GAFA : Reprenons le pouvoir !
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Description

Il y a vingt ans Apple entamait avec le retour de Steve Jobs sa seconde vie. Google et Amazon étaient des start-up et Facebook n’existait pas. Vingt ans après, les GAFA font partie des entreprises les plus puissantes au monde. N’avons-nous pas fait preuve de naïveté face à ces jeunes pousses qui se réclamaient de la liberté d’entreprendre et de l’innovation ? Peut-on encore lutter contre ces empires plébiscités par les consommateurs et aux ambitions sans limite ? Joëlle Toledano montre dans ce livre comment les GAFA arrivent à s’extraire du droit commun, à verrouiller la concurrence, à définir leurs propres règles en s’appuyant sur l’efficacité des outils numériques. Dénonçant notre retard face à ces entreprises sophistiquées et agiles, elle nous exhorte à comprendre ce nouveau monde et à reprendre l’initiative. La transformation numérique est rapide, bouleverse les chaînes de valeur. Les intérêts de court terme sont souvent opposés à ceux de long terme, d’où les difficultés à définir l’intérêt général. Donnons-nous les moyens de fabriquer les institutions du XXIe siècle au service du bien commun ! Joëlle Toledano, économiste, est reconnue en Europe comme une spécialiste de la régulation des marchés. Elle a été membre du collège de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP, 2005-2011) et a occupé des fonctions importantes dans de grands groupes français. Aujourd’hui, professeure émérite associée à la chaire « Gouvernance et régulation » à Dauphine, elle est au « board » de plusieurs jeunes pousses du numérique. 

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 26 août 2020
Nombre de lectures 7
EAN13 9782738153258
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0750€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

© O DILE J ACOB , SEPTEMBRE  2020 15, RUE S OUFFLOT , 75005 P ARIS
www.odilejacob.fr
ISBN : 978-2-7381-5325-8
Le code de la propriété intellectuelle n'autorisant, aux termes de l'article L. 122-5 et 3 a, d'une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l'usage du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation ou réproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (art. L. 122-4). Cette représentation ou reproduction donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo .
Pour Emmanuelle, Sarah, Ilan. Pour Chiara, Romy, Sasha. Pour Hélène et Alexis.
Introduction

Il y a vingt ans Apple entamait avec le retour de Steve Jobs sa seconde vie. Google et Amazon étaient des start-up et Facebook n’existait pas. Vingt ans après, elles sont parmi les entreprises les plus puissantes du monde. Les valorisations boursières de Google, Amazon et Apple, tout en fluctuant, dépassent régulièrement les 1 000 milliards de dollars et celle de Facebook les 500. Elles disposent d’une puissance financière et technique exceptionnelle, font parties des marques les plus connues, des entreprises les plus influentes.
Comment les GAFA, ces encore très jeunes entreprises bâties autour des technologies numériques, ont-elles réussi à se développer si vite ? Comment a-t-on laissé se constituer de tels empires aux ambitions sans limite ?
Au début, nous avons été éblouis face à la nouveauté et la qualité presque magique des services proposés. Pendant des décennies, les livres de marketing nous ont expliqué que le client devait être au centre de l’entreprise. L’expression, qui se retrouvait dans les rapports d’activité, n’avait pas toujours de traduction tangible. L’obsession du client, la nécessité d’innover pour capter son attention, faire croître les utilisateurs et augmenter les usages ont été une préoccupation essentielle de tous les nouveaux acteurs du numérique. La connaissance actualisée des clients est devenue une obligation vitale pour tous, que seule l’informatique permet d’obtenir.
Ces nouveaux services numériques simples et accessibles ou ces nouvelles façons de rendre ces services suppriment des intermédiaires, organisent et classent des informations jusque-là hors de portée, rendent possibles des partages des ressources et des appariements à moindre coût. En créant des « plateformes », ces jeunes pousses ne s’embarrassaient pas toujours des obligations légales qui prévalent en matière de protection des consommateurs, de droits d’auteur ou de réglementations sectorielles.
Fascination, sidération mais aussi incompréhension ont accompagné la croissance de ces acteurs. Les entreprises « disruptées » par de nouvelles solutions numériques ont vu leur modèle économique fragilisé. Mais les premières années, elles avaient du mal à faire autre chose que réclamer le retour au monde ancien et à ses rentes ; Tout d’un coup, certains blocages structurels disparaissaient comme des lignes « Maginot » qui tombaient avec le numérique : Hadopi, chargé de surveiller le téléchargement illégal était contourné avec le changement de pratiques des consommateurs (du téléchargement au streaming ), les licences de taxis ne permettaient plus d’organiser la rareté, alors que les consommateurs plébiscitaient les nouveaux acteurs.
À cela s’ajoutait une profonde incompréhension des nouveaux modèles économiques, tant chez les décideurs que dans la majorité des médias et du monde académique. De ce fait, l’idée de réguler les plateformes numériques (toutes les plateformes) en leur imposant les règles anciennes conduisait naturellement à une levée de boucliers… L’apparition de ces nouveaux acteurs montrait en creux que toutes les réglementations ne devaient pas nécessairement être conservées, car elles empêcheraient les consommateurs de bénéficier de meilleurs services à des coûts moindres. Pour partie, elles protègent des acteurs bénéficiant de rentes injustifiées qu’il est légitime de ne pas conserver en l’état. L’objection fondée était qu’une telle politique de régulation était mauvaise pour l’innovation, la productivité, la croissance et donc l’emploi. Il a fallu du temps pour comprendre que le numérique apportait avec lui non seulement des nouveaux services largement plébiscités mais aussi de nouveaux modèles économiques, de nouvelles façons de faire du profit face auxquels nous avons été démunis. Ce n’est que lorsque les mécanismes économiques à l’œuvre ont commencé à être décryptés que la revendication de concurrence équitable (le fameux «  level playing field  ») entre les anciens et les nouveaux acteurs a émergé. A posteriori , une impression de grande naïveté prévaut face à des pratiques dont on comprend qu’elles étaient pour partie néfastes. Mais faire le tri, au cas par cas, n’était pas évident pour les pouvoirs publics comme pour les observateurs alors que l’interventionnisme était considéré comme inefficace et l’innovation comme forcément positive.
Mais pour faire le tri et comprendre les enjeux, globalement et secteur par secteur, il faut se donner les moyens de comprendre des entreprises sophistiquées et agiles qui, contrairement aux entreprises du monde physique, laissent peu de traces de leurs comportements, testent sans arrêt de nouvelles pratiques et sont opaques. Cette non-transparence dans les outils algorithmiques de classement ou d’appariement est, en outre, avec une certaine ironie, justifiée pour empêcher que certains utilisateurs ne manipulent les résultats des algorithmes au détriment des autres. On peut imaginer que certains propriétaires d’algorithmes sont d’autant plus sensibles aux risques de manipulations qu’ils savent pour les avoir pratiquées, que c’est possible !
Pour les autres entreprises, la difficulté stratégique s’est doublée d’une difficulté financière. En effet, les opérateurs historiques sont doublement contraints. Ils doivent, d’une part baisser drastiquement le prix de certains produits, voire les rendre gratuits, et d’autre part redéfinir leur modèle économique. Or ils portent toujours une exigence de rentabilité à court terme alors que les nouveaux entrants qui s’appuient au démarrage sur des circuits de financement alternatifs ont des horizons de rentabilité plus longs. Difficile pour la grande distribution de lutter contre Amazon et sa remarquable qualité de service quand non seulement on ne joue pas à armes égales au plan réglementaire et qu’il faut repenser sa stratégie, mais qu’en plus les exigences de résultats financiers imposées par les marchés aux entreprises historiques ne sont pas les mêmes que celles du monde numérique !
Il y a peut-être une dernière spécificité à cette révolution numérique : elle s’est adressée d’abord aux particuliers et a souvent concerné des secteurs d’importance stratégique mineurs comme la musique, les jeux, la publicité… Rien qui fasse penser aux industries de réseaux, et aux grands acteurs de l’énergie du XX e  siècle que les États et les responsables politiques ont d’emblée perçu comme importants. Sans compter l’absence fréquente de culture technique, le peu d’appétence et de familiarité avec les services numériques des générations plus anciennes occupant les plus hauts postes de responsabilité. Pour relativiser l’ampleur des changements technologiques à l’œuvre, l’économiste Robert Gordon, célèbre pour ses travaux sur le ralentissement de la croissance, se moquait d’un symbole comme le smartphone pour symboliser les évolutions en cours. Ce n’est que depuis une dizaine d’années que les secteurs financiers et automobiles ou l’industrie de la santé sont apparus dans l’horizon stratégique visible des Big Tech . Plus récemment encore avec l’affaire Snowden, les infox et les opérations de manipulations politiques, les questions de sécurité, de défense et de démocratie ont percuté celles du numérique. Le débat public s’en est emparé. Le numérique a progressivement envahi le champ des préoccupations régaliennes. Et les questions d’économie et de droit de la concurrence sont sorties du cercle des seuls spécialistes.
La puissance du discours des GAFA ne doit pas être sous-estimée : leurs dirigeants sont des esprits brillants et le discours de l’efficacité contre la bureaucratie, forcément tatillonne et mal informée, est séduisant. Ils exercent un lobbying très efficace pour défendre l’absence de réglementation au nom de l’innovation. Il a fallu que la compréhension des nouvelles dynamiques augmente pour répondre à la conjugaison élégante d’une grande séduction intellectuelle, de l’idéal libertarien de l’Internet coopératif et non réglementé et de l’idéologie libérale pour qui toute intervention publique était inefficace et constituait une atteinte à l’innovation créatrice. On retrouvait l’émancipation individuelle par la technologie au confluent des deux. Avec comme garant le droit de la concurrence souvent érigé en vigie des pratiques : l’absence de condamnation valait absolution.
En deux, trois ans, la situation a changé. Les premiers contentieux ont fini par aboutir, certes pour des faits datant d’une dizaine d’années, voire davantage, et de nombreuses procédures ont été lancées des deux côtés de l’Atlantique. Mais condamner des pratiques anticoncurrentielles ou des atteintes à la vie privée ne suffira pas. Pas plus d’ailleurs qu’attendre que les Américains démantèlent ces jeunes géants riches et plein d’énergie ou que leurs homologues chinois viennent les concurrencer. En cause, de nouveaux empires économiques dont les dynamiques de déploiement nous ont échappé trop longtemps. Eux, arrivent à s’extraire du droit commun, à verrouiller la concurrence, à définir leurs propres règles en s’appuyant sur l’efficacité des outils numériques et

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