"La chasse à l’hectolitre"
162 pages
Français

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"La chasse à l’hectolitre" , livre ebook

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Description

Lorsqu’en 1861, Frédéric Müller crée une petite brasserie à Neuchâtel, personne n’imagine qu’elle deviendra en un siècle l’une des plus grandes brasseries de Suisse romande. La brasserie Müller a marqué, pendant près de 150 ans, la vie sociale et associative neuchâteloise. Elle a accompagné les changements de mœurs, les changements de consommation. C’est cette merveilleuse aventure que nous raconte Hélène Pasquier. A partir de la seconde moitié du 19ème siècle, il est plus facile de fabriquer de la bière que de l’écouler. En effet, les brasseurs suisses vendent leur production essentiellement dans les débits de boissons, mais leur nombre est régulé par l’octroi de patente. Dans ces conditions, les brasseries se livrent une lutte sans merci afin de conserver leur clientèle. Cette lutte porte le nom de "chasse à l’hectolitre". Afin de survivre, la Brasserie Müller se lance aussi dans cette "chasse à l’hectolitre", qui consiste à acheter des brasseries concurrentes pour s’attribuer leur clientèle et à accorder des prêts aux tenanciers de débit de boissons. Qualifiée d’irrationnelle par les autres secteurs agroalimentaires suisses, cette pratique n’est que la pointe la plus visible de tout un système d’enjeux construit autour du client et réglementé, dès 1907, par une entente cartellaire.

Sujets

Informations

Publié par
Nombre de lectures 0
EAN13 9782940489565
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0165€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
4e de couverture
Aux Editions Alphil
Collection Dessins de presse :
André Harvec. L’univers Harvec . Delémont, 1996.

Collection Histoire, économie et société, dirigée par Alain Cortat et Laurent Tissot

Alain Cortat. Condor, cycles, motocycles et construction mécanique, 1890-1980. Innovation, diversification et profits. Delémont, 1998.

Jean-Daniel Kleisl. Le patronat de la boîte de montre dans la vallée de Delémont. L’exemple de E. Piquerez SA et de G. Ruedin SA à Bassecourt (1926-1982). Delémont, 1999.

Hélène Pasquier. « La chasse à l’hectolitre ». La Brasserie Müller à Neuchâtel (1885-1953). Neuchâtel, 2001.
Titre
Copyright
© Editions Alphil, 2001
Case postale 1514
2002 Neuchâtel 2

EAN Epub : 978-2-940-48956-5

Conception graphique : Teddy Nusbaumer, graphiste, Delémont
Gambrinus


GAMBRINUS ,
roi légendaire et patron laïc des brasseurs.

Statue en bois polychrome, fin du XVII e siècle, Allemagne.

« L’apparition du personnage de Gambrinus coïncide avec le premier essor de la production brassicole au XVI e siècle et son étonnante popularité accompagne au XIX e siècle « l’âge d’or » de la consommation de la bière ». Bertrand Hell.

Crédit photographique :
Bayerischer Brauerbund e.V.
Ouvrages
Cet ouvrage a été publié grâce au soutien :
– de la direction des affaires culturelles de la ville de Neuchâtel ;
– de la Faculté des lettres et sciences humaines de l’Université de Neuchâtel ;
– de la Loterie Romande ;
– du Fonds Butticaz de la Société d’histoire de la Suisse Romande ;
– de Monsieur Pierre Uhler
Préface
Domaine de recherches reconnu depuis plusieurs années, l’histoire des entreprises a surtout fait ses preuves sur la base de l’étude des grandes unités de production. C’est à partir de leur évolution, de leur trajectoire, de leur mode de fonctionnement, de leur modèle de développement qu’elle s’est affirmée en tant que discipline scientifique. Le lien n’a rien de fortuit. Il traduit la conviction dominante chez les historiens, mais également chez les économistes, d’une adéquation entre les performances de l’économie générale et celles des grandes entreprises, les premières résultant des secondes. A son échelle, la Suisse ne fait pas exception à ce constat. Son histoire d’entreprises en reflète aussi la tendance. Si les critères définissant une « grande » entreprise n’y rejoignent pas les dimensions reconnues dans les principaux pays industriels, l’image sous-jacente est bien celle qui associe son histoire au poids supposé déterminant de ses entreprises les plus volumineuses.

Les études sont cependant nombreuses à le montrer : le tissu industriel de la Suisse reste avant tout lié à la prédominance de petites et moyennes entreprises (PME) dans les secteurs économiques les plus divers. Production de biens de fabrication semi-finis ou finis, de biens de consommation, sous-traitance, les domaines d’activités des PME sont très larges et leurs modes de production diversifiés. Globalement, les effets cumulés sont considérables.

Or si cette affirmation est souvent répétée, les conséquences historiographiques n’ont guère été tirées, sur le plan microéconomique tout au moins. C’est tout le mérite d’Hélène Pasquier de s’être attelée à l’étude d’une petite entreprise et de nous en montrer la spécificité dans la gestion des affaires, le pouvoir de décision, le développement des stratégies. L’étude d’une petite entreprise active dans le secteur alimentaire fait, de plus, prendre conscience de l’importance de types d’activités jugées trop souvent secondaires dans l’essor économique de la Suisse. Même si elle se justifie, l’insistance historiographique mise sur les secteurs industriels « lourds » - métallurgie, horlogerie, électricité, chimie - n’en donne pas moins une vision de la vitalité économique du pays réduite à l’intensité de ces seules activités. Le tableau reste forcément incomplet.

Dans ces perspectives, l’exemple de la Brasserie Müller à Neuchâtel est tout à fait révélateur. Ne comptabilisant guère plus d’une douzaine d’employés au début du XX e siècle, cette entreprise familiale est établie dans une région à forte tradition viticole. Elle a donc dû s’imposer sur un marché a priori peu porteur. Dans une grande mesure, l’histoire de la Brasserie Müller, c’est l’histoire de la conquête d’un goût et d’une culture. Elle illustre les effets de l’innovation technique sur les modèles de consommation. Sans dénier les effets ravageurs du phylloxéra sur la consommation de vin dès les années 1880, la chance de la brasserie neuchâteloise, et celle de toutes les autres brasseries suisses, est d’avoir pu compter sur les progrès réalisés dans la maîtrise des phénomènes chimiques au cours du XIX e siècle. Importées en Suisse, ces innovations permettent de fabriquer une bière de meilleure qualité et à un coût plus abordable. Les conditions étaient ainsi réunies pour livrer à la clientèle neuchâteloise un produit disposant d’une meilleure assise technique et commerciale.

Le point fort de l’étude d’Hélène Pasquier est d’analyser l’essor de cette entreprise sous l’angle de la politique de vente, aspect crucial de son activité. Les contraintes de production dominées, celles de la vente ne cessent en effet de renaître au gré des changements conjoncturels et structurels. L’écoulement de la bière repose sur l’établissement de points de vente, soit des débits de boissons. Or, la brasserie est rapidement prise en tenaille entre les nouvelles capacités d’expansion de la production et les limites d’un marché soumis à des exigences administratives et techniques. Liée à une politique cantonale restrictive en matière de délivrance des patentes, dépendante encore du degré réduit de conservation de la bière, l’entreprise n’a dès lors qu’un objectif, le maintien des acquis. Ces circonstances expliquent la propension des entreprises brassicoles à se maintenir dans des dimensions très réduites et à se contenter de marchés régionaux, voire locaux. La segmentation des producteurs entraîne celle du marché. Dans ce contexte, Hélène Pasquier montre comment les stratégies développées prennent des directions tout à fait originales, mais rétrospectivement guère surprenantes. Forcée d’adopter un comportement malthusien en amont, la Brasserie Müller s’engage en aval, pour garder ses débouchés, dans un système basé sur la création de liens très personnels qui prennent l’aspect d’une véritable structure « féodale ». L’entreprise ligote les tenanciers de débits de boissons par l’octroi de prêts financiers ou de cautionnements. Jointe à sa rigidité, la distorsion du marché brassicole exclut ainsi toute perspective d’expansion à court et à moyen termes.

Les mesures de cartellisation adoptées dès 1907 par l’ensemble de la branche ne sont, dans ces circonstances, que le prolongement logique de cette situation. Elles peuvent être comprises comme la manifestation de l’instinct de survie d’entreprises confrontées à des réalités techniques et politiques qui les dépassent. Mais elles portent également en elles la volonté de partager un marché difficilement extensible eu égard à ses particularités. Touchant la majorité des entreprises brassicoles suisses, ces mesures assurent le respect absolu et la protection de la clientèle. En garantissant une part de marché, si faible soit-elle, aux brasseries installées, la « paix de la bière » trouve son fondement dans une quasi-élimination de la concurrence. La fidélité aux accords est le garant de la survie pour tous. Amendes, mesures de rétorsion, dénonciation doivent assurer la sérénité des affaires et ramener à de meilleurs sentiments les volontés récalcitrantes.

Si elles « institutionnalisent » indiscutablement un mouvement cartellaire, ces réglementations exacerbent en fait la lutte autour des tenanciers : en voulant réguler la chasse à l’hectolitre, elles ouvrent une autre chasse, la chasse aux rebelles qui grignotent les parts de marché en usant de toutes les ruses possibles.

Grâce aux archives de la Brasserie Müller, Hélène Pasquier aborde tous ces aspects, encore peu connus du lecteur suisse, avec une très grande clarté. Elle met à jour un ensemble de pratiques qui donnent à la structure économique suisse une image moins flatteuse mesurée à l’aune de la globalisation ambiante. La terre de liberté économique si souvent pr

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