Je m amuse à vieillir : Le cerveau, maître du temps
172 pages
Français

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Je m'amuse à vieillir : Le cerveau, maître du temps , livre ebook

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Description

Dans ce livre, le professeur Yves Agid, neurologue, spécialiste des maladies du cerveau, nous montre que vieillir ne dépend pas seulement du temps qui passe : vieillir dépend surtout de notre cerveau. À partir de sa longue expérience clinique et scientifique, il nous expose sans langue de bois, mais toujours avec humour, les progrès réalisés dans la compréhension et le traitement des maladies neuro-dégénératives. Si on veut améliorer le bien-être des personnes âgées, il faut comprendre ce qu’on appelle vieillir : quels sont les fondements biologiques du vieillissement ? Et puisque le cerveau est en première ligne, comment se traduit le vieillissement cérébral ? En fait, vieillir n’est pas une maladie. C’est la vie tout simplement. Peut-être la plus importante partie de l’existence, et qu’on peut vivre intensément ! Yves Agid est professeur émérite de neurologie et de biologie cellulaire à l’université Paris-Sorbonne. Membre de l’Académie des sciences, membre fondateur de l’Institut du cerveau et de la moelle épinière (ICM), c’est un spécialiste de la recherche sur les maladies neurodégénératives. Il est notamment l’auteur, avec Pierre Magistretti, de L’Homme glial, qui est un grand succès.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 02 janvier 2020
Nombre de lectures 6
EAN13 9782738149626
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0900€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

© O DILE J ACOB , JANVIER  2020 15, RUE S OUFFLOT , 75005 P ARIS
www.odilejacob.fr
ISBN : 978-2-7381-4962-6
Le code de la propriété intellectuelle n'autorisant, aux termes de l'article L. 122-5 et 3 a, d'une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l'usage du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation ou réproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (art. L. 122-4). Cette représentation ou reproduction donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo .
À Agnès.
Introduction


« Et l’on voit de la flamme aux yeux des jeunes gens
Mais dans l’œil du vieillard on voit de la lumière. »
Victor H UGO .

C’est Paul Léautaud qui disait : « Je m’amuse à vieillir, c’est une occupation de tous les instants. » Pourtant, a-t-on déjà entendu quelqu’un dire : « Je suis content de vieillir ! » ? Vieillir un peu : oui, pourquoi pas ? Vieillir pour souffrir, perdre la raison ou la mobilité, jamais ! Dans le temps, les hommes se vieillissaient pour se faire valoir. Aujourd’hui, le vieillissement est plutôt considéré comme une déchéance par la personne âgée et comme un repoussoir par la société . Comment faire pour que la vieillesse soit perçue comme le prolongement naturel de l’existence et, pourquoi pas, comme une nouvelle existence ?
Les gens ne savent pas ce qu’est le vieillissement. Ou plus exactement ils croient savoir. Chacun a son idée qu’il essaye d’appliquer à lui-même. Et, bien souvent, on se trompe. Personne n’a encore vécu le vieillissement des hommes et des femmes d’aujourd’hui ; et puis comment savoir quel sera son propre vécu de la vieillesse puisqu’on ne l’a jamais essayé ? Comme on vit beaucoup plus âgé aujourd’hui qu’hier, comment saurait-on ce que sera le « vieillir » de demain ? Il y a aussi peut-être une certaine veulerie qui fait qu’on n’a pas envie d’anticiper sa propre vieillesse…
Alors, qu’entend-on par « vieillir » ? Le vieillissement, c’est « la diminution des fonctions de l’organisme avec le passage du temps, qui se traduit par une modification des organes de notre corps » – douleurs articulaires, presbytie, paresse intestinale, essoufflement, etc. – et de notre système nerveux – oubli des noms, instabilité pour descendre les escaliers, marche plus prudente, etc. C’est un « embouteillage de déficits », pour Régis Debray (2004), « involution, mais, pour presque tous, préférable à la mort », écrit André Comte-Sponville (2001).
Mais est-ce si vrai ? Et si c’était le contraire ? Tout n’est pas que déclin dans la vieillesse. Certaines fonctions sont conservées. Même si mes cheveux blanchissent, ma mémoire reste bonne, mes gestes vifs, mon enthousiasme sans faille. D’autres aptitudes se renforcent, comme un certain savoir-faire, une curiosité croissante, une sagesse avérée. Le message fort de ce livre est que le vieillissement d’un individu ne dépend pas seulement de sa prise d’âge, c’est-à-dire du passage du temps ; il dépend surtout du vieillissement de son cerveau.
Voici, par exemple, une dame de 93 ans qui serait volontiers classée dans la catégorie des « vieillards ». Malgré ses cheveux blancs et les rides accentuées de son visage, elle se tient droite, sa démarche est leste, ses gestes sont vifs et précis, elle plaisante et s’intéresse à la conversation. Bref, elle a l’air plus jeune que son âge, mais si son comportement est resté jeune, c’est que son cerveau, qui génère son comportement, est resté jeune : son cerveau a moins vieilli que le reste de son organisme. En voici une autre qui est encore ce qu’on pourrait appeler « une belle femme » à 65 ans. Elle a une « peau de jeune fille », dit-on d’elle, et pourtant son visage lui donne une apparence décatie. Elle marche lentement, elle se tient comme si elle avait peur de tomber, elle est fatiguée, elle dit avoir du mal à retrouver ses souvenirs, elle se plaint de douleurs des genoux et de constipation. Bref, cette dame a un bon aspect extérieur, mais elle paraît plus âgée que son âge, car son comportement moteur, intellectuel et émotionnel est déficient. Or si son comportement donne ainsi une impression de vieillesse, c’est que son cerveau lui-même vieillit plus vite que son corps.
Ces deux exemples illustrent la différence qu’il y a entre la « prise d’âge », qui est un laps de temps, et le fait de « vieillir », qui est un comportement de vieux. Il n’y a pas de rapport entre le comportement jeune ou vieux de ces deux femmes et leur âge respectif. Le vieillissement intéresse certes les organes du corps, à l’origine de désagréments, voire de handicaps, mais ce qui fait qu’un individu a l’air vieux provient surtout de l’altération de son comportement. Or, de même que le comportement (ce qu’on perçoit d’une personne) dépend du fonctionnement du cerveau, de même l’altération du comportement dépend de son dysfonctionnement. Par conséquent, ce qui est important en matière de prise d’âge, c’est moins le vieillissement des organes du corps que le vieillissement du cerveau. Autrement dit, et contrairement aux idées reçues, la perception du vieillissement d’un individu est plus liée à son cerveau qu’à son aspect extérieur.
Si le vieillissement fait peur, c’est que l’idée est associée à la possibilité de morbidité et de mort. La mort, certes, mais peut-être plus encore les maladies « liées » au vieillissement, dont les maladies neurodégénératives, avec leurs corollaires d’incapacité et d’invalidité. Perdre ses facultés intellectuelles, sa mobilité, ne plus être autonome, devenir dépendant : voilà les questions qui préoccupent la personne âgée ! Le plus grand problème sociologique, économique et politique de nos sociétés, aujourd’hui et surtout demain.
Si on veut améliorer le bien-être et l’insertion sociale des personnes âgées, il faut savoir de quoi on parle. Il faut donc comprendre ce qu’on appelle vieillissement. Qu’est-ce qu’une personne âgée ? Pourquoi est-on ou a-t-on l’air vieux ? Comment se traduit le phénomène de vieillissement ? Puisque le cerveau est en première ligne, quels sont les fondements biologiques du vieillissement cérébral ? En quoi le vieillissement du cerveau normal diffère-t-il du vieillissement pathologique ? Comment envisager les réformes qui remettront au mieux les vieux au sein de la famille, de la société ? Peut-on rester jeune ? Comment vivre intensément cette partie, peut-être la plus importante, de l’existence ? Pour répondre à ces questions, la difficulté tient au fait que, malgré une quantité impressionnante de travaux publiés sur le sujet (parmi d’autres, citons Robert, 1998, 2003, 2006 ; Debray, 2004 ; Burkes et Barnes, 2006 ; Grady, 2012 ; Yeoman et al ., 2012 ; Thakur et al ., 2012 ; Ploton et Cyrulnik, 2014 ; Papenberg et al ., 2015 ; Chow et Herrup, 2015), il n’y a toujours pas de conception unifiée du vieillissement.
D’où cet essai destiné à démythifier les poncifs du type « vieillir, c’est un naufrage » ; ou la version « schtroumpf » du vieillissement telle que proposée par les magazines à la mode (ces beaux septuagénaires qui se regardent en souriant béatement) ; ou encore la vision fantaisiste de l’homme immortel qui fait rêver les benêts. Aller contre les idées reçues, c’est bien, encore faut-il se fonder sur des réalités scientifiques validées. Si je le fais, c’est pour lutter contre les opinions non fondées, sources de fantasmes et d’obscurantisme. Ma seule légitimité est d’avoir une longue expérience de la prise en charge des personnes âgées, surtout celles qui souffrent, et un certain savoir-faire dans le domaine de la neurobiologie du vieillissement, normal et pathologique, puisque c’est mon métier depuis plus de trente ans. J’ose donc, avec recul et optimisme, ce qui n’exclut pas un peu d’humour et de férocité, en espérant que ce livre aidera les personnes âgées, ou en voie de l’être, à aborder le grand âge avec joie.
Pour illustrer la gigantesque question du passage du temps et du vieillissement de l’homme (un homme sur deux est une femme…), voici les 10 questions traitées dans ce livre, lesquelles peuvent être lues séparément :
1 .  Avec le temps qui passe, il est normal de prendre de l’âge, mais est-il normal de vieillir ?
2 .  Qu’est-ce qui fait qu’on a l’air vieux ?
3 .  Comment vit-on son propre vieillissement ?
4 .  Le vieillissement est-il uniforme ?
5 .  Est-ce qu’on perd des neurones quand on vieillit ?
6 .  Est-ce qu’on « naît vieux » ou est-ce qu’on s’use ?
7 .  Quelle différence entre le vieillissement normal et le vieillissement pathologique ?
8 .  Que craint-on ? Une maladie neurodégénérative ?
9 .  Est-ce qu’on meurt de vieillesse ?
10 .  Le vieillissement, un sacrifice ? Non, un défi et du bon sens.
CHAPITRE 1
Avec le temps qui passe, il est normal de prendre de l’âge, mais est-il normal de vieillir ?


« Pour moi, être âgé, c’est avoir quinze ans de plus que moi… »
Bernard B ARUCH .

Quand est-ce qu’on devient vieux ? Il paraît que les Français se considèrent seniors à partir de 60 ans et vieux à partir de 70. Mais le terme « senior » est appliqué par l’assurance-chômage à partir de 45 ans, par les compagnies industrielles à partir de 60 ans, par les assurances à 65 ans… Et nous-mêmes qui savons que nous prenons de l’âge, à partir de quand ressentons-nous la vieillesse ?

On prend de l’âge, mais est-ce à dire qu’on vieillit ?
Le vieillissement, cette perte de vitalité par affaiblissement des fonctions physiologiques, dépend certes du temps qui passe, mais pas exclusivement. Le temps, c’est une donnée physique, mais dont l’interprétation psychologique est fondamentalement variable : il est des nonagénaires qui ont l’impression que le temps passe trop vite, il est des cinquantenaires qui n’en

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