Contribution à une histoire des cartels en Suisse
261 pages
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Description

L’objectif de ce livre est d’analyser le processus de cartellisation en Suisse de la fin du XIXe siècle à la fin du XXe siècle. Il vise en particulier à essayer de construire un modèle explicatif. Bien que la réalisation d’un tel objectif soit encore lointaine, les articles publiés apportent des réponses stimulantes et soulèvent des pistes de recherches futures. Parmi les questions traitées, il y a la chronologie de la cartellisation. Peut-on établir pour la Suisse une chronologie de la cartellisation, et si oui, quels sont les facteurs qui l’expliquent ? Les auteurs s’attachent aussi à étudier le processus législatif en matière de cartels et en particulier le rôle des groupes de pression lors de l’élaboration de la loi sur les cartels. Les articles traitent également de questions telles que les conditions propices à la création de cartels (nombre et taille des entreprises, structures de la branche, coût d’entrée, type de productions, etc.), l’intervention de l’État, les effets de la cartellisation sur la structure d’une branche et sur le processus de rationalisation, l’impact de la politique douanière et le rôle des cartels internationaux. Les approches sont diverses, elles analysent ces questions du point de vue d’une branche, d’un cartel ou de celui des entreprises. Ce livre vise aussi à mettre le cas helvétique dans une perspective internationale. Jusqu’à présent, la Suisse a été considérée comme une exception en matière de cartellisation, or, nous émettons l’hypothèse qu’il faut examiner l’exemple suisse à la lumière de ce qui se produit dans la plupart des petits pays européens aux mêmes époques.

Sujets

Informations

Publié par
Nombre de lectures 0
EAN13 9782889304462
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0165€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

© Éditions Alphil-Presses universitaires suisses, 2010
Case postale 5
2002 Neuchâtel 2
Suisse
 
www.alphil.ch
www.pressesuniversitairessuisses.ch
 
Diffusion et commandes :
Livresco Diffusion
commande@livresco.ch
www.livresco.ch
 
ISBN 978-2-88930-446-2
 
La préparation de ce livre a été effectuée dans le cadre du projet de recherche du FNS « L’horlogerie dirigée. Constitution, pratiques et impacts d’un cartel national (1924-1971) », subside n° 100011-109464.
 
Publié avec le soutien du Fonds national suisse de la rechreche scientifique
 
 
 
Photographie de couverture :
Sydney de Coulon, directeur et administrateur-délégué d’Ebauches SA (1932-1964) et de l’ASUAG (1931-1933) ; Hermann Obrecht, président du conseil d’administration de l’ASUAG (1931-1935), représentant à la fois des instances politiques et des banques au sein de l’ASUAG, futur conseiller fédéral ; Ernest Scherz, vice-président de l’ASUAG, membre du conseil d’administration de l’ASUAG durant près de 30 ans, directeur de la Banque cantonale de Berne, président du conseil d’administration de la Fiduciaire horlogère suisse (Fidhor), représentant des banques au sein de l’ASUAG. L’ASUAG (abréviation allemande de Société Générale de l’horlogerie suisse) est une holding financière et industrielle qui constitue un élément central du cartel horloger suisse.
 
Responsable d’édition : Thalia Brero
 
Graphisme et mise en page : Nusbaumer-graphistes sàrl, Delémont www.nusbaumer.ch


C ONTRIBUTION À UNE HISTOIRE DES C ARTELS EN S UISSE 1
A LAIN C ORTAT
La question de la cartellisation en Suisse est restée peu discutée et a peu suscité d’attention de la part des chercheurs, bien que le pays ait connu une forte cartellisation depuis l’entre-deux-guerres. Pendant longtemps, les seuls travaux disponibles ont été ceux d’Erich Gruner qui a travaillé sur le sujet dans les années 1950 et ceux plus anciens de Robert Jaccard, de Fritz Marbach et de Georges Paillard 2 . Cela fait une décennie environ que le sujet a à nouveau attiré l’attention des chercheurs et celle des historiens 3 . Parmi les travaux publiés ces dix dernières années, on peut citer les livres de Samuel Jordan, de Christophe Koller et d’Hélène Pasquier 4 . Il faut aussi citer les travaux de Frédéric Rebmann en lien avec l’établissement de la législation 5 . D’autres domaines que l’histoire ont suscité des recherches, il faut en particulier mentionner les études d’André Mach 6 en sciences politiques et naturellement les nombreuses recherches en sciences juridiques et économiques 7 .
Les questions soulevées dans ce livre sont fondamentales pour comprendre le fonctionnement de l’économie suisse des années 1920 à la fin des années 1990. La pensée dominante a longtemps reproché aux cartels d’augmenter artificiellement les prix, de limiter la concurrence et l’arrivée de nouveaux entrants, de freiner la rationalisation et l’innovation, de maintenir de petites structures peu efficaces, donc d’être un frein au développement économique, à court et à moyen termes. Or, la réalité offre peut-être des situations plus contrastées. Les travaux de Georges Symeonidis pour la Grande-Bretagne montrent que la cartellisation n’est pas systématiquement un frein à l’innovation 8 .
Le processus de cartellisation reste mal connu pour la Suisse, malgré les travaux cités ci-avant. Il faut souligner que les chercheurs qui ont travaillé avant les années 1960 disposaient de très peu de matériaux, aussi leurs études se limitent souvent à lister des cartels et à présenter les grandes théories et l’évolution du système légal. Il y avait jusqu’à présent très peu d’études internes de cartels qui analysent, par exemple, l’organisation d’un cartel, la manière dont les prix sont fixés, les négociations pour la répartition des contingents, l’impact de la cartellisation sur la politique d’innovation des entreprises, etc. Or, depuis quelques années, l’arrivée dans les archives publiques de sources d’entreprises et d’associations ou l’ouverture, même partielle et difficile, d’archives d’entreprises et d’associations, permettent d’analyser le processus de cartellisation et de poser les bases qui doivent permettre d’expliquer le modèle suisse. Dès lors, il est possible d’avoir une approche interne et externe sur la cartellisation. On quitte ainsi, comme le montrent les articles publiés dans ce livre, le niveau macro-économique, pour analyser la cartellisation à un niveau méso (étude d’une branche ou d’un cartel) ou micro (étude de l’impact d’un cartel sur une ou des entreprises). Ces études doivent permettre à terme de proposer une explication de la cartellisation.
Les questions étudiées par les auteurs de ce livre apportent des réponses, mais soulèvent aussi de nombreuses questions. Pour chaque thème (chronologie, question douanière, processus législatif, conditions propices, intervention de l’État, effet de la cartellisation sur la structure d’une branche et sur la rationalisation, innovation, etc.), des études plus approfondies doivent encore être menées, afin de saisir les processus de manière globale.
Pourquoi consacrer un livre à l’exemple suisse, alors que les travaux encouragent les comparaisons internationales ? En fait, ce travail se veut une contribution à la réflexion menée par plusieurs chercheurs sur la cartellisation dans les petits pays occidentaux. En effet, lors d’une réunion d’un groupe de chercheurs consacrée à une histoire comparative de la cartellisation, il est apparu que plusieurs petits pays européens se trouvaient dans une situation identique, c’est-à-dire avec des économies fortement cartellisées jusqu’à la fin du XX e  siècle 9 . En ce sens, la Suisse ne constitue pas une exception, mais serait plutôt un élément d’un système qui touche plusieurs petits européens. Bram Bouwens et Joost Dankers affirment qu’aux Pays-Bas, pendant toute une partie du XX e  siècle, les cartels sont vus comme des formes naturelles et légales du système économique.
Les deux auteurs cités indiquent que le système politico-économique des Pays-Bas se caractérise, avant la Seconde Guerre mondiale, par une grande ouverture et peu de protections douanières. Dans ce contexte, les cartels sont perçus par les législateurs comme ayant peu d’effets, car les entreprises sont engagées dans une compétition internationale dans le cadre d’une économie ouverte. Pour les deux historiens néerlandais, l’importance et le rôle des cartels sont alors sous-estimés tant par les législateurs que par l’opinion publique 10 . Durant cette période, les législateurs ne combattent pas les cartels. Mais dans les faits, les entreprises sont engagées dans des cartels internationaux, ce qui permet d’avoir des accords de cartel efficaces sur le territoire national. Après la guerre, les Pays-Bas entrent dans un autre système économique, en raison de la reconstruction qui se caractérise par une double coordination : d’une part par l’État qui contrôle les importations et les exportations et qui s’invite dans les négociations salariales entre employeurs et employés. D’autre part, par une forte coordination entre entreprises de certains secteurs et parfois entre secteurs. Bouwens et Dankers expliquent que cette coordination est héritée de l’économie de guerre, où les associations d’entrepreneurs ont eu à gérer les importations et les exportations. Dans ce contexte, les cartels continuent à prospérer. Cette situation évolue durant les années 1950 et 1960, mais l’économie néerlandaise reste fortement coordonnée jusque dans les années 1980. Bouwens et Dankers signalent à ce propos : «  In the Netherlands of the 1950s and 1960s coordination still prevailed above the liberal market economy. Cartels and gentlemen’s agreements were part of the economic policy [...] In the 1980s this attitude towards cartels ultimately resulted in a public discussion on the restrictive competition policy in the cartel paradise of Europe called the Netherlands.  » 11 Ce qu’il importe d’observer dans le cas néerlandais, c’est qu’indépendamment du système économique mis en place (une économie libérale et ouverte dans l’entre-deux-guerres ou une économie coordonnée dans l’après-guerre), les cartels prospèrent.
Les travaux

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