Peindre la mort
288 pages
Français

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Peindre la mort , livre ebook

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Description

Barbara est étudiante, et passionnée de peinture. Elle est belle, intelligente et très douée. Et elle s’est mis en tête de peindre la mort. Pas de la décrire, pas de la représenter : de la peindre. Et pour cela, il faut qu’elle trouve un modèle.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 09 avril 2018
Nombre de lectures 0
EAN13 9782414139347
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0075€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composé par Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-414-13932-3

© Edilivre, 2018
Chapitre I
« Elle arrive. Elle arrive et je la vois, je la sens. En moi, comme en toute chose, elle est là. Noire sous la lune, blanche sous le soleil, elle est là, furtive, lente puis vivace, imprenable. Elle effraie, elle attire, elle est belle, prenante. Elle court, vole, se précipite puis repart, sans proie, mais elle reviendra, c’est sûr. Elle n’oublie jamais, et elle ne m’oubliera pas. Je me l’imagine, voilée de noir, avec sa faux à la main. Sans visage, sans vie.
Mais laisse-moi leur dire, juste leur dire… »
* * *
Le bus arrivait dans la rue Ampère. On ne distinguait pas les deux couleurs, rouge et blanc, pas encore, mais simplement les deux phares qui aveuglaient. La nuit s’évaporait à peine, et le rideau du ciel restait imperturbablement noir. Le chauffeur mit le clignotant, et le bus stoppa devant le petit abri où une publicité pour du chocolat s’étalait. Quatre personnes montaient à bord et les portes automatiques purent enfin se refermer. Un jeune homme, les yeux hagards et vides, mal réveillé visiblement, le walkman vissé sur les oreilles, n’entendait laisser sa place à personne, et son attitude défiait quiconque de venir s’asseoir à côté de lui. Pourtant l’un des quatre passagers montés à l’arrêt, une jeune femme, vint s’asseoir à côté de lui. Une jeune femme vraiment belle, brune, les yeux vert brillant. Elle posa entre ses jambes une serviette noire en cuir usé, qui était remplie de papiers et de livres divers. Une étudiante, évidemment. Elle regardait par la vitre la rue qu’elle connaissait par cœur, s’attachait à trouver un détail nouveau, mais non, rien. La rue Ampère, puis l’avenue Foch ne changeaient pas. Son regard persistait à fouiller le décor changeant qui défilait derrière la vitre sale.
Elle s’appelait Barbara. Étudiante en sociologie, elle passait sa vie essentiellement à trois occupations. La sociologie, la philosophie et la peinture. La ville était parfaite pour elle. Ville étudiante, mélangée de toutes les catégories sociales, de la plus défavorisée, comme les gens qui squattaient le long de la voie rapide dans des tentes, jusqu’aux plus aisées, comme ceux qui vivaient près du cours Jean Jaurès, dans des anciennes bâtisses où les murs extérieurs, vieux et sales, cachaient des intérieurs luxueux et immenses. Barbara venait clairement de cette dernière catégorie, et son style vestimentaire était sobre mais couteux, cela se voyait tout de suite. Elle avait tenu à son indépendance, et ses parents lui avaient acheté un appartement et lui allouait une rente de 10000 francs par mois, pour survivre. Elle survivait sans grosse difficulté.
Le bus stoppa de nouveau. Barbara leva la tête.
« Attendez !!! »
L’étourdie se leva brusquement, saisit sa serviette et se rua hors du bus juste avant que celui-ci ne referme complètement les portes. Elle avait failli rater l’arrêt.
Elle se recoiffa discrètement, puis se dirigea vers l’arrêt du tramway, comme la plupart des matins. À peine arrivée à l’arrêt, un tramway se présentait. Elle sauta à l’intérieur et après un vague regard pour trouver un siège, elle s’accrocha à la barre et resta debout, toutes les places étant prises. Des tours en béton, puis quelques vitrines, on accélère, on s’arrête, on ré-accélère. Un cycle changeant qui se transforme en monotonie, comme chaque matin. Enfin parvenue à destination, Barbara quitta le tramway et se dirigea vers l’institut.
On aurait dit un château : le bâtiment avait une allure médiévale, tout gris, avec une immense porte en bois qui se divisait en deux battants. Quelques lumières éclairaient les fenêtres sur quelques étages et semblaient donner vie à ce monstre de béton.
Barbara franchit les portes et traversa la cour qui se remplissait de plus en plus, beaucoup venant fumer une cigarette avant les cours, tenant également un gobelet de café fumant dans la main.
Elle gravit les grands escaliers et s’engouffra dans un grand couloir très large, où une multitude d’étudiants allaient et venaient dans toutes les directions. Barbara croisa des yeux, des corps de gens qu’elle ne salua pas. Puis, la porte de l’amphithéâtre se présenta, et elle monta quelques marches pour s’installer à l’une des places où il y avait le moins de monde possible autour d’elle. Elle n’était pas la dernière, mais une quarantaine de personnes s’étaient déjà installées. Quelques minutes après, un homme d’une cinquantaine d’années entra, posa sa serviette sur son bureau, et daigna enfin accorder un regard à ses élèves, en faisant sans dire un mot, taire le brouhaha qui s’était installé.
Barbara attendait ces cours avec impatience. La philo l’attirait beaucoup, énormément plus que la sociologie d’ailleurs.
« Bonjour, tout le monde a bien dormi ? »
Le cours commençait et un monologue long et profond débuta.
La salle était assez vieille, et incroyablement mal entretenue. Mais les élèves et le professeur n’en avaient pas grand choses à faire. Elle était suffisante pour les cours.
Celui-ci dura une heure.
Le professeur s’étalait sur les principes de la mort, la séparation du corps et de l’esprit et invoqua tous les philosophes qui dissociaient, chacun leur tour, dans la bouche du professeur, les états différents de ce que pourrait être la mort.
Puis il termina par une citation d’Hegel :
« La mort, si nous voulons nommer ainsi cette irréalité, est la chose la plus redoutable. Ce n’est pas cette vie qui recule d’horreur devant la mort et se préserve pure de la destruction, mais la vie qui porte la mort, et se maintient dans la mort même, qui est la vie de l’esprit.
On pourrait interpréter ceci comme un gage d’immortalité, ou d’une véritable description de la mort. Mais qui saurait décrire la mort ?
Je vous laisse réfléchir à toutes ces idées, nous en parlerons dans quelques temps. »
La jeune femme prit cette phrase en plein esprit. Elle partit ailleurs d’un seul coup. Elle en revint quelques secondes plus tard, lorsque la sonnerie retentit.
Barbara prit son carnet, le referma et le rangea dans sa serviette. Puis elle quitta la salle, suivant la foule qui se pressait dehors.
« Le cours t’a plu ?
Barbara se retourna, un peu surprise, puis fixa le jeune homme qui la regardait en souriant.
– Le cours, tu as trouvé ça bien ?
– Oui, beaucoup.
Elle tourna les talons, un peu étonnée, puis s’empressa de rejoindre le hall.
Le jeune homme la rattrapa, puis l’agrippant par l’épaule, l’obligea à s’arrêter.
– Attends un peu. Ecoute, ça fait plus d’un mois qu’on est dans le même amphi, qu’on suit les mêmes cours et on ne se connaît pas !! On pourrait, je ne sais pas, moi, on peut discuter un peu de temps en temps, non ?
– Discuter de quoi ?
Un peu surpris par la réponse, le jeune homme écarquilla les yeux, sourit, et fixa le vide. Il semblait réfléchir à une réponse possible, mais n’en trouva pas. Ses yeux revinrent se poser sur ceux de Barbara
– Je m’appelle David.
Barbara ne répondit pas. Elle le fixait, un peu agacé et surprise.
– Ben, pour quelqu’un qui étudie la socio, on ne peut pas vraiment dire que tu sois super sociable !!! Ça te dirait pas de prendre un café, ou un verre un de ces soirs après les cours ?
– Un de ces soirs ! » répondit Barbara.
Puis elle lui tourna définitivement le dos et sortit dans le hall, hâtant le pas.
« Jeu, set et match, mademoiselle Barrowski !
Pascal lança une petite tape amicale sur le dos de David, et ce dernier lui renvoya un sourire forcé. Pascal leva les yeux au ciel, sourit à son tour, puis lui dit :
– Laisse tomber, David, c’est une petite bourgeoise, une conne. J’étais avec elle, l’an dernier. Enfin plutôt, j’étais dans sa classe : pas un mot, pas un sourire, rien ! Une tombe !
– Barrowski, tu as dit ?
– Oui ! Barbara Barrowski ! Mais celle-là, c’est mort d’avance, tu n’y arriveras pas ! Laisse tomber ! Bon tu t’amènes ?
– Hmm hmm ! »
David était grand, blond et assez mignon. Il n’avait pas vraiment l’habitude de laisser les jeunes femmes de marbre, et il ne s’avouait pas facilement vaincu ! Il était un jeune homme très équilibré qui étudiait la philosophie depuis trois ans. Il venait de la campagne, près des hauteurs d’Aix les bains, et malgré son air de jeune cadre dynamique, il était simple et souriait constamment.
« Barbara Barrowski ! » répéta-t-il !
Barbara avait déjà repris le tram et se dirigeait vers le centre ville. Elle arriva au bout d’une quinzaine de minutes aux portes de la place Grenette, puis, évitant une voiture qui arriva sur elle sans ménagement, elle intégra la place piétonne, et poussa la porte d’un bar. « L’étain ».
Le serveur avait les yeux d’un lendemain de fête, il essuyait ses tables, et il n’avait rien d’autre à faire. Il n’y avait personne à l’exception d’un vieillard qui semblait se parler à lui-même, à voix basse, devant un verre de vin blanc bon marché.
Barbara s’assit à une table et commanda un café. Elle aimait bien venir ici, car c’était un bar déserté des étudiants. Calme, sans vie, sans bruit, il était ce monde à part qu’elle recherchait dans cette ville où grouillaient toutes sortes de choses qui la dérangeaient. Les yeux dans le vide, elle repensait au cours du matin. Quelque chose la gênait. Qu’avait dit ce prof déjà ? « On ne peut représenter un état réellement, on le symbolise par un aspect ou une symbolique. Représenter la vie, c’est par exemple dessiner un enfant qui vient au monde. On représente un état en représentant ceux qui subissent cet état… Comment peut-on… »
« 10 francs, s’il vous plait. »
L’homme aux yeux vitreux avait posé la tasse fumante devant elle, et elle ne s’en était pas rendu compte. Elle paya son dû, saisit la ta

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