Automutilations : Comprendre et soigner
204 pages
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Description

Qu’est-ce que l’automutilation ? Voici le premier ouvrage en français et multidisciplinaire sur ce sujet. Ce livre permet d’appréhender la complexité de ce trouble qui est à l’interface de différentes pathologies et qui est présentée pour la première fois selon l’éclairage de la dysrégulation émotionnelle ou gestion inadaptée des émotions. Ce livre a pour objectif d’apporter une aide efficace aux soignants et aux éducateurs. Il propose des pistes concrètes afin d’accompagner les personnes dans le processus de soin : • un vaste protocole intégratif (TCC, ACT, pleine conscience, thérapie rogérienne, thérapie des schémas, thérapie dialectique) ; • des fiches pratiques prêtes à l’emploi et des techniques expliquées pour faciliter le suivi psychothérapeutique ; • des conseils pour recevoir un adolescent et sa famille ; • et une partie spécifique pour le corps enseignant et les infirmières scolaires. Vincent Trybou est psychologue clinicien et psychothérapeute TCC. C’est à partir de son expérience de l’instabilité émotionnelle et de l’impulsivité des patients bipolaires qu’il présente une approche pratique de la dysrégulation émotionnelle des automutilations et des différents modèles de thérapie. Il est coauteur de Soigner sa cyclothymie avec le docteur Élie Hantouche. Baptiste Brossard, docteur en sociologie (école normale supérieure de Paris–EHESS), est chercheur à l’Université de Montréal. Sa thèse, basée sur les témoignages de soixante-dix personnes qui s’automutilent, propose une analyse approfondie des mécanismes sous-jacents à cette pratique. Marianne Kédia est docteur en psychologie clinique et psychothérapeute de formation cognitivo-comportementale et humaniste. Elle est spécialiste du psychotraumatisme, tant dans sa pratique clinique, en associations ou à l’hôpital, que dans ses travaux de recherche scientifique.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 21 novembre 2018
Nombre de lectures 2
EAN13 9782738145956
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0900€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

© O DILE J ACOB , NOVEMBRE  2018 15, RUE S OUFFLOT , 75005 P ARIS
www.odilejacob.fr
ISBN : 978-2-7381-4595-6
Le code de la propriété intellectuelle n'autorisant, aux termes de l'article L. 122-5 et 3 a, d'une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l'usage du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation ou réproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (art. L. 122-4). Cette représentation ou reproduction donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo .
Avant-propos

Écrire sur les automutilations constitue pour les auteurs que nous sommes le travail le plus complexe que nous ayons eu à faire depuis des années. Chacun d’entre nous a déjà de nombreux livres et publications derrière lui. Mais ce sujet particulier a été un défi. Car, chacun venant d’horizons différents avec des patientèles et des expertises particulières, il nous a fallu sortir de nos dogmatismes personnels. C’est en voulant éviter les explications simplistes et exclusives, très souvent liées à des biais de recrutement, que nous avons choisi de travailler à trois sur ce projet, en considérant ce que chacun pouvait apporter aux autres, en croisant la psychologie et la sociologie, et des modèles qui peuvent paraître très éloignés ou hermétiques. Là où le sociologue voit des dynamiques sociales et familiales, le psychologue habitué aux troubles de l’humeur voit un problème d’humeur, et la psychologue travaillant dans le trauma voit avant tout du trauma. Une seule explication aurait été trop simple, surtout pour un sujet aussi labyrinthique que les automutilations. La littérature française sur cette thématique est assez réduite, et souvent réductrice. Outre-Atlantique, de nombreux auteurs ont proposé des outils fantastiques peu utilisés ou non traduits en français. Comprendre les automutilations nécessite en effet de recourir à des outils multiples. Cela aura été notre défi que de proposer aujourd’hui cet ouvrage qui tente de croiser les modèles théoriques, pour montrer que les automutilations sont autant le « carrefour » de plusieurs maladies que la énième manifestation d’une problématique de régulation des émotions sous-jacente à de nombreuses pathologies d’apparence pourtant éloignées et spécifiques. Notre souhait aura toujours été d’éviter de cantonner les thérapeutes dans des explications construites sur des raccourcis sans cesse répétés et se soldant par des impasses thérapeutiques.
Nous avons beaucoup lu, beaucoup expérimenté, beaucoup échangé, remis en cause nos modèles, restructuré notre pensée, car nous savons que les patients venant consulter pour cette problématique présentent des mécanismes aux ramifications tentaculaires résistantes à un seul modèle explicatif ou à une ou deux techniques. C’est donc à la croisée des modèles du trouble de la personnalité borderline, des troubles alimentaires, des addictions, des troubles de l’humeur, de la biologie, des recherches sur les dynamiques sociales et familiales, des modèles systémiques, de la sociologie interactionniste, des modèles du trauma complexe, des pathologies impulsives que nous tenterons de trouver une structure explicative. Et c’est à la croisée de la thérapie comportementale et cognitive (TCC), de la pleine conscience, de la thérapie d’acceptation et d’engagement (ACT), de la thérapie rogérienne, de la thérapie des schémas, de la thérapie familiale et de la thérapie dialectique que nous proposerons des techniques de prise en charge thérapeutique répondant à ce concept majeur qu’est la régulation émotionnelle.
Nous avons volontairement voulu être précis et concis, préférant mettre en avant les idées et les techniques plutôt que des dizaines de témoignages de patients, qui se retrouvent dans de très nombreux autres ouvrages sans avoir besoin d’être repris ici. Pour les lecteurs néanmoins en demande de témoignages, l’ouvrage de Baptiste Brossard Se blesser soi-même présente les portraits détaillés de nombreuses personnes, parmi les soixante-dix qu’il a rencontrées dans le cadre de son étude, et reste aujourd’hui l’un des livres les plus précis et fournis en termes de témoignages.
De même, dans un souci de ne pas alourdir l’ouvrage, les 530 références utilisées dans ce livre ainsi que les échelles et questionnaires sont accessibles sur Internet à l’adresse indiquée dans la bibliographie essentielle présentée en fin d’ouvrage.
Introduction

« L’atteinte corporelle est une forme de contrôle de soi pour celui ou celle qui a perdu le choix des moyens et ne dispose pas d’autres ressources pour se maintenir au monde. Elle est donc une forme d’“autoguérison”. »
David L E B RETON , 2003, p. 12.

Dans le film d’animation Vice-versa des studios Pixar, sorti en 2015, on suit la vie de la jeune Riley Andersen, 11 ans, qui quitte sa ville natale pour aller vivre à San Francisco, là où son père a trouvé un nouveau travail. Dans son cerveau, on voit discuter et agir ses émotions : Joie, Tristesse, Peur, Dégoût et Colère. Sa nouvelle vie à San Francisco ne plaît pas à Riley : elle a perdu ses amis, elle trouve sa nouvelle maison terne, son père est stressé. Mais Joie fait tout pour positiver, quitte à empêcher Tristesse de faire son travail : montrer une émotion qui permettrait aux parents de percevoir que quelque chose va mal. Après avoir vu que Riley, malheureuse dans cette nouvelle vie, avait pleuré à l’école, Joie empêche totalement Tristesse d’accaparer Riley. Joie et Tristesse, se disputant sur la conduite à tenir, se retrouvent expulsées par accident du centre de contrôle du cerveau de Riley, laissant les commandes à Colère, Peur et Dégoût. Sous l’influence de ces trois émotions, Riley se coupe de ses parents, de ses amis, de ce qui lui plaît, s’isole, jusqu’à ce que Colère propose à Riley de fuguer. Progressivement, toute la personnalité de Riley s’effondre. Après un long périple, et grâce à la collaboration entre les deux émotions, Joie et Tristesse parviennent à revenir dans le cerveau. Joie comprend que l’un des meilleurs souvenirs de Riley est un moment de tendresse avec ses parents à la suite d’une forte déception : Riley avait pleuré et ses parents l’avaient consolée. Joie accepte alors de laisser Tristesse agir : Riley revient de sa fugue et éclate en sanglots devant ses parents, et ces derniers la réconfortent. Vice-versa tente de nous faire comprendre que c’est l’expression de la tristesse, émotion typique des besoins non satisfaits, qui retisse le lien familial et, ce faisant, renforce les attachements et la solidité psychologique de la petite Riley.
C’est exactement ce que nous pensons du fonctionnement des automutilations : les émotions ne « sortent » pas correctement en raison de facteurs qui empêchent les personnes de trouver des manières efficaces de s’exprimer. Soit parce que ces personnes ne savent pas comment les faire sortir, soit parce qu’elles s’en empêchent. Elles se sentent inhibées ou verrouillées, le plus souvent parce que l’environnement le leur a interdit de longue date, leur a appris que cela était vain, impudique, dangereux, inacceptable, ou parce que des mécanismes de pensée ou des variables externes leur proposent des choix impossibles. Mais il faut néanmoins faire sortir ces émotions à tout prix plutôt qu’imploser. Et les automutilations, c’est mieux que rien.
Il nous paraît opportun de présenter dès maintenant le concept de dysrégulation émotionnelle qui va parcourir tout cet ouvrage. La dysrégulation émotionnelle (Ochsner et Gross, 2007) est un terme un peu barbare qui veut dire « mauvaise régulation des émotions », « dysfonction de la régulation des émotions » ou « difficulté à gérer les émotions ». Si la « régulation émotionnelle » est l’ensemble des techniques et processus qu’une personne utilise pour gérer ses émotions et ressentis, la dysrégulation émotionnelle, elle, est l’inadaptabilité des techniques et processus utilisés par une personne face à une émotion qui survient. Si certaines personnes ont eu la chance d’acquérir une boîte à outils très complète avec des instruments multiples et très précis, d’autres ont hérité d’une vide, ou, mal achalandée, elles utilisent un marteau pour coller du papier peint ou une perceuse pour tailler un crayon de papier. Pour utiliser un vocabulaire plus connu des psychologues, la dysrégulation émotionnelle est similaire au coping 1 . À partir du moment où une personne n’a pas les outils nécessaires et efficaces pour gérer les tensions internes (émotions) et les agressions et problèmes externes (conflits, événements nécessitant une action ou une décision), ou utilise systématiquement et de façon rigide les mêmes outils quelles que soient les situations qui surviennent, elle devient prisonnière d’émotions qui s’imposent à elle. Elle les subit et se trouve impuissante face à elles. Elle va alors tenter de s’en sortir coûte que coûte, avec les moyens dont elle dispose, et ainsi opter pour des stratégies qui peuvent l’apaiser sur le moment mais ne règlent pas le problème de fond (qui va donc persister et se présenter à nouveau). Ces stratégies dangereuses ou délétères à long terme ont un coût élevé et vont au contraire augmenter la détresse. Tout cela, c’est la dysrégulation émotionnelle , le mauvais coping, le manque de flexibilité psychologique (Kashdan et Rottenberg, 2010) qui permet une bonne adaptabilité du sujet 2 . Favazza (1996) parle notamment de «  form of coping and self-help  » . Linehan (1993b) définit la dysrégulation émotionnelle comme « le résultat d’une prédisposition biologique, d’un contexte environnemental, et des transactions entre ces deux parties durant la période de développement. […] La dysrégulation du système est conséquence

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