Au pôle sud
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Description

Roald Amundsen (1872-1928)



"Depuis plusieurs années, je préparais une expédition dans le bassin arctique. Avec le Fram, je me proposais d’entreprendre une nouvelle dérive à travers l’océan Glacial, en partant du détroit de Behring. Explorer le grand blanc qui occupe encore la majeure partie de la calotte polaire boréale et compléter l’œuvre de Nansen, tel était mon dessein. Les préparatifs étaient très avancés, la date même du départ fixée au début de l’été 1910, lorsque soudain se répandit la nouvelle de l’arrivée de Peary au Pôle Nord. Tout de suite je compris que l’avenir de mon projet était menacé. Seule une décision rapide pouvait le sauver ; aussi immédiatement, je résolus de changer mes batteries et de faire volte-face vers le Sud.


J’avais, il est vrai, annoncé que mon exploration garderait un caractère exclusivement scientifique et ne se préoccuperait point d’établir un record ; d’autre part, les souscripteurs de l’expédition ne m’avaient apporté leur contribution que sur la foi d’un programme précis relatif à l’Arctique. En raison du fait nouveau, comme du peu de chances qui me restaient de pouvoir réaliser mon projet primitif, je jugeai que, sans manquer de loyauté envers les donateurs, je pouvais tenter une entreprise qui, en cas de succès, remettrait immédiatement l’affaire sur pied."



Roald Amundsen, explorateur norvégien, fut le premier à atteindre le pôle sud le 14 décembre 1911.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 07 juillet 2022
Nombre de lectures 0
EAN13 9782384420865
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0015€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Au pôle sud


Roald Amundsen

Traduit et adapté par Charles Rabot


Juillet 2022
Stéphane le Mat
La Gibecière à Mots
ISBN : 978-2-38442-086-5
Couverture : pastel de STEPH'
lagibeciereamots@sfr.fr
N° 1084
I
De Norvège à la Grande Barrière
 
Mon programme. – Les préparatifs à bord du Fram. – Le branle-bas du départ. – Croisière d’essai. – Psychologie canine. – Relâche à Madère. – Je dévoile à mes compagnons la destination du navire. – La zone des vents d’ouest. – Vers Kerguelen. – La banquise antarctique. – Fête de Noël 1910. – En vue de la Grande Barrière.
 
Depuis plusieurs années, je préparais une expédition dans le bassin arctique. Avec le Fram , je me proposais d’entreprendre une nouvelle dérive à travers l’océan Glacial, en partant du détroit de Behring. Explorer le grand blanc qui occupe encore la majeure partie de la calotte polaire boréale et compléter l’œuvre de Nansen, tel était mon dessein. Les préparatifs étaient très avancés, la date même du départ fixée au début de l’été 1910, lorsque soudain se répandit la nouvelle de l’arrivée de Peary au Pôle Nord. Tout de suite je compris que l’avenir de mon projet était menacé. Seule une décision rapide pouvait le sauver ; aussi immédiatement, je résolus de changer mes batteries et de faire volte-face vers le Sud.
J’avais, il est vrai, annoncé que mon exploration garderait un caractère exclusivement scientifique et ne se préoccuperait point d’établir un record ; d’autre part, les souscripteurs de l’expédition ne m’avaient apporté leur contribution que sur la foi d’un programme précis relatif à l’Arctique. En raison du fait nouveau, comme du peu de chances qui me restaient de pouvoir réaliser mon projet primitif, je jugeai que, sans manquer de loyauté envers les donateurs, je pouvais tenter une entreprise qui, en cas de succès, remettrait immédiatement l’affaire sur pied. Ce fut donc avec une conscience très calme que je décidai de retarder l’exécution de mon plan primitif d’un an ou deux, afin d’essayer de réunir dans l’intervalle les fonds qui me faisaient défaut. Le Pôle Nord était atteint ; le plus important des problèmes arctiques, aux yeux du grand public, se trouvait résolu. Pour éveiller l’intérêt de la foule en faveur de mon voyage dans le Nord, il ne me restait d’autre ressource que de frapper un grand coup en m’attaquant au Pôle Sud. Mais je résolus de garder secrète ma résolution jusqu’au jour que j’avais choisi.
Voici le programme de l’expédition : le Fram , l’ancien et glorieux navire de Nansen nous portera. Il quittera la Norvège avant le 15 août au plus tard. Madère sera notre première et unique escale. De là, prenant la route des voiliers, – car le Fram ne peut guère être considéré autrement, – nous irons d’abord au Sud, à travers l’Atlantique ; puis nous nous dirigerons sur l’Est, en passant en dessous du cap de Bonne-Espérance et de l’Australasie, pour entrer dans la mer de Ross vers le 1 er janvier 1911. Comme base d’opérations, j’ai choisi la baie des Baleines, le point le plus méridional qu’un navire puisse atteindre sur les bords de la Grande Barrière. Nous espérons être rendus à destination le 15 janvier environ. Dix hommes s’installeront sur ce glacier avec deux ans de vivres dans une maison dont nous apporterons les matériaux de construction. Le débarquement opéré, le Fram reprendra la mer et gagnera Buenos Aires. De ce port comme point de départ il accomplira ensuite une campagne océanographique dans l’Atlantique Sud, jusqu’à la côte d’Afrique. Cette croisière terminée en octobre 1911, le navire reviendra à la baie des Baleines embarquer l’expédition, qui aura ou n’aura pas réussi à atteindre le Pôle, mais qui, de toute façon, sera prête à s’embarquer sur le Fram dans les derniers jours de janvier 1912.
 
Tel fut élaboré dans ma petite maisonnette des bords du Bundefjord, le programme que je viens d’exposer ; tel il fut accompli de point en point. La dernière phrase de mon projet prouve l’exactitude avec laquelle j’avais évalué le temps nécessaire à son exécution. « Nous serons de retour du Pôle Sud le 22 janvier 1912 », écrivais-je ; or, ce fut ce jour même que nous rentrâmes à nos quartiers d’hiver, après avoir conquis le but suprême. Bien d’autres fois nos prévisions tombèrent juste. Sous ce rapport le capitaine Nilsen était un véritable devin. Tandis que je me contentais de supputer les dates, lui n’hésitait pas à calculer les heures. Il avait annoncé pour le 15 janvier 1911 notre arrivée à la Barrière, située à environ 30.000 Km de la Norvège. Vingt-quatre heures avant cette date nous parvenions au terme de notre navigation.
Un vote du Parlement norvégien m’accorda la disposition du Fram et un crédit de 105.000 francs pour les réparations et les transformations nécessaires.
Depuis le commencement du mois de mai 1910, le Fram est amarré à son corps mort, devant les vénérables remparts de la vieille citadelle d’Akershus. Aussitôt commence le chargement, sous la direction du lieutenant Nilsen, une opération singulièrement délicate. Il ne s’agit pas simplement, en effet, d’entasser au petit bonheur les colis dans les cales, mais de les ranger avec ordre de manière que l’on sache où tout se trouve. En même temps que les approvisionnements, on embarque le matériel et l’équipement. Chacun de mes collaborateurs a une spécialité et doit, sous sa responsabilité, s’occuper de tout ce qui la concerne. Le 2 juin, tout est à peu près terminé. Ce jour-là, le roi et la reine nous font l’honneur de visiter le Fram . Le lendemain, dans l’après-midi, nous allons mouiller devant mon habitation sur les bords du Bundefjord pour y charger la cabane destinée à nous abriter pendant l’hiver.
Après une campagne préliminaire de quelques semaines dans les mers voisines de Norvège, pour nous assurer de la bonne condition du bateau, nous arrivons le 24 juillet à Christiansand, où nous avons à embarquer le reste des approvisionnements : 400 ballots de poisson sec, toute notre pacotille de skis, les traîneaux, des bois de charpente, etc. Enfin nous avons à prendre à bord les 97 chiens eskimos cantonnés depuis le milieu de mars dans un îlot désert voisin de Flekkerö. Éprouvée par une longue et pénible traversée, la meute n’était pas arrivée en très bon état, mais une bonne alimentation l’avait remise d’aplomb.
Seul le lieutenant Nilsen connaît la destination de l’expédition. Aussi bien mes camarades qui ne prévoient pour le moment qu’un voyage à San Francisco par le cap Horn sont-ils tous intrigués par un tas de choses que l’on charge à Christiansand. Pourquoi, dès maintenant, nous embarrasser de tous ces chiens et leur faire effectuer une aussi longue traversée ? En Alaska, ne trouverons-nous pas toutes les bêtes dont nous aurons besoin et d’aussi bonne qualité ? Pourquoi toutes ces planches, alors qu’à San Francisco il sera si facile d’en acheter ? Personne n’ose m’interroger ; en revanche, Nilsen est assailli par des flots de questions. Aussi quelques jours avant le départ je mets les lieutenants Prestrud et Gjertsen dans la confidence, après qu’ils se sont engagés d’honneur et par écrit à garder le silence.
À Christiansand, deux membres de l’expédition, Hassel et Lindström, nous rejoignent ; par contre, le mécanicien est remercié. Pour le remplacer, la maison Diesel, de Stockholm, nous envoie un des ouvriers qui ont monté le moteur, nommé Kunt Sundbeck. Cet excellent homme nous a rendu les plus grands services.
Tous les approvisionnements arrivés, nous établissons au-dessus du pont une sorte de faux-pont pour que les chiens se trouvent à l’abri du soleil et de l’humidité.
Dans l’après-midi du 9 août, a lieu l’embarquement de nos 97 compagnons à quatre pattes. Ils arrivent vingt par vingt, dans une grande gabare, et sont aussitôt attachés. L’opération, menée avec célérité, est achevée en deux heures. Maintenant, le pont se trouve complètement occupé ; la passerelle même est envahie par nos passagers. Quatorze bêtes y sont installées, laissant à peine la place suffisante pour le barreur. Quant à l’officier de quart, il ne pourra remuer ; peut-être même devra-t-il se tenir à cloche-pied. Le dernier chien embarqué, l’ancre est aussitôt levée et maintenant, en route pour l’Antarctique, un voyage de 16.000 milles !
Pendant toute la traversée de la mer du Nord, un temps magnifique. Grâce à cette heureuse circonstance, l’acclimatation de la meute à son nouveau milieu se trouve singulièrement facilitée. Que n’a-t-on pas dit avant le départ ? Qu’elle serait enlevée par les lames, qu’elle succomberait aux ardeurs du soleil des tropiques, que nous ne pourrions la nourrir, etc. Le succès de notre entreprise dépend de l’état dans lequel les chiens arriveront sur le théâtre des opérations. Dès le début, je me préoccupe donc d’assurer leur bien-être. En premier lieu, la troupe est divisée en groupes de dix têtes, et chaque groupe confié à un ou deux hommes qui en prendront la charge et la responsabilité. La distribution de la pitance n’est pas une petite affaire ; elle n’exige rien moins que la présence de tout l’équipage ; par suite a-t-elle lieu au moment du changement de bordée. Manger à sa faim est l’idéal du chien eskimo, et le meilleur moyen de trouver le chemin de son cœur est de lui donner un morceau de viande. Sur ce principe est réglée toute notre conduite à l’égard de nos pensionnaires ; le résultat de cette politique fut excellent, et, au bout de quelques jours, toutes les escouades étaient dans les meilleurs termes avec leurs gardiens respectifs.
Le régime de la chaîne n’était point du goût des chiens ; leur tempérament est beaucoup trop ardent pour s’en accommoder. Mais il serait dangereux de leur accorder la liberté avant que leur éducation ne soit plus complète. S’il est aisé de gagner leur affection, les éduquer est plus difficile. La satisfaction de ces animaux est touchante quand nous nous occupons d’eux. L’entrevue du matin est particulièrement cordiale. Dès que leurs maîtres font leur apparition sur le pont, ils exprime

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