Le capital et le travail dans les chaînes mondiales de valeur
417 pages
Français

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Description

Les difficultés d’approvisionnement dans plusieurs pays à la suite de la pandémie du COVID-19 et de la guerre en Ukraine a montré une fois de plus la forte interdépendance de nos économies où les chaînes mondiales de valeur (CMV) constituent une forme d’organisation industrielle dominante. Grâce à celles-ci, les firmes leaders, le plus souvent des multinationales des pays riches du Nord, organisent la production à travers la soumission des firmes et des travailleur·euse·s du monde entier en contrôlant les ressources stratégiques et le travail en obtenant ainsi la part du lion des profits. La littérature dominante et les organisations internationales affirment que la participation des entreprises aux CMV permet d’élever les compétences, la valeur ajoutée de la production et les profits et, de surcroît, d’améliorer la croissance économique et le bien-être des travailleur·euse·s. Une littérature critique a remis en cause cette vision en montrant comment les firmes leaders recherchent une main-d’oeuvre précaire et à bas coût. Cependant, ces différentes études se focalisent sur les secteurs à forte intensité de main-d’oeuvre dans les pays du Sud et sur une seule composante des CMV : le capital ou le travail.
Cet ouvrage vise à combler cette lacune en étudiant l’effet des CMV sur les firmes et les travailleur·euse·s de l’industrie suisse des machines, des équipements électriques et des métaux (MEM). Sur la base d’une analyse documentaire et de soixante entretiens approfondis avec des dirigeants et des salarié·e·s de deux firmes leaders suisses et des sous-traitants, des syndicats et des associations patronales, l’auteur met en évidence une dynamique de double divergence par rapport aux effets étudiés dans la littérature : la participation aux CMV implique à la fois une détérioration de la performance des firmes subordonnées, de l’emploi et du travail. L’auteur dévoile les mécanismes sous-jacents à cette dynamique et identifie des pistes permettant un développement des CMV au service du travail.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 mars 2023
Nombre de lectures 0
EAN13 9782889304592
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0165€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

© Éditions Alphil-Presses universitaires suisses, 2023
10, rue du Tertre
2000 Neuchâtel
Suisse
 
 
www.alphil.ch
 
Alphil Diffusion
commande@alphil.ch
 
 
DOI : 10.33055/ALPHIL.03201
 
ISBN papier : 978-2-88930-457-8
ISBN pdf : 978-2-88930-458-5
ISBN epub : 978-2-88930-459-2
 
 
Publié avec le soutien du Fonds national suisse de la recherche scientifique.
 
Les Éditions Alphil bénéficient d’un soutien structurel de l’Office fédéral de la culture pour les années 2021-2024.
 
Illustration de couverture : Grand Canyon, 2013, acrylique et collage sur panneau © Mary Iverson, Seattle.
 
Responsable d’édition : François Lapeyronie


Avant-propos
C et ouvrage est issu d’un travail de thèse conduit à l’Université de Genève. Il a été rédigé en partie lors d’un séjour au Royaume-Uni, à l’Université du Sussex et à l’Université Queen Mary de Londres, dans le cadre d’une bourse Doc.Mobility du Fonds national suisse (FNS).
Mon objet de recherche est directement lié à mon vécu. Dès mon jeune âge, je me suis intéressé aux faits économiques, en particulier à la manière dont les tendances du capitalisme mondialisé impactent la vie concrète des travailleur·euse·s. Dans mon entourage, j’ai souvent vu pointer du doigt la « mondialisation » comme la cause de la souffrance professionnelle. Mes premières recherches sur les entreprises en Suisse m’ont également fait comprendre la centralité des dynamiques de l’économie mondiale dans le vécu des personnes qui vivent de leur travail. Dès lors, je me suis interrogé sur les déterminants économiques de la vie des travailleur·euse·s à partir d’un cadre théorique qui permet de relier ces dynamiques globales à la réalité de terrain. À cet égard, le cadre des chaînes mondiales de valeur m’a paru pertinent pour aborder ces enjeux.
Les deux années qui viennent de s’écouler ont été marquées par des crises sanitaires, économiques et géopolitiques sans précédent. En sus de leur impact sur la santé et la vie des êtres humains, le Covid-19 et les mesures de confinement prises par les gouvernements ainsi que le contexte de la guerre en Ukraine ont montré la centralité des chaînes mondiales de valeur en tant que forme d’organisation industrielle dans nos sociétés. Ces chaînes sont au cœur des défis sociaux contemporains, et l’analyse de leur fonctionnement revêt une importance cruciale si l’on souhaite concevoir une autre organisation de la production qui, au lieu de satisfaire la valorisation du capital des grandes firmes mondiales, serait orientée vers la satisfaction des besoins des populations. Certes, l’analyse menée dans le cadre de cet ouvrage ne porte que sur un secteur particulier de l’économie suisse, mais nous sommes convaincus que les lecteur·rice·s sauront y trouver un intérêt plus large.


Préface
L ’ouvrage que le lecteur a entre ses mains découle de la thèse de doctorat d’Aris Martinelli, dont il constitue une version condensée. Avec cet ouvrage, le lecteur assiste à l’éclosion d’un penseur de la socio-économie au sens fort du terme. Aris Martinelli parvient en effet à penser ensemble l’économie et ses exigences de performance et de productivité d’une part, le social et son souci de justice et de respect des droits et de la dignité des personnes d’autre part. Alors que ces deux lignes d’investigation se déploient le plus souvent en parallèle et sans dialogue entre elles, on trouve ici un souci constant de montrer comment elles interagissent dans la pratique, comment l’économie ne se déploie pas à l’écart du social et comment le social ne peut faire l’économie, si l’on ose dire, des considérations économiques. Cet agenda, qui consiste à faire tenir ensemble deux voies qui sont trop souvent disjointes, est celui des plus grands penseurs de la socio-économie tels que Marx, Commons, Polanyi ou encore Sen et c’est précisément cette voie difficile qu’Aris Martinelli choisit de suivre. Qui plus est, il le fait en se donnant comme objet d’étude empirique les chaînes mondiales de valeur (CMV), ce qui implique de prendre aussi en compte les questions d’échelle géographique et de modalité de gouvernance entre acteurs économiques situés à des niveaux différents de ces chaînes. Cette voie comporte des exigences théoriques – prendre au sérieux tous les savoirs pertinents, qu’ils relèvent d’inspirations sociologiques ou économiques – et empiriques – se donner les moyens d’analyser un objet complexe où les aspects sociaux et économiques sont étroitement imbriqués, à divers échelles géographiques et niveaux de gouvernance, en veillant à ce que chaque dimension trouve sa juste place dans l’interprétation.
La première partie propose ainsi une réflexion théorique complexe qui se base sur un état de la littérature très complet dans les divers domaines concernés (économie politique, économie industrielle, théories du management, théories de la régulation et de la gouvernance d’entreprise, littérature sur les chaînes mondiales de valeur, mais aussi sociologie du travail et sociologie des relations industrielles). Elle développe, à partir de cet état de la littérature, un cadre théorique propre qui intègre chacune de ces composantes et qui est synthétisé dans le schéma de la page 94 de cet ouvrage. On voit ainsi comment tous ces éléments interagissent au travers des divers espaces des chaînes mondiales de valeur : l’espace techno-productif et ses exigences propres relatives aux manières les plus efficaces d’organiser la production au sein de chaînes de valeur impliquant une multiplicité d’entreprises ; l’espace intangible qui souligne l’importance des biens intangibles (tels que la connaissance ou les marques) et des droits de propriété intellectuelle dans le cadre des CMV, notamment en lien avec l’émergence d’un capitalisme monopolistique intellectuel qui voit les entreprises leaders s’arroger une forme de monopole sur ces biens intangibles ; l’espace de gouvernance et ses diverses formes d’organisation des liens entre firmes leaders et firmes subordonnées au sein des CMV, notamment la gouvernance dite captive qui voit les entreprises leaders capter la valeur ajoutée par les entreprises subordonnées ; et l’espace de valorisation où le rôle des institutions dans la création et l’appropriation de valeur au sein des CMV est mis en avant. Ce schéma est en soi un tour de force analytique qui témoigne du souci d’Aris Martinelli d’intégrer tous les savoirs pertinents et de son refus obstiné de toute forme de simplification et de réductionnisme analytique. On observe ici une pensée qui se développe et se décante, non pas par élimination ou mise à l’écart de la complexité, mais par intégration progressive des diverses facettes de cette complexité dans un cadre cohérent, une pensée en construction qui ne renonce à aucun moment à l’ambition de comprendre les phénomènes dans toute leur complexité. Ce schéma est bien sûr un propos d’étape qui demande à être ultérieurement affiné, mais il met en lumière un grand potentiel analytique qui met l’eau à la bouche et fait attendre les travaux à venir avec impatience.
L’ambition d’Aris Martinelli n’est cependant pas simplement théorique, il s’agit aussi et surtout de traduire cet effort analytique en grille d’enquête opérationnelle, permettant de mesurer l’impact de ces chaînes mondiales de valeur ainsi saisies dans toute leur complexité configurationnelle. Cette évaluation d’impact se déploie sur le plan industriel, avec l’ambition de déterminer si l’insertion dans une CMV se traduit par des formes d’ industrial upgrading , voyant les capacités de production et de création de valeur multipliées pour toutes les parties prenantes, ou au contraire d’ industrial downgrading , où l’efficacité productive ne serait pas améliorée par une telle insertion dans les CMV, ou en tout cas pas pour toutes les parties prenantes. Elle se déploie aussi sur le plan social, où l’analyse est menée pour le versant travail des relations industrielles, que ce soit au sein des firmes leaders ou au sein des firmes subordonnées : il s’agit ici d’évaluer si l’intégration dans une CMV entraîne un social upgrading , soit une amélioration des conditions de travail à tous les niveaux, ou au contraire une trajectoire marquée par des formes de dégradation sociale. C’est là une très grande ambition empirique qui exige une investigation des chaînes mondiales de valeur sous le double angle d’une sociologie du capital et d’une sociologie du travail, avec l’objectif de tester la thèse de la double divergence, selon laquelle l’amélioration de la performance des firmes leaders se traduit par une dégradation des conditions industrielles des firmes subordonnées (un industrial downgrading en quelque sorte) et des conditions de travail des employés à la fois dans les firmes leaders et subordonnées (soit un double social downgrading , pourrait-on dire). Le chapitre méthodologique fournit la grille d’enquête pour l’opérationnalisation de cette ambition au travers d’une investigation empirique minutieuse des pratiques du capital et du travail dans les firmes leaders et subordonnées des chaînes mondiales de valeur. Les défis de la sociologie en entreprise, en termes d’accès au terrain et de difficultés à obtenir les informations disponibles, sont largement connus et pouvaient laisser craindre qu’Aris Martinelli ne soit pas en mesure de réaliser son ambition. L’ouvrage entre nos mains montre comment il a su surmonter les réticences de certains de ses interlocuteurs et trouver des solutions ou des voies de traverse lorsque la situation semblait bloquée. Tout cela en s’efforçant toujours de faire en sorte que tous les points de vue – acteurs patronaux et syndicaux au niveau de la branche, managers et travailleurs des firmes leaders et subordonnées aux divers échelons de la hiérarchie – soient représentés et que les difficultés d’accès au terrain ne se traduisent pas par des biais dan

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