLIOGRAPHIE
Du même auteurchez Odile Jacob
INTRODUCTION
Retour à Cythère
Le sexe nous intéresse toujours. Cela a commencé sur les parois des caves historiées par Homo sapiens . Sexe, nourriture et territoire : voilà nos premières représentations visuelles 1 . Et cela n’arrête jamais. Du bavardage sur les people aux questions de société, de la mode à la loi, d’Internet au cinéma et, plus que jamais, dans notre vie, nous en sommes inlassablement curieux. Quoi de plus naturel et physique, quand tout va bien ; quoi de plus troublant, lorsqu’au plaisir se mélange la souffrance, et si le désir se fait angoisse. Quoi de plus évident ou de plus dépaysant, lorsque les choix d’objets ou les identités de genre se mettent à vaciller.
L’amour nous intéresse toujours. L’amour pour nos proches et nos amis, mais aussi et surtout l’amour érotique. Le plaisir que nous fait une présence, la présence de cette personne-ci, dont l’enchantement n’est pas remplaçable ; la déréliction que son absence, ou son abandon, nous cause – une douleur qui passera avec le temps, sans doute, mais une douleur qui nous empêche de manger, dormir ou travailler. L’amour qui réunit sensualité et tendresse devance toujours nos prédictions sur nous-mêmes.
Pour comprendre, nous avons sous la main une panoplie de savoirs. Sexologie et médecine, bien sûr ; mais aussi la théorie darwinienne de l’évolution qui parvient à tout expliquer, jusqu’aux nuances des penchants, par la survie de l’espèce ; les neurosciences, de plus en plus raffinées dans la mise à point des love maps cérébrales ou dans la recherche sur la chimie de l’excitation et de l’attachement. Les arts d’aimer pullulent dans les magazines, en papier ou sur le net. La technique triomphe aussi bien dans les espaces-temps qui nous font nous accoupler et fantasmer entre écrans, clubs, blogs et réseaux que dans la promesse de réaliser, enfin, le grand rêve aphrodisiaque. Viagra, Cialis et Levitra se vendent très bien ; la pilule pour femmes est pour demain. À chaque philtre d’amour son mode d’emploi, qui dessine, à son tour, de nouveaux rythmes pour le corps, de nouveaux espaces-temps pour éros . « Quand c’est le bon moment, êtes-vous prêt ? », chuchote une publicité.
Bien des maîtres à aimer dispensent des certitudes sur les causes et les effets de l’amour. En contrepoint à la pharmacie d’Aphrodite, les philosophes viennent nous rappeler ce qui échappera toujours aux dosages et aux ordonnances : le hasard des rencontres qui se muent, parfois, en longues fidélités 2 ou le mouvement premier de l’amour « qui vient 3  ». Le désir est désir de l’autre, dans sa différence et dans l’intersubjectivité. Que les femmes se gardent d’occuper la place de l’objet 4  ! Regardons en face la sexualité contemporaine, afin d’en comprendre les aspects contradictoires : maîtrise et démocratisation, d’une part ; inquiétude et désarroi, d’autre part 5 . En 2005, Benoît XVI émettait son encyclique sur l’amour catholique, Deus caritas est , synthèse supérieure d’ éros et d’ agapè 6 . Ne séparons surtout pas ses différentes expériences, éros , philia et agapè , recommande, depuis longtemps, André Compte-Sponville 7 . Il faut se placer dans une perspective résolument antichrétienne, crie à tue-tête Michel Onfray 8 , pour retrouver les plaisirs sans ombre des païens. Attention, nous avertit Jean-Paul Kaufman, le sexe n’est pas un loisir comme les autres ; si vous, ô demoiselles, cherchez toujours le prince charmant, vos chasses en ligne vont rendre les hommes encore plus fuyants, encore moins scrupuleux 9 . Indifférente, hélas, à ce qui la fonda jadis, la philosophie ignore l’ironie.
La psychanalyse se contente de chuchoter l’impossible et l’indispensable du rapport sexuel, dans ses ambivalences extrêmes : ce qui donne le bonheur le plus intense, mais nous jette dans le désespoir absolu ; ce qui exalte notre pouvoir de séduction, mais nous livre à la merci d’autrui ; ce qui nous rapproche dans l’illusion de faire un, mais nous fait haïr, abandonner et tromper celle ou celui qui, hier, était tout pour nous. La vie est désir. Le plaisir est une petite mort. Le langage fait l’amour. Ce sont des détails qui nous font chavirer – nous voilà transis à cause de la courbe d’une épaule, d’une façon de marcher ou d’un tout petit accent. Ce sont des riens qui font tout et pourtant, si le porteur d’un de ces riens répond, c’est l’amour ! On peut mépriser le divan comme un appareil à normaliser le désir 10  ; on peut se réjouir qu’il y ait un radeau matelassé, quelque part dans le monde, où venir s’échouer quand tout va mal.
En Europe et aux États-Unis, nous vivons dans une culture érotique à plusieurs voix. Cette polyphonie s’accompagne d’une liberté vertigineuse de choisir comment parler, penser et vivre. Nos vies sexuelles sont désormais à la carte. Je ne le déplore pas. Je ne regrette pas le bon vieux temps d’avant la technique, quand un homme bien constitué, la cinquantaine épanouie, se découvrant de moins en moins à l’aise avec son pénis, n’avait aucun recours – sauf la soupe du promis ou le sabayon dans le tiramisu . Les remèdes disponibles aujourd’hui agissent à la fois sur le corps (en favorisant la dilatation des artères), sur l’expérience érotique (en rétablissant la confiance en soi) et, ajouterai-je, sur ce que nous pouvons penser, finalement, du sexe au masculin. Le phallus n’est que la prothèse du pénis. C’est une construction imaginaire, d’autant plus monumentale dans la culture, que la réalité anatomique déçoit. Toute femme sait cela, mais le succès moléculaire le confirme. La virilité, fantasme de maîtrise et de puissance, s’appuie sur un organe des plus fragiles : vulnérable au passage du temps et aux états d’âme et, surtout, immensément capricieux.
Je ne regrette pas le paradis perdu d’avant le féminisme, quand les hommes pouvaient se permettre de séduire au pluriel, aller discrètement au bordel, entretenir une maîtresse avec la complicité de tous, y compris leurs épouses résignées. Les hommes séduisent toujours, et encore plus, sans doute, mais le désir des femmes change la donne. Dans des stratégies moins escomptées, dans des formes de réciprocité plus mobiles, le jeu de rôles n’est plus le même. La liberté sexuelle au féminin doit beaucoup au contrôle technologique de la fécondité, à la possibilité de maîtriser le temps biologique. Cela s’accompagne, bien évidemment, de la conscience, politique, transgressive, laïque et très récente, d’un droit à prendre, qu’on veut voir reconnu, pour sa vie et pour son corps. Là aussi, il serait absurde, surtout pour une femme, de céder à la doléance antimoderne.
De même, il ne faudrait pas aller trop vite dans la consternation sur les effets moraux de cette liberté, ainsi que nous le serine la tradition catholique, reconvertie, pour l’occasion, en une phénoménologie charitable ou, plus étrangement, une réflexion fascinée par le constat d’échec 11 . Les mises en garde abondent : la chair serait devenue une viande performante ; un hédonisme égoïste ruine désormais l’intersubjectivité oblative. Une habitude de pensée parcourt une critique féministe, aux résonances pieuses : si on nous traite en objet de désir, on nous réduit à un objet sexuel, par conséquent à une chose, voire une marchandise. Quel malentendu, quand même, sur le sens du mot « objet » ! Un objet sexuel est, en fait, la cause d’un désir, un désir qui s’y accroche. Cela n’a rien à voir avec le ravalement d’une personne à une chose. Cela permet, en revanche, de mieux baliser les voies d’ éros  : ce qui nous attire n’est pas la biographie intégrale ou les œuvres complètes ou le portrait en 3D d’une personne, mais une partie qui, montée en épingle, fait que le tout nous paraît unique. C’est l’amour qui, ensuite, transforme le désir en amitié ou en une vie commune, avec ses engagements éthiques et ses accommodements esthétiques. La matérialité éclatée du corps reste la condition d’un désir qui bouge, dans l’espace et dans le temps.
Je ne

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